Droit de rétractation : Décision du 21 septembre 2022 Cour d’appel de Rouen RG n° 21/02415

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Droit de rétractation : Décision du 21 septembre 2022 Cour d’appel de Rouen RG n° 21/02415

N° RG 21/02415 – N° Portalis DBV2-V-B7F-IZQU

COUR D’APPEL DE ROUEN

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 21 SEPTEMBRE 2022

DÉCISION DÉFÉRÉE :

111900286

Tribunal judiciaire de Rouen du 18 mars 2021

APPELANT :

Monsieur [M] [Y]

né le 14 juin 1956 à [Localité 4]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

comparant en personne, représenté et assisté de Me Carine DESROLLES de la Scp BRULARD – LAFONT – DESROLLES, avocat au barreau de l’Eure

INTIMEES :

Sas PRO RENOV HABITAT

[Adresse 1]

[Adresse 1]

non constituée bien que régulièrement assigné le 2 août 2021 par acte remis à l’étude d’huissier

Sa FINANCO

RCS Brest B338 138 795

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée et assistée par Me Marc ABSIRE de la Selarl DAMC, avocat au barreau de Rouen plaidant par Me Antoine ETCHEVERRY

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 23 mai 2022 sans opposition des avocats devant Mme Magali DEGUETTE, conseiller, rapporteur,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée :

Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre,

M. Jean-François MELLET, conseiller,

Mme Magali DEGUETTE, conseillère,

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Catherine CHEVALIER,

DEBATS :

A l’audience publique du 23 mai 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 21 septembre 2022.

ARRET :

PAR DEFAUT

Rendu publiquement le 21 septembre 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

signé par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier.

*

* *

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

A la suite d’un démarchage à domicile, M. [M] [Y] a commandé le 6 novembre 2018 à la Sas Renov Habitat la fourniture et la pose de quatre volets roulants manuels pour le prix de 1 972 euros TTC dans sa maison d’habitation située [Adresse 3]. Il a confirmé ces travaux lors du rendez-vous de pré-installation technique le 15 novembre 2018.

Le financement du prix a été prévu au moyen du versement de la somme de 72 euros en espèces et de celle de 1 900 euros par le biais d’un crédit affecté sollicité le 6 novembre 2018 auprès de la Sa Financo.

Par actes d’huissier de justice des 21 novembre et 2 décembre 2019, M. [M] [Y] a fait assigner la Sas Renov Habitat et la Sa Financo devant le tribunal de grande instance de Rouen. Il a demandé l’annulation ou la résolution judiciaire du contrat de vente, la nullité du contrat de crédit et le remboursement des mensualités du crédit échues et réglées.

Suivant jugement du 18 mars 2021, le tribunal judiciaire de Rouen a :

– rejeté les moyens de nullité du contrat de vente et du contrat de crédit signés le 6 novembre 2018,

– débouté M. [M] [Y] de l’ensemble de ses demandes,

– condamné M. [M] [Y] à payer à la Sa Financo une indemnité de 400 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [M] [Y] aux dépens,

– rappelé que l’exécution provisoire est de droit.

Par déclaration du 11 juin 2021, M. [M] [Y] a formé un appel contre ce jugement en toutes ses dispositions.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 24 février 2022 et signifiées le 1er mars 2022 à la Sas Pro Renov Habitat par procès-verbal de recherches infructueuses, M. [M] [Y] demande de voir en application des articles L.111-1 et suivants, L.221-5, L.221-9, L.221-10, L.242-1, L.312-48, L.312-55 et R.221-2 du code de la consommation, 1103, 1104, 1193 et 1194 du code civil, 143, 144, 155, 263 et 287 du code de procédure civile :

– infirmer les dispositions du jugement entrepris qui ont :

. rejeté les moyens de nullité du contrat de vente et du contrat de crédit signés le 6 novembre 2018,

