Droit de rétractation : Décision du 14 décembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/16248

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Droit de rétractation : Décision du 14 décembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/16248

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 9 – A

ARRÊT DU 14 DÉCEMBRE 2023

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/16248 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGNEN

Décision déférée à la Cour : Arrêt du 9 juin 2022 – Cour d’Appel de PARIS – Pôle 4-9 A – RG n° 19/16788

DEMANDEUR À L’OPPOSITION

Monsieur [B] [W]

né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

assisté de Me Matthieu CHUDET, avocat au barreau de PARIS, toque : C1775

DÉFENDERESSE À L’OPPOSITION

La société CREATIS, société anonyme agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 419 446 034 00128

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Olivier HASCOET de la SELARL HKH AVOCATS, avocat au barreau de l’ESSONNE

substitué à l’audience par Me Camille JAMI de la SELARL HKH AVOCATS, avocat au barreau de l’ESSONNE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 octobre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon offre préalable acceptée le 19 décembre 2013, la société Creatis a consenti à M. [B] [W] un regroupement de crédits d’un montant en capital de 71 000 euros remboursable au taux nominal conventionnel de 8,36 % l’an (soit un TAEG de 10,38 % l’an) en 144 mensualités de 782,63 euros hors assurance soit 844,76 euros avec assurance.

Plusieurs échéances n’ayant pas été honorées, la société Creatis a entendu se prévaloir de la déchéance du terme.

Par acte du 14 juin 2018, la société Creatis a fait assigner M. [W] devant le tribunal d’instance de Villejuif en paiement du solde du prêt lequel, par jugement contradictoire du 4 avril 2019, a :

– déclaré la société Creatis recevable en ses demandes,

– dit que la société Creatis est déchue de son droit aux intérêts conventionnels au titre du contrat n° 000100000197813,

– condamné M. [W] à payer à la société Creatis la somme de 45 139,62 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2017 et jusqu’au parfait paiement,

– débouté la société Creatis de sa demande au titre de la capitalisation des intérêts,

– débouté M. [W] de sa demande en délais de paiement,

– déboute la société Creatis de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté les parties de leur demandes plus amples ou contraires,

– condamné M. [W] aux dépens,

– ordonné l’exécution provisoire de la présente décision.

Après avoir contrôlé la recevabilité de la demande au regard de la forclusion et pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels, le tribunal a retenu s’agissant de la consultation obligatoire du FICP dans le cadre de la vérification de solvabilité que le prêteur ne produisait aux débats qu’une fiche intitulée « interrogation BDF » ne permettant pas de connaître la nature exacte de la réponse donnée par la société Banque de France relativement à la solvabilité du débiteur.

Il a déduit les sommes versées soit 25 860,38 euros du capital emprunté de 71 000 euros.

La société Creatis a relevé appel de ce jugement par déclaration du 15 août 2019 sollicitant l’infirmation du jugement entrepris en ce qu’il avait prononcé la déchéance du droit aux intérêts, rejeté la demande de capitalisation des intérêts et d’article 700 du code de procédure civile et sollicitant la condamnation de M. [W] à lui payer la somme de 74 710,51euros au titre du prêt avec intérêts au taux contractuel de 8,36 % à compter de la mise en demeure du 15 décembre 2017, la capitalisation annuelle des intérêts dans le cadre de l’anatocisme, et la condamnation de M. [W] à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens avec distraction au profit de son conseil.

Par arrêt rendu par défaut le 9 juin 2022, la présente cour a :

– infirmé le jugement sauf en ce qu’il a rejeté la demande de capitalisation des intérêts ;

– statuant à nouveau dans les limites de l’appel, et y ajoutant,

– condamné M. [B] [W] à payer à la société Creatis la somme de 69 650,21 euros avec intérêts au taux contractuel de 8,36 % l’an portant sur la somme de 61 415,37 euros à compter du 15 décembre 2017 et au taux légal pour le surplus,

– condamné M. [B] [W] à verser à la société Creatis la somme de 600 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– rejeté le surplus des demandes,

– condamné M. [B] [W] aux dépens.

Cet arrêt a été signifié à M. [W] le 12 août 2022 et le 9 septembre 2022, celui-ci a formé opposition.

