Droit de rétractation : Décision du 1 décembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 21/00027

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Droit de rétractation : Décision du 1 décembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 21/00027

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 9 – A

ARRÊT DU 01 DÉCEMBRE 2022

(n° , 19 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/00027 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CC3JY

Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 décembre 2019 – Tribunal d’Instance d’EVRY – RG n° 11-19-001078

APPELANTES

La société SOLFINEA anciennement dénommée BANQUE SOLFEA, société anonyme à conseil d’administration, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité

N° SIRET : 562 059 832 00138

[Adresse 2]

[Localité 9]

représentée par Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

substitué à l’audience par Me Christine LHUSSIER de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, société anonyme à conseil d’administration, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 542 097 902 04319

[Adresse 1]

[Localité 6]

représentée par Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

substitué à l’audience par Me Christine LHUSSIER de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMÉS

Monsieur [P] [H]

né le 24 septembre 1957 à [Localité 10] (54)

[Adresse 4]

[Localité 5]

représenté par Me Schmouel HABIB de la SELEURL HERACLES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1511

Madame [D] [L] épouse [H]

née le 15 septembre 1961 à [Localité 13] (ITALIE)

[Adresse 4]

[Localité 5]

représentée par Me Schmouel HABIB de la SELEURL HERACLES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1511

Maître Pascale HUILLE ERAUD en qualité de liquidateur judiciaire de la société FRANCE SOLAIRE ENERGIES (SA)

[Adresse 3]

[Adresse 12]

[Localité 7]

DÉFAILLANT

PARTIE INTERVENANTE

La SELARL C. BASSE, prise en la personne de Me Christophe BASSE, en qualité de mandataire ad hoc de la SARL France solaire énergies

[Adresse 3]

[Adresse 11]

[Localité 8]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

– RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

A la suite d’un démarchage à domicile, M. [P] [H] et Mme [L] [D] épouse [H] ont acquis, le 24 mai 2012, auprès de la société France solaire énergies, une installation photovoltaïque de production d’électricité outre un ballon d’eau chaude thermodynamique pour un montant de 23 500 euros.

Le même jour, M. et Mme [H] ont signé auprès de la société Banque Solfea un contrat de crédit affecté au financement de l’installation pour un montant de 23 500 euros remboursable en 197 mensualités dont 7 mensualités de 120 euros chacune et 178 mensualités de 207 euros chacune hors assurance, au taux d’intérêt nominal conventionnel de 5,79 % l’an.

M. [H] a attesté le 7 juillet 2012 de la livraison et de la pose du matériel acquis et le déblocage des fonds entre les mains du vendeur est intervenu le 16 juillet 2012.

Le raccordement de l’installation au réseau électrique a été réalisé le 29 octobre 2012 et un contrat d’achat de l’énergie produite a été validé par M. [H] auprès d’Electricité de France le 8 novembre 2013.

M. et Mme [H] ont procédé au remboursement anticipé du prêt.

Par jugement du tribunal de commerce d’Évry en date du 21 septembre 2015, la société France Solaire Énergies a été placée en liquidation judiciaire et Maître Pascale Huille-Eraud désignée en qualité de mandataire liquidateur. La procédure a été clôturée pour insuffisance d’actifs le 19 novembre 2021 et Maître Christophe Basse désigné en qualité de mandataire avec pour mission de poursuivre les instances en cours et de répartir le cas échéant les sommes perçues à l’issue de celles-ci.

Saisi le 28 février 2017 par M. et Mme [H] d’une demande tendant principalement à l’annulation des contrats de vente et de crédit affecté à l’encontre de la société Banque Solfea, le tribunal d’instance d’Evry, par jugement réputé contradictoire du 31 décembre 2019 auquel il convient de se reporter, a :

– rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société BNP Paribas personal finance venant aux droits de la banque Solfea,

– déclaré M. et Mme [H] recevables en leurs demandes,

– prononcé la nullité du contrat de vente et du contrat de prêt et rappelé qu’il appartient à M. et Mme [H] de restituer le matériel photovoltaïque et à Maître Pascale Huille-Eraud en qualité de liquidateur de la société France Solaires Energies, d’assurer sa dépose et la remise en état de la toiture,

– condamné la société BNP Paribas personal finance venant aux droits de la banque Solfea à la privation de sa créance de restitution des sommes empruntées,

– condamné la société BNP Paribas personal finance venant aux droits de la banque Solfea, à restituer aux époux [H] les sommes versées sans cause du fait de la nullité du contrat de crédit, soit une somme de 23 849,52 euros,

– débouté M. et Mme [H] de leurs demandes de dommages et intérêts,

– débouté la société BNP Paribas personal finance venant aux droits de la banque Solfea de sa demande de condamnation visant à lui restituer le matériel photovoltaïque,

– débouté la société BNP Paribas personal finance venant aux droits de la banque Solfea du surplus de ses demandes,

– condamné la société BNP Paribas personal finance venant aux droits de la banque Solfea, à la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Pour déclarer les demandes recevables, la juridiction a considéré que l’action de M. et Mme [H] tendait à obtenir la nullité des contrats de vente et de crédit sans qu’aucune demande en paiement d’une somme d’argent ou condamnation à une obligation de faire ne soit formulée à l’encontre de la société France Solaire Energies ou son liquidateur, de sorte qu’il n’y avait pas lieu à déclaration de créance à la procédure collective du vendeur.

Elle a considéré que le remboursement anticipé du prêt ne pouvait valoir renonciation à contester la validité du contrat de prêt de sorte que la demande était recevable à l’encontre de la société Banque Solfea.

Pour annuler le contrat de vente, la juridiction a principalement retenu au visa de l’article L. 121-23 du code de la consommation, que le bon de commande ne portait pas une désignation suffisante de la nature et des caractéristiques des biens vendus en l’absence de toute mention relative à la marque. Elle a relevé également un défaut de précision quant aux modalités et délai de livraison, aux modalités du crédit affecté et quant au nom du démarcheur.

