Droit de rétractation : décision du 23 mars 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 20/05242
Droit de rétractation : décision du 23 mars 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 20/05242
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République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 23/03/2023

N° de MINUTE : 23/307

N° RG 20/05242 – N° Portalis DBVT-V-B7E-TK4R

Jugement (N° 19/000085) rendu le 20 Octobre 2020 par le Tribunal de proximité de Calais

APPELANTE

SA BNP Paribas Personal Finance agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Francis Deffrennes, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

INTIMÉS

Monsieur [K] [E]

né le [Date naissance 3] 1979 à [Localité 10] – de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représenté par Me Ludivine Denys, avocat au barreau de Lille, avocat constitué assisté de Me Myriam Papin, avocat au barreau de Vannes

Maître [R] [G] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SASU Air Eco Logis

[Adresse 9]

[Localité 7]

Défaillant, à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 9 mars 2021 par acte remis à domicile

SASU Air Eco Logis représentée par son liquidateur judiciaire

[Adresse 2]

[Localité 8]

Défaillante, la signification de la déclaration d’appel a été faite à la personne de son liquidateur judiciaire le 9 mars 2021 par acte remis à domicile

DÉBATS à l’audience publique du 11 janvier 2023 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Yves Benhamou, président de chambre

Catherine Ménegaire, conseiller

Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

ARRÊT REPUTE CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 16 décembre 2022

EXPOSE DU LITIGE

Le 24 août 2017, M. [E] a, suivant bon de commande numéro 9138, conclu un contrat avec la société Air Eco Logis, ci après ‘la société EC LOG’, en vue de la fourniture et de la pose de panneaux photovoltaïques et d’un chauffe-eau thermodynamique pour un prix total de 29’900 euros TTC, dans le cadre d’un démarchage à domicile.

Le même jour, M. [E] a souscrit un contrat de crédit affecté avec la société Cetelem, aux droits de laquelle se trouve désormais la SA BNP Paribas Personal finance, destiné au financement des prestations précitées, au taux de 4,70 % l’an, remboursable en 144 mensualités.

Par exploit d’huissier en date du 29 janvier 2019, M. [E] a assigné en justice la société EC LOG et la société BNP Paribas Personal finance aux fins notamment d’obtenir la nullité du contrat de vente et du contrat de crédit affecté.

Par jugement contradictoire en date du 20 octobre 2020, le tribunal de proximité de Calais a :

– prononcé la résolution du protocole transactionnel conclu entre M. [E] et la société EC LOG le 25 mai 2018,

– prononcé la résolution du contrat n° 9138 conclu le 24 août 2017 par M. [E] avec la société EC LOG portant sur la fourniture et la pose de panneaux photovoltaïques et d’un chauffe-eau pour un montant total de 29’900 euros,

– constaté la résolution de plein droit du contrat de crédit affecté numéro 41573928689001 d’un montant de 29’900 euros conclu le 24 outre 2017 par M. [E] avec la société Cetelem pour le financement des prestations de la société EC LOG,

– condamné la société BNP Paribas Personal finance à payer à M. [E] la somme de 3 112,10 euros en remboursement des échéances du crédit affecté, avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,

– condamner la société EC LOG à payer à la société BNP Paribas Personal finance la somme de 10’036,96 euros en réparation de son préjudice avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,

– condamné la société EC LOG à payer à M. [E] la somme de 500 euros en réparation de son préjudice moral avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,

– condamné in solidum la société EC LOG et la société BNP Paribas Personal finance à payer à M. [E] la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

– condamné in solidum la société EC LOG la société BNP Paribas Personal finance aux dépens de l’instance,

– ordonné l’exécution provisoire du jugement.

La société EC LOG a été placé en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 24 juin 2020, Me [R] [G] ayant été désigné liquidateur judiciaire.