Aux termes de ses conclusions du 22 septembre 2023, M. [W] demande à la cour :

– de le déclarer recevable et bien fondé en l’intégralité de ses moyens, fins et prétentions,

– de débouter la société Creatis de l’intégralité de ses moyens, fins et prétentions,

– de le juger recevable et bien fondée en son opposition, de rétracter l’arrêt rendu et statuant à nouveau :

– à titre principal sur la déchéance du droit aux intérêts de juger que la société Creatis ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, de ce que l’offre ou le contrat de regroupement de crédits qui lui ont été présentés comportaient un bordereau de rétractation conforme à la réglementation applicable, en outre, que la société Creatis ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, de ce qu’elle a valablement consulté le fichier des incidents caractérisés de paiement et traité les résultats obtenus dans le cadre de son examen de sa solvabilité, en conséquence, de confirmer purement et simplement le jugement déféré rendu le 19 avril 2019 par le tribunal d’instance de Villejuif, en ce qu’il a jugé que la société Creatis était déchue de son droit aux intérêts, frais et pénalités, en ce inclus l’indemnité de résiliation de 8 % et qu’il n’était redevable à l’endroit de la société Creatis que d’une somme de 45 139,62 euros, avec intérêts au taux légal non majoré et a débouté la société Creatis de sa demande d’anatocisme et au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– en toute hypothèse sur les mesures d’atermoiement, de juger qu’il est parfaitement éligible à une mesure d’atermoiement et en conséquence de reporter ou échelonner selon tel échéancier qu’il plaira à la cour de fixer, le paiement de toutes sommes dues par lui, pour une durée de deux ans, de prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit qui sera celui du taux légal et que les paiements s’imputeront d’abord sur le capital,

– en outre de condamner la société Creatis à lui payer une somme de 4 000 euros au titre de ses frais irrépétibles ainsi qu’aux entiers dépens.

Il fait valoir que la consultation du FICP ne respecte pas les dispositions des articles 12 et 13 du décret du 26 octobre 2010 puisque le résultat n’apparaît pas.

Il soutient également que le contrat de regroupement de crédits versé aux débats par la société Creatis est dépourvu de bordereau de rétractation détachable, de sorte que la preuve de sa régularité n’est pas rapportée et que la clause de reconnaissance qu’il a signée est insuffisante pour rapporter cette preuve.

Il expose ses revenus et charges et soutient être bien fondé à obtenir un délai de grâce de deux ans, le temps pour lui de parvenir à mettre en ‘uvre une solution d’apurement de ses dettes, et à ce qu’il soit prescrit que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit qui sera celui du taux légal et que les paiements s’imputeront d’abord sur le capital.

Par conclusions notifiées le 16 octobre 2023, la société Creatis demande à la cour :

– de déclarer M. [W] mal fondé en ses demandes, fins et conclusions, et de l’en débouter,

– de la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions d’appel,

– y faisant droit de confirmer l’arrêt entrepris,

– subsidiairement, si la cour prononçait la déchéance du droit aux intérêts contractuels, de condamner M. [W] à lui payer la somme de 45 139,62 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 15 décembre 2017, sans suppression de la majoration de 5 points,

– de condamner M. [W] à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Elle fait valoir que seul l’exemplaire préteur doit comporter un bordereau de rétractation, que M. [W] a bien reconnu avoir pris connaissance et être en possession de l’offre de prêt dotée d’un formulaire détachable de rétractation et qu’elle verse aux débats un exemplaire de l’offre de prêt strictement identique à celui dont M. [W] est resté en possession qui comporte exactement les mêmes références 11 2013 et qui comporte un bordereau.

S’agissant de la consultation du FICP elle affirme que dans la colonne « résultat », il est coché un « V » qui signifie qu’il n’y a pas de fichage FICP, que le chemin informatique par internet qui est mentionné en bas de page fait bien ressortir qu’il s’agit d’une interrogation de la Banque de France, effectuée via le logiciel « EFIBANK », que la preuve de ce que l’interrogation a été faite résulte de la phrase en dessous des deux fenêtres où il est mentionné : « Note : l’enregistrement global n’est possible que pour les interrogations à l’état » Reçue  » et dont le résultat est « V », qu’il est bien mentionné un état : « enregistré le 27.12.2013-13.45.54. » et qu’il résulte de ces mentions que :

– soit il y a un résultat coché, ce qui signifie qu’il y a bien eu interrogation puisque sinon il ne peut pas y avoir d’enregistrement,

– puisqu’il est marqué « enregistré », c’est donc qu’il y a bien eu à la fois interrogation et ensuite enregistrement, l’enregistrement n’étant pas possible tant qu’il n’y a pas d’interrogation et que le résultat n’est pas coché « V ».

Elle ajoute produire aux débats un procès-verbal de constat du 4 avril 2017, dressé par Maître [E], huissier de justice associé à [Localité 5], qui décrit ainsi le processus de consultation FICP de l’ouverture de l’ordinateur jusqu’à l’édition de l’historique complet des interrogations Banque de France de cette journée, qui mentionne que : « La consultation FICP est une étape obligatoire pour finaliser le dossier de crédit ».

Elle considère en conséquence rapporter la preuve qu’elle a bien interrogé le fichier FICP, avant de débloquer des fonds et que le résultat (V) a permis ensuite, en l’absence de fichage FICP, l’enregistrement du dossier.

