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TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
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Chambre 04
N° RG 23/00077 – N° Portalis DBZS-W-B7G-WZJN
JUGEMENT DU 18 JANVIER 2024
DEMANDEURS :
Mme [R] [O]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Marine CRAYNEST, avocat au barreau de LILLE
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 2021/023585 du 22/12/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de LILLE)
M. [M] [D]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par Me Marine CRAYNEST, avocat au barreau de LILLE
DEFENDEUR :
La S.A.S. GROUPE LABEL ENVIRONNEMENT, immatriculée au RCS de PARIS sous le n°829067826, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Charlotte DESMON, avocat postulant au barreau de LILLE, Me Paul ZEITOUN, avocat plaidant au barreau de PARIS
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Président: Ghislaine CAVAILLES, Vice-Présidente
Assesseur: Leslie JODEAU, Vice-présidente
Assesseur: Sophie DUGOUJON, Juge
GREFFIER: Yacine BAHEDDI, Greffier
DEBATS :
Vu l’ordonnance de clôture en date du 22 Février 2023.
A l’audience publique du 09 Novembre 2023, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré,les avocats ont été avisés que le jugement serait rendu le 18 Janvier 2024.
Sophie DUGOUJON, Juge rapporteur qui a entendu la plaidoirie en a rendu compte au tribunal dans son délibéré
JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 18 Janvier 2024 par Ghislaine CAVAILLES, Président, assistée de Yacine BAHEDDI, greffier.
EXPOSE DU LITIGE
Suivant bon de commande n°2519 signé le 18 novembre 2020 au nom de ”[M] [D] [O]” et signé par Madame [R] [O], a été souscrit auprès de la S.A.S. GROUPE LABEL ENVIRONNEMENT (ci-après ”la société G.L.E.) un contrat de fourniture, installation et mise en service d’une pompe à chaleur air/eau monophasée de marque Atlantic, avec délégation des démarches administratives à ladite société, le tout moyennant le prix de 17.900 euros T.T.C.
Par acte sous seing privé daté du 20 novembre 2020, Madame [R] [O] et Monsieur [M] [D] ont accepté auprès de la S.A. DOMOFINANCE une offre de contrat de crédit affecté à l’acquisition de cette pompe à chaleur portant sur une somme empruntée de 17.900 euros.
Une attestation de fin de travaux a, ensuite, été émise, datée du 25 novembre 2020 et signée.
Le 1er décembre 2020, Monsieur [D] et Madame [O] ont fait usage de leur droit de rétractation.
Suivant lettre recommandée avec avis de réception datée du 14 décembre 2020, Madame [O] a, par l’intermédiaire de son conseil, mis en demeure la société G.L.E. d’avoir à récupérer, à ses frais, la pompe à chaleur sous huitaine.
Suivant exploit délivré le 29 décembre 2021, Madame [R] [O] et Monsieur [M] [D] ont fait assigner la société GROUPE LABEL ENVIRONNEMENT devant le tribunal judiciaire de Lille aux fins principalement d’annulation ou résolution de la vente et de dommages et intérêts.
Après une mesure de radiation pour défaut de diligence des parties, le dossier a finalement été réinscrit au rôle des affaires en cours. La clôture des débats est intervenue le 22 février 2023, par ordonnance du même jour, et l’affaire a été fixée à l’audience du 09 novembre 2023.
