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ARRET N° 23/
BUL/SMG
COUR D’APPEL DE BESANCON
ARRET DU 25 AVRIL 2023
CHAMBRE SOCIALE
Audience publique
du 28 février 2023
N° de rôle : N° RG 21/02205 – N° Portalis DBVG-V-B7F-EOSA
S/appel d’une décision
du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de Besançon
en date du 15 novembre 2021
Code affaire : 80J
Contestation du motif non économique de la rupture du contrat de travail
APPELANT
Monsieur [N] [T], demeurant [Adresse 2]
Représenté par Maître Thierry CHARDONNENS, avocat au barreau de BESANCON, présent
INTIMEE
S.A TRICOTAGE DES VOSGES, sise [Adresse 1]
Représentée par Maître Alexandra MOUGIN, avocat au barreau de BELFORT, présente
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats du 28 Février 2023 :
Monsieur Christophe ESTEVE, Président de Chambre
Madame Bénédicte UGUEN-LAITHIER, Conseiller
Mme Florence DOMENEGO, Conseiller
qui en ont délibéré,
M. Xavier DEVAUX, directeur de greffe lors des débats et et Mme MERSON GREDLER, Greffière lors de la mise à disposition
Les parties ont été avisées de ce que l’arrêt sera rendu le 25 Avril 2023 par mise à disposition au greffe.
**************
FAITS ET PROCEDURE
M. [N] [T] a été embauché par la société ETS JACQUEMARD, le 21 octobre 1985 suivant contrat à durée indéterminée en qualité de merchandiser-gestionnaire salarié.
A compter du 1er janvier 1989, il est devenu attaché commercial par un nouveau contrat annulant et remplaçant le précédent.
La convention collective applicable était celle du Textile et de ses annexes.
En 2010, la société est devenue société OLYMPIA et par une convention du 15 septembre 2014 M. [N] [T] a été mis à la disposition de la société TRICOTAGE DES VOSGES.
Le 1er juillet 2015, la société OLYMPIA, devenue entre temps NEW OLYMPIA, a fusionné avec la société TRICOTAGE DES VOSGES.
Après avoir formalisé le 9 septembre 2019 une rupture conventionnelle prenant effet le 17 octobre suivant, M. [N] [T] a, par requête du 5 octobre 2020, saisi le conseil de prud’hommes de Besançon afin d’obtenir l’annulation de la rupture conventionnelle en raison d’un vice du consentement lié au harcèlement moral subi, et voir dire que la rupture de son contrat de travail doit produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et statuer sur ses divers préjudices
Suivant jugement du 15 novembre 2021, ce conseil a :
– dit que la rupture conventionnelle signée entre M. [N] [T] et la S.A. TRICOTAGE DES VOSGES a été librement consentie
– dit que le contrat de travail de M. [N] [T] ne comporte pas de clause de non concurrence
– débouté M. [N] [T] de l’intégralité de ses demandes
– condamné M. [N] [T] à payer à la S.A. TRICOTAGE DES VOSGES la somme de 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– condamné M. [N] [T] aux entiers dépens
Par déclaration du 16 décembre 2021, M. [N] [T] a relevé appel de cette décision et selon dernières conclusions du 12 décembre 2022, demande à la cour de :
– infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions
– dire nulle la rupture conventionnelle du 9 septembre 2019 en raison d’un vice du consentement lié au harcèlement moral subi
– dire que la rupture de son contrat de travail doit produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse
– fixer son salaire moyen à 2 997,41 euros mensuels
– condamner la société TRICOTAGE DES VOSGES à lui payer les sommes suivantes:
* 32 974,59 € au titre de l’indemnité de licenciement.