. débouté M. [M] [Y] de l’ensemble de ses demandes,

. condamné M. [M] [Y] à payer à la Sa Financo une indemnité de 400 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

. condamné M. [M] [Y] aux dépens,

statuant à nouveau,

– prononcer l’annulation du contrat de vente conclu entre lui et la Sas Pro Renov Habitat le 6 novembre 2018,

– prononcer la nullité du contrat de crédit affecté conclu avec la Sa Financo accessoire au contrat conclu avec la Sas Pro Renov Habitat,

– dire et juger que la Sa Financo a commis une faute en ayant versé les fonds au vendeur sans avoir préalablement procédé aux vérifications nécessaires sur la validité et la bonne exécution du contrat de vente et qu’il n’est redevable d’aucune somme envers elle ensuite de la résolution du contrat de crédit accessoire,

– condamner la Sa Financo à lui rembourser la somme de 1 619,09 euros à la suite du prononcé de la nullité du contrat de crédit accessoire, somme qui sera à parfaire à la date de l’arrêt à intervenir,

– ordonner une mesure de vérification d’écriture à son égard pour constater l’imitation de sa signature sur les documents intitulés procès-verbal de livraison et demande de financement et mandat de prélèvement,

– condamner la Sas Pro Renov Habitat à lui payer les sommes suivantes :

. 3 200 euros correspondant au coût des travaux réparatoires,

. 3 000 euros au titre du préjudice moral,

. 3 000 euros au titre du trouble de jouissance,

– subsidiairement, ordonner avant dire droit une mesure d’expertise judiciaire confiée à tel expert qu’il plaira à la cour de désigner avec mission essentiellement de, connaissance prise du dossier, indiquer si les travaux réalisés sont conformes aux règles de l’art et vérifier si les désordres allégués existent et, dans ce cas, les décrire en indiquant leur nature, donner tous éléments techniques qui permettront à la juridiction de déterminer si les désordres allégués :

. sont imputables à une erreur de conception, à un manquement à l’obligation d’information ou au devoir de conseils, à un vice de construction, à une malfaçon dans la mise en ‘uvre, une négligence dans l’entretien ou l’exploitation des ouvrages ou à quelconques autres causes,

. affectent l’un des éléments constitutifs de l’ouvrage ou l’un de ses éléments d’équipement,

. constituent une simple défectuosité, des malfaçons ou des vices graves, en précisant s’ils sont susceptibles de compromettre la solidité de l’ouvrage ou le rendre impropre à sa destination,

indiquer l’importance, la nature, le coût et la durée des travaux de remise en état,

– subsidiairement, avant dire droit, ordonner une expertise aux fins de vérification de signature et commettre à cette fin tel expert qu’il plaira à la cour de désigner avec pour mission notamment de se faire remettre par les parties l’original du document intitulé procès-verbal de livraison et demande de financement et du document intitulé mandat de prélèvement sur lesquels il conteste sa signature, se faire remettre en original tous documents contemporains comportant sa signature incontestable et tous documents que l’expert estimera utiles à l’accomplissement de sa mission,

procéder à tous examens comparatifs à l’effet de déterminer si la signature qui lui est attribuée sur les documents intitulés procès-verbal de livraison et demande de financement et mandat de prélèvement sont ou non de sa main,

– désigner le conseiller de la mise en état pour suivre les opérations d’expertise et, en cas d’empêchement de l’expert, procéder d’office à son remplacement et dire que l’expert devra tenir ce magistrat informé de l’exécution de sa mission et de toute difficulté qu’il pourrait rencontrer pour l’accomplir,

– condamner in solidum la Sas Pro Renov Habitat et la Sa Financo à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en plus des entiers dépens de l’instance, lesquels comprendront le coût des procès-verbaux de constat du 1er août 2019 pour un montant de 264,09 euros et du 1er avril 2021 pour un montant de 208,33 euros.