Par déclaration reçue par le greffe de la cour le 17 décembre 2020, signifiée à Me [G] ès qualité par acte d’huissier en date du 9 mars 2021, la société BNP Paribas Personal finance a relevé appel de l’ensemble des chefs du jugement, sauf en ce qu’il a condamné la société EC LOG à lui payer la somme de 10’036,96 euros en réparation de son préjudice avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement et a débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 14 décembre 2022, la société BNP Paribas Personal finance demande à la cour

de :

– réformer le jugement rendu par le tribunal de proximité de Calais en date du 20 octobre 2020 en ce qu’il a :

– prononcé la résolution du protocole transactionnel conclu entre M. [E] et la société EC LOG le 25 mai 2018,

– prononcé la résolution du contrat n° 9138 conclu le 24 août 2017 par M. [E] avec la société EC LOG portant sur la fourniture et la pose de panneaux photovoltaïques et d’un chauffe-eau pour un montant total de 29’900 euros,

– constaté la résolution de plein droit du contrat de crédit affecté numéro 41573928689001 d’un montant de 29’900 euros conclu le 24 outre 2017 par M. [E] avec la société Cetelem pour le financement des prestations de la société EC LOG,

– condamné la société BNP Paribas Personal finance à payer à M. [E] la somme de 3 112,10 euros en remboursement des échéances du crédit affecté, avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,

– condamné in solidum la société EC LOG et la société BNP Paribas Personal finance à payer à M. [E] la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté la société BNP Paribas personal finance de ses demandes plus amples ou contraires,

– condamné in solidum la société EC LOG la société BNP Paribas Personal finance aux dépens de l’instance,

Statuant à nouveau,

vu les articles L.312-55 et L.312-56 du code de la consommation,

vu les articles 1103 et 1104 du code civil,

vu l’article 1182 du code civil,

vu l’article 1315 du code civil devenu l’article 1353 dudit code,

vu l’article 9 du code de procédure civile,

à titre principal

– débouter M. [E] de l’intégralité de ses prétentions telles que formulées à l’encontre de la société BNP Paribas Personal finance,

– dire et juger que le bon de commande régularisé le 24 août 2017 par M. [E] respecte les dispositions des articles L.221-5 et suivants du code de la consommation,

– à défaut, constater que M. [E] a amplement manifesté sa volonté de renoncer à invoquer la nullité du contrat au titre des prétendus vices l’affectant sur le fondement des articles L.221-5 et suivants du code de la consommation et ce, en toute connaissance des dispositions applicables,

– constater la carence probatoire de M. [E],

– dire et juger que les conditions d’annulation du contrat principal de vente conclu avec la société EC LOG sur le fondement d’un prétendu dol ne sont pas réunies et qu’en conséquence, le contrat de crédit affecté conclu par M. [E] avec la société BNP Paribas Personal finance n’est pas annulé,

– dire et juger que les conditions de résolution judiciaire du contrat principal de vente conclu avec la société EC LOG ne sont pas réunies et qu’en conséquence le contrat de crédit affecté conclu par M. [E] avec la société BNP Paribas Personal finance n’est pas résolu,

– en conséquence, ordonner à M. [E] de reprendre le règlement des échéances du prêt entre les mains de la société BNP Paribas Personal finance conformément aux stipulations du contrat de crédit affecté accepté le 24 août 2017 et ce, jusqu’à parfait paiement,

à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour devait confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé la résolution du contrat principal de vente conclu le 24 août 2017 entre M. [E] et la société EC LOG et de manière subséquente, constater la résolution de plein droit du contrat de crédit affecté, ou si la cour décidait de prononcer la résolution des contrats,

– constater, dire et juger que la société BNP Paribas Personal finance n’a commis aucune faute en procédant la délivrance des fonds, ni aucune faute dans l’octroi du crédit,

– par conséquent, condamner M. [E] à rembourser à la société BNP Paribas Personal finance le montant du capital prêté, déduction faite des paiements d’ores et déjà effectués,