Elle a considéré qu’un consommateur profane ne pouvait tirer du bon de commande aucune information probante sur les modalités d’installation ou le rendement technique des panneaux, qui constituent pourtant des caractéristiques essentielles des biens et services proposés.

Le premier juge a considéré que le fait que les acquéreurs se soient abstenus de toute protestation lors de la livraison et de la pose des matériels commandés en signant l’attestation de livraison avec demande de financement puis en s’acquittant des échéances du prêt ne suffisait pas à établir qu’ils avaient agi en connaissance de cause et renoncé tacitement à invoquer les vices de forme du contrat de vente.

La juridiction a retenu une négligence fautive de la banque dans la délivrance des fonds sans vérification de la régularité formelle du contrat financé, dont l’insuffisance d’indication des caractéristiques essentielles des matériels vendus était manifeste et donc aisément décelable par un professionnel. Elle a dispensé M. et Mme [H] de la restitution du capital prêté et condamné la banque à leur rembourser les versements effectués au titre des mensualités de l’emprunt. En l’absence de preuve d’un préjudice, M. et Mme [H] ont été déboutés de leur demande en indemnisation complémentaire sur le fondement de l’article 1240 du code civil.

Suivant déclaration enregistrée le 22 décembre 2020, la société Banque Solfea nouvellement dénommée Solfinea et la société BNP Paribas personal finance (ci-après dénommée BNPPPF) ont relevé appel de cette décision.

Dans leurs dernières conclusions remises le 1er septembre 2022, elles demandent à la cour :

– de déclarer recevable et bien fondée l’intervention forcée à l’instance de la Selarl C. Basse, en qualité de mandataire ad hoc de la société France solaire énergies,

– d’infirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions,

– de déclarer irrecevable la demande en nullité du contrat de vente et du contrat de crédit, à tout le moins de dire qu’elle n’est pas fondée et de débouter M. et Mme [H] de leurs demandes à ce titre ainsi que de leur demande en restitution des sommes versées,

– de déclarer irrecevable la demande visant au prononcé de la déchéance du droit aux intérêts contractuels, de la dire à tout le moins infondée et la rejeter,

– subsidiairement, en cas de nullité des contrats, de déclarer irrecevable la demande de M. et Mme [H] visant à la décharge de l’obligation de restituer le capital prêté, à tout le moins de les en débouter et de les condamner en conséquence in solidum à payer à la société Solfinea et subsidiairement à la société BNP Paribas personal finance la somme de 23 500 euros en restitution du capital prêté et de déclarer irrecevables les demandes visant à la privation de sa créance et à sa condamnation au paiement de dommages-intérêts, à tout le moins de rejeter les demandes à ce titre,

– très subsidiairement, de limiter la réparation qui serait due eu égard à la faute des emprunteurs ayant concouru à leur propre préjudice et de limiter en conséquence la réparation à concurrence du préjudice subi à charge pour M. et Mme [H] d’en justifier ; en cas de réparation par voie de dommages-intérêts, de limiter la réparation à hauteur du préjudice subi et de dire et juger que M. et Mme [H] restent tenus de restituer l’entier capital à hauteur de 23 500 euros,

– à titre infiniment subsidiaire, si la cour devait priver la société Solfinea et subsidiairement, la société BNPPPF de sa créance, de condamner in solidum M. et Mme [H] à payer la somme de 23 500 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable, d’enjoindre aux intéressés de restituer, à leurs frais, le matériel installé chez eux à la Selarl C. Basse, dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l’arrêt ainsi que les revenus perçus au titre de la revente d’électricité, et de dire et juger qu’à défaut de restitution, ils resteront tenus de la restitution du capital prêté ; subsidiairement, de priver M. et Mme [H] de leur créance en restitution des sommes réglées du fait de leur légèreté blâmable,

– de débouter M. et Mme [H] de toutes autres demandes, fins et conclusions,

– d’ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence,

– en tout état de cause, de condamner in solidum M. [H] et Mme [H] à payer à la société Solfinea et subsidiairement à la société BNPPPF la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.

Les appelantes s’estiment recevables et bien fondées à appeler en intervention forcée à la présente procédure, la Selarl C. Basse en tant que mandataire ad hoc de la société France solaire énergies.

Elles soulèvent l’irrecevabilité des demandes compte tenu d’un remboursement total anticipé du crédit par les emprunteurs lequel a produit un effet extinctif de l’obligation aux termes de l’article 1234 du code civil, dans la mesure où il a été fait en connaissance de cause et qu’il vaut reconnaissance de dette et empêche toute contestation ultérieure.

Elles estiment irrecevables les demandes en nullité des contrats faute de déclaration de créance à la procédure collective de la société France solaire énergies.

Elles soulèvent encore l’irrecevabilité des demandes, se fondant sur les dispositions de l’article 1134 du code civil qui prévoient une remise en cause exceptionnelle des contrats et sans mauvaise foi.

Elles invoquent le caractère irrecevable, à tout le moins non-fondé du grief tiré de la nullité du contrat de vente entraînant la nullité du contrat de crédit sur le fondement d’une irrégularité formelle du bon de commande au regard des dispositions de l’article L. 121-23 du code de la consommation.

Elles contestent toute irrégularité formelle du bon de commande au regard des dispositions de l’article L. 121-23 du code de la consommation, faisant état de ce que l’imprécision d’une mention ne peut pas être sanctionnée par la nullité, contrairement à l’absence d’une mention. Elles estiment que la désignation du matériel est suffisamment précise et que le premier juge est allé au-delà des exigences textuelles. Elles font remarquer que les conditions d’exécution du contrat de vente figurent aux conditions générales de vente.

