Droit de rétractation : décision du 20 avril 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 21/03050
Droit de rétractation : décision du 20 avril 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 21/03050
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MM/ND

Numéro 23/1371

COUR D’APPEL DE PAU

2ème CH – Section 1

ARRET DU 20/04/2023

Dossier : N° RG 21/03050 – N° Portalis DBVV-V-B7F-H7JU

Nature affaire :

Prêt – Demande en remboursement du prêt

Affaire :

[O] [I]

[U] née [R] [I]

C/

[B] [L]

S.A. COFIDIS

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 20 avril 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 27 Février 2023, devant :

Monsieur Marc MAGNON, magistrat chargé du rapport,

assisté de Madame Nathalène DENIS, Greffière présente à l’appel des causes,

Marc MAGNON, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Philippe DARRACQ et en a rendu compte à la Cour composée de :

Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller faisant fonction de Président

Monsieur Marc MAGNON, Conseiller

Madame Joëlle GUIROY, Conseillère

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTS :

Monsieur [O] [I]

de nationalité française

[Adresse 3]

[Localité 5]

Madame [U] née [R] [I]

de nationalité française

née le [Date naissance 2] 1964 à [Localité 7] (65)

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentés par Me Géraldine CORET, avocat au barreau de BAYONNE

Assistés de Me Julien PLOUTON (SELAS Julien PLOUTON), avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMES :

Maître [B] [L]

dont le siège social est [Adresse 1], es qualité de mandataire liquidateur de la SAS SOLUTION ECO ENERGIE, immatriculée au RCS de Bobigny sous le n° 521 970 756 dont le siège social est [Adresse 4], placée en liquidation judiciaire selon jugement du Tribunal de Commerce de Bobigny du 19 mai 2021 et publié au BODACC le 21 mai 2021 (Bodacc A n° 20210099)

assignée

S.A. COFIDIS

société à directoire et conseil de surveillance, immatriculée au RCS de Lille Métropole sous le n° 325 307 106, dont lesiège social est sis [Adresse 6], agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié audit siège, venant aux droits de la SA GROUPE SOFEMO suite à une fusion absorption ayant effet au 1er octobre 2015

Représentée par Me Sophie CREPIN de la SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de PAU

Assistée de la SELARL HAUSSMANN KAINIC HASCOËT HÉLAIN, avocat au barreau de l’ESSONNE

sur appel de la décision

en date du 01 JUIN 2021

rendue par le JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE MONT DE MARSAN

EXPOSE DES FAITS ET PROCEDURE:

Monsieur et Madame [I] ont fait l’acquisition , au début de l’année 2014 d’une installation photovoltaïque comprenant 12 modules de 250 Wc, d’une puissance totale de 3Kwc, acquise auprès de la société C²NE. L’installation s’est faite le 9 avril 2014.

Le 28 avril 2014, à la suite d’un nouveau démarchage d’un commercial de la même société, Monsieur [O] [I] a commandé à la société C²NE, CENTRE NATIONAL DES NOUVELLES ENERGIES ECO-ENERGIE, la fourniture, la livraison et la pose d’une installation solaire photovoltaïque complémentaire de 2000 Wc et d’une isolation thermique, au prix global convenu de 20 800 euros.

Le 22 mai 2014, Monsieur [O] [I] a signé un nouveau bon de commande avec la SARL SOLUTION ECO ENERGIE, personne morale distincte de la précédente, mais portant sur le même matériel.

Le même jour, Monsieur et Madame [O] [I] ont souscrit auprès de la société SOFEMO FINANCEMENT, filiale de la SA GROUPE SOFEMO, aux droits de laquelle vient désormais la SA COFIDIS, un crédit d’un montant de 20 800 euros remboursable, après un différé de 11 mois, en 180 mensualités de 182,89 euros incluant le coût de l’assurance et les intérêts au taux annuel effectif global de 5,97%, destiné à ‘nancer cette nouvelle acquisition. Le vendeur, intermédiaire de crédit ayant proposé ce contrat de financement, est la SARL SOLUTION ECO ENERGIE.

Le 2 juin 2014, le consuel a attesté la conformité de l’installation aux prescriptions de sécurité électrique en vigueur.

