Droit de rétractation : Décision du 1 février 2024 Cour d’appel de Dijon RG n° 22/01294

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Droit de rétractation : Décision du 1 février 2024 Cour d’appel de Dijon RG n° 22/01294

SA MY MONEY BANK

C/

[Z] [G]

[N] [H] épouse [G]

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D’APPEL DE DIJON

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 01 FEVRIER 2024

N° RG 22/01294 – N° Portalis DBVF-V-B7G-GBQ5

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : au fond du 09 septembre 2022,

rendue par le tribunal de proximité du Creusot – RG : 11-22/93

APPELANTE :

SA MY MONEY BANK, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège :

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 5]

représentée par Me Fabien KOVAC, membre de la SCP DGK AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 46

assistée de Me Martine MESPELAERE, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉS :

Monsieur [Z] [G]

né le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 6] (71)

domicilié :

[Adresse 3]

[Localité 4]

Madame [N] [H] épouse [G]

née le [Date naissance 2] 1980 à [Localité 7] (75)

domiciliée :

[Adresse 3]

[Localité 4]

non représentés

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 septembre 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Marie-Pascale BLANCHARD, Président de Chambre. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la cour étant alors composée de :

Marie-Pascale BLANCHARD, Président de Chambre,

Sophie BAILLY, Conseiller,

Leslie CHARBONNIER, Conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG,

DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 30 Novembre 2023 pour être prorogée au 11 Janvier 2024 puis au 01 Février 2024,

ARRÊT : rendu par défaut,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Marie-Pascale BLANCHARD, Président de Chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Suivant offre préalable de crédit acceptée le 18 novembre 2019, la SA Money Bank a consenti à M. [Z] [G] et Mme [N] [H] épouse [G] un prêt de 42 728,03 euros, amortissable sur une durée de 144 mois, selon un taux d’intérêt fixe de 4,1200 % et au taux annuel effectif global de 5,75 %, destiné d’une part au regroupement de plusieurs crédits, d’autre part au financement d’un besoin de trésorerie.

Huit échéances étant demeurées impayées, le prêteur a notifié aux époux [G], par courriers recommandés du 7 janvier 2022 avec avis de réception du 13 janvier suivant, sa volonté de se prévaloir de la déchéance du terme et leur a réclamé paiement de la somme totale de 43 530,30 euros.

Sur l’assignation délivrée aux époux [G] le 15 mars 2022 et par jugement du 9 septembre 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de le Creusot a :

– déclaré My Money Bank recevable en ses demandes,

– constaté la résolution du contrat de crédit conclu le 18 novembre 2019,

– condamné solidairement M. [Z] [G] et Mme [N] [G], née [H] à payer à la SA My Money Bank la somme de 33 319,87 euros avec intérêts au taux légal, à compter du 7 janvier 2022,

– condamné in solidum M. [Z] [G] et Mme [N] [G] née [H] à payer à la SA My Money Bank la somme de 350 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné in solidum M. [Z] [G] et Mme [N] [G] née [H] aux dépens,

– débouté l’ensemble des parties de toutes demandes plus amples ou contraires.

Suivant déclaration au greffe du 18 octobre 2022, la société My Money Bank a relevé appel de cette décision en ce qu’il a :

– condamné solidairement M. [Z] [G] et Mme [N] [G] née [H] à payer à la SA My Money Bank la somme de 33 319,87 euros avec intérêts au taux légal, à compter du 7 janvier 2022,

– condamné in solidum M. [Z] [G] et Mme [N] [G] née [H] à payer à la SA My Money Bank la somme de 350 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté l’ensemble des parties de toutes demandes plus amples ou contraires.

Selon ses conclusions notifiées par voie électronique le 30 août 2023 et signifiées à M. et Mme [G] par acte de commissaire de justice du 31 août 2023, la société My Money Bank demande à la cour, au visa des articles 1134 ancien et 1103, 1104 nouveaux du code civil, L.311-30 et suivants, L.314-10 du code de la consommation, de :

– infirmer le jugement en ce qu’il a :

condamné solidairement M. [Z] [G] et Mme [N] [G] née [H] à payer à la SA My Money Bank la somme de 33.319, 87euros avec intérêts au taux légal, à compter du 7 janvier 2022,

condamné in solidum M. [Z] [G] et Mme [N] [G] née [H] à payer à la SA My Money Bank la somme de 350 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

débouté l’ensemble des parties de toutes demandes plus amples ou contraires,

statuant à nouveau :

– condamner solidairement M. et Mme [G] à hauteur de la somme de 43 530,30 euros assortie des intérêts au taux conventionnel de 4,1200 % l’an à compter du 7 janvier 2022, date de la déchéance du terme,

– condamner in solidum M. et Mme [G] à payer à la société My Money Bank la somme de 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner en tous les frais et dépens.

