République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 1
ARRÊT DU 14/12/2023
N° de MINUTE : 23/1057
N° RG 22/02916 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UK2Z
Jugement (N° 11-12-428) rendu le 03 Juin 2022 par le Juge des contentieux de la protection de Lens
APPELANTE
SA Cofidis agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 8]
[Localité 4]
Représentée par Me Maxime Hermary, avocat au barreau de Béthune, avocat constitué
INTIMÉS
Monsieur [L] [U]
né le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 7] – de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 5]
Défaillant, à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 05 septembre 2022 par acte remis à domicile
Madame [Y] [H] épouse [U]
née le [Date naissance 1] 1976 à [Localité 6] – de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 5]
Défaillante, à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 05 septembre 2022 par acte remis à domicile
DÉBATS à l’audience publique du 11 octobre 2023 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Yves Benhamou, président de chambre
Samuel Vitse, président de chambre
Catherine Ménegaire, conseiller
ARRÊT PAR DEFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 14 décembre 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 28 septembre 2023
EXPOSE DU LITIGE
Selon offre acceptée le 23 mars 2019, M. [L] [U] et Mme [Y] [H] épouse [U] ont souscrit auprès de la société Cofidis un contrat de regroupement de crédits n°289860007655590 d’un montant de 18 900 euros, remboursable en 96 mensualités au taux débiteur nominal annuel de 5,78 %.
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 3 novembre 2021, la société Cofidis s’est prévalue de la déchéance du terme du contrat de crédit.
Par acte d’huissier délivré le 19 novembre 2021, la société Cofidis a assigné M. [U] et Mme [H] en justice aux fins d’obtenir leur condamnation au paiement de sa créance au titre du solde du contrat de crédit.
Par jugement réputé contradictoire du 3 juin 2022 le tribunal de proximité de Lens a :
– déclaré recevable l’action de la société Cofidis,
– prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la société Cofidis,
– condamné solidairement M. [U] et Mme [H] à payer à la société Cofidis la somme de 12 524,47 euros au titre du contrat de crédit n°28986000765590 avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 19 novembre 2021,
– rejeté le surplus des demandes,
– condamné in solidum M. [U] et Mme [H] aux dépens,
– débouté la société Cofidis de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit n’y avoir lieu à exécutoire provisoire.
Par déclaration reçue par le greffe de la cour le 17 juin 2022, la société Cofidis a relevé appel de l’ensemble des chefs de ce jugement sauf en ce qu’il l’a déclarée recevable en ses demandes, et a condamné M. [U] et Mme [H] aux dépens.
Aux termes de ses conclusions déposées par voie électronique le 23 août 2022, la société Cofidis demande à la cour de :
– infirmer le jugement rendu par le tribunal de proximité de Lens en ce qu’il a :
– prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la société Cofidis,
– condamné solidairement M. [U] et Mme [H] à payer à la société Cofidis la somme de 12 524,47 euros au titre du contrat de crédit n°28986000765590 avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 19 novembre 2021,
– rejeté le surplus des demandes,
– débouté la société Cofidis de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
En conséquence,
– condamner solidairement M. [U] et Mme [H] à payer à la société Cofidis les sommes de :
– principal : 17 127,67 euros avec intérêts au taux légal de 5,78 % l’an à compter du 19 novembre 2021,
– indemnité légale : 1 361,23 euros avec intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 2021,
– condamner solidairement M. [U] et Mme [H] au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner solidairement M. [U] et Mme [H] aux entiers frais et dépens.
La société Cofidis a signifié aux intimés sa déclaration d’appel et ses conclusions par actes d’huissier délivrés le 5 septembre 2022 à domicile.
Les intimés n’ont pas constitué avocat.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures de la société Cofidis pour l’exposé de ses moyens.
La clôture de l’affaire a été rendue le 28 septembre 2023.
MOTIFS
Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels
Le premier juge a déchu la société Cofidis de son droit aux intérêts contractuels au motif que le contrat produit ne permettait pas d’établir que la banque a remis à l’emprunteur une offre de crédit contenant un formulaire détachable de rétractation, l’acte figurant au dossier ne contenant aucune copie du bordereau et la simple clause signée par l’emprunteur attestant de la remise d’un contrat conforme aux dispositions de l’article L.312-21 du code de la consommation n’étant pas suffisante à rapporter la preuve de cette remise.
La banque fait valoir qu’elle a produit devant le premier juge le dossier de financement qui avait été adressé aux emprunteurs et qui permettait de constater que le bordereau de rétractation avait bien été remis à l’emprunteur.
Aux termes de l’article L.312-19 du code de la consommation ‘L’emprunteur peut se rétracter sans motifs dans un délai de quatorze jours calendaires révolus à compter du jour de l’acceptation de l’offre de contrat de crédit comprenant les informations prévues à l’article L. 312-28.’