à titre infiniment subsidiaire, si par impossible la cour considérait à l’instar du premier magistrat que la société BNP Paribas Personal finance a commis une faute dans le déblocage des fonds,

– dire et juger que le préjudice subi du fait de la perte de chance de ne pas contracter les contrats de crédit affecté litigieux ne peut être égal au montant de la créance de la banque,

– dire et juger que M. [E] conservera l’installation du ballon thermodynamique et des panneaux solaires photovoltaïques qui ont été livrés et posés à son domicile par la société EC LOG (puisque ladite société est en liquidation judiciaire et qu’elle ne se présentera donc jamais au domicile de M. [E] pour récupérer le matériel installé à son domicile), que l’installation photovoltaïque fonctionne parfaitement puisque ladite installation est raccordée au réseau ERDF ENDIS, que l’installation a bien été mise en service et que M. [E] perçoit chaque année depuis 2019 des revenus énergétiques grâce à installation photovoltaïque litigieuse,

– par conséquent, dire et juger que la société BNP Paribas Personal finance ne saurait être privée de sa créance de restitution compte tenu de l’absence de préjudice avéré pour M. [E],

– par conséquent, condamner M. [E] à rembourser à la société BNP Paribas Personal finance le montant du capital prêté, déduction faite des échéances d’ores et déjà acquittées par l’emprunteur,

– à défaut, réduire de bien plus juste proportions le préjudice subi par M. [E] et condamner à tout le moins ce dernier à restituer à la BNP Paribas Personal finance une fraction du capital prêté, fraction qui ne saurait être inférieure aux deux tiers du capital prêté,

en tout état de cause,

– débouter M. [E] de l’intégralité de ses demandes en paiement de dommages-intérêts complémentaires tels que formulées à l’encontre de la société BNP Paribas Personal finance en l’absence de faute imputable prêteur et à défaut de justifier de la réalité du sérieux d’un quelconque préjudice qui serait directement lié à la prétendue faute que M. [E] tente de mettre à la charge du prêteur,

– débouter M. [E] de sa demande en paiement de dommages-intérêts au titre de la remise en état de la toiture telle que formulées à l’encontre de la société BNP Paribas Personal finance,

– condamner M. [E] à payer à la société BNP Paribas Personal finance la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [E] aux entiers frais et dépens, y compris ceux d’appel, dont distraction profit de Me Francis Deffrennes, avocat aux offres de droit, conformément dispositions de l’article 699 code de procédure;

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, le 27 août 2021 M. [E] demande à la cour de :

Vu les articles L.111-1, L.221-5, L.221-9 et L.242-1, L.312-55 du code de la consommation,

Vu l’ancien article 1108 du code civil (désormais 1130),

Vu les anciens articles L.311-20, L.311-21 du code de la consommation,

vu les article L.311-89, L.312-7 et L.312-11 du code de ma consommation,

Vu l’article 515 du code de procédure civile,

– confirmer le jugement du tribunal de proximité de toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a fixé à la somme de 3 112,10 euros le montant à régler par la société BNP Paribas Personal finance à M. [E] en remboursement des échéances du crédit affecté et en ce qu’il a partiellement débouté M. [E] de ses demandes dommages-intérêts,

statuant de nouveau,

– condamner la société BNP Paribas Personal finance à rembourser toutes les mensualités par M. [E], soit la somme de 12’819,30 euros,

– condamner la société BNP Paribas Personal finance à verser à M. [E] la somme de 8 000 euros en réparation du préjudice financier de jouissance et la somme de 3 000 euros en réparation du préjudice moral,

– condamner la société BNP Paribas Personal finance à verser à M. [E] la somme de 5 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel,

– condamner la société BNP Paribas Personal finance au paiement des entiers dépens lesquels pourront être directement recouvrés par Me Ludivine Denys, conformément à l’article 699 code de procédure civile.

Me [R] [G] es qualité n’a pas constitué avocat ni conclu.