* 89 930,70 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et
sérieuse
* 8 993,07 € au titre de l’indemnité de préavis et 899,30 € au titre des congés payés afférents
– déduire la somme de 45 402,92 € perçue lors de la signature de la rupture conventionnelle
– dire que la société TRICOTAGE DES VOSGES n’a pas renoncé à la clause de non-concurrence dans les conditions posées par l’article 12 du contrat de travail
– condamner la société TRICOTAGE DES VOSGES à lui payer la somme de 16 017,18 € correspondant à la contrepartie financière prévue par la clause de non-concurrence
– débouter la société TRICOTAGE DES VOSGES de l’ensemble de ses demandes
– condamner la société TRICOTAGE DES VOSGES à lui payer la somme de 8 000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel en sus des dépens de première instance et d’appel
Par conclusions du 24 janvier 2023, la société TRICOTAGES DES VOSGES demande à la cour de:
A titre principal,
– confirmer le jugement déféré
A titre subsidiaire,
– limiter aux sommes suivantes les prétentions adverses :
*7802,64 € au titre de l’indemnité minimale prévue à l’article L.1235-3 du code du travail *28 609,68 € au titre de l’indemnité de licenciement
* 7 802,64 € au titre de l’indemnité de préavis et 708,26 € au titre des congés payés afférents
En tout état de cause,
– condamner M. [N] [T] à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens
En application de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour l’exposé des moyens des parties, à leurs conclusions susvisées.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 2 février 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
I – Sur la demande d’annulation de la rupture conventionnelle
M. [N] [T] explique avoir accepté une rupture conventionnelle proposée par son employeur, au motif qu’elle lui apparaissait comme la seule issue en raison de son épuisement professionnel suite aux pressions subies et à sa surcharge de travail. Il précise qu’il se trouvait alors dans un état de violence psychologique tel qu’il a vicié son consentement et entaché de nullité la convention de rupture du fait du harcèlement moral dont il était la cible (Soc 30 janvier 2013 n°12-13865).
Afin de caractériser le harcèlement dont il se prévaut, il articule plusieurs griefs à l’encontre de son employeur et considère que ce dernier ne prouve pas que les faits présentés reposeraient sur une raison objective étrangère à tout harcèlement moral.
La société TRICOTAGE DES VOSGES rappelle que s’il entend voir prospérer sa demande d’annulation de la rupture conventionnelle intervenue entre les parties, il incombe à son salarié d’apporter la double preuve de l’existence de faits de harcèlement moral, en d’autres termes d’agissements répétés ayant entraîné une dégradation de ses conditions de travail et de son état de santé, et de ce que ces agissements ont altéré sa liberté de consentir à la rupture conventionnelle (Soc 29 janvier 2020 n°18-24.296).
Elle fait observer que M. [N] [T] n’a pas usé de son droit de rétractation dans le délai de quinze jours imparti et a été en capacité de négocier à la hausse son indemnité, laquelle dépasse largement ce qu’aurait été son indemnité de licenciement.
Elle estime par ailleurs que les faits invoqués par son salarié ne sont pas constitutifs d’un harcèlement moral dans la mesure où les reproches qui lui ont été faits au titre de la baisse de son chiffre d’affaire et de frais professionnels incohérents étaient légitimes, qu’il n’a lui-même spontanément pas observé le droit à la déconnexion et que son périmètre portant sur 8 à 11 départements était similaire à celui de ses collègues.
En vertu de l’article L.1237-11 du code du travail ‘L’employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie. La rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties. Elle résulte d’une convention signée par les parties au contrat. Elle est soumise aux dispositions de la présente section destinées à garantir la liberté du consentement des parties ‘.
Au cas particulier, il résulte des débats que M. [N] [T] a fait l’objet de deux convocations à un entretien préparatoire en vue d’une rupture conventionnelle les 30 août et 9 septembre 2019 après avoir été informé qu’il lui était possible de se faire assister au cours de ces entretiens par un autre salarié de l’entreprise.
Par sa signature du protocole d’accord, le salarié s’est déclaré pleinement informé de ses droits et obligations réciproques et a accepté les termes de celui-ci en particulier le montant de l’indemnité de rupture égale à 45 000 euros et la date de cessation définitive de son contrat de travail le 17 octobre 2019 et a été informé de son droit à rétractation et des modalités pour l’exercer.