S’agissant des clauses afférentes aux garanties du matériel et au bordereau de rétractation, elles précisent que la nullité n’est pas encourue et que le bon de commande est parfaitement lisible. Elles font valoir que M. et Mme [H] n’ont pas émis de contestation à la réception de l’installation et ont exécuté le contrat pendant plus de quatre ans.

Elles estiment que M. et Mme [H] sont défaillants dans la charge de la preuve qui leur incombe d’établir le dol allégué.

Subsidiairement, elles font valoir que les acquéreurs ont confirmé le contrat par son exécution volontaire et en manifestant la volonté de conserver le matériel et de l’utiliser, de sorte qu’ils ont renoncé de manière non équivoque et en connaissance de cause à se prévaloir d’une irrégularité purement formelle du bon de commande. Elles ajoutent que l’acquéreur ne peut pas d’un côté solliciter la nullité des contrats et de l’autre poursuivre leur exécution par revente de l’électricité à EDF.

A défaut d’annulation du contrat de vente entraînant l’annulation du contrat de crédit, elles rappellent que le contrat de crédit doit recevoir exécution.

En cas d’annulation des contrats, elles estiment irrecevable ou mal fondée la demande visant à la privation de la créance de la banque alors que les acquéreurs ont poursuivi l’exécution volontaire des contrats et les ont confirmés, renonçant ainsi à opposer tout moyen de contestation afférent à une irrégularité formelle du bon de commande ou à une faute dans le déblocage des fonds.

Elles contestent toute faute de la banque dans la vérification de la régularité du bon de commande alors qu’aucun texte ne prévoit une telle obligation à la charge de l’établissement de crédit dont le défaut serait sanctionné par la déchéance de son droit à restitution du capital en cas de nullité des contrats. Elles rappellent que l’indemnisation à l’égard de l’emprunteur est limitée à hauteur du préjudice subi, dont l’existence doit être prouvée.

Elles contestent toute faute liée au versement des fonds puisque la banque n’a fait qu’exécuter l’ordre de paiement donné par son mandat, conformément aux règles du mandat. Subsidiairement, elles rappellent que le déblocage des fonds a été réalisé après réception d’un certificat de livraison.

Elles soutiennent que les intimés ne démontrent pas l’existence d’un préjudice ou d’un lien de causalité avec la faute de la banque puisque l’installation fonctionne et que les clients produisent de l’électricité.

Elles relèvent par ailleurs que la nullité des contrats de vente et de crédit affecté emporterait obligation pour les emprunteurs de restituer le capital emprunté. Pour autant, elles font observer que, du fait de la liquidation judiciaire de la société France solaire énergies, le matériel restera entre les mains des acquéreurs qui pourront librement l’utiliser, ce qu’elles souhaitent voir être pris en compte dans le calcul des restitutions à opérer, aux termes des articles 174 à 1796 du code civil. En tout état de cause, elles soutiennent que même si une faute était reconnue, les acquéreurs devraient restituer la part du capital ayant financé le matériel conservé.

Elles soulignent enfin que la légèreté blâmable avec laquelle M. et Mme [H] ont signé l’attestation de fin de travaux constitue une faute occasionnant un préjudice correspondant au capital prêté dont la banque serait privée.

S’agissant des autres fautes soulevées à l’encontre de la banque, elles soulèvent l’irrecevabilité de la demande de dommages et intérêts ou son caractère mal fondé, compte tenu du risque de double indemnisation.

Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels, elles soutiennent qu’il s’agit d’une demande nouvelle non formée en première instance et donc irrecevable en application de l’article 564 du code de procédure civile et qu’elle est prescrite car formée au-delà du délai de prescription quinquennale prévu par l’article L. 110-4 du code de commerce applicable aux actions mixtes entre consommateurs et commerçants.

Elles la jugent infondée en ce que la banque a respecté les obligations mises à sa charge par le code de la consommation. Elles précisent que c’est à l’employeur du personnel formé qu’il appartient de produire l’attestation de formation du personnel aux fins de contrôle et non à l’établissement de crédit, que la preuve n’est pas rapportée d’une participation à un dol commis par le vendeur et qu’il n’existait aucun risque d’endettement de sorte qu’elle n’était pas tenue d’un devoir de mise en garde. Elles indiquent que la banque a bien respecté ses obligations précontractuelles d’information.

Suivant conclusions remises le 5 septembre 2022, M. et Mme [H] requièrent la cour :

– de confirmer la décision rendue en ce qu’elle a rejeté les fins de non-recevoir soulevées par la banque, les a déclarés recevables en leurs demandes, a prononcé l’annulation des contrats, privé la banque de sa créance de restitution des sommes empruntées, avec restitution des sommes versées sans cause du fait de la nullité du contrat de crédit, soit une somme de 23 849,52 euros, débouté la société BNPPPF de sa demande de restitution du matériel, débouté la société BNPPPF du surplus de ses demandes et condamné cette société à leur verser la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– d’infirmer la décision en ce qu’elle les a déboutés de leurs demandes de dommages et intérêts,

– de débouter la société BNPPPF de l’ensemble de ses moyens, fins et conclusions,

– à titre subsidiaire, de prononcer la déchéance du droit de la banque aux intérêts du crédit affecté,

– en tout état de cause, de condamner in solidum la société BNPPPF et la banque Solfea à leur verser les sommes de :

– 4 554 euros au titre de la remise en état de la toiture et de la suppression du branchement de l’installation,

– 3 000 euros au titre de leur préjudice financier et du trouble de jouissance,

– 3 000 euros au titre de leur préjudice moral,

– de condamner in solidum la société BNPPPF et la banque Solfea à leur payer une somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Les intimés soutiennent au visa de l’article L. 622-21 du code de commerce, que leur demande est recevable puisqu’elle vise au prononcé de la nullité des contrats de vente et de crédit, sans aucune demande en paiement de somme d’argent.