Elle s’oppose aux délais de paiement sollicités en faisant valoir que M. [W] n’apporte pas la preuve qu’il sera davantage dans la capacité de régler ses dettes dans deux ans, que sa situation personnelle et financière au regard de l’importance montre qu’il ne sera ni en capacité de régler la dette dans deux ans, ni même dans un délai de 24 mois.

Subsidiairement, elle soutient que la suppression de la majoration de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier ne peut être faite que par le juge de l’exécution.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 17 octobre 2023 et l’affaire a été appelée à l’audience du 17 octobre 2023.

MOTIF DE LA DÉCISION

Sur l’opposition et ses effets

Il résulte des dispositions des articles 571 et suivants du code de procédure civile que l’opposition tend à faire rétracter une décision rendue par défaut et que si elle n’est ouverte qu’au défaillant, elle remet en question, devant le même juge, les points jugés par défaut pour qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit, que la décision rendue par défaut n’est anéantie que par la décision qui la rétracte et que dans l’instance qui recommence, la recevabilité des prétentions respectives du demandeur et de l’opposant s’apprécie, en fonction de la demande primitive, suivant les règles ordinaires.

L’opposition formée par M. [W] défaillant lors du premier procès en appel dans le mois de la signification de l’arrêt par défaut est recevable et l’arrêt par défaut du 9 juin 2022- RG 19-16788 doit donc être rétracté.

Sur la demande en paiement

Le présent litige est relatif à un crédit souscrit le 19 décembre 2013 soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu’il doit être fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.

Sur la forclusion

La recevabilité de l’action de la société Creatis au regard de la forclusion, vérifiée par le premier juge, n’est pas remise en cause à hauteur d’appel.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

1- le bordereau de rétractation

M. [W] produit la copie de son contrat « exemplaire à renvoyer » lequel ne comporte pas de bordereau de rétractation.

L’article L. 311-11 du code de la consommation en sa version applicable au contrat, prévoit que l’offre de contrat de crédit est établie par écrit ou sur un autre support durable. Elle est remise ou adressée en autant d’exemplaires que de parties et, le cas échéant, à chacune des cautions.

Il résulte des articles L. 311-12 et L. 311-48 du code de la consommation en leur version applicable au litige, que pour permettre à l’emprunteur d’exercer son droit de rétractation, un formulaire détachable est joint à son exemplaire du contrat de crédit et que le prêteur qui accorde un crédit sans remettre à l’emprunteur un contrat comprenant un tel formulaire est déchu du droit aux intérêts en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

Ce formulaire doit être établi conformément au modèle-type de bordereau et selon l’article R. 311-4 du même code, il ne peut comporter au verso aucune mention autre que le nom et l’adresse du prêteur.

Il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à ses obligations précontractuelles et la signature par l’emprunteur de l’offre préalable de crédit comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur lui a remis le bordereau de rétractation constitue seulement un indice qu’il incombe à celui-ci de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires.

A hauteur d’appel, la société Creatis produit en sa pièce n° 16, un exemple de liasse contractuelle constituée de 6 pages, dont un exemplaire « contrat à renvoyer » et deux exemplaires « à conserver », ces deux derniers exemplaires étant bien pourvus d’un bordereau détachable de rétractation.

Cette liasse démontre suffisamment que l’exemplaire de contrat destiné à être renvoyé au prêteur ne comporte pas de bordereau ce qui n’est pas une obligation mais que celui qui doit être conservé par l’emprunteur en comporte un qu’il peut donc utiliser. Aucune déchéance du droit aux intérêts n’est encourue sur ce fondement.

2- Le contenu de la vérification FICP

L’article L. 311-9 (devenu L. 312-16) du code de la consommation impose notamment au prêteur avant de conclure le contrat de crédit, de vérifier la solvabilité de l’emprunteur et de consulter le fichier prévu à l’article L. 333-4 (devenu L. 751-1), dans les conditions prévues par l’arrêté mentionné à l’article L. 333-5 (devenu L. 751-6).

Il résulte de l’article L. 311-48 al.2 (devenu L. 341-2) que lorsque le prêteur n’a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 311-8 et L. 311-9 (devenus L. 312-14 et L. 312-16), il est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

Même si aucun formalisme n’est exigé quant à la justification de la consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers par les organismes prêteurs, l’article 13 de l’arrêté du 26 octobre 2010 relatif au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers prévoit, dans sa rédaction applicable au litige, qu’en application de l’article L. 333-5 du code de la consommation, afin de pouvoir justifier qu’ils ont consulté le fichier, les établissements et organismes mentionnés à l’article 1er doivent, dans les cas de consultations aux fins mentionnées au I de l’article 2, conserver des preuves de cette consultation, de son motif et de son résultat, sur un support durable. En effet, la Banque de France ne délivre pas de récépissé de la consultation de son fichier.