Il n’a pas fait usage de ce droit dans le délai de quinze jours imparti et la rupture conventionnelle a reçu l’homologation de la DIRECCTE le 14 octobre 2019.
Pour soutenir que la signature de cette convention de rupture est entachée de nullité M. [N] [T] affirme que le harcèlement moral dont il était alors l’objet l’a privé de tout consentement éclairé.
Il résulte des dispositions de l’article L.1152-1 du code du travail qu’aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
L’article L.1154-1 précise à sa suite qu’en cas de litige relatif à l’application notamment de l’article L.1152-1 précité, le salarié présente des éléments de fait qui permettent de supposer l’existence d’un harcèlement.
Ainsi lorsque le salarié présente des faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral et dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
En l’occurrence M. [N] [T] reproche à son employeur :
– de n’avoir pas respecté son droit à déconnexion en lui adressant des courriels tardifs ou lors des week-end
– d’avoir élargi considérablement son périmètre d’intervention de 4 départements à l’origine à 11 départements en 2019, favorisant une surcharge de travail
– de l’avoir convoqué à plusieurs entretiens et émis des reproches tenant à un manque de résultats et à un non respect des outils de communication et des procédures
– d’avoir remis en cause le bien fondé de ses notes de frais
– d’avoir organisé une surveillance par le truchement de son supérieur hiérarchique
– de n’avoir pas respecté son mal des transports
Les faits ci-dessus exposés, pris dans leur ensemble, permettent de supposer l’existence d’un harcèlement moral au préjudice de M. [N] [T], de sorte qu’il convient d’examiner dans un second temps les justifications apportées par l’employeur, pour chacun de ces faits, afin d’apprécier si elles parviennent à renverser la présomption bénéficiant au salarié.
1- Le non respect du droit à déconnexion
Le droit à la déconnexion s’entend du droit pour le salarié de ne pas se connecter à ses outils numériques professionnels et de ne pas être contacté, en dehors de son temps de travail, au moyen du matériel professionnel mis à sa disposition par l’employeur ou de son matériel personnel.
M. [N] [T] reproche à son employeur de lui adresser des courriels tardifs ou lors des week-end et produit par deux pièces (pièces n°11 et 12) un exemple d’échanges électroniques illustrant son propos, dans lesquelles il apparaît que sa hiérarchie lui a transmis cinq messages en dehors de ses horaires de travail, en l’occurrence à 18 heures 12, 18 heures 13, 18 heures 37, 18 heures 39 et 19 heures 01, dont certains n’appelaient aucune réponse ou précisaient que la réponse était attendue et à tel délai mais en aucun cas immédiatement.
Il résulte en effet des productions que la société TRICOTAGE DES VOSGES a mis en place des mesures d’incitation et de prévention afin que ce droit soit respecté.
Ainsi par un message collectif du directeur régional Est du 27 février 2019, adressé notamment à l’intéressé, il est donné la consigne de respecter le droit à déconnexion de chacun et de se soumettre à la règle suivante :
‘-Plus de mails et appels en dehors des créneaux horaires suivants : 9H-18H
– Plus de mails et appels pendant les périodes de congés et RTT’
Lors d’un entretien avec ce même directeur régional le 18 juin 2019, il est d’ailleurs rappelé à M. [N] [T] qu’il ne doit pas travailler le week-end.
Dans un courriel du 5 juillet 2019, M. [O] [C], son supérieur hiérarchique direct, rappelle également à l’intéressé : ‘Lors de notre entretien nous t’avions demandé de respecter tes horaires et jours de travail pour envoyer tes mails. Il est inutile et nous ne le demandons pas que tu répondes immédiatement à nos demandes. En l’espèce j’avais demandé une réponse pour le lendemain et certainement pas immédiatement’.