Ils estiment que le remboursement anticipé du crédit ne peut fonder une fin de non-recevoir en ce que la banque ne s’appuie sur aucune disposition légale et que l’action n’est absolument pas fondée sur une répétition de l’indu. Ils contestent également toute irrecevabilité sur la base d’un prétendu enrichissement sans cause dès lors qu’ils n’ont pas l’intention de conserver l’installation qui ne correspond pas à ce qui avait été convenu au départ avec France solaire Energies.

Ils font état au visa de l’article L. 121-23 de la consommation, d’une insuffisance du bon de commande quant à la désignation des biens vendus, en l’absence de mention de la marque, du modèle, de la référence, de l’aspect, de la dimension, de la couleur et du poids des panneaux photovoltaïques, en l’absence de mention de la marque, du modèle, des références, de la performance, de la dimension, du poids de l’onduleur et du ballon thermodynamique. Ils dénoncent l’absence de mention relative aux modalités de pose (impact visuel, orientation, inclinaison) et au délai de livraison et de mise en service. Ils indiquent ne pas avoir reçu de plan technique.

Ils font valoir que les modalités de financement sont imprécises à défaut de mention relative à la durée de la phase de report d’amortissement, au nombre de mensualités, au montant d’une mensualité, au taux effectif global, au taux nominal, au nom de l’organisme préteur et au coût global du crédit. Ils dénoncent l’absence de précision quant au coût de l’installation.

Ils invoquent une absence de lisibilité du bon de commande et son ambiguïté en ce qu’il fait état d’une simple candidature, le caractère contradictoire des mentions relatives aux garanties des matériels, des conditions générales de vente non rédigées en caractères clairs et apparents. Ils font état de l’absence de nom du démarcheur.

Ils invoquent encore la nullité du bon de commande en raison d’un formulaire de rétractation qui ne peut être séparé sans endommager le contrat et notamment la signature des parties, l’identité du démarcheur, la date et le lieu de signature du contrat, ainsi que l’identité du vendeur. Ils soutiennent que certaines mentions figurant à l’article R. 121-5 du code de la consommation ne sont pas reproduites.

Ils dénoncent des abstentions malicieuses, la référence à un partenariat mensonger avec EDF fait par la société France solaire énergies, des agissements dolosifs caractérisés par la présentation fallacieuse de la rentabilité de l’installation.

Ils soutiennent que la société France solaires énergies a commis un dol s’agissant de sa présentation de l’objet de l’ensemble contractuel et de son caractère définitif.

Ils rappellent que par application de l’article L. 311-32 du code de la consommation, la nullité du contrat de vente doit entraîner la nullité du contrat de crédit affecté.

Ils contestent avoir confirmé les irrégularités du bon de commande en expliquant qu’en tant que consommateurs profanes, ils n’étaient pas en mesure de déceler immédiatement les causes de nullité du contrat et de rétracter leur consentement. Ils font observer que les travaux ont été réalisés le 7 juillet 2012, soit, avant même l’envoi par la banque des modalités de financement du prêt et du tableau d’amortissement par courrier daté du 16 juillet 2012 de sorte qu’au jour de la signature dudit procès-verbal, ils n’avaient qu’une connaissance biaisée de leurs engagements auprès de la banque et qu’en conséquence, ils ne pouvaient valablement y renoncer.

Ils invoquent une faute de la banque qui a consenti un crédit et débloqué les fonds sur la base d’un bon de commande nul, sans vérification auprès des emprunteurs et du vendeur et alors que l’installation n’était que partielle puisque la mise en service n’a eu lieu que plusieurs mois après la livraison. Ils prétendent que la banque aurait dû s’informer de la faisabilité du projet et qu’elle est dans l’impossibilité de se prévaloir de l’attestation de livraison pour s’exempter de sa responsabilité.

Ils soutiennent que leur préjudice se tire nécessairement de l’effet produit par la nullité des contrats à savoir que le vendeur doit récupérer son matériel alors que la restitution du capital emprunté constituerait, pour la banque, une somme indûment perçue.

En l’absence de nullité des contrats, les intimés entendent mettre en jeu la responsabilité de la banque et sollicitent à ce titre la somme de 24 000 euros. Ils soutiennent que les fautes de la banque, tel que décrites leur causent nécessairement un lourd préjudice notamment au regard de leur situation financière compliquée. Ils invoquent un préjudice qui s’analyse en une perte de chance de ne pas contracter.

A titre subsidiaire, ils invoquent les dispositions des articles 1134, 1135 et 1147 du code civil et L. 311-8 du code de la consommation, pour solliciter la déchéance du droit aux intérêts de la société Banque Solfea. Ils prétendent que l’établissement de crédit ne s’est pas intéressé à leur situation financière, à leurs capacités de paiement avec évaluation des conséquences que le crédit peut avoir sur leur situation, aux garanties offertes. Ils mettent en cause la responsabilité de la banque quant à ses devoirs d’information, de mise en garde et de conseil relatifs à des consommateurs profanes quant à l’opportunité économique du projet et au caractère illusoire des rendements escomptés.

Ils évaluent à la somme de 4 554 euros le montant de remise en état de leur toiture et à la suppression du branchement de l’installation, selon devis versé aux débats, à 3 000 euros leur préjudice financier et de jouissance faisant remarquer que les charges de crédit ont eu pour conséquences de réduire leur niveau de vie durant plusieurs années et d’obérer leur trésorerie disponible, et à 3 000 euros leur préjudice moral.