Le 3 juin 2014, la SAS SOLUTION ECO ENERGIE a adressé a Monsieur [O] [I] la facture n° F14060 d’un montant de 20 800 euros.

Le 6 juin 2014, Monsieur [O] [I] a attesté avoir obtenu et accepté sans réserve la livraison des matériels commandés, constaté expressément que tous les travaux et prestations qui devaient être effectués ont été pleinement réalisés et demandé au préteur de débloquer les fonds entre les mains de la SAS SOLUTION ECO ENERGIE.

Le 16 juin 2014, la société SOFEMO FINANCEMENT a con’rmé à Monsieur [O] [I] l’acceptation de sa demande de flnancement.

Le 16 février 2017, la SA COFIDIS a adressé à Monsieur [O] [I] et Madame [U] [I] née [R] le tableau d’amortissement du crédit souscrit le 22 mai 2014, prévoyant une première échéance au 15 mars 2017.

Le 7 novembre 2018, la société JP SUN a transmis à Monsieur [O] [I] l’étude technique de l’installation photovoltaïque qu’il lui avait commandée et qui constate notamment l’absence de raccordement au réseau public ERDF et, par voie de conséquence, l’absence de contrat de rachat d’électricité.

Le 21 janvier 2019, le tribunal de commerce de Nanterre a placé la SAS C2NE en liquidation judiciaire et désigné la SELARL Legrand François en qualité de liquidateur judiciaire.

Le 7 février 2019, Monsieur [O] [I] et Madame [U] [I] née [R] ont déclaré leur créance, d’un montant principal de 39 285 euros, au liquidateur.

Par actes d’huissier de justice séparés du 18 avril 2019, Monsieur [O] [I] a fait assigner la SA COFIDIS, venant aux droits de la société SOFEMO FINANCEMENT, et la SAS SOLUTION ECO ENERGIE devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Mont-de-Marsan, pour entendre :

AVANT DIRE DROIT

Ordonner la suspension de leur obligation de paiement à l’égard de la SA COFIDIS venant aux droits de SOFEMO, jusqu’ à la date de règlement du litige au fond, étant précisé que les échéances ne porteront pas intérêts,

AU FOND, A TITRE PRINCIPAL

Constater que la cession de contrat entre la société C2NE et la SAS SOLUTION ECO ENERGIE ne leur a pas été notifiée et qu’ils ne l’ont pas acceptée,

Prononcer la nullité du contrat SOLUTION ECO ENERGIE pour manquements aux dispositions relatives au démarchage, sans frais supplémentaires pour eux, et/ou pour vice du consentement,

Prononcer la nullité du contrat SOFEMO sans frais supplémentaires pour eux,

Dire et juger que la SA COFIDIS venant aux droits de SOFEMO ne pourra prétendre à quelque restitution des fonds prêtés que ce soit, en conséquence de la faute commise à leur encontre,

Condamner la SA COFIDIS venant aux droits de SOFEMO à leur rembourser les échéances du prêt qu’ils ont d’ores et déjà acquittées (4 572,25 euros, somme à parfaire),

Condamner la SAS SOLUTION ECO ENERGIE à leur verser une somme de 5 000 euros au titre des frais de remise en état de l’installation,

Condamner solidairement la SA COFIDIS et la SAS SOLUTION ECO ENERGIE à leur verser une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir,

A TITRE SUBSIDIAIRE

Prononcer la résolution du contrat SOLUTION ECO ENERGIE pour inexécution contractuelle,

Prononcer la résolution judiciaire de plein droit du contrat de prêt souscrit auprès de la société SOFEMO,

Dire et juger que la SA COFIDIS venant aux droits de la société SOFEMO ne pourra prétendre à quelque restitution des fonds prêtés que ce soit, en conséquence de la faute commise à leur encontre,

Condamner la SA COFIDIS venant aux droits de SOFEMO à leur rembourser les échéances du prêt qu’ils ont d’ores et déjà acquittées (4 572,25 euros, somme a parfaire),

Condamner la SAS SOLUTION ECO ENERGIE à leur verser une somme de 5 000 euros au titre des frais de remise en état de l’installation,

Condamner solidairement la SA COFIDIS et la SAS SOLUTION ECO ENERGIE à leur verser une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Son épouse est intervenue à l’instance.