Dans un courriel adressé le 9 juillet 2019 par le même supérieur, il est souligné ‘je te rappelle encore, une nouvelle fois, qu’il est inutile de répondre aux mails après tes heures de travail ni en dehors des jours travaillés de la semaine car la société a mis en place un droit à la déconnexion pour ses employés. Cette directive de l’entreprise est suivie par tous tes collègues, en conséquence tu voudras bien désormais respecter scrupuleusement cette règle’.
Le compte-rendu d’un entretien avec le directeur régional du 18 juillet 2019, mentionne même que M. [N] [T] indique que ‘pour lui le droit à la déconnexion n’a pas de sens dans la fonction commerciale’.
Dans ces circonstances, l’appelant qui considère ouvertement que le droit à déconnexion n’a aucun sens et répond par courriels à des messages professionnels non urgents en dehors de ses heures de travail alors qu’il est incité régulièrement à se conformer aux consignes en la matière et n’allègue d’ailleurs pas avoir été contacté téléphoniquement pour son travail en dehors de ses horaires professionnels, est particulièrement mal fondé à reprocher ce fait à son employeur.
2- Le périmètre d’intervention
M. [N] [T] justifie qu’alors que son périmètre d’intervention s’étendait sur six départements en février 2018 il a été étendu à huit départements à compter du 18 février 2019 (outre l’entrepôt Schiever).
Toutefois, la société TRICOTAGE DES VOSGES fait valoir et démontre qu’un périmètre de cet ordre s’avérait similaire à ceux assignés à ses collègues.
Il résulte en effet du tableau de répartition des forces de vente par secteur à la date du 12 novembre 2018 (qui n’a effectivement pas été actualisé en cours d’année puisque le périmètre de M. [N] [T] n’y compte que quatre départements) que si certains interviennent sur de moins nombreux départements, sans qu’il soit cependant précisé leur temps de travail hebdomadaire, la plupart ont un périmètre composé de cinq à onze départements.
En outre, comme l’ont retenu les premiers juges, il n’est pas allégué que cet élargissement se soit accompagné d’une augmentation des objectifs de vente ni même d’une surcharge de travail mais il apparaît au contraire que le chiffre d’affaire du salarié était en baisse constante depuis 2017, de sorte que cette réorganisation des secteurs, qui a concerné d’autres commerciaux de la société, était nécessaire afin de lui permettre de remonter ce chiffre d’affaire.
L’élargissement intervenu par courrier du 30 juillet 2019 avec effet au 2 septembre suivant portant à onze le nombre de départements de son périmètre d’intervention n’a finalement pas été réellement mis en oeuvre dans la mesure où M. [N] [T] a formalisé dès le 9 septembre 2019 une rupture conventionnelle.
3- La multiplication des entretiens et les reproches
S’il est établi par l’appelant que son supérieur l’a interrogé par courriel à plusieurs reprises au cours de l’année 2019 et qu’il a fait l’objet de trois entretiens avec le directeur régional au cours de cette même période, il apparaît cependant que les interpellations qui ont été faites au salarié à ces occasions, sont légitimes.
Ainsi il est mis en exergue dans les productions que M. [N] [T] présente non seulement un chiffre d’affaire en constante diminution mais également qu’il ne se conforme pas aux procédures et méthodes exigées (non transmission des reporting le vendredi soir, non respect des outils de communication générant une perte de temps dans la transmission des commandes et le suivi de son activité…).
Dans ces conditions, il n’apparaît pas que les observations adressées à l’appelant par son supérieur par voie électronique ou à l’occasion de ces entretiens et les invitations à corriger sa façon de procéder afin d’atteindre l’objectif qui lui est défini et mettre en oeuvre les process et méthodes imposées à tous ses collègues soient constitutives de faits de harcèlement, puisqu’elles relèvent du pouvoir managerial de l’employeur.
4- La surveillance par le truchement de son supérieur hiérarchique
M. [N] [T] estime que son supérieur hiérarchique, M. [O] [C], a effectué le 12 mars 2019, la même tournée que lui pour vérifier qu’il a bien effectué les visites qu’il avait programmées.