La société My Money Bank conteste la déchéance de son droit aux intérêts contractuels appliquée par le premier juge au motif de la violation des dispositions de l’article R.312-10 du code de la consommation.

Elle soutient que son offre de prêt est rédigé en caractères de taille supérieure à 2,82 mm, que sa présentation est claire et lisible, ainsi que cela a été constaté par ministère d’huissier.

Elle relève que les emprunteurs ont exécuté le contrat pendant plusieurs années sans que ni sa lisibilité, ni sa clarté ne leur pose difficultés.

La déclaration d’appel a été signifiée à M. et Mme [G] par acte de commissaire de justice du 1er décembre 2022.

Les intimés n’ont pas constitué avocat devant la cour.

MOTIFS DE LA DECISION

Selon les dispositions combinées des articles L.312-28, L.341-4 et R.312-10 du code de la consommation dans leur rédaction applicable, l’offre de prêt doit, à peine de déchéance totale du droit aux intérêts, être rédigée en caractères dont la hauteur ne peut être inférieure à celle du corps huit ; comporter un encadré, inséré au début du contrat, qui informe l’emprunteur des caractéristiques essentielles du crédit et de manière claire et lisible, dans l’ordre précisé ci-dessous :

1° L’identité et l’adresse géographique des parties contractantes ainsi que, le cas échéant, l’identité et l’adresse de l’intermédiaire de crédit concerné,

2° L’encadré mentionné à l’article L.312-28 qui indique en caractères plus apparents que le reste du contrat, dans l’ordre choisi par le prêteur et à l’exclusion de toute autre information :

a) Le type de crédit,

b) Le montant total du crédit et les conditions de mise à disposition des fonds,

c) La durée du contrat de crédit,

d) Le montant, le nombre et la périodicité des échéances que l’emprunteur doit verser et, le cas échéant, l’ordre dans lequel les échéances seront affectées aux différents soldes dus fixés à des taux débiteurs différents aux fins du remboursement. Pour les découverts, il est indiqué le montant et la durée de l’autorisation que l’emprunteur doit rembourser,

e) Le taux débiteur, les conditions applicables à ce taux, le cas échéant tout indice ou taux de référence qui se rapporte au taux débiteur initial, ainsi que les périodes, conditions et procédures d’adaptation du taux. Si différents taux débiteurs s’appliquent en fonction des circonstances, ces informations portent sur tous les taux applicables
f) Le taux annuel effectif global, et le montant total dû par l’emprunteur, calculés au moment de la conclusion du contrat de crédit. Toutes les hypothèses utilisées pour calculer ce taux sont mentionnées,

g) Tous les frais liés à l’exécution du contrat de crédit, dont, le cas échéant, les frais de tenue d’un ou plusieurs comptes destinés à la mise à disposition des fonds ou au paiement des échéances de crédit et les frais liés à l’utilisation d’un instrument de paiement déterminé, ainsi que les conditions dans lesquelles ces frais peuvent être modifiés,
h) Les sûretés et les assurances exigées, le cas échéant,

i) Le cas échéant, l’existence de frais de notaire,

j) en cas de crédit servant à financer l’acquisition de bien ou service déterminés, ce bien ou ce service et son prix au comptant,

3° Les modalités de remboursement par l’emprunteur ;

4° L’identité et l’adresse des cautions éventuelles ;

5° Une rubrique sur les conditions d’acceptation ou de rétractation du contrat de crédit qui mentionne notamment, dans l’ordre choisi par le prêteur :

a) Les informations relatives aux conditions de conclusion du contrat, dont l’existence et les modalités d’expression de l’agrément de l’emprunteur conformément aux dispositions de l’article L.312-24,

b) L’existence du droit de rétractation, le délai et les conditions d’exercice de ce droit, l’obligation incombant à l’emprunteur conformément aux dispositions de l’article L.312-26, le montant de l’intérêt journalier servant au calcul des intérêts cumulés mentionnés à ce même article,

c) Les dispositions de l’article L.312-25,

d) Le cas échéant, les droits de l’emprunteur d’un crédit affecté ainsi que leurs conditions d’exercice,