La SAS SOLUTION ECO ENERGIE a conclu au débouté et à la condamnation de [O] [I] à lui payer une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

La société COFIDIS, venant aux droits de la SA GROUPE SOFEMO, a conclu à titre principal au débouté des époux [I] et à leur condamnation à poursuivre l’exécution pleine et entière du contrat de crédit, conformément aux stipulations contractuelles telles que retracées dans le tableau d’amortissement,

A TITRE SUBSIDIAIRE, elle a demandé, en cas d’annulation ou de résolution du contrat principal leur condamnation solidaire à lui rembourser le capital emprunté d’un montant de 20 800 euros, au taux légal, à compter du jugement à intervenir, déduction à faire des échéances payées,

A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE, la condamnation de la SAS SOLUTION ECO ENERGIE à lui payer la somme de 32 920,20 euros au taux légal à compter du jugement à intervenir,

EN TOUT ETAT DE CAUSE condamner la SAS SOLUTION ECO ENERGIE à la relever et garantir de toute condamnation qui pourrait être mise à sa charge au profit de Monsieur [O] [I] et Madame [U] [I] née [R],

outre la condamnation solidaire de la SAS SOLUTION ECO ENERGIE, Monsieur [O] [I] et Madame [U] [I] née [R] à lui payer une somme de 1 200 euros fondée sur l’article 700 du Code de procédure civile,

Ordonner l’exécution provisoire de ses seules demandes,

Condamner solidairement la SAS SOLUTION ECO ENERGIE, Monsieur [O] [I] et Madame [U] [I] née [R] aux entiers dépens.

Par jugement du 1er juin 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Mont de Marsan a:

Déclaré Madame [U] [I] née [R] recevable en son intervention volontaire.

Ecarté des débats l’étude technique de l’installation photovoltaïque établie le 7 novembre 2018 par Monsieur [N] [W], gérant de la société JP SUN.

Débouté Monsieur [O] [I] et Madame [U] [I] née [R] de toutes leurs demandes.

Condamné solidairement Monsieur [O] [I] et Madame [U] [I] née [R] à payer à la SA COFIDIS, se trouvant aux droits de la SA GROUPE SOFEMO, une somme de MILLE DEUX CENTS EUROS (1 200 euros) fondée sur l’article 700 du Code de procédure civile.

Condamné solidairement Monsieur [O] [I] et Madame [U] [I] née [R] à payer à la SAS SOLUTION ECO ENERGIE, sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, une somme de MILLE DEUX CENTS EUROS (1 200 euros).

Dit n’y avoir lieu a exécution provisoire.

Condamné solidairement Monsieur [O] [I] et Madame [U] [I] née [R] aux entiers dépens de l’instance et de ses suites.

Par déclaration en date du 13 septembre 2021, les époux [I] ont relevé appel de cette décision.

La SAS SOLUTION ECO ENERGIE a été placée en liquidation judiciaire, suivant jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 19 mai 2021 publié au Bodacc le 21 mai 2021.

Par assignation en intervention forcée du 8 novembre 2021, remise à domicile, les époux [I] ont fait signifier à Maître [B] [L], mandataire liquidateur de la SAS SOLUTION ECO ENERGIE, la déclaration d’appel et le jugement,

Cet appel en cause a été joint à l’instance principal, par ordonnance du magistrat de la mise en état du 16 novembre 2021.

Par acte d’huissier remis à domicile le 12 avril 2022, la société COFIDIS a fait signifier ses conclusions à Maître [L], ès qualités.

Par acte d’huissier du 16 janvier 2023, remis à domicile, les époux [I] ont fait signifier leurs conclusions à Maître [L], ès qualités.

Maître [L], en qualité de liquidateur judiciaire de la société SOLUTION ECO ENERGIE, n’a pas constitué avocat

L’ordonnance de clôture est du 11 janvier 2023, l’affaire étant fixée au 27 février 2023.