Suivant acte délivré le 25 mai 2022 à personne morale, les sociétés Solfinea et BNP Paribas personal finance ont fait assigner en intervention forcée la Selarl C. Basse prise en la personne de Christophe Basse en qualité de mandataire ad hoc de la société France solaire énergies. La Selarl C. Basse n’a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l’appelante, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 6 septembre 2022 et l’affaire a été appelée à l’audience du 12 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, la cour constate :

– que si la société BNP Paribas personal finance est intervenue en première instance comme venant aux droits de la société Solfea nouvellement dénommée Solfinea, elle ne justifie pas de cette qualité à hauteur d’appel et ne prétend pas non plus venir aux droits de la société Solfea alors que ces deux sociétés distinctes ont bien relevé appel du jugement de première instance,

– que doit être déclarée recevable l’intervention forcée à la présente procédure, de la Selarl C. Basse, en qualité de mandataire ad hoc de la société France Solaire Energies,

– que le contrat de vente conclu le 24 mai 2012 entre la société France Solaire Energies et M. et Mme [H] est soumis aux dispositions des articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation, dans leur rédaction en vigueur au jour du contrat issue de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993, dès lors qu’il a été conclu dans le cadre d’un démarchage à domicile,

– que le contrat de crédit affecté conclu le même jour entre M. et Mme [H] et la société Banque Solfea est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu’il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,

– qu’il convient de faire application des dispositions du code civil en leur version antérieure à l’entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.

Il résulte du dernier alinéa de l’article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.

Sur les fins de non-recevoir

Les appelantes soulèvent dans le corps de leurs écritures le caractère irrecevable, à tout le moins non-fondé du grief tiré de la nullité du contrat de vente entraînant la nullité du contrat de crédit sur le fondement d’une irrégularité formelle du bon de commande au regard des dispositions de l’article L. 121-23 du code de la consommation.

Cette fin de non-recevoir n’est pas reprise dans le dispositif des écritures de sorte qu’il ne sera pas statué spécifiquement sur ce point par application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile.

– Sur la fin de non-recevoir tirée du remboursement anticipé total valant reconnaissance de dette

La société Solfinea soutient que le remboursement anticipé intégral du prêt par M. et Mme [H] vaut reconnaissance non équivoque de la dette leur interdisant de remettre en cause celui-ci par des moyens de contestation qu’ils avaient omis de faire valoir.

Elle fait valoir qu’en application de l’article 1234 ancien du code civil dans sa rédaction applicable au litige, le remboursement par anticipation du crédit litigieux, qui vaut reconnaissance de dette, a emporté extinction de la dette initiale au titre de ce contrat de crédit.

Elle n’invoque cependant aucune disposition légale selon laquelle un tel paiement ferait obstacle à l’action en annulation du contrat de vente conclu par M. et Mme [H] avec la société France Solaire Energies.

M. et Mme [H] sont donc recevables en leur action de ce chef, à laquelle le remboursement du crédit est indifférent, étant observé que l’annulation du contrat de crédit affecté et désormais remboursé ne constituerait qu’une conséquence de plein droit de l’annulation ou de la résolution du contrat principal.

Par ailleurs, le remboursement du crédit affecté ne fait pas obstacle à une action en responsabilité à l’encontre du prêteur de deniers sur le fondement de ses obligations spécifiques et qui tend à l’octroi de dommages-intérêts et non pas à la restitution d’un indu.

En conséquence, c’est à bon droit que le premier juge a rejeté la fin de non-recevoir tirée de ce chef et reçu M. et Mme [H] en leur action. Le jugement est confirmé sur ce point.

– Sur la fin de non-recevoir pour défaut de déclaration de la créance au passif de la procédure collective de la société France solaire énergies

Les appelantes invoquent l’irrecevabilité des demandes en l’absence de déclaration de créance dans la procédure collective de la société France solaire énergies, estimant que les demandes, introduites tendent indirectement au paiement d’une somme d’argent.

Selon l’article L. 622-21 du code de commerce, le jugement d’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire interrompt ou interdit toute action en justice tendant à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent ou à la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent. L’article L.622-22 prévoit que les instances en cours sont interrompues jusqu’à que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance.

Si la société France Solaire Énergies fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d’actifs, force est de constater que M. et Mme [H] n’ont formé aucune demande de condamnation pécuniaire à l’encontre de celle-ci, mais bien une demande de nullité du contrat de vente et du contrat de crédit affecté prononcée par le premier juge et discutée à hauteur d’appel, peu important que cette action soit susceptible d’entraîner des restitutions.

L’absence de déclaration de créance au passif de la procédure collective de la société France Solaire Énergies par M. et Mme [H] est donc indifférente à la recevabilité de leur action à l’encontre de cette société.

C’est donc à juste titre que le premier juge a rejeté la fin de non-recevoir soulevée à ce titre. Le jugement est confirmé sur ce point.

– Sur la fin de non-recevoir soulevée sur le fondement de l’article 1134 du code civil

Les appelantes se fondent dans leurs écritures sur l’article 1134 alinéa 1 du code civil pour invoquer le caractère irrecevable et à tout le moins infondé de la demande en annulation des contrats, faisant état du caractère exceptionnel de la remise en cause d’un contrat par une partie qui ne doit pas agir de mauvaise foi.

Ce faisant, il n’est pas expliqué en quoi le non-respect des dispositions de l’article 1134 du code civil en leur version applicable en la cause viendraient fonder une irrecevabilité des demandes formulées.

Il s’ensuit qu’aucune irrecevabilité n’est encourue de ce chef et que la fin de non-recevoir formée à ce titre en cause d’appel doit être rejetée.

Sur la nullité du contrat de vente et du contrat de crédit

– Sur la nullité pour non-respect du formalisme contractuel

L’article L. 121-23 dispose : « Les opérations visées à l’article L. 121-21 doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

1° Noms du fournisseur et du démarcheur ;

2° Adresse du fournisseur ;

3° Adresse du lieu de conclusion du contrat ;

4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;

5° Conditions d’exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d’exécution de la prestation de services ;

6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l’intérêt et le taux effectif global de l’intérêt déterminé dans les conditions prévues à l’article L. 313-1 ;

7° Faculté de renonciation prévue à l’article L. 121-25, ainsi que les conditions d’exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 ».

Selon l’article L. 121-24 du même code, le contrat visé à l’article L. 121-23 doit comprendre un formulaire détachable destiné à faciliter l’exercice de la faculté de renonciation dans les conditions prévues à l’article L. 121-25.