Par courrier du 29 mars 2021 adressé à la cour, le liquidateur a fait valoir au visa des article L.622-7 et L.622-21 du code de commerce qu’aucune condamnation en paiement d’une créance antérieure ne peut être prononcée à l’encontre de la société EC LOG et que toute fixation au passif est irrecevable, M. [E] n’ayant pas déclaré sa créance.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l’exposé de leurs moyens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 16 décembre 2022, et l’affaire fixée pour être plaidée à l’audience du 11 janvier 2023.

MOTIFS

Sur la transaction conclue entre EC LOG et M. [E]

M. [E] et la société EC LOG ont signé le 25 mai 2018 un protocole transactionnel par lequel la société venderesse s’est engagée à verser à M. [E] la somme de 1 909,75 euros en quatre versements, cependant que M. [E] s’est engagé à ne pas introduire de procédure judiciaire à son encontre.

Le premier juge a prononcé la résolution dudit protocole au motif qu’il n’a pas été exécuté par la société EC LOG qui n’a effectué qu’un versement.

La société BNP Paribas personal finance a relevé appel de la disposition du jugement ayant prononcé la résolution dudit protocole, mais ne forme strictement aucune prétention à ce titre, ni ne développe aucun moyen afférent à la réformation de cette disposition du jugement, tant dans le corps que dans le dispositif de ses conclusions.

Dès lors, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a prononcé la résolution du protocole transactionnel conclu entre la société EC LOG et M. [E].

Sur la nullité du contrat de vente

En vertu de l’articles L.221-9 du code de la consommation, les contrats hors établissement doivent faire l’objet d’un contrat écrit daté dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat. Il comprend toutes les informations prévues par l’article L.221-5. Le contrat doit être accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L.221-5.

Selon l’article L.221-5 du code de la consommation ‘Préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat ;

3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;

4° L’information sur l’obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d’un contrat de prestation de services, de distribution d’eau, de fourniture de gaz ou d’électricité et d’abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l’exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l’article L. 221-25 ;

5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l’article L. 221-28, l’information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;

6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l’utilisation de la technique de communication à distance, à l’existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’Etat. (…)’

Selon l’article L.111-1 du code de la consommation, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° les caractéristiques essentielles du bien ou du service compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné,

2° le prix du bien ou du service en application de l’article L.112-1 à L.112-4,

3° en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service,

4° les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte ;

5° s’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique, et le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en oeuvre des garanties et autres conditions contractuelles ;

6° la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre 1er du livre VI. (…)’

En vertu de l’article L.242-1du code de la consommation, les dispositions de l’article L.221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.

En l’espèce, il ressort des diverses relances adressées par M. [E] à la société EC LOG, notamment de son mail du 9 juillet 2018, et mise en demeure de son avocat en date du 17 août 2018, que M. [E] n’a jamais été laissé en possession d’un exemplaire écrit et daté du bon de commande conclu avec la société EC LOG, et n’a jamais pu en obtenir copie. La société EC LOG ne rapporte pas la preuve qui lui incombe en vertu de l’article 1353 du code civil qu’elle a rempli son obligation de remettre au consommateur un exemplaire du bon de commande.

Dès lors, il apparaît nécessairement que M. [E] n’a eu connaissance des informations prévues par l’article L.111-1 du code de la consommation, ni qu’il a été mis en possession du bordereau de rétractation prévu par l’article L.221-5, cette absence de communication par la société venderesse n’étant d’ailleurs pas discutée par la banque.

Il suit que le contrat est nul sur le fondement de l’article L.242-1 du code de la consommation.

La société BNP personal finance fait valoir que M. [E] a confirmé la nullité invoquée dans la mesure où n’ayant pas usé de sa faculté de rétractation, il a exécuté le contrat en réceptionnant sans réserve l’installation, en demandant le versement des fonds à la banque, en remboursant les échéances du crédit, et en signant un contrat d’énergie avec la société ERDF, alors que ‘le bon de commande régularisé comportait nécessairement en caractères parfaitement lisibles les dispositions du code de la consommation relatives au démarchage à domicile’, de sorte que si un vice affectait le bon de commande, M. [E] pouvait parfaitement en avoir conscience.