Au-delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l’espèce des dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, la cour entend se référer pour l’exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessous.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Vu les conclusions notifiées le 10 janvier 2023 par les époux [I] , tendant à :

Vu les articles 46 et 48 du Code de procédure civile ;

Vu les articles 1109, 1116, 1117, 1134 et 1184 du Code civil ;

Vu les articles L. 141-5, L 121-17 et suivants, L. 311-32 et suivants du Code de la Consommation ;

Vu les dispositions conventionnelles desdits contrats ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE

INFIRMER le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a déclaré l’intervention volontaire de Madame [I] recevable

CONSTATER que la procédure à l’encontre de la société SOLUTION ECO ENERGIE est régularisée par l’assignation en intervention forcée de Maître [L], mandataire liquidateur de ladite société, et lordonnance de jonction du 16 novembre 2021

AU FOND, A TITRE PRINCIPAL :

PRONONCER la nullité du contrat SOLUTION ECO ENERGIE pour manquements

aux dispositions relatives au démarchage, sans frais supplémentaires pour MONSIEUR ET MADAME [I] et/ou pour dol ;

PRONONCER la nullité du contrat SOFEMO de plein droit sans frais supplémentaires pour MONSIEUR ET MADAME [I] ;

DIRE que la société COFIDIS venant aux droits de SOFEMO ne pourra prétendre à quelque restitution des fonds prêtés que ce soit en conséquence de la faute commise à l’encontre des requérants ;

CONDAMNER la société COFIDIS venant aux droits de la société SOFEMO à rembourser les échéances du prêt d’ores et déjà acquittées par les requérants incluant les échéances versées avant le remboursement anticipé du prêt et les sommes versées par la BNP PARIBAS en remboursement du prêt par anticipation ;

CONDAMNER la société COFIDIS venant aux droits de la société SOFEMO à verser aux requérants la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du CPC

A TITRE SUBSIDIAIRE :

PRONONCER la résolution judiciaire du contrat SOLUTION ECO ENERGIE pour inexécution contractuelle ;

PRONONCER la résolution judiciaire de plein droit du contrat de prêt souscrit auprès de la société SOFEMO ;

DIRE que la société COFIDIS venant aux droits de la société SOFEMO ne pourra prétendre à quelque restitution des fonds prêtés que ce soit en conséquence de la faute commise à l’encontre des requérants ;

CONDAMNER la société COFIDIS venant aux droits de la société SOFEMO à rembourser les échéances du prêt d’ores et déjà acquittées par les requérants (incluant les échéances versées avant le remboursement anticipé du prêt et les sommes versées par la BNP PARIBAS en remboursement du prêt par anticipation) ;

CONDAMNER la société COFIDIS venant aux droits de la société SOFEMO à verser aux requérants la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du CPC ;

*

Vu les conclusions notifiées par la société COFIDIS le 12 janvier 2023, tendant à :

Vu les conclusions et pièces notifiées le 10/01/2023 par Monsieur et Madame [I]

Ordonner le rabat de l’ordonnance de clôture rendue le 11/01/2023,

Déclarer recevables les conclusions en réponse notifiées le 12/01/2023 par la SA COFIDIS

Déclarer Monsieur [O] [I] et Madame [U] [I] née [R] prescrits, irrecevables et subsidiairement mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions et les en débouter,

Déclarer la SA COFIDIS recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

Confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a débouté Monsieur [O] [I] et Madame [U] [I] née [R] de l’intégralité de leurs demandes,

A titre subsidiaire, si la Cour venait à prononcer la nullité ou la résolution judiciaire des conventions :

Condamner solidairement Monsieur [O] [I] et Madame [U] [I] née [R] à rembourser à la SA COFIDIS le capital emprunté d’un montant de 20 800 € au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir, déduction à faire des échéances payées, en l’absence de faute de COFIDIS et en toute hypothèse en l’absence de préjudice et de lien de causalité,

En tout état de cause :

Condamner solidairement Monsieur [O] [I] et Madame [U] [I] née [R] à payer à la SA COFIDIS une indemnité d’un montant de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Condamner solidairement Monsieur [O] [I] et Madame [U] [I] née [R] aux entiers dépens.

MOTIVATION :

Maître [L], prise en sa qualité de liquidateur de la société SOLUTION ECO ENERGIE, n’a pas constitué avocat et il n’est pas établi qu’elle ait été touchée à personne par les différents actes de signification qui lui ont été délivrés. L’arrêt sera en conséquence rendu par défaut.