L’article L.312-21 du même code dispose ‘Afin de permettre l’exercice du droit de rétractation mentionné à l’article L. 312-19, un formulaire détachable est joint à son exemplaire du contrat de crédit.’
Selon l’article L.341-4 du code de la consommation ‘Le prêteur qui accorde un crédit sans remettre à l’emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 312-18, L. 312-21, L. 312-28, L. 312-29, L. 312-43 ainsi que, pour les opérations de découvert en compte, par les articles L. 312-85 à L. 312-87 et L. 312-92, est déchu du droit aux intérêts’.
Si aucune disposition légale n’impose au prêteur de conserver un exemplaire du bordereau de rétractation joint à l’exemplaire de l’offre communiqué à l’emprunteur, il lui incombe cependant de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à ses obligations contractuelles en application de l’article 1353 du code civil dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; la signature par l’emprunteur, comme en l’espèce, de l’offre préalable comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur lui a remis le bordereau de rétractation constitue seulement un indice qu’il incombe à ce dernier de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires, comme cela résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, et appliquée par les juridictions françaises (voir notamment 1re Civ., 21 octobre 2020, pourvoi n° 19-18.971).
En l’espèce, la banque verse aux débat la copie du dossier complet de financement adressé à M. M. [U] et Mme [H] comportant notamment l’exemplaire de l’offre destinée à être renvoyée au prêteur ne comportant pas de bordereau de rétractation, ainsi que l’exemplaire de l’offre à conserver par l’emprunteur comportant le bordereau de rétractation, qui est rédigé conformément au modèle type annexé à l’article R.312-9 du code de la consommation.
Ce document produit par la banque constitue un indice suffisant à corroborer la mention signée par l’emprunteur selon laquelle il a reconnu être restée en possession d’un exemplaire de l’offre dotée d’un formulaire détachable de rétractation.
Il convient en conséquence de réformer le jugement entrepris en ce qu’il a déchu la banque de son droit aux intérêts contractuels.
Sur la créance de la banque
En application de l’articles L. 312-39 du code de la consommation, en cas de défaillance de l’emprunteur dans le remboursement d’un crédit à la consommation, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés ; jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt ; le prêteur peut demander en outre une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance, sans préjudice de l’application de l’article 1231-5 du code civil.
Au regard des pièces produites aux débats, notamment du contrat de crédit et du tableau d’amortissement, des lettres de mise en demeure et de déchéance du terme, de l’historique du compte et du décompte de créance arrêté au 16 mars 2022, M. [U] et Mme [H] sont solidairement condamnés à payer à la société Cofidis la somme de 17 127,67 euros, augmentée des intérêts au taux contractuel de 5,78 % sur la somme de 17 015,37 euros à compter du 17 mars 2022, au titre du solde du contrat de crédit.
M. [U] et Mme [H] sont également condamnés solidairement à payer à la société Cofidis la somme de 1 361,23 euros, augmentée des intérêts légaux à compter du 20 novembre 2021, date de réception de la lettre de déchéance du terme, au titre de l’indemnité légale de résiliation.
Il n’y a pas lieu d’assurer l’effectivité de la sanction de la déchéance du droit aux intérêts, puisqu’elle n’a pas été prononcée, et partant, le jugement entrepris sera réformé en ce qu’il a écarté la majoration de l’intérêt légal prévue par l’article L.313-3 du code monétaire et financier.
Sur les demandes accessoires
Les motifs du premier juge méritant d’être adoptés, le jugement entrepris est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.
M. [U] et Mme [H], qui succombent, sont condamnés in solidum aux dépens de l’instance d’appel conformément aux dispositions du code de l’article 696 du code de procédure civile.
En équité, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt par défaut et dans les limites de l’appel ;
Réforme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf celles relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau ;
Condamne solidairement M. [L] [U] et Mme [Y] [H] à payer à la société Cofidis la somme de 17 127,67 euros, augmentée des intérêts au taux contractuel de 5,78 % sur la somme de 17 015,37 euros à compter du 17 mars 2022, au titre du solde du contrat de crédit ;
Condamne solidairement M. [L] [U] et Mme [Y] [H] à payer à la société Cofidis la somme de 1 361,23 euros, augmentée des intérêts légaux à compter du 20 novembre 2021, au titre de l’indemnité légale de résiliation ;
Dit n’y avoir lieu à écarter la majoration de l’intérêt légal prévue par l’article L.313-3 du code monétaire et financier ;
Y ajoutant ;
Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum M. [L] [U] et Mme [Y] [H] aux dépens de l’instance d’appel.
Le greffier
Gaëlle PRZEDLACKI
Le président
Yves BENHAMOU