L’article L. 121-25 alinéa 1 du même code prévoit que dans les sept jours, jours fériés compris, à compter de la commande ou de l’engagement d’achat, le client a la faculté d’y renoncer par lettre recommandée avec accusé de réception.

Les articles R. 121-3 et R. 121-5 précisent que le formulaire détachable destiné à faciliter l’exercice de la faculté de renonciation prévu à l’article L. 121-25 fait partie de l’exemplaire du contrat laissé au client. Il doit pouvoir en être facilement séparé.

En application de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l’espèce, M. et Mme [H] ne produisent qu’une copie de mauvaise qualité du seul recto du bon de commande signé le 24 mai 2012. Les appelantes produisent quant à elle une copie de meilleure qualité du recto et du verso dudit bon de commande lequel décrit l’objet de la vente comme suit :

« 1 Installation solaire photovoltaïque d’une puissance globale de 3000 Wc, comprenant

12 panneaux photovoltaïques certifiés NF EN 61215 Classe II 250 Wc

1 Système intégré au bâti ‘ Onduleur ‘ Coffret de protection ‘ Disjoncteur ‘ Parafoudre

1Forfait d’installation de l’ensemble (à l’exclusion d’éventuelles tranchées)

1Démarches administratives (Mairie, Région, EDF, ERDF, Consuel). Assurance RC et PE

1La mise en service, le Consuel et le tirage des câbles entre le compteur et l’onduleur sont inclus

1 forfait raccordement inclus

1 éco-participation (valeur 805 €)

1 ballon thermodynamique 200 l ».

Il convient de relever que c’est en ajoutant au texte précité que le premier juge a retenu que le bon de commande aurait dû préciser la marque des matériels vendus sans caractériser in concreto en quoi l’absence de cet élément était de nature à affecter la compréhension par l’acquéreur de l’objet du contrat. Il en est de même des références, de l’aspect des panneaux ainsi que de leur dimension, couleur et poids ou encore du modèle, des références, de la performance, de la dimension et du poids de l’onduleur et du ballon thermodynamique.

Il convient de relever que le descriptif des matériels vendus permettait suffisamment aux acquéreurs de comparer utilement les produits proposés avec d’autres produits présents sur le marché et de vérifier la complète installation des éléments avant de signer l’attestation de fin de travaux, étant précisé que l’absence de remise de plans techniques n’est pas une cause de nullité du contrat. Le bon de commande satisfait donc au 4° du texte susvisé.

Le bon de commande mentionne bien le prix global à payer à savoir 23 500 euros TTC ainsi que les modalités de financement au moyen d’un crédit de ce montant souscrit auprès de Solfea par 7 mensualités de 120 euros et 178 mensualités de 2017 euros au taux effectif global de 5,95 %. La durée de la phase d’amortissement de 11 mois est également précisée.

Le contrat de crédit souscrit le même jour par M. et Mme [H] porte mention de l’organisme prêteur, de la somme empruntée, de la durée du crédit, de la durée de l’amortissement, du montant et du nombre des mensualités à payer, du taux débiteur fixe, du taux annuel effectif global ainsi que du coût total du crédit de sorte que l’ensemble des éléments d’information relatifs au financement de l’opération ont été portés à la connaissance des emprunteurs.

Le bon de commande satisfait donc au 6° du texte susvisé.

En revanche, le bon de commande ne comporte aucune mention informant utilement les acquéreurs des modalités et du délai de livraison des biens ou d’exécution de la prestation de services, en contradiction avec le 5° de l’article susvisé.

Le bon de commande encourt donc la nullité sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs invoqués.

L’article 1338 du code civil dispose que : « A défaut d’acte de confirmation ou ratification, il suffit que l’obligation soit exécutée volontairement après l’époque à laquelle l’obligation pourrait être valablement confirmée ou ratifiée. La confirmation, ratification, ou exécution volontaire dans les formes et à l’époque déterminées par la loi, emporte la renonciation aux moyens et exceptions que l’on pouvait opposer contre cet acte, sans préjudice néanmoins du droit des tiers ».

Il est admis que la nullité sanctionnant le non-respect des obligations prescrites au vendeur par les articles précités, est une nullité relative qui peut être couverte par le consommateur qui, en toute connaissance des irrégularités affectant le contrat entend néanmoins en poursuivre l’exécution et s’en prévaloir. Il incombe à celui qui s’oppose à l’annulation du contrat d’établir que le consommateur avait connaissance des irrégularités du contrat et qu’il a renoncé à s’en prévaloir par des actes non équivoques.

En l’espèce, les emprunteurs ont apposé leur signature sous une clause du bon de commande par laquelle ils reconnaissent avoir pris connaissance des termes et conditions figurant au verso et en particulier des dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-26 du code de la consommation y figurant et applicables aux ventes à domicile. La simple lecture de ces dispositions suffit à informer une personne normalement avisée des exigences de la réglementation en matière de démarchage à domicile et plus particulièrement des mentions nécessaires à la validité du bon de commande et aux conditions d’annulation de la commande.

M. et Mme [H] ont manifesté leur renoncement à se prévaloir de la nullité du contrat de vente par le fait qu’ils n’ont pas souhaité faire jouer leur faculté de rétractation, par la réception de l’installation sans réserve valant déblocage des fonds au profit du vendeur, par l’exploitation qu’ils ont faite de leur installation, sans émettre aucune critique sur la qualité de l’installation photovoltaïque et sur son fonctionnement postérieurement à son raccordement au réseau électrique le 29 octobre 2012 et en réglant les échéances mensuelles de remboursement du crédit avant remboursement anticipé du crédit.

Ce renoncement est encore patent par la vente de l’électricité produite par leur installation raccordée, à la société EDF depuis le 8 novembre 2013 et encore postérieurement à l’introduction de leur action en justice, ce qui n’est pas contesté.