* * *
Aux termes de leurs dernières écritures notifiées par voie électronique le 19 février 2023, Madame [O] et Monsieur [D] demandent au tribunal, au visa des articles L.221-18 et suivants, L.312-47 et suivants du Code de la consommation, 1224 et suivants et 1240 et suivants du Code civil, de :
– Faire droit à l’ensemble de leurs demandes,
– Débouter la SAS GROUPE LABEL ENVIRONNEMENT de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
A titre principal :
– Constater la nullité du contrat de vente pour vice de forme et vice du consentement ainsi que la nullité du contrat de crédit DOMOFINANCE affecté d’un montant de 17.900€
– Ordonner à la SAS GROUPE LABEL ENVIRONNEMENT de venir récupérer à ses frais la pompe à chaleur au domicile de Madame [O] et Monsieur [D] sous huitaine, et ce sous astreinte de 200 € par jour de retard,
A titre subsidiaire :
– Constater la résolution du contrat de vente et à défaut prononcer la résolution judiciaire du contrat de vente,
– Ordonner à la SAS GROUPE LABEL ENVIRONNEMENT de venir récupérer à ses frais la pompe à chaleur au domicile de Madame [O] et Monsieur [D] sous huitaine, et ce sous astreinte de 200 € par jour de retard,
En tout état de cause : Condamner la SAS GROUPE LABEL ENVIRONNEMENT à leur verser :
– la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à ses obligations d’information et de conseil,
– la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour trouble de jouissance subi ,
– la somme de 3.000 € au titre de l’article 700°2 du code de procédure civile, outre sa condamnation aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées par voie électronique le 07 février 2023, la société G.L.E. demande au tribunal, au visa des articles 1137 et 1124 du Code civil et 9 du Code de procédure civile, de :
– la déclarer recevable et bien fondée en toutes ses demandes ;
– rejeter les demandes, fins et conclusions des consorts [D]-[O] prises à son encontre ;
A titre principal, sur la demande de nullité du contrat conclu entre elle et les consorts [D]-[O] le 18 novembre 2020 aux motifs de prétendus manœuvres dolosive : débouter les consorts [D]-[O] de leur demande tendant à faire prononcer l’annulation du contrat conclu auprès de sa société sur le fondement d’un dol et d’une erreur ;
A titre subsidiaire :
– sur la demande de résolution du contrat conclu entre elle et les consorts [D]-[O] le 18 novembre 2020 aux motifs de prétendus manœuvres dolosive : débouter les consorts [D]-[O] de leur demande tendant à faire prononcer l’annulation du contrat conclu auprès de sa société sur le fondement d’un manquement contractuel ;
– sur les demandes indemnitaires formulées par les consorts [D]-[O] à son encontre : débouter les consorts [D]-[O] de leurs demandes indemnitaires ;
En tout état de cause, sur l’action abusive des consorts [D]-[O] :
– condamner solidairement les consorts [D]-[O] à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du caractère parfaitement abusif de l’action initiée par ces derniers ;
– condamner solidairement les consorts [D]-[O] à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– condamner in solidum les consorts [D]-[O] aux entiers dépens.
Pour l’exposé des moyens des parties, il sera fait application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile et procédé au visa des dernières conclusions précitées.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, il y a lieu de dire qu’une demande tendant à “juger” ne constitue pas nécessairement une prétention au sens juridique du terme devant être tranchée par le tribunal. Ces demandes n’ont, par conséquent, pas été retenues en tant que telles mais seront, le cas échéant, étudiées en leur qualité de moyens des parties.
Sur la validité du contrat
Conformément à l’article 1131 du même code, les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat.
Selon l’article 1130 du même code, l’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s’apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.
A cet égard, l’article 1137 définit le dol comme « le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des mensonges » voire comme « la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie […]. ».
Le dol suppose donc la réunion d’un élément matériel qui peut être une manœuvre frauduleuse, un mensonge ou une simple réticence portant sur un élément déterminant du consentement de l’acquéreur, ainsi qu’un élément intentionnel, la volonté de tromper son cocontractant.
En l’espèce, les consorts [O]-[D] font, en premier lieu, valoir que le contrat souscrit le 18 novembre 2020 auprès de la société G.L.E. est affecté d’un vice de forme sanctionné par la nullité de l’acte, dès lors que le bon de commande a été établi au nom de ”[M] [D] [O]”, mais a été signé uniquement par Madame [O].
Ils considèrent, en outre, que leur consentement a été vicié, soutenant que la société défenderesse a insisté auprès d’eux afin de procéder à la pose de l’installation dès le 25 novembre 2020 et ce, alors que le bon de commande n’avait été accepté que le 18 novembre précédent et que le délai de rétractation de 14 jours n’était pas expiré, de sorte qu’ils ont été privé de leur délai de réflexion. Ils estiment que ce comportement de la société G.L.E. caractérise des manœuvres dolosives et frauduleuses ayant eu pour but de forcer la vente.