Par dernières conclusions notifiées le 18 octobre 2021 et signifiées le 5 novembre 2021 à la Sas Pro Renov Habitat, la Sa Financo sollicite de voir :

– déclarer M. [M] [Y] irrecevable et subsidiairement mal fondé en ses demandes et en débouter celui-ci,

– confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

– à titre subsidiaire, si la cour venait à prononcer la nullité ou la résolution judiciaire des conventions, condamner M. [M] [Y] à lui rembourser le capital emprunté de 1 900 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir, déduction à faire des sommes payées,

– à titre plus subsidiaire, si M. [M] [Y] était dispensé de lui rembourser le capital, condamner la Sas Pro Renov Habitat à lui payer la somme de 2 233,44 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,

– à titre infiniment subsidiaire, condamner la Sas Pro Renov Habitat à lui payer la somme de 1 900 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,

– en tout état de cause, condamner la Sas Pro Renov Habitat à la garantir de toute condamnation qui pourrait être mise à sa charge au profit de M. [M] [Y] et condamner tout succombant à lui payer une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

La Sas Pro Renov Habitat, à qui la déclaration d’appel le 2 août 2021 en l’étude de l’huissier instrumentaire et les conclusions des parties ont été signifiées, n’a pas constitué avocat.

La clôture de l’instruction a été ordonnée le 4 mai 2022.

MOTIFS

Sur la nullité du contrat conclu avec la Sas Pro Renov Habitat

M. [Y] fait valoir que le contrat ne respecte pas les dispositions du code de la consommation régissant le démarchage à domicile, que le bon de commande du 6 novembre 2018 ne comporte qu’un descriptif sommaire des travaux à réaliser, ne détaille pas le prix de chaque produit et/ou de la main d’oeuvre concernant leur pose, et ne mentionne pas le mode de fonctionnement manuel ou électrique des volets, ni l’adresse de la société.

Il reproche également à la Sas Pro Renov Habitat d’avoir méconnu son droit de rétractation en fixant un rendez-vous pour la pré-installation technique au 15 novembre 2018, de ne pas lui avoir délivré un formulaire de rétractation détachable du bon de commande et conforme aux articles L.221-5 et R.221-2 du code de la consommation, d’avoir reçu la somme de 72 euros dès le 6 novembre 2018 soit avant l’expiration d’un délai de 7 jours après la conclusion du contrat. Il ajoute qu’il n’a pas réitéré son consentement en signant le procès-verbal de livraison et demande de financement, ni le mandat de prélèvement Sepa, car ce n’est pas sa signature qui y figure, qu’il a porté plainte pour faux en écriture le 4 juin 2019.

La Sa Sofinco réplique que M. [Y] ne produit pas le verso du bon de commande comprenant les conditions générales de vente, de sorte qu’il est irrecevable à en soulever la nullité. Elle soutient ensuite que le bon de commande spécifie les caractéristiques essentielles du matériel commandé, le délai de livraison et les modalités de son financement, qu’il est donc conforme aux dispositions du code de la consommation. Elle ajoute que, s’il était affecté d’une cause de nullité, celle-ci serait relative et sujette à réitération du consentement par l’emprunteur qui a souscrit un contrat de crédit, signé la fiche de dialogue, remis la copie de sa carte d’identité et les éléments sur sa solvabilité, laissé les volets roulants être posés, signé le procès-verbal de livraison, la demande de financement et le mandat de prélèvement Sepa et pris connaissance des articles du code de la consommation figurant au verso du bon de commande.

Le moyen soulevé par la Sa Financo relatif à l’absence de production de l’intégralité du bon de commande n’est pas constitutif d’une fin de non-recevoir. Relevant du débat au fond, ce moyen est inopérant. Il l’est d’autant plus que l’exemplaire du bon de commande produit par M.[Y], constituant sa pièce n°2, est complet en ses recto et verso. La Sa Financo sera déboutée de sa demande tendant à voir déclarer

M. [Y] irrecevable en ses demandes.

Selon l’article L.221-5 du code de la consommation dans sa version en vigueur au jour de la signature du bon de commande, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services :

– les informations prévues aux articles L.111-1 qui visent :

1° les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné,

2° le prix du bien ou du service, en application des articles L.112-1 à L.112-4,

3° en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service,

4° les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte,

5° s’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles,

– lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat.