Il communique à cet effet un échange électronique du 19 mars 2019 entre lui et son supérieur mais si ce dernier lui demande des explications sur des constats qu’il a pu faire et des incohérences relevées au sujet de deux établissements dans lesquels il se trouvait le 12 mars précédent, auxquelles le salarié apporte des réponses circonstanciées, commentées par M. [O] [C], il ne peut être tiré la conclusion à la seule lecture de cet échange que l’appelant était ‘surveillé’ par son supérieur.
A supposer même que le supérieur de l’intéressé ait effectué comme il le prétend une tournée de surveillance le 12 mars 2019, ce fait est isolé et l’appelant ne peut valablement soutenir que cette vérification était injustifiée puisqu’il en est tiré un certain nombre d’enseignements et de consignes à mettre en oeuvre en vue d’améliorer le chiffre d’affaire ou de limiter les déplacements du salarié.
5- La remise en cause des notes de frais
M. [N] [T] déplore également la remise en cause de ses notes de frais par son employeur et conteste l’application d’un abattement mis en place en 2018, oscillant entre 20 et 30% en raison du caractère polluant de son véhicule.
Il est exact que le choix d’une politique environnementale des frais professionnels de la société TRICOTAGE DESVOSGES, applicable à tous ses salariés, promeut les véhicules non polluants.
En cela les abattements appliqués ne consistent pas en une sanction de l’appelant, dont le véhicule est considéré polluant, et qui a, au même titre que ses collègues été informé en 2017 de la mise en place de ces nouvelles règles de prise en charge des frais de déplacement qui s’appliquent à l’ensemble des effectifs de la société.
Pour le surplus, il est démontré que des explications ont été réclamées au salarié en raison de distances kilométriques invoquées ne correspondant pas avec les déplacements mentionnés.
Là encore, l’employeur démontre que l’application de ses conditions de remboursements de frais professionnels n’est pas fautive, étant observé qu’il ne peut davantage lui être reproché de solliciter des explications en présence d’incohérences manifestes.
6- Le non respect de son mal des transports
L’appelant fait enfin grief à son employeur de ne pas tenir compte de son mal des transports.
Cependant, il verse lui-même un échange électronique avec M. [O] [C] au sujet d’un séminaire organisé durant la première semaine de février 2016 pour récompenser les forces de vente, par lequel celui-ci lui écrit le 17 novembre 2015 : ‘il m’a été rapporté qu’un déplacement en avion était inenvisageable pour vous et que ce voyage serait une source de stress…La société ne vous exempt donc pas d’un séminaire mais entend votre problème lié aux transports aériens. Nous regretterons votre absence’.
Cependant, si le même M. [O] [C] lui reproche dans un courriel du 5 février 2019 de l’avoir prévenu de son absence la veille d’un séminaire de vente en septembre 2018 en raison d’une lombalgie, d’avoir manqué un séminaire à [Localité 3] début 2019 en raison d’un mal de dos, et lui demande un certificat médical justifiant du mal des transports y compris par train invoqué par M. [N] [T], il n’apparaît pas injustifié pour le directeur commercial France de la société de rappeler à l’intéressé que sa présence aux séminaires trimestriels de vente est obligatoire, dès lors qu’y sont présentées les collections, les promotions et la stratégie commerciale de la saison suivante et d’exiger une justification médicale en vue d’une exemption.
Au demeurant, à la veille d’un séminaire à [Localité 4] en septembre 2019, la cour relève que M. [N] [T] n’évoque nullement son mal des transports pour se rendre en avion de [Localité 5] à [Localité 4], mais une pièce d’identité non valide.
Ce fait ne saurait constituer un agissement caractérisant un harcèlement.