Pour démontrer avoir satisfait à son obligation de consultation préalable du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, la société Creatis communique un document qui comporte la mention « interrogation BDF », concerne « [B] [W] », la clef BDF, l’état « enregistré le 27.12.2013 » le résultat qui est visuellement un signe V dans un rond noir et le motif « interrogation BDF ». Figure sur la même feuille la mention : « note : l’enregistrement global n’est possible que pour les interrogations à l’état reçue et dont le résultat est : » et il est reproduit le même signe V dans un rond noir.

Le procès-verbal de constat d’huissier du 4 avril 2017 qui est produit aux débats permet d’établir que dans le cadre du processus informatique de la société Creatis, la présence d’une coche verte établit que la personne n’est pas fichée. Toutefois l’huissier ne précise pas ce qui se passe lorsque la personne est fichée et si par exemple apparaît une coche d’une autre couleur. La cour observe que le document qui lui est produit est en noir et blanc et ne permet nullement de savoir si la coche qui correspond donc au signe V était verte ou d’une autre couleur.

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts en application de l’article L. 311-48 al.2 (devenu L. 341-2).

Sur le montant des sommes dues

La société Creatis qui produit la mise en demeure avant déchéance du terme du 13 novembre 2017 enjoignant à M. [W] de régler l’arriéré de 6 165,35 euros sous 30 jours à peine de déchéance du terme et celle notifiant la déchéance du terme du 15 décembre 2017 portant mise en demeure de payer le solde du crédit et un décompte de créance se prévaut de manière légitime de la déchéance du terme du contrat et de l’exigibilité des sommes dues.

Aux termes de l’article L. 311-48 devenu L. 341-8 du code de la consommation, lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu. Les sommes déjà perçues par le prêteur au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux de l’intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a déduit les sommes versées soit 25 860,38 euros du capital emprunté de 71 000 euros et condamné M. [W] à payer à la société Creatis la somme de 45 139,62 euros.

Le prêteur, bien que déchu de son droit aux intérêts, demeure fondé à solliciter le paiement des intérêts au taux légal, en vertu de l’article 1153 devenu 1231-6 du code civil, sur le capital restant dû, majoré de plein-droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice en application de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier.

Ces dispositions légales doivent cependant être écartées s’il en résulte pour le prêteur la perception de montants équivalents ou proches de ceux qu’il aurait perçus si la déchéance du droit aux intérêts n’avait pas été prononcée, sauf à faire perdre à cette sanction ses caractères de dissuasion et d’efficacité (CJUE 27 mars 2014, affaire C-565/12, Le Crédit Lyonnais SA / Fesih Kalhan).

En l’espèce, le crédit personnel a été accordé à un taux d’intérêt annuel fixe de 8,36 % l’an. Dès lors, les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal apparaissent significativement inférieurs à celui résultant du taux contractuel sauf en cas de majoration de cinq points. Il convient en conséquence de ne pas faire application de l’article 1231-6 du code civil dans son intégralité et de n’écarter que l’application de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier. Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a dit que la somme restant due en capital au titre de ce crédit portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure de payer du 20 décembre 2017 et convient en outre d’écarter cette majoration.

Le jugement doit également être confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de capitalisation des intérêts et l’indemnité de résiliation qui n’est pas due du fait de la déchéance du droit aux intérêts.

Sur la demande de délais de paiement

Le premier juge a rejeté la demande de délais de paiement en relevant que M. [W] justifiait de la signature d’une promesse de vente pour un bien immobilier mais que la réalisation de la vente était incertaine. La cour observe que M. [W] a déjà bénéficié depuis la première condamnation prononcée par le tribunal d’instance de Villejuif le 4 avril 2019 de délais de fait de quatre ans et demi et il ne justifie pas les avoir mis à profit pour effectuer le moindre règlement. Il y a donc lieu de le confirmer le jugement sur ce point et de le débouter de cette demande.

Sur les autres demandes

Le jugement doit être confirmé en ce qu’il a condamné M. [W] aux dépens de première instance et a rejeté la demande de la société Creatis sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Creatis qui succombe doit être condamnée aux dépens d’appel et il apparaît équitable de lui faire supporter les frais irrépétibles engagés par M. [W] à hauteur d’une somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Déclare recevable l’opposition à l’arrêt par défaut du 9 juin 2022 RG 19-16788 et le rétracte ;

Statuant à nouveau,

Confirme le jugement rendu par le tribunal d’instance de Villejuif du 4 avril 2019 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Ecarte l’application de la majoration de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier ;

Rejette la demande de délais de paiement ;

Condamne la société Creatis aux dépens d’appel et d’opposition ;

Condamne la société Creatis à payer à M. [W] une somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande plus ample ou contraire.

La greffière La présidente

 


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