Sur le premier moyen soulevé, le tribunal relève qu’à supposer la difficulté soulevée constitutive d’un ”vice de forme”, il n’est pas rapporté la preuve d’un quelconque grief en ayant résulté pour les demandeurs, alors qu’il ressort des éléments versés aux débats et des écritures en demande que tant Monsieur [D] que Madame [O] entendaient souscrire ce contrat, le contrat de crédit affecté ayant au demeurant été souscrit par eux deux (pièce n°4 demandeurs), l’attestation de fin de travaux ayant été signée par Monsieur [D] (pièce n°15 défenderesse) et l’ensemble des demandes formulées dans le cadre de la présente instance étant au profit de l’un comme l’autre des demandeurs.
La demande en nullité du contrat ne saurait, dès lors, aboutir de ce chef.
Quant à l’existence d’un dol, il convient de souligner que, quand bien même il serait démontré que l’installation de la pompe à chaleur avant l’extinction du délai de rétractation a été forcée par la société venderesse, ce seul fait n’est pas de nature à caractériser une manœuvre frauduleuse destinée à tromper le consentement de Madame [O] et de Monsieur [D], lequel avait au demeurant déjà été donné par la signature du bon de commande, ce d’autant qu’une telle livraison/ installation ne privait pas, en elle-même, juridiquement les clients de leur possibilité de se rétracter dans le délai légal, ainsi qu’il sera développé infra.
La demande principale en annulation du contrat litigieux devra, en conséquence, rejetée.
Sur la résolution du contrat
Madame [O] et Monsieur [D] entendent voir constater la résolution du contrat de vente du fait de leur rétractation et, à défaut, voir prononcer cette résolution du fait de la mauvaise exécution du contrat et des défauts de conformité affectant l’installation de la pompe à chaleur.
Sur l’existence d’une rétractation régulière
Aux termes de l’article 1122 Code civil, la loi ou le contrat peuvent prévoir un délai de réflexion, qui est le délai avant l’expiration duquel le destinataire de l’offre ne peut manifester son acceptation ou un délai de rétractation, qui est le délai avant l’expiration duquel son bénéficiaire peut rétracter son consentement.
Ainsi, dans le cadre particulier des contrats portant sur la fourniture d’eau, de gaz ou d’électricité lorsqu’ils ne sont pas conditionnés dans un volume délimité ou en quantité déterminée ou de chauffage urbain conclus à distance et hors établissement, le législateur a t-il prévu, aux termes de l’article L.221-18 du Code de la consommation, que :
« Le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d’autres coûts que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25.
[…]
Pour les contrats conclus hors établissement, le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.
[…] »
L’article L.221-25 du même code, dans sa version antérieure à l’ordonnance du 22 décembre 2021 applicable au litige, dispose néanmoins que :
« Si le consommateur souhaite que l’exécution d’une prestation de services ou d’un contrat mentionné au premier alinéa de l’article L. 221-4 commence avant la fin du délai de rétractation mentionné à l’article L. 221-18, le professionnel recueille sa demande expresse par tout moyen pour les contrats conclus à distance et sur papier ou sur support durable pour les contrats conclus hors établissement.
Le consommateur qui a exercé son droit de rétractation d’un contrat de prestation de services ou d’un contrat mentionné au premier alinéa de l’article L. 221-4 dont l’exécution a commencé, à sa demande expresse, avant la fin du délai de rétractation verse au professionnel un montant correspondant au service fourni jusqu’à la communication de sa décision de se rétracter ; ce montant est proportionné au prix total de la prestation convenu dans le contrat. Si le prix total est excessif, le montant approprié est calculé sur la base de la valeur marchande de ce qui a été fourni.
Aucune somme n’est due par le consommateur ayant exercé son droit de rétractation si sa demande expresse n’a pas été recueillie en application du premier alinéa ou si le professionnel n’a pas respecté l’obligation d’information prévue au 4° de l’article L. 221-5. ».