Sur le rabat de l’ordonnance de clôture :

Par conclusions du 12 janvier 2023, la société COFIDIS a demandé le rabat de l’ordonnance de clôture en l’état des pièces communiquées et conclusions notifiées par les appelants la veille de la clôture.

Par message RPVA, le conseil des époux [I] a déclaré ne pas s’opposer à cette demande et a indiqué ne pas solliciter un renvoi de l’affaire pour réouverture des débats.

Les parties en étant d’accord, il convient de révoquer l’ordonnance de clôture et de fixer une nouvelle clôture à la date de l’audience, sans renvoi de l’affaire.

Sur la nullité du contrat de vente :

A titre liminaire, il convient de rejeter la fin de non-recevoir soulevée par la société COFIDIS, tirée de la nouveauté de la demande d’annulation du bon de commande passé avec la société SOLUTION ECO ENERGIE, puisque qu’en réalité les époux [I] demandent, comme en première instance, la nullité du contrat SOLUTION ECO ENERGIE, cette demande s’appuyant cette fois sur l’analyse du bon de commande produit par le prêteur et non plus sur l’analyse du bon de commande de la société C²NE en leur possession, document qui n’est pas le support du crédit affecté accordé par la société SOFEMO. En effet, en première instance, les époux [I] tiraient argument de l’existence de ces deux bons de commande, concernant le même matériel, pour soutenir que le contrat passé avec la société C²NE avait été cédé à la société SOLUTION ECO ENERGIE sans leur accord, au moyen de l’édition d’un bon de commande qu’ils n’auraient nullement signés.

Pour autant, que ce soit en première instance ou en appel, les époux [I] demandent bien l’annulation du contrat exécuté par la société SOLUTION ECO ENERGIE et l’annulation, par voie de conséquence, du contrat de crédit affecté, avec déchéance du prêteur de sa créance de restitution, pour faute.

Cette première fin de non-recevoir est rejeté.

Il convient également, sur la base du même raisonnement, de rejeter la fin de non- recevoir soulevée par la société COFIDIS, tirée de la prescription. Les demandes n’étant pas nouvelles, elles ont été portées devant le premier juge avant l’expiration du délai de prescription de l’action.

A hauteur d’appel, les époux [I] soutiennent, sans en tirer aucune conséquence juridique en terme de prétention, que le contrat du 22 mai 2014 passé avec la société SOLUTION ECO ENERGIE serait un faux, au motif que la signature apposée en bas de page, au nom du client, ne serait pas celle de Monsieur [O] [I]. Toutefois , cette signature correspond à celle qui est apposée sur l’exemplaire original du contrat de crédit affecté en possession du prêteur, document daté du même jour et signé des deux emprunteurs.

Or, l’existence de ce contrat de crédit, qui mentionne comme vendeur ou intermédiaire de crédit la société SOLUTION ECO ENERGIE, n’est pas contesté par les époux [I] qui en ont accepté le bénéfice.

Dès lors, il existe bien un bloc contractuel composé d’un contrat de vente passé entre Monsieur [I] et la société SOLUTION ECO ENERGIE et d’un contrat de crédit affecté, daté du même jour, passé entre la société SOFEMO, d’une part, Monsieur [I] et son épouse , d’autre part.

La thèse d’une cession de contrat irrégulière soutenue par les appelants ne repose ainsi sur aucun élément factuel probant.

Les époux [I] poursuivent plus sérieusement la nullité du contrat passé avec la société SOLUTION ECO ENERGIE, pour manquement aux dispositions légales d’ordre public applicables au contrat conclu hors établissement, relatives à son formalisme et à l’information du consommateur.

Les époux [I] fondent leur action notamment sur les dispositions des articles L. 121-18-1 , L. 121-17, L. 121-16, L. 111-1du code de la consommation, dans sa version issue de la loi dite Hamon n° 2014-344 du 17 mars 2014, relatives au contrat conclu hors établissement.