Il est rappelé que si la violation du formalisme prescrit par les dispositions précitées du code de la consommation, et qui a pour finalité la protection des intérêts de l’acquéreur démarché, est sanctionnée par une nullité relative à laquelle il peut renoncer par une exécution volontaire de son engagement irrégulier, il résulte des dispositions de l’article 1882 du code civil dans sa version applicable à la date de conclusion du contrat, que la confirmation tacite d’un acte nul est subordonnée à la double condition que son auteur ait eu connaissance du vice l’affectant et qu’il ait eu l’intention de le réparer.

La renonciation à se prévaloir de la nullité du contrat par son exécution doit, dès lors que la confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et l’intention de le réparer, être caractérisée par sa connaissance préalable de la violation des dispositions destinées à le protéger.

Or, en l’espèce, la société EC LOG n’a jamais remis à M. [E] un exemplaire du bon de commande qu’il a régularisé. Au surplus, l’exemplaire du bon de commande produit par la société BNP Paribas Personal finance ne comporte pas les conditions générales, ni aucune référence aux dispositions du code de la consommation en matière de démarchage à domicile. M. [E], consommateur profane, ne pouvait en aucun cas avoir connaissance que l’absence de remise du contrat par écrit était une cause de nullité dudit contrat, ni ne pouvait prendre conscience des vices susceptibles de l’affecter, dès lors qu’il n’était pas en sa possession ; qu’il ne pouvait pas davantage user de sa faculté de rétractation.

En conséquent, aucun de ses actes postérieure à la signature du bon de commande, ne saurait être considéré comme une confirmation tacite de la nullité par l’acheteur.

Il convient en conséquence d’infirmer le jugement ce qu’il a prononcé la résolution du contrat de vente, et de prononcer sa nullité.

Sur l’annulation du crédit accessoire

En application du principe de l’interdépendance des contrats constatée par l’article L.312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Il y a lieu d’infirmer le jugement en ce qu’il a constaté la résolution du contrat de crédit affecté et de constater sa nullité de plein droit en application des dispositions susvisées.

Sur les conséquences de l’annulation du contrat accessoire de crédit

Les annulations prononcées entraînent en principe la remise des parties en l’état antérieur à la conclusion des contrats. Ainsi, l’annulation du contrat de prêt en conséquence de celle du contrat de vente qu’il finançait emporte, pour l’emprunteur, l’obligation de rembourser au prêteur le capital prêté, peu important que ce capital ait été versé directement au vendeur par le prêteur, sauf si l’emprunteur établi l’existence d’une faute du prêteur et d’un préjudice consécutif à cette faute. Elle emporte également pour le prêteur l’obligation de restituer les sommes déjà versées par l’emprunteur.

Sur les fautes de la banque

M. [E] fait valoir que la banque a commis des fautes la privant de sa créance de restitution au motif qu’elle a participé aux manoeuvres dolosives de la société venderesse, qu’elle n’a pas vérifié la validité du bon de commande, qu’elle a libéré les fonds sans s’assurer de la réalisation de la prestation par la société venderesse. Il reproche également à la banque d’avoir manqué à son obligations de conseil et de mise en garde consistant au financement d’une installation dont elle ne pouvait ignorer le caractère ruineux aux rendements illusoires, alors que ses revenus étaient insuffisants pour assumer la charge nouvelle du prêt.

La banque fait valoir qu’elle n’a commis aucune faute dans la mesure où elle a libéré les fonds au vu d’un certificat de livraison et d’une demande de financement signés par l’emprunteur, qu’elle n’avait pas à vérifier la régularité formelle du contrat, ni n’est responsable du défaut de raccordement de l’installation au réseau ERDF, ne s’étant pas engagée contractuellement à s’assurer de la mise en service de l’installation.