En pareille hypothèse, l’article L.221-23 prévoit que le consommateur renvoie ou restitue les biens au professionnel ou à une personne désignée par ce dernier, sans retard excessif et, au plus tard, dans les quatorze jours suivant la communication de sa décision de se rétracter conformément à l’article L. 221-21, à moins que le professionnel ne propose de récupérer lui-même ces biens.
S’agissant des contrats conclus hors établissement, lorsque les biens sont livrés au domicile du consommateur au moment de la conclusion du contrat, le professionnel récupère les biens à ses frais s’ils ne peuvent pas être renvoyés normalement par voie postale en raison de leur nature.
La responsabilité du consommateur ne peut être engagée qu’en cas de dépréciation des biens résultant de manipulations autres que celles nécessaires pour établir la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement de ces biens, sous réserve que le professionnel ait informé le consommateur de son droit de rétractation, conformément au 7° de l’article L. 221-5.
En l’espèce, le contrat régularisé le 18 novembre 2020 entre les parties, pour lesquelles il n’est ni contesté ni contestable qu’elles sont pour les uns des consommateurs et l’autre un professionnel, est un contrat d’achat, de livraison, d’installation et de mise en service d’une pompe à chaleur, soit d’un contrat de fourniture de chauffage urbain conclu hors établissement, ce qui n’est pas expressément contesté.
Les dispositions des articles L.221-18 et suivants du Code de la consommation lui sont, dès lors, applicables.
Sur ce, ledit contrat ayant été conclu le 18 novembre 2020, le délai de rétractation de quatorze jours expirait le 02 décembre 2020 à 24h00, en application des dispositions de l’article L.221-19 du Code de la consommation.
Or, il n’est pas contesté que les consorts [O]-[D] ont formulé une demande de rétractation le 1er décembre 2020, soit avant l’expiration du délai (conclusions en défense, page 20).
La société G.L.E. soutient, néanmoins, que les demandeurs n’étaient plus recevables à faire usage du droit de rétractation puisque, alors que ce droit leur avait parfaitement été rappelé aux termes du contrat, les consorts [O]-[D] avaient fait le choix de solliciter l’installation de la pompe à chaleur et laissé libre accès à leur domicile pour l’exécution des travaux avant même l’expiration du délai de rétractation, accepté sans réserve la réception des travaux, sollicité expressément de la banque qu’elle veuille bien procéder au déblocage des fonds au profit de sa société et, enfin, procédé au paiement régulier des échéances du prêt auprès de la banque, de sorte qu’ils ont manifesté par tous leurs actes leur volonté de confirmer le contrat.
Il est, en effet, constant que tandis que le contrat daté du 18 novembre 2020 rappelait, en des termes clairs et non équivoques, en son article 9, que « le client dispose d’un délai de quatorze (14) jours pour se rétracter », la livraison et l’installation de la pompe à chaleur ont eu lieu quelques jours à peine après la signature et bien avant l’expiration dudit délai, une attestation de fin de travaux ayant été datée du 25 novembre 2020 et signée par Monsieur [D] (pièce n°15 défenderesse).
La société G.L.E. ne peut néanmoins se contenter de soutenir, de surcroît en procédant par simple voie d’affirmation, que ce sont les clients qui ont insisté afin que le matériel soit installé à leur domicile rapidement, alors que l’installation réalisée avant la fin du délai de rétractation sans qu’il soit démontré de renonciation expresse et écrite de leur part à l’exercice de ce droit ne peut être assimilée à cette renonciation.
En effet, si une telle livraison avant expiration du délai de rétractation était envisageable, elle était toutefois encadrée tant par l’article L.221-5 du Code de la consommation précité, que par le contrat lui-même, lequel stipulait, également en son article 9, que « pour que les prestations d’installation […] puissent être exécutées avant la fin du délai de rétractation, le Client doit expressément donner son consentement et renoncer à l’exercice de son droit de rétractation en signant la case dûment prévue à cet effet à la fin du présent Contrat ».