Toutefois, à la date du 22 mai 2014, le bon de commande signé avec la société SOLUTION ECO ENERGIE était soumis aux dispositions du code de la consommation, dans sa version antérieure à la loi Hamon, relatives au contrat de vente ou de prestation de service conclu lors d’un démarchage à domicile, les textes invoqués par les appelants étant applicables à compter du 14 juin 2014.

Le contrat de vente conclu à l’issue d’un démarchage à domicile, comme au cas d’espèce, était ainsi soumis aux dispositions des anciens articles L. 111-1, L. 121-21 et L. 121-23 du Code de la consommation.

Selon l’article L. 111-1, dans sa version alors applicable,

« I – tout professionnel vendeur de biens doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien.

II. – Le fabricant ou l’importateur de biens meubles doit informer le vendeur professionnel de la période pendant laquelle les pièces indispensables à l’utilisation des biens seront disponibles sur le marché. Cette information est obligatoirement délivrée au consommateur par le vendeur, avant la conclusion du contrat.

III. – En cas de litige portant sur l’application des I et II, il appartient au vendeur de prouver qu’il a exécuté ses obligations ».

Selon l’article L. 121-23 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable à la date du 22 mai 2014,

«Les opérations visées à l’article L. 121-21(vente, location, location-vente, location avec option d’achat, après démarchage) doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

1° Noms du fournisseur et du démarcheur ;

2° Adresse du fournisseur ;

3° Adresse du lieu de conclusion du contrat ;

4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;

5° Conditions d’exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d’exécution de la prestation de services ;

6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l’intérêt et le taux effectif global de l’intérêt déterminé dans les conditions prévues à l’article L. 313-1 ;

7° Faculté de renonciation prévue à l’article L. 121-25, ainsi que les conditions d’exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26.

Selon les appelants, le bon de commande, dont ils affirment qu’il ne leur a pas été remis, ne respecte pas le formalisme légal précité.

La société COFIDIS conteste ce grief et soutient qu’il appartient aux époux [I] de produire l’original du bon de commande, ce qui permettrait d’en apprécier la conformité. Elle fait valoir également qu’en tout état de cause, en poursuivant volontairement l’exécution du contrat principal, M [I] a confirmé les éventuelles irrégularités alléguées dont il ne peut plus se prévaloir en application de l’article 1338 du code civil, dans sa version antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

Toutefois, la société COFIDIS produit elle-même une copie du bon de commande, auquel est affecté le crédit qu’elle a consenti, qui ne comporte ni le délai précis d’exécution de l’installation et des prestations accessoires comprises dans le contrat de vente, ni une information du consommateur sur les modalités d’exercice du droit de rétractation, ni la reproduction intégrale des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 du code de la consommation. En outre, ce document ne comporte aucun formulaire détachable de rétractation, ni la preuve que le consommateur a reçu un exemplaire du contrat.

Sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres griefs, ceux tirés de la violation des dispositions légales relatives au droit de rétractation, à l’information du consommateur, à la remise d’un exemplaire du contrat et au délai d’exécution de l’ensemble des prestations prévues au contrat de vente justifient son annulation.

Et, en l’absence de mention sur le bon de commande des textes qui fixent son formalisme, il ne peut être soutenu que le consommateur, par l’exécution du contrat de vente et du contrat de crédit, ou encore par la signature de l’attestation de livraison demandant au prêteur de débloquer les fonds empruntés, entre les mains du vendeur, a entendu couvrir, en connaissance de cause, les nullités du bon de commande et renoncer à les invoquer.

En conséquence de la violation des dispositions légales précitées, les époux [I] sont fondés à obtenir la nullité du contrat de vente en sa totalité. Le jugement sera ainsi infirmé

Sur la nullité du contrat de crédit affecté :

En application de l’article L. 311-32 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au contrat, le contrat de crédit affecté souscrit par les époux [I] est annulé de plein droit en conséquence de l’annulation du contrat principal.

Le jugement sera donc infirmé sur l’annulation du contrat de crédit affecté.

Sur la responsabilité du prêteur :

En droit, il résulte des articles L. 311-31 et L. 311-32 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 que la résolution ou l’annulation d’un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu’il finance, emporte pour l’emprunteur l’obligation de restituer au prêteur le capital prêté, mais que le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.