D’une part, ainsi que l’a relevé le premier juge, M. [E] ne produit aucune pièce aux débats propre à établir que la société EC LOG se serait contractuellement engagée sur une rentabilité particulière de l’installation photovoltaïque ou sur l’autofinancement de l’opération contractuelle, et ne démontre pas l’existence d’un dol commis par la société venderesse. Partant, il ne démontre pas l’existence d’une faute de la banque à raison de sa prétendue participation aux manoeuvres dolosives de la société EC LOG.

D’autre part, s’agissant des manquements de la banque à son obligation de conseil et de mise en garde, il est rappelé que le banquier dispensateur de crédit est tenu à un devoir de mise en garde envers un emprunteur non averti, à raison de ses capacités financières et des risques de l’endettement né de l’octroi du prêt. Un tel devoir n’existe qu’en cas d’inadaptation du prêt aux capacités financières de l’emprunteur, créant de ce fait un risque d’endettement né de l’octroi du prêt. Il incombe à l’emprunteur qui invoque un devoir de mise en garde de la banque à son égard de démontrer que les prêts n’étaient pas adaptés à sa situation financière et créaient un risque d’endettement contre lequel il devait être mis en garde.

Ce devoir ne porte pas sur l’ opportunité ou les risques de l’opération financée.

De plus, il résulte de la fiche de dialogue produite aux débats que M. [E] a déclaré lors de la souscription du crédit un revenu de 3 132 euros et des charges de 780 euros, laissant un reste à vivre mensuel de 2 352 euros, permettant aisément de le remboursement de l’emprunt à hauteur de 277,34 euros par mois. Au regard de ces éléments, M. [E] ne démontre pas que le crédit affecté était inadapté à sa situation et créait un risque d’endettement excessif sur lequel la banque aurait dû le mettre en garde, et il n’est d’ailleurs pas fait état d’incident de remboursement.

La banque n’était donc pas tenue à un devoir spécifique de mise en garde et il convient en conséquence de constater que la banque n’a pas commis de faute à ce titre.

Par ailleurs, le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution commet une faute.

En l’espèce, le bon de commande produit par la banque, (qui ne comporte pas les conditions générales), ne mentionne aucune date ou délai de livraison, ni bordereau de rétractation, et à ce double titre, est manifestement entâché de causes de nullité flagrantes.

En acceptant de financer une opération de vente entachée de cause de nullité, la banque a commis une faute dans le déblocage des fonds.

Par ailleurs, et comme l’a exactement relevé le premier juge, il ressort du bon de commande que la prestation complète comprend le raccordement au réseau d’ERDF ainsi que les démarches administratives (soit auprès de Consuel et de la mairie et d’EDF). Dès lors, l’obligation de vérifier la complète exécution du contrat pesant sur la banque impliquait de s’assurer aussi de la réalisation de ces prestations.

En l’espèce, l’attestation de fin de travaux en date du 3 octobre 2017 remise au prêteur ne lui permettait pas de se convaincre de l’exécution complète du contrat dans la mesure où celle-ci indiquait seulement que ‘l’installation (livraison et pose) est terminée ce jour’ ce qui impliquait nécessairement que les démarches administratives et de raccordement auxquelles la société EC LOG s’était engagée n’étaient pas réalisées.

De plus, ce document ne pouvait manifestement pas rendre compte de ce que les travaux commandés étaient terminés, dans la mesure où elle était datée du 3 octobre 2017, soit quelques jours seulement après la signature du bon de commande, ce délai étant à l’évidence trop court pour assurer la finalisation de l’installation ce que ne pouvait ignorer la banque professionnelle dispensateur de crédits affectés à la vente d’installations photovoltaïques. Il est d’ailleurs établi que le raccordement et la mise en service de l’installation n’ont été effectués qu’en mai 2018, soit postérieurement au déblocage des fonds.