C’est au professionnel, qui de surcroît invoque une telle renonciation, de démontrer avoir respecté le formalisme prescrit non seulement par la loi mais également par le contrat sur ce point. Tel n’est pas le cas, aucune renonciation expresse et par écrit émanant des consorts [O]-[D] n’étant rapportée.
Au surplus, il doit être relevé que ne sont démontrés ni l’existence d’une demande de déblocage des fonds auprès de l’organisme prêteur, ni le déblocage effectif desdits fonds, ni a fortiori de remboursement d’échéances du contrat de crédit, puisqu’il est établi et, au demeurant, non-contesté que Madame [O] et Monsieur [D] ont rétracté leur acceptation de l’offre de crédit affecté le 1er décembre 2020, ce dont la société DOMOFINANCE a indiqué avoir pris acte, par courrier en réponse du 11 décembre 2020 (pièces n°5 et 18 demandeurs).
Dans ces conditions, les consorts [O]-[D] étaient parfaitement en droit de rétracter leur consentement, ce qu’ils ont fait le 1er décembre 2020, soit dans le délai qui leur était imparti.
La conséquence de l’exercice de ce droit de rétractation étant l’anéantissement rétroactif et de plein droit du contrat, la résolution de ce dernier sera constatée.
Sur les conséquences de la résolution
Aux termes de l’article L.131-1 du Code des procédures civiles d’exécution, tout juge peut, même d’office, ordonner une astreinte pour assurer l’exécution de sa décision.
En l’espèce, en conséquence de la résolution, la pompe à chaleur doit être restituée par Madame [O] et Monsieur [D] mais, s’agissant d’un bien ne pouvant être renvoyé par voie postale en raison de sa nature, il sera ordonné à la société G.L.E. de récupérer à ses frais la pompe à chaleur au domicile des demandeurs, en application de l’article L.221-23 précité.
Par ailleurs, compte tenu de l’ancienneté du litige et du fait qu’un maintien de l’installation de la pompe à chaleur litigieuse est de nature à priver Madame [O] et Monsieur [D] de l’installation d’un nouveau moyen de chauffage et donc, à les priver de chauffage, il apparaît nécessaire de condamner la société G.L.E. à récupérer le bien objet du contrat résolu sous astreinte de 80 euros par jour de retard à compter du 31ème jour suivant la signification de la présente décision.
Enfin, outre le fait que l’établissement prêteur, la société DOMOFINANCE, n’a pas été attraite à la cause, il sera relevé que la prétention de résolution du contrat de crédit affecté formulée au cœur des conclusions en demande (page 10) n’est pas reprise au dispositif de ces dernières, de sorte qu’il n’y a pas lieu à statuer sur ce point, en application des dispositions de l’article 768 du Code de procédure civile.
Sur les demandes indemnitaires formulées à l’encontre de la société G.L.E.
Les consorts [O] – [D] sollicitent, en outre, la condamnation de la société venderesse à leur verser une somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice pour manquement aux obligations d’information et de conseil, non-respect du droit de rétractation et manquement à son obligation de faire ainsi qu’une somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour le trouble de jouissance subi du fait des manquements de la société G.L.E.
Ils font grief à la société G.L.E. d’avoir posé la pompe à chaleur avant même l’expiration du délai de rétractation et ce, sans avoir pris la peine de procéder à une étude technique et thermique de l’habitation, laquelle était nécessaire pour poser, dans les règles de l’art, une pompe à chaleur adaptée au logement.
Ils lui reprochent également le dysfonctionnement de la pompe à chaleur ainsi que des malfaçons ayant rendu l’installation dangereuse. Ils font ainsi valoir être privés de moyen de chauffage depuis deux années.
La société G.L.E. conclut au rejet de ces demandes, rappelant, en premier lieu le principe de non-cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle et l’inapplicabilité à la réparation d’un dommage se rattachant à l’exécution d’un engagement contratuel de l’article 1240 du Code civil.
Elle rajoute qu’en tout état de cause, la mise en jeu d’une responsabilité de droit commun nécessite la preuve d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité. Elle soutient, à cet égard, avoir parfaitement accompli toutes ses obligations contractuelles et fait observer que les demandeurs succombent également dans l’administration de la preuve d’un préjudice, alors que leurs demandes indemnitaires ne sont corroborées par aucune pièce.