Ces dispositions sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.

L’article L.221-10 du code précité dispose que le professionnel ne peut recevoir aucun paiement ou aucune contrepartie, sous quelque forme que ce soit, de la part du consommateur avant l’expiration d’un délai de sept jours à compter de la conclusion du contrat hors établissement.

En l’espèce, le bon de commande n°362 signé par M. [Y] le 6 novembre 2018 contient les indications suivantes dans le paragraphe ‘Désignation’ : ‘Changement de vos volets pour une meilleure isolation phonique et thermique ainsi qu’un rendu esthétique optimale.

Description :- coffre à pan coupé

– ADP 41

– couleur Teck foncé.

Dimmensions

210 x 120

131 x 119 (x 3)

Prix TTC, livré, posé. Garantie 20 ans.

Fabrication française. Normes NF. CE.’

Le prix total HT de cette prestation s’élève à 1 869,19 euros, le montant de la TVA à 102,81 euros et le total TTC à 1 972 euros.

Sont également mentionnés : la modalité des règlements par le versement d’un acompte de 72 euros et la conclusion d’une offre préalable de crédit de 1 900 euros et ses caractéristiques, le taux de TVA de 5,5 % et la date de livraison : ‘Décembre 2018’.

Il y est également spécifié que : ‘Le client déclare :

1) Avoir pris connaissance des conditions de ventes ainsi que des articles L.121-23 à L.121-26 du code de la consommation figurant au dos du bon de commande et éventuellement avoir reçu l’offre préalable de crédit.

2) Etre d’accord sur les conditions, sur celles relatives au règlement indiquées au verso, ainsi que sur les marchandises, spécifications, quantités et prix faisant l’objet du présent bon de commande.

3) Reconnaître avoir reçu une documentation du matériel ci-dessus désignés.’.

Comme justement avancé par M. [Y], ne figuraient pas dans ce bon de commande : le détail du prix de chaque volet et de la main d’oeuvre pour leur pose, le mode de fonctionnement manuel ou électrique de ces volets, les coordonnées postales de la Sas Pro Renov Habitat. L’absence de ce dernier renseignement empêchait l’exercice du droit de rétractation, qui n’était pas non plus facilité du fait de l’absence d’un formulaire détachable du bon de commande, lequel était en l’espèce inclus au verso de l’exemplaire de celui-ci.

Le grief du non-respect du délai de rétractation de 14 jours du fait de la fixation du rendez-vous pour la pré-installation technique à la date du 15 novembre 2018 est aussi fondé.

Ne l’est pas celui du versement de 72 euros avant l’expiration du délai de sept jours, cette somme ayant été remise au technicien de la Sas Pro Renov Habitat le 15 novembre 2018 comme mentionné sur le document de confirmation de travaux.

Le bon de commande du 6 novembre 2018 encourt donc la nullité.

Bien que procédant du non-respect de règles relevant d’un ordre public de protection, cette nullité relative est susceptible de régularisation s’il existe des actes postérieurs à la connaissance par l’acquéreur du ou des vices affectant le contrat et démontrant sa volonté de l’accepter.

M. [Y] nie être le signataire du procès-verbal de livraison et demande de financement et du mandat de prélèvement Sepa, datés du 11 février 2019. Il demande à ce qu’il soit procédé à une vérification d’écriture.

L’article 287 du code de procédure civile dispose que, si l’une des parties dénie l’écriture qui lui est attribuée ou déclare ne pas reconnaître celle qui est attribuée à son auteur, le juge vérifie l’écrit contesté à moins qu’il ne puisse statuer sans en tenir compte.