En conséquence, M. et Mme [H] ne peuvent se prévaloir, presque cinq ans après la signature du bon de commande, de la nullité formelle du bon de commande.

– Sur la nullité pour dol

M. et Mme [H] soulèvent encore la nullité du contrat de vente pour vice du consentement sur le fondement des articles 1109 et 1116 du code civil et L. 111-1 du code de la consommation.

Selon l’article 1116 du code civil, dans sa rédaction alors applicable, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man’uvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces man’uvres, l’autre partie n’aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé.

Selon les dispositions de l’article L. 111-1 du code de la consommation en sa version applicable du 25 juillet 2010 au 14 juin 2014, tout professionnel vendeur de biens doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien. Le fabricant ou l’importateur de biens meubles doit informer le vendeur professionnel de la période pendant laquelle les pièces indispensables à l’utilisation des biens seront disponibles sur le marché. Cette information est obligatoirement délivrée au consommateur par le vendeur, avant la conclusion du contrat.

En l’espèce, les appelants allèguent que le vendeur a fait preuve de réticences dolosives concernant les caractéristiques essentielles des biens vendus et certaines informations ayant trait au délai de raccordement, à l’assurance obligatoire à souscrire en cas d’acquisition de tels matériels, à la location obligatoire d’un compteur de production auprès de la société EDF et à la durée de vie des matériels et notamment, celle de l’onduleur électrique.

Ils indiquent que s’ils avaient su que de tels frais seraient à engager sur les 20 années à venir, à savoir la somme de 7 500 à 10 000 euros, leur refus aurait été catégorique, s’agissant d’une installation qui ne devait formellement rien leur coûter.

Ils précisent communiquer aux débats des informations relatives aux choix d’un onduleur, choix qu’ils n’ont là pas eu à connaître et démontrant que les prix hors pose varient entre 1 300 et 2 000 euros en fonction de la performance et de la marque de celui-ci.

Ils font aussi état de ce que le vendeur a évoqué des partenariats mensongers avec EDF pour pénétrer leur habitation et qu’il a usé de man’uvres dolosives caractérisées par une présentation fallacieuse de la rentabilité de l’installation.

Ils produisent au soutien de leurs allégations une fiche d’informations relatives aux onduleurs, des lettres d’EDF et d’ERDF adressés à des usagers, la plaquette éditée par France solaire énergies intitulée « Certains vous promettent la lune…nous vous garantissons le soleil, crédit d’impôt +économies d’énergies +revente à EDF =placement rentable ! », le slogan EDF « EDF, Changer l’énergie ensemble- L’énergie est notre avenir, économisons-là », la copie du recto du bon de commande et un extrait de documentation du vendeur.

Les exemples de courriers adressés à d’autres usagers ne concernent pas le présent litige et les autres éléments communiqués sont insuffisants à établir les réticences ou man’uvres alléguées.

Il n’est pas démontré en quoi il serait critiquable pour la société venderesse de faire état de partenariat avec la société EDF dès lors que le raccordement de l’installation et la possibilité de vendre l’électricité produite dépendent d’elle.

Il n’est pas non plus démontré que la société France solaire énergies ait fait état de perspectives de rendement chiffrées qu’elle savait fallacieuses ou qu’elle se serait engagée sur une quelconque rentabilité de l’installation ni sur la performance de son installation photovoltaïque. Les intimés ne produisent à cet égard aucune pièce permettant de renseigner la cour sur les capacités effectives de leur installation basée sur une estimation réalisée sur la durée de vie de l’installation.

M. et Mme [H] soutiennent encore que le contrat leur a été présenté comme une simple candidature sans engagement soumise à la confirmation de sa parfaite viabilité économique et de son autofinancement et que d’ailleurs le contrat s’intitule « demande de candidature au programme Maison Verte » avec la mention « Sous réserve de faisabilité technique administrative et d’autofinancement ».

Ces allégations ne sont nullement étayées. Au demeurant, il est remarqué que le fait de signer le bon de commande et de signer simultanément le contrat de crédit s’y rapportant suffisait à informer une personne normalement avisée qu’elle s’engageait dans une relation contractuelle ferme, sauf exercice du droit de rétractation.

Les prétentions des appelants relatives à un dol non démontré sont donc rejetées.

Il n’a donc pas lieu à annulation du contrat de vente et le contrat de crédit n’est pas nul de plein droit au sens de l’article L. 311-32 du code de la consommation.

Sur la responsabilité de la société banque Solfea

Si M. et Mme [H] invoquent une faute de la société banque Solfea pour avoir consenti un crédit et débloqué les fonds sur la base d’un bon de commande nul, les motifs qui précèdent rendent sans objet ce grief dès lors que le bon de commande n’est pas annulé.

Ils soutiennent également que la banque a commis une faute en libérant des fonds sans vérifier que les travaux prévus au contrat étaient finalisés jusqu’au raccordement au réseau électrique et la mise en service de l’installation permettant la signature d’un contrat de rachat d’électricité. Ils estiment que le prêteur ne peut se fonder sur l’attestation de fin de travaux produite qui ne présume pas de l’exécution complète des travaux y compris le raccordement.

Selon l’article L. 311-31 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige, les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation. En cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d’interruption de celle-ci.

Les dispositions de l’article L. 311-51 du même code en leur version applicable au litige prévoient que le prêteur est responsable de plein droit à l’égard de l’emprunteur de la bonne exécution des obligations relatives à la formation du contrat de crédit, que ces obligations soient à exécuter par le prêteur qui a conclu ce contrat ou par des intermédiaires de crédit intervenant dans le processus de formation du contrat de crédit, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.

Il incombe donc au prêteur de vérifier que l’attestation de fin de travaux suffit à déterminer que la prestation promise a été entièrement achevée.