Sur ce, le tribunal s’étonne, à l’instar de la société défenderesse, que les demandeurs appuient leur prétentions indemnitaires sur le fondement de la responsabilité délictuelle alors même qu’ils invoquent exclusivement à son encontre des manquements à ses obligations contractuelles et pré-contractuelles. La demande ne peut, dès lors, aboutir sur ce fondement.
Au surplus, il doit être relevé que les éléments versés aux débats sont insuffisants à démontrer que les consorts [O] – [D] sont sans moyen de chauffage depuis plus de deux ans.
Madame [O] – [D] seront, en conséquence, déboutés de leurs demandes indemnitaires.
Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive
Conformément aux dispositions de l’article 1240 du Code civil, « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».
L’exercice d’une action en justice constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à dommages et intérêts que dans le cas où son titulaire en fait, à dessein de nuire, un usage préjudiciable à autrui.
En l’espèce, dès lors qu’il est fait droit, au moins partiellement, aux demandes des consorts [O]-[D], leur action ne saurait être qualifiée d’abusive.
La demande sera rejetée.
Sur les mesures accessoires
L’article 696 du Code de procédure civile dispose : « la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie ».
Par ailleurs, il résulte des dispositions de l’article 700 du même code que“Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :
1° A l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2° Et, le cas échéant, à l’avocat du bénéficiaire de l’aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l’aide aurait exposés s’il n’avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l’article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations. […]”.
En l’espèce, la société G.L.E, qui succombe, sera condamnée aux dépens de la présente instance, de sorte que sa demande au titre des frais irrépétibles sera rejetée.
Par ailleurs, la demande tendant à condamner la société succombante à verser à Madame [O] et Monsieur [D], la première étant bénéficiaire de l’aide juridictionnelle partielle, une somme sur le fondement de l’article 700 2° ne saurait être accueillie, dès lors que cet alinéa ne permet le versement d’une indemnité de procédure qu’au seul avocat.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal statuant publiquement par jugement contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en premier ressort,
Déboute Madame [R] [O] et Monsieur [M] [D] de leur demande principale tendant à voir prononcer l’annulation du contrat conclu le 18 novembre 2020 avec la S.A.S. GROUPE LABEL ENVIRONNEMENT ;
Constate la résolution du contrat de fourniture, d’installation et de mise en service de pompe à chaleur de marque Atlantic intervenu le 18 novembre 2020 entre la S.A.S. GROUPE LABEL ENVIRONNEMENT, d’une part, et Madame [R] [O] et Monsieur [M] [D], d’autre part, par suite de la rétractation de ces derniers dans le délai légal ;
Dit que Madame [R] [O] et Monsieur [M] [D] devront restituer à la S.A.S. GROUPE LABEL ENVIRONNEMENT la pompe à chaleur de marque Atlantic objet du contrat résolu ;
Ordonne à la S.A.S. GROUPE LABEL ENVIRONNEMENT de récupérer la pompe à chaleur objet du contrat résolu au domicile de Madame [R] [O] et Monsieur [M] [D] et à ses propres frais ;
A défaut d’une telle exécution dans le délai de 30 jours suivant la signification de la présente décision, Condamne la S.A.S. GROUPE LABEL ENVIRONNEMENT, à compter du 31ème jour, à une astreinte provisoire de 80 euros par jour calendaire de retard jusqu’à la reprise effective de la pompe à chaleur, pendant trois mois ;
Déboute Madame [R] [O] et Monsieur [M] [D] de leurs demandes indemnitaires ;
Déboute la S.A.S. GROUPE LABEL ENVIRONNEMENT de sa demande indemnitaire ;
Condamne la S.A.S. GROUPE LABEL ENVIRONNEMENT aux entiers dépens de l’instance ;
Rejette la demande tendant à voir verser une somme à Madame [R] [O] et Monsieur [M] [D] sur le fondement de l’article 700 2° du Code de procédure civile ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
Le greffier, La présidente.