L’article 288 du même code précise qu’il appartient au juge de procéder à la vérification d’écriture au vu des éléments dont il dispose après avoir, s’il y a lieu, enjoint aux parties de produire tous documents à lui comparer et fait composer, sous sa dictée, des échantillons d’écriture. Dans la détermination des pièces de comparaison, le juge peut retenir tous documents utiles provenant de l’une des parties, qu’ils aient été émis ou non à l’occasion de l’acte litigieux.

La comparaison de l’ensemble des signatures apposées sur les différents documents, non contestées par M. [Y] (bon de commande du 6 novembre 2018, offre de contrat de crédit, fiche de dialogue et offre d’assurance, conclus avec la Sa Financo le 6 novembre 2018, bon du rendez-vous et confirmation de travaux du 15 novembre 2018, reçu de fin de travaux du 8 février 2019, courrier du 28 février 2019 qu’il a adressé à la Sas Pro Renov Habitat) et qui sont contemporaines aux signatures contestées, permet d’affirmer qu’il s’agit de la même signature que celles apposées par celui-ci sur les deux documents précités.

M. [Y] ajoute que le mandat de prélèvement ne comporte pas l’indication de ses coordonnées bancaires.

Ceci est exact. Mais, il ressort des pièces versées aux débats que la Sa Financo a été destinataire d’un relevé d’identité bancaire, qui lui a permis de connaître les coordonnées du compte de M.[Y].

Figuraient au verso du bon de commande, après les conditions générales de vente, les dispositions du code de la consommation régissant les contrats conclus hors établissement dans des caractères de petite taille mais parfaitement lisibles qui permettaient à M. [Y] de déterminer qu’elles n’avaient pas été totalement respectées aux termes de son bon de commande. En connaissance de celles-ci, il a poursuivi l’exécution du contrat en souscrivant le contrat de crédit affecté avec assurance, en remettant son relevé d’identité bancaire et sa carte d’identité à destination du prêteur, en signant le 8 février 2019 le reçu de fin de travaux et de pose des quatre volets roulants manuels conformes au bon de commande sans aucune réserve quant à l’absence de manivelle ou de tout dispositif d’ouverture et de fermeture, en signant le 11 février 2019 le procès-verbal de livraison et demande de financement certifiant avoir pris possession du bien commandé, que ce bien était conforme aux références portées sur le bon de commande et donnant pour instruction à la banque de débloquer les fonds au profit du vendeur. M. [Y] n’a pas davantage contesté le courrier daté du 16 février 2019 par lequel la Sa Financo lui confirmait le financement de 1 900 euros en lien avec son contrat principal conclu avec la Sas Pro Renov Habitat.

Ces faits successifs démontrent une exécution volontaire et non équivoque du contrat par M.[Y] en connaissance des vices affectant le bon de commande, ce qui vaut confirmation de celui-ci et le prive de la possibilité de se prévaloir des nullités formelles invoquées. Sa demande d’annulation du contrat sera rejetée. La décision du premier juge ayant statué en ce sens sera confirmée.

Sur la nullité du contrat conclu avec la Sa Financo

M. [Y] reproche à la Sa Financo de ne pas avoir vérifié que la Sas Pro Renov Habitat disposait d’un personnel qualifié en mesure de réaliser les travaux financés, ni la conformité du bon de commande aux dispositions du code de la consommation sur le démarchage, et de ne pas avoir respecté l’article L.312-48 du même code en ne s’assurant pas de la complète exécution de la prestation convenue. Il ajoute que cette dernière aurait pu s’apercevoir en procédant à la comparaison des autres documents signés par lui que sa signature avait été imitée par la Sas Pro Renov Habitat sur le procès-verbal de livraison et demande de financement et sur le mandat de prélèvement Sepa. Il en conclut qu’elle a commis une faute la privant de sa créance de restitution et l’obligeant à lui rembourser les mensualités échues et réglées.