En s’abstenant de s’assurer que le contrat était entièrement exécuté, la société Cofidis a manifestement commis une faute dans le déblocage des fonds.

Sur le préjudice

Pour que la banque qui a commis une faute soit privée de tout ou partie de sa créance de restitution, il faut que l’emprunteur prouve avoir subi un préjudice en lien avec cette faute en application de l’article 9 du code de procédure civile, suivant lequel il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de ses prétentions.

Les fautes commises par la banque dans le déblocage des fonds entraînent manifestement un préjudice pour l’emprunteur en l’espèce dans la mesure où il ne sera pas en mesure d’obtenir la restitution du prix, ni la désinstallation de l’équipement et la remise en état de son habitation du fait de la déconfiture de la société EC LOG, placée en liquidation judiciaire, alors que la restitution du prix et la remise en état par la société installatrice aurait dû être la conséquence normale de l’annulation du contrat principal.

En outre, s’il n’est pas contesté que l’installation photovoltaïque litigieuse est fonctionnelle, il ressort toutefois que M. [E] n’entend pas garder le matériel dont la vente est annulée, cette installation étant au surplus génératrice de frais non prévus au contrat tel que, notamment, la location obligatoire d’un compteur de production auprès de la société EDF et l’obligation de changer l’onduleur tous les cinq ans en raison de sa durée de vie limité, et qu’il devra par lui-même procéder à sa désinstallation du matériel et aux remises en état.

Il convient en conséquence, compte tenu du préjudice subi par l’intimé, de priver la banque de son droit à restitution du capital et de confirmer le jugement sur ce point.

Infirmant le jugement entrepris, il y a lieu de condamner la société BNP Paribas personal finance à payer à M. [E] la somme non contestée de 12 819,30 euros (arrêté au jour des conclusions de M. [E] en date du 27 août 2021), en restitution des échéances déjà payées.

L’ensemble des sommes versées postérieurement par l’emprunteurs au titre du contrat de crédit devront être restituées par la banque.

Sur la demande de dommages-intérêts complémentaires

L’intimé ne justifie pas d’un préjudice financier ou d’un trouble de jouissance résultant des fautes de la banque qui n’aurait pas été pris en considération dans l’évaluation du préjudice réparé par la dispense de restitution d’une partie du capital emprunté. Il en est de même s’agissant du préjudice moral allégué en lien avec les fautes de la banque.

En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné la banque à payer à M. [E] la somme de 500 euros en réparation d’un préjudice moral et confirmé en ce qu’il a rejeté les autres demandes de dommages-intérêts.

Sur les demandes accessoires

Les motifs du premier juge méritant d’être adoptés, le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.

La société BNP Paribas personal finance succombant partiellement, elle sera condamnée aux d’appel dont distraction au profit de Me Ludivine Denys en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, et condamnée à payer à M. [E] la somme de 1 800 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par réputé contradictoire, dans les limites de l’appel ;

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a privé la société BNP Paribas Personal finance de sa demande de restitution du capital prêté, débouté [E] de sa demande de dommages et intérêts au titre de son préjudice financier et de jouissance et en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau ;

Prononce la nullité du contrat de vente n° 9138 conclu le 24 août 2017 entre M. [E] et la société EC LOG ;

Constate la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté numéro 41573928689001 d’un montant de 29’900 euros conclu le 24 outre 2017 entre par M. [E] et la société Cetelem aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas personal finance ;

Condamne la société BNP Paribas personal finance à payer à M. [E] la somme de 12 819,30 euros arrêtée au 27 août 2021, sauf à parfaire, en remboursement des échéances du crédit affecté ;

Rejette la demande de dommages et intérêts formée par M. [E] au titre de son préjudice moral ;

Condamne la société BNP Paribas personal finance à payer à M. [E] la somme de 1 800 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société BNP Paribas Personal finance aux dépens.

Le greffier

Gaëlle PRZEDLACKI

Le président

Yves BENHAMOU

 


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