Par ailleurs si M. [N] [T] reproche aux premiers juges de n’avoir pas évoqué les attestations de Mme [J] [K] et de M. [E] [Z] et d’avoir retenu que le certificat médical de son médecin traitant se limitait à reprendre les doléances de son patient, force est de constater que les témoignages de ses deux anciens collègues, ne viennent à aucun moment corroborer la réalité d’un harcèlement moral dont il aurait été la cible dans la mesure où ils n’évoquent que leur situation respective et le procès ayant reconnu l’absence de cause réelle et sérieuse de leur licenciement en 2015 et 2016 (aucun harcèlement moral n’ayant été invoqué). De même le témoignage très subjectif de M. [P] [H], ancien collègue intervenant au surplus sur la région Bretagne, n’est pas de nature à étayer le propos de M. [N] [T].
S’agissant du certificat médical du docteur [R] du 14 septembre 2020, celui-ci reprend effectivement les doléances de l’intéressé lorsqu’il évoque une majoration de sa charge de travail et un accroissement des exigences de sa hiérarchie sans compensation, et s’il a observé une dégradation de son état de santé à la même époque (rachialgies, sciatalgie, goutte), aucun lien n’est cependant établi entre l’un et l’autre.
Il résulte par conséquent des éléments qui précèdent que les griefs articulés à l’encontre de l’employeur par M. [N] [T] ne constituent pas, au regard des éléments objectifs permettant d’en expliquer la raison ou d’en écarter le bien fondé, des agissements constitutifs d’un harcèlement moral, aucune dégradation de l’état de santé de l’intéressé n’étant par ailleurs établie en lien avec lesdits agissements.
Dans ces conditions, l’appelant est d’autant moins fondé à soutenir qu’il a accepté les conditions de la rupture conventionnelle sous la pression de son employeur compte tenu du harcelement allégué.
La charge de la preuve du vice du consentement incombe au salarié qui s’en prévaut.
Il suit de là que faute de justifier d’un vice ayant affecté son consentement libre et éclairé, il y a lieu, à la suite des premiers juges dont la décision sera confirmée de ce chef, de rejeter la demande d’annulation de la rupture conventionnelle formée par M. [N] [T] ainsi que ses prétentions indemnitaires subséquentes.
II – Sur l’existence d’une clause de non concurrence
M. [N] [T] fait valoir que sa convention de rupture conventionnelle stipule qu’il ‘a été embauché le 21 octobre 1985 dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée toujours en vigueur’ et en déduit que l’employeur n’a pas renoncé à la clause de non concurrence, qui y était insérée et qu’il a respecté.
Cependant la société TRICOTAGE DES VOSGES lui objecte à bon droit que le contrat de travail du 1er janvier 1989, dépourvu de toute clause de non concurrence, a annulé et remplacé celui qui lui avait été consenti le 21 octobre 1985, et qui stipulait une telle clause en son article 12, de sorte qu’aucune clause de ce type n’était plus en vigueur au moment de la rupture du contrat de travail.
Dans ces conditions, et quand bien même la rupture conventionnelle ferait de façon erronée référence à une telle clause, inexistante dans le contrat ainsi rompu, l’appelant ne peut se prévaloir du versement d’une quelconque contrepartie financière à ce titre.
Le jugement déféré qui a rejeté cette prétention doit être confirmé de ce chef.
III – Sur les demandes accessoires
Le jugement querellé sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens.
Echouant en sa voie de recours, M. [N] [T] sera débouté de sa demande d’indemnité de procédure, condamné aux dépens d’appel, ainsi qu’à verser à l’intimée, contrainte d’exposer des frais irrépétibles à hauteur de cour, une somme de 1 500 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
DEBOUTE M. [N] [T] de sa demande d’indemnité de procédure.
CONDAMNE M. [N] [T] à payer à la SA TRICOTAGE DES VOSGES une somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
CONDAMNE M. [N] [T] aux dépens d’appel.
Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le vingt cinq avril deux mille vingt trois et signé par Christophe ESTEVE, Président de chambre, et Mme MERSON GREDLER, Greffière.
LA GREFFIERE, LE PRESIDENT DE CHAMBRE,