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ARRÊT N°23/144
PF
N° RG 21/01909 – N° Portalis DBWB-V-B7F-FUE6
S.A. LA BANQUE POSTALE CONSUMER FINANCE ‘LBPCF (EX SA BANQUE POSTALE FINANCEMENT
C/
[G] ÉPOUSE [L]
COUR D’APPEL DE SAINT – DENIS
ARRÊT DU 21 AVRIL 2023
Chambre civile TGI
Appel d’une décision rendue par le JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE SAINT-PIERRE en date du 20 septembre 2021 suivant déclaration d’appel en date du 05 novembre 2021 RG n° 20/03366
APPELANTE :
S.A. LA BANQUE POSTALE CONSUMER FINANCE ‘LBPCF (EX SA BANQUE POSTALE FINANCEMENT
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Pierre HOARAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
INTIMÉE :
Madame [P] [G] ÉPOUSE [L] épouse [L]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Georges-andré HOARAU de la SELARL GEORGES-ANDRE HOARAU ET ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
DATE DE CLÔTURE : 22 septembre 2022
DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 17 Février 2023 devant Madame FLAUSS Pauline, Conseillère, qui en a fait un rapport, assistée de Madame Marina BOYER, Greffière, les parties ne s’y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué, à l’issue des débats, que l’arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 21 Avril 2023.
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Monsieur Eric FOURNIE, Conseiller
Qui en ont délibéré
greffier : Madame Marina BOYER, greffière
Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 21 Avril 2023.
* * * *
LA COUR :
Par offre de crédit accepté le 4 octobre 2012, M. et Mme [L] ont souscrit un prêt de 50.000 euros au taux de 5,80 %, payable en 144 mensualités de 482,77 euros auprès de la SA Banque Postale.
Après plusieurs impayés, la banque a mis en demeure M. et Mme [L] de lui payer les sommes dues par courrier recommandé réceptionné le 10 juillet 2020.
Par acte d’huissier du 19 septembre 2020, la SA Banque Postale a fait sommation à M. et Mme [L] de payer le capital déchu, outre les pénalités, intérêts et échéances de retard pour la somme de 32.533,44 euros. A cette occasion, le décès de M. [L] le 17 octobre 2019 a été porté à la connaissance de la SA Banque Postale.
Par acte d’huissier du 19 décembre 2020, la SA Banque Postale a saisi le Juge des Contentieux de la Protection du Tribunal Judiciaire de Saint-Pierre (Réunion) aux fins de condamner Mme [L] au paiement de ladite somme, ramenée à 15.367,05 euros suite à la prise en charge partielle des remboursements par l’assurance décès de M. [L].
Par jugement du 20 septembre 2021, le juge a :
– prononcé la déchéance totale du droit aux intérêts, indemnités et frais au titre du contrat en date du 04/10/2012 ;
– débouté la SA Banque Postale de l’ensemble de ses demandes ;
– condamné la SA Banque Postale à payer à Mme [L] la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la SA Banque Postale aux dépens ;
– débouté les parties de leurs plus amples demandes.
Par déclaration du 5 novembre 2021 au greffe de la cour, la SA Banque Postale a formé appel du jugement.
Elle demande à la cour de :
– juger son appel parfaitement recevable;
– juger que le contrat de prêt est en tous points conforme aux exigences du Code de la consommation ;
– juger qu’il est prouvé que l’exemplaire emprunteur dudit contrat comportait bien un bordereau de rétractation conforme.
– juger que le dossier établit que la situation et la solvabilité des emprunteurs a bien été étudié sérieusement par le banquier.
– juger que la pièce N° 6 produite aux débats établit la consultation du FICP,
En conséquence,
– réformer le jugement du 20 septembre 2021 en toutes ses dispositions.
Statuant de nouveau,
– juger qu’aucune déchéance du droit aux intérêts du créancier ne peut être prononcée.
– condamner Mme [L] au paiement de la somme en principal de 15.637, 05 euros augmentée des intérêts de droit ;
– condamner la même au paiement de la somme de 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
– débouter Mme [L] de toutes demandes autres ou contraires.
Mme [L] sollicite de la cour de :
– confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;
– débouter la SA Banque Postale de l’ensemble de ses prétentions ;
Subsidiairement
– Fixer la créance de la SA Banque Postale à la somme de 12.824,92 euros.
– lui voir accorder la possibilité de régler cette dette à hauteur de 100 euros par mois.
– Dire qu’il n’y pas lieu d’appliquer les intérêts.
– Voir modérer la clause pénale.
– Voir dire que ses paiements s’imputeront d’abord sur le capital.