La Sa Financo répond qu’elle n’a commis aucune faute lors de la libération des fonds qui a eu lieu après réception du procès-verbal de livraison et demande de financement signé par M.[Y] malgré les dénégations de celui-ci et le fait qu’il savait qu’il ne disposait pas d’une manivelle ; que le bon de commande n’était entaché d’aucune cause de nullité et avait au minimum une apparence de régularité ; que, dans l’hypothèse de causes de nullité affectant ce bon de commande, celles-ci n’étaient pas facilement décelables par elle lorsqu’elle a procédé au contrôle de sa régularité formelle ; que M. [Y] ne prouve pas le préjudice qui en a découlé pour lui ; qu’il demeure donc tenu au remboursement du capital emprunté.

Le prêteur est tenu de vérifier la régularité formelle du contrat principal et d’informer l’emprunteur d’une éventuelle irrégularité afin que celui-ci puisse confirmer le contrat ou y renoncer. Il doit aussi s’assurer de l’exécution complète du contrat principal et ne délivrer les fonds qu’après une telle exécution. A défaut, le prêteur commet une faute susceptible d’engager sa responsabilité.

Dans le cas présent, M. [Y] met en cause la responsabilité de la Sa Financo, sans solliciter la résolution du contrat de crédit affecté et/ou l’allocation de dommages et intérêts aux termes du dispositif de ses conclusions. Il demande uniquement le prononcé de la nullité de ce contrat, sanction du non-respect des conditions requises pour sa formation, et le remboursement subséquent des mensualités échues et payées.

Aucun moyen de nullité du contrat de crédit affecté n’étant invoqué dans la discussion et la cour d’appel n’étant saisie que des demandes de prononcé de nullité de ce contrat et de remboursement consécutif des sommes déjà réglées, M. [Y] en sera débouté. Le jugement du tribunal ayant rejeté ces prétentions sera confirmé.

Sur la responsabilité contractuelle de la Sas Pro Renov Habitat

M. [Y] fait valoir que les quatre volets roulants ne sont pas fixés convenablement et qu’il n’existe aucun moyen de les faire fonctionner à défaut de disposer d’une manivelle ou d’un tout autre dispositif permettant leur fermeture et leur ouverture, que la Sas Pro Renov Habitat a manqué à son obligation de résultat dans l’exécution de ses travaux, mais également à son obligation d’information et de conseil lorsqu’elle a préconisé la pose de volets roulant manuels qui était impossible.

Il sollicite l’allocation de dommages et intérêts pour le préjudice moral qu’il a subi du fait de l’imitation de sa signature par la Sas Pro Renov Habitat sur les documents transmis à la Sa Financo pour obtenir le financement du contrat. Il précise qu’il a été contraint de déposer plainte pour faux et qu’il reste tenu de rembourser les échéances du prêt depuis juillet 2019 alors même qu’il ne peut pas jouir des volets roulants.

Il demande enfin la réparation de son préjudice de jouissance qu’il subit depuis plus de deux ans et alors que la Sas Pro Renov Habitat lui avait garanti une meilleure isolation phonique et thermique en lui fournissant ces volets, garantis 20 ans.

Selon l’article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.

Le juge ne peut pas se fonder exclusivement sur une expertise privée réalisée non contradictoirement à la demande de l’une des parties. En revanche, il peut s’appuyer sur celle-ci dès lors qu’elle est corroborée par d’autres éléments de preuve.

En l’espèce, il ressort des constatations effectuées le 25 mai 2021 par M. [H] du cabinet Mahe-Villa et associés, expert amiable mandaté par l’assureur protection juridique de M.[Y], hors la présence de la Sas Pro Renov Habitat dûment convoquée à cet effet, que :

– le coffre de chacun des quatre volets roulants manuels obstruait la vue de l’intérieur vers l’extérieur,

– les coulisses n’étaient fixées que par une vis chacune,

– il était impossible d’installer la manivelle pour actionner chaque volet, car la sortie depuis le coffre tombait dans l’emprise de l’ouvrant droit de la menuiserie, ce qui rendait ces volets inutilisables.