6° Une rubrique sur les informations relatives à l’exécution du contrat qui mentionne notamment, dans l’ordre choisi par le prêteur :

a) Les conditions et modalités selon lesquelles l’emprunteur peut rembourser le crédit par anticipation, ainsi que les conditions et le mode de calcul de l’indemnité de remboursement anticipé que le prêteur peut réclamer en application de l’article L. 312-34,
b) Les conditions et modalités selon lesquelles l’emprunteur peut résilier le contrat,
c) Un avertissement relatif aux conséquences d’une défaillance de l’emprunteur,
d) Les indemnités en cas de retard de paiement et, le cas échéant, les frais d’inexécution que le prêteur peut demander à l’emprunteur en cas de défaillance, ainsi que les modalités d’adaptation et de calcul de ces indemnités et de ces frais,
e) Pour les opérations de crédit amortissable à durée déterminée, lesquelles excluent la location-vente et la location avec option d’achat, le droit de l’emprunteur de recevoir un relevé sous la forme d’un tableau d’amortissement, à sa demande et sans frais, à tout moment durant toute la durée du contrat,

7° Une rubrique sur les informations relatives au traitement des litiges, qui mentionne notamment, dans l’ordre choisi par le prêteur :

a) La procédure de la médiation mentionnée à l’article L.316-1 du code monétaire et financier et ses modalités d’accès,

b) Les dispositions de l’article R.312-5,

c) L’adresse de l’autorité mentionnée à l’article L.632-1 du code monétaire et financier et celle de l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation.

Si aucune disposition légale ne vient définir le « corps huit », il correspond à la taille de caractère d’imprimerie faisant huit points de hauteur, le point étant la norme typographique de référence.

Si traditionnellement en France, le point Didot de 0,3759 mm constituait la norme de référence, le développement de la publication assistée par ordinateur a conduit à l’utilisation de plus en plus fréquente d’une autre norme, le point Pica, mesurant 0,351 mm.

Les dispositions législatives et réglementaires du code de la consommation n’opérant aucune distinction au profit de l’une ou de l’autre de ces normes typographiques, l’utilisation des deux doit être admise.

L’application de la valeur de ces deux normes à un caractère de corps huit, conduit à des tailles respectives de la police de 3,0 mm et 2,8 mm et il s’en déduit qu’une offre de prêt rédigée en caractères d’au moins 2,8 mm est de nature à satisfaire aux dispositions précitées, dès lors que cette taille correspond au corps huit du point Pica.

Au cas particulier, il ressort du constat réalisé par huissier de justice le 25 avril 2022 que la vérification faite par sondage sur différents paragraphes de l’offre de prêt et sur des lignes seules à différents endroits du document fait apparaître une taille de police de 3,0 mm.

Ce constat comme les vérifications effectuées par la cour ne permettent pas d’établir que l’offre de prêt soumise aux époux [G] a été rédigée en caractères dont la taille est manifestement insuffisante pour être inférieure au corps huit exigé par l’article R. 311-6 du code de la consommation.

L’offre de prêt comporte les mentions énumérées par ce même article et particulièrement en pages 1 et 2 l’encadré prévu par l’article L. 312-28.

Les informations exigées par ce texte sont présentées par rubriques, dont les titres correspondent à la liste de l’article R.312-10 et sous une forme plus aérée que le reste du contrat par l’emploi d’interlignes plus importants.

Les informations contenues dans cet encadré et relatives aux caractéristiques essentielles du crédit se détachent ainsi du reste du contrat.

Cette présentation satisfait aux obligations mises à la charge du prêteur qui ne saurait encourir la sanction de la déchéance du droit aux intérêts contractuels.

La société My Money Bank produit un décompte de sa créance conforme aux dispositions de l’article L.312-39 du code de la consommation détaillant le capital restant dû majoré des intérêts échus mais non payés, et une indemnité de 8 % du capital restant dû.

En conséquence, infirmant la décision de première instance, la cour condamnera M. et Mme [G] au paiement de la somme de 43 530,30 euros outre intérêts au taux contractuel de 4,12 % l’an à compter du 7 janvier 2022.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de le Creusot en date du 9 septembre 2022 en ce qu’il a :

– condamné solidairement M. [Z] [G] et Mme [N] [G] née [H] à payer à la SA My Money Bank la somme de 33 319,87 euros avec intérêts au taux légal, à compter du 7 janvier 2022,

– débouté l’ensemble des parties de toutes demandes plus amples ou contraires,

statuant à nouveau,

Condamne solidairement M. [Z] [G] et Mme [N] [G] née [H] à payer à la SA My Money Bank la somme de 43 530,30 euros avec intérêts au taux contractuel de 4,12 % l’an à compter du 7 janvier 2022,

Confirme le jugement dans ses autres dispositions,

y ajoutant,

Condamne in solidum M. [Z] [G] et Mme [N] [G] née [H] aux dépens de l’instance d’appel,

Déboute la SA My Money Bank de sa demande complémentaire en cause d’appel fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,

 


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