En tous les cas,
– Condamner la SA Banque Postale à payer la somme de 4.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– La condamner aux entiers dépens ;
MOTIFS DE LA DECISION
Vu les dernières conclusions de la SA Banque Postale du 25 février 2022 et celles de Mme [L] du 13 mai 2022 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties ;
Vu l’ordonnance de clôture du 22 septembre 2022 ;
Vu les articles L. 311-12 et L. 311-48 du code de la consommation, dans leurs rédactions antérieures à celles issues de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ;
Il résulte de ces textes que, pour permettre à l’emprunteur d’exercer son droit de rétractation, un formulaire détachable est joint à son exemplaire du contrat de crédit et que le prêteur qui accorde un crédit sans remettre à l’emprunteur un contrat comportant un tel formulaire est déchu du droit aux intérêts en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.
Ces dispositions sont issues de la transposition par la France de la directive n° 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive n° 87/102/CEE. La garantie de l’effectivité de la directive s’oppose à ce qu’en raison d’une clause type, le juge doive considérer que le consommateur a reconnu la pleine et correcte exécution des obligations précontractuelles incombant au prêteur: une telle clause constitue un indice qu’il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments de preuve pertinents et que le consommateur doit toujours être en mesure de faire valoir qu’il n’a pas été destinataire de cette fiche ou que celle-ci ne permettait pas au prêteur de satisfaire aux obligations d’informations précontractuelles lui incombant.
En l’espèce, la SA Banque Postale verse aux débats son exemplaire du contrat conclu avec M. et Mme [L], lequel comporte une clause type attestant de la remise d’un formulaire de rétractation. Elle entend corroborer cet indice par la production d’un exemplaire de contrat type utilisé pour l’exemplaire à conserver par le client mais ce seul élément est insuffisant à démontrer que Mme [L] a bien été récipiendaire d’un tel exemplaire de contrat.
De plus, si le bordereau de rétractation, établi sous forme de papillon à détacher en bas de la page 11 du contrat, comprend bien les mentions du modèle type visé à l’article
R. 311-4 ancien du code de la consommation, en revanche, il comporte un entête ambigu pour le consommateur moyen visant le “co-emprunteur” et non tout emprunteur: “Attention, ne retournez ce bordereau que si vous renoncez à vous porter co-emprunteur”.
Dès lors, le premier juge a exactement énoncé que la SA Banque Postale n’apportait pas la preuve qui lui incombe d’avoir rempli son obligation résultant de l’article L. 311-12 susvisé.
Vu les articles L. 311-9, L. 311-33, L. 333-4 et L. 333-5 du code de la consommation dans leurs versions applicables au litige ;
Vu l’article 13 de l’arrêté modifié du 26 octobre 2010 relatif au Fichier national des incidents de remboursement des Crédits aux particuliers (FICP) ;
L’article L. 312-16 susvisé prévoit qu’avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur et ce, notamment par la consultation du fichier prévu à l’article L. 751-1, à savoir le FICP.
En l’espèce, les deux documents produits (pièce 6), lesquels comportent son entête et attestent, sans référence à aucun élément extérieur qu’elle n’ait pu elle-même établir, qu’elle a sollicité la consultation du FICP pour chacun des co-emprunteurs, est insuffisant à établir la preuve de la consultation du FICP. En outre, aux termes de ces documents, la consultation serait intervenue le 10 octobre 2012, soit postérieurement à la conclusion du contrat le 4 octobre 2012.
Aussi, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres arguments de la banque, c’est à bon droit que le premier juge a prononcé la déchéance totale des intérêts du prêt par application des dispositions susvisées de l’article L. 311-33.
Enfin, sans même qu’il ne soit besoin de statuer sur la contestation de la clause pénale de 2.270, 74 euros, c’est par des calculs non contestés dans leur quantum établis à partir du contrat de prêt litigieux, de son avenant du 21 août 2013, des tableaux d’amortissement y afférents et des décomptes de créance après déduction des sommes versées par l’assurance que le premier juge a jugé qu’après imputation des intérêts déjà payés sur le seul capital restant dû, le montant des sommes restant à devoir par Mme [L] était nul.
Le jugement entrepris ayant débouté la banque de sa demande en paiement doit ainsi être confirmé.
Sur les dépens et frais irrépétibles.
Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile;
La SA Banque Postale, qui succombe, supportera les dépens et versera à Mme [L] la somme de 1.000 euros au titre de sa demande d’indemnité de procédure rejetée.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement et contradictoirement en dernier ressort, en matière civile, par sa mise à disposition au greffe conformément à l’article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;
– Confirme le jugement entrepris ;
Y ajoutant,
– Condamne la SA Banque Postale à verser à Mme [L] la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles ;
– Condamne la SA Banque Postale aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Madame Marina BOYER, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE signé LE PRÉSIDENT