Il a imputé ces désordres en totalité à la Sas Pro Renov Habitat qui a installé des volets inadaptés et impropres à leur destination et n’est jamais revenue pour installer les motorisations. Il a préconisé le remplacement des quatre ensembles par des volets roulants de rénovation avec manoeuvre motorisée solaire pour un coût estimé à

3 200 euros TTC. Cette solution de réparation a été confirmée par les trois professionnels sollicités par M. [Y] pour établir un devis à cette fin.

L’absence de manivelle sur chaque volet roulant a également été constatée aux termes des procès-verbaux de constat des 1er août 2019 et 1er avril 2021. Lors de ce second constat, Me [V], huissier de justice, a relevé l’impossibilité d’utilisation de ces volets conforme à leur destination, le défaut d’achèvement des travaux de pose et l’existence de défauts de fixation des rails permettant aux volets de coulisser.

Enfin, M. [T], menuisier, a confirmé, à la suite de son devis du 22 avril 2021, l’impossibilité de faire fonctionner un volet roulant à manivelle laquelle ne pouvait pas être installée et que, si elle l’était, elle entraînerait la condamnation de l’ouvrant de la fenêtre.

La Sas Pro Renov Habitat a failli à son obligation de résultat de réaliser une installation efficiente de quatre volets roulants. Elle a aussi manqué à son obligation de conseil à l’égard de M. [Y] quant à l’impossibilité d’installer des volets roulants manuels nécessitant la pose d’une manivelle. Professionnel en matière de rénovation de l’habitat, elle engage sa responsabilité contractuelle. Elle sera condamnée à indemniser M. [Y] du coût des travaux de réfection de 3 200 euros TTC.

Elle sera également tenue de réparer la privation de jouissance de ses volets subie par M. [Y] depuis le 11 février 2019 lesquels sont bloqués en position ouverte et n’assurent pas l’isolation phonique et thermique, ni le rendu esthétique optimal, promis. Il sera fait droit à sa demande de paiement de la somme de 3 000 euros par la Sas Pro Renov Habitat.

Par contre, à l’issue de la vérification d’écriture à laquelle il a été procédé et aucun élément probant contraire n’étant produit, la mise en cause de la Sas Pro Renov Habitat n’est pas fondée. M. [Y] sera débouté de sa demande d’indemnisation d’un préjudice moral.

Sur les demandes accessoires

Les dispositions de première instance sur les dépens et les frais irrépétibles seront infirmées.

Partie perdante, la Sas Pro Renov Habitat sera condamnée aux dépens, lesquels n’incluent pas le coût des procès-verbaux de constat des 1er août 2019 et 1er avril 2021 qui ne constituent pas des dépens au sens de l’article 695 du code de procédure civile.

Il n’est pas inéquitable de la condamner également à payer à M. [Y] et à la Sa Financo, chacun, la somme de 3 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens qu’ils ont exposés pour cette procédure.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt par défaut, rendu publiquement par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a condamné M. [M] [Y] à payer à la Sa Financo une indemnité de 400 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et condamné M. [M] [Y] aux dépens,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute la Sa Financo de sa demande tendant à voir déclarer M. [M] [Y] irrecevable en ses demandes,

Condamne la Sas Pro Renov Habitat à payer à M. [M] [Y] les sommes suivantes :

. 3 200 euros TTC au titre des travaux de remplacement des quatre volets roulants,

. 3 000 euros en réparation de son préjudice de jouissance,

Condamne la Sas Pro Renov Habitat à payer à M. [M] [Y] et à la Sa Financo, chacun, la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute M. [M] [Y] du surplus de ses demandes,

Condamne la Sas Pro Renov Habitat aux dépens.

Le greffier,La présidente,

 


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