En l’espèce, la société SOFEMO, aux droits de laquelle vient la société COFIDIS, a commis une faute contractuelle en libérant les fonds sans avoir relevé l’irrégularité, de surcroît flagrante, du bon de commande qui ne comportait ni information sur les modalités du délai de rétractation, ni formulaire de rétractation ni information correcte du consommateur. Au demeurant, le bon de commande du 22 mai 2014 comporte une contradiction flagrante, puisqu’il est indiqué que le raccordement ERDF n’est pas inclus dans les prestations exécutées par le vendeur, alors que cette prestation est comptée pour 1500,00 euros sur le bon de commande litigieux, justifie le montant du crédit demandé et a bien été facturée à l’acheteur.

Au vu de ces irrégularités et de cette contradiction, il appartenait ainsi à la société SOFEMO de s’assurer que le consommateur, dûment informé de ses droits, entendait renoncer à exercer son droit de rétractation et demandait le déblocage des fonds avant même tout raccordement de l’installation. Or, la société COFIDIS ne justifie pas que le prêteur se soit assuré de cette volonté, après avoir attiré l’attention des époux [I] sur les irrégularités et contradiction du bon de commande.

En manquant à ses obligations contractuelles, la banque a laissé les époux [I] s’engager dans une opération contractuelle complexe adossée à un prêt important sans bénéficier des dispositions protectrices du droit de la consommation, mettant à leur charge l’obligation de rembourser un prêt affecté à un contrat, conclu dans des conditions irrégulières, dont ils ont pu légitiment refuser de poursuivre l’exécution.

Et les époux [I] subissent bien un préjudice en lien avec la faute du prêteur, puisqu’ils n’ont pu exercer leur droit de rétractation et ne doivent pas, dans ces conditions, supporter les conséquences financières des fautes de la banque.

Il convient d’ajouter que selon l’avis technique de Monsieur [W] , de l’entreprise JP SUN, régulièrement versé aux débats, corroboré par le constat d’huissier de Maître Domenge -Junca en date du 16 novembre 2022, l’installation n’est pas raccordée au réseau ERDF.

La société COFIDIS sera donc déboutée de sa demande de restitution du capital prêté aux époux [I], à hauteur de 20800,00 euros, et sera condamnée à leur rembourser les échéances du prêt acquittées par les demandeurs et les sommes versées par la BNP PARIBAS en remboursement du prêt par anticipation.

Sur les demandes annexes :

Au regard de l’issue du litige, la société COFIDIS, partie succombante, est condamnée aux dépens de première instance et d’appel.

Compte tenu des circonstances de la cause et de la position respective des parties, l’équité justifie de condamner la société COFIDIS à payer à Monsieur et Madame [I] une somme de 2500,00 euros au titre des frais non compris dans les dépens de l’entière procédure.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, par défaut et en dernier ressort,

Ordonne le rabat de l’ordonnance de clôture et fixe la clôture à la date de l’audience, sans renvoi de l’affaire,

Infirme le jugement, sauf en ce qu’il a déclaré recevable l’intervention volontaire de Madame [I],

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Déclare recevables les demandes des époux [I],

Prononce la nullité du contrat de vente conclu entre Monsieur [O] [I] et la société SOLUTION ECO ENERGIE pour manquements aux dispositions relatives au démarchage, prescrites à peine de nullité,

Prononce la nullité subséquente du contrat de crédit affecté conclu entre les époux [I] et la société SOFEMO,

Condamne la société COFIDIS, venant aux droits de la société SOFEMO, à rembourser aux époux [I] le montant des échéances du prêt qu’ils ont acquittées personnellement et le montant des sommes versées à COFIDIS, par la BNP PARIBAS, en remboursement du prêt SOFEMO par anticipation,

Déboute la société COFIDIS de l’ensemble de ses prétentions,

La condamne aux dépens de première instance et d’appel,

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société COFIDIS à payer aux époux [I] une somme de 2500,00 euros au titre des frais non compris dans les dépens de l’entière procédure.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Marc MAGNON, coneiller, suite à l’empêchement de Monsieur Philippe DARRACQ, conseiller faisant fonction de Président et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l’article 456 du Code de Procédure Civile.

La Greffière, Le Président,

 


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