En revanche, il n’appartient pas au prêteur de s’assurer par lui-même de l’exécution des prestations et il ne saurait être garant de l’exécution du contrat principal.

Il est rappelé que le contrat de crédit souscrit prévoir expressément que les fonds sont versés à la livraison du bien au bénéficiaire mentionné dans l’attestation de fin de travaux.

C’est au vu du certificat de livraison signé le 7 juillet 2012 par M. [H] que la société Solfea a procédé au déblocage des fonds directement entre les mains du vendeur le 16 juillet 2012.

Le certificat de livraison permet d’identifier sans ambiguïté l’opération financée au moyen du contrat de crédit signé par M. et Mme [H] le 24 mai 2012. L’acquéreur atteste que les travaux objets du financement qui ne couvrent pas le raccordement au réseau électrique et les autorisations administratives éventuelles sont terminés et conformes au devis et il demande à la banque Solfea de payer la somme de 23 500 euros représentant le montant du crédit après expiration des délais légaux. Les opérations de raccordement au réseau électrique et de mise en service de l’installation échappant à la compétence de la société France solaire énergies et il ne saurait être reproché à la banque de n’avoir pas opéré de contrôle quant à des autorisations données par des organismes tiers, ni quant à la réalisation effective du raccordement au réseau électrique relevant d’ERDF, structure également tiers par rapport à l’ensemble contractuel.

Cette attestation est donc suffisante pour apporter la preuve de l’exécution du contrat principal sans qu’aucune faute ne soit établie à l’encontre de l’organisme financeur.

Il n’est pas non plus expliqué en quoi la banque aurait dû s’informer de la faisabilité du projet.

M. et Mme [H] ne justifient par ailleurs d’aucun préjudice en lien direct avec les conditions de libération du capital de 23 500 euros.

Il s’ensuit que le jugement doit être infirmé en ce qu’il a retenu que la faute commise par la société Solfea devait conduire à dispenser M. et Mme [H] d’avoir à restitution du capital prêté et en ce qu’il a condamné la société BNPPPF venant aux droits de la société Solfea à restituer à M. et Mme [H] le montant des sommes dont ils se sont acquittées au titre du prêt à hauteur de 23 849,52 euros. Le jugement doit être confirmé en ce qu’il a débouté la société BNPPPF venant aux droits de Solfea de sa demande en restitution du matériel sauf à dire que cette demande visait la société Solfea banque.

Le jugement est également confirmé en ce qu’il a débouté M. et Mme [H] de leur demande de dommages et intérêts à l’encontre de la banque sur le fondement de l’article 1240 du code civil pour des fautes non prouvées.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

Les intimés réclament à titre subsidiaire que la banque soit déchue de son droit aux intérêts.

Les appelantes s’opposent à cette demande comme étant irrecevable car nouvelle en cause d’appel sur le fondement des articles 564 du code de procédure civile et prescrite car formée au-delà du délai de prescription quinquennale prévu par l’article L. 110-4 du code de commerce applicable aux actions mixtes entre consommateurs et commerçants. Elles la jugent mal fondée.

En application de l’article 564 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

L’article 567 du même code rend recevable à hauteur d’appel les demandes formées à titre reconventionnel.

M. et Mme [H] sollicitent pour la première fois en cause d’appel, dans leurs conclusions numéro 1 déposées le 13 juillet 2021, la déchéance du droit aux intérêts de la banque.

En l’absence de toute demande en paiement formée par le prêteur au titre de l’exécution du contrat de crédit, la demande de déchéance du droit aux intérêts constitue non pas un moyen de défense, mais une demande reconventionnelle tendant à la restitution d’intérêts trop perçus. Cette demande qui se rattache avec un lien suffisant aux prétentions formées par M. et Mme [H], est donc recevable par application des textes susvisés.

En application de l’article L. 110-4 du code de commerce, les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.

La demande de déchéance du droit aux intérêts du prêteur, formée le 13 juillet 2021 soit plus de cinq années à compter de la conclusion du contrat de crédit le 24 mai 2012, doit être déclarée irrecevable comme étant prescrite au regard du texte susvisé.

Sur les autres demandes

Les dispositions du jugement querellé relatives aux dépens et frais irrépétibles sont infirmées.

M. et Mme [H] qui succombent en leurs prétentions sont tenus aux entiers dépens de première instance et d’appel. Ils sont condamnés à payer à la société Solfinea anciennement dénommée Banque Solfea, la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le surplus des demandes des parties est rejeté.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, en dernier ressort, par arrêt réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe,

Déclare recevable l’intervention forcée à la présente instance de la Selarl C. Basse, en qualité de mandataire ad hoc de la société France Solaire Energies ;

Rejette la fin de non-recevoir soulevée sur le fondement de l’article 1134 du code civil ;

Déclare irrecevable comme étant prescrite la demande tendant à la déchéance du droit aux intérêts de la société Banque Solfea ;

Infirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a rejeté les fins de non-recevoir liées au remboursement anticipé du crédit et à l’absence de déclaration de créance au passif de la procédure collective du vendeur, a reçu M. et Mme [H] en leur action, les a déboutés de leur demande de dommages et intérêts, a rejeté la demande de restitution du matériel photovoltaïque ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés, et y ajoutant,

Déboute M. [P] [H] et Mme [D] [L] épouse [H] de l’intégralité de leurs demandes ;

Rappelle que M. [P] [H] et Mme [D] [L] épouse [H] sont redevables de plein droit du remboursement des sommes perçues en exécution du jugement qui est infirmé ;

Déboute les parties de toute autre demande ;

Condamne in solidum M. [P] [H] et Mme [D] [L] épouse [H] aux dépens de première instance et d’appel, ces derniers pouvant être recouvrés directement par la Selas Cloix & Mendes-Gil conformément à l’article 699 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum M. [P] [H] et Mme [D] [L] épouse [H] à payer à la société Solfinea anciennement dénommée Banque Solfea la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

La greffière La présidente

 


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