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République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 1
ARRÊT DU 07/09/2023
N° de MINUTE : 23/749
N° RG 21/03199 – N° Portalis DBVT-V-B7F-TVUM
Jugement (N° 20-002302) rendu le 19 Mars 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Lille
APPELANTE
SA Cofidis dont l’une des enseignes est Sofémo Financement agissant en la personne de son représentant légal domicilié audit siège
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentée par Me Xavier Hélain, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
INTIMÉS
Monsieur [F] [X]
né le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 8] (Italie) – de nationalité Française
[Adresse 7]
[Localité 3]
Représenté par Me Jérémie Boulaire, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
SARL Eneopro prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Marie Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué assisté de Me David Deharbe, avocat au barreau de Lille avocat plaidant
DÉBATS à l’audience publique du 10 mai 2023 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Yves Benhamou, président de chambre
Catherine Ménegaire, conseiller
Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 07 septembre 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 12 avril 2023
EXPOSE DU LITIGE
Le 21 avril 2016, M. [X] a contracté auprès de la société Eneopro une prestation relative à l’installation d’un système photovoltaïque et d’un ballon thermodynamique pour un montant de 29’900 euros TTC, dans le cadre d’un démarchage à domicile.
Le même jour, M. [X] a accepté une offre préalable de crédit auprès de la société Cofidis exerçant sous la marque ‘Sofemo financement’, affecté à la réalisation d’une prestation de ‘panneaux photovoltaïques’ d’un montant de 29’900 euros, remboursables en 180 mensualités, précédées d’un différé de paiement de 11 mois, incluant les intérêts au taux nominal annuel de 5,61 %.
Par actes d’huissier délivrés les 12 et 13 août 2020, M. [X] a fait assigner la société Eneopro et la société Cofidis en justice aux fins d’obtenir la nullité des contrats de vente et de crédit affecté.
Par jugement contradictoire en date du 19 mars 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille a :
– écarté les conclusions en réponse n° 1 de M. [X] communiquées tardivement,
– débouté M. [X] de sa demande de nullité du contrat de vente du 21 avril 2016 conclu avec la société Eneopro et du contrat de crédit affecté du 21 avril 2016 conclu avec la société Cofidis exerçant sous la marque ‘Sofemo financement’,
– prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels du contrat de crédit souscrit le 21 avril 2016 entre M. [X] et la société Cofidis,
– condamné la société Cofidis à payer à M. [X] la somme de 17’421,69 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision,
– débouté la société Eneopro et la société Cofidis du surplus de leurs demandes,
– condamné M. [X] aux dépens de l’instance,
– condamné M. [X] à payer à la société Cofidis la somme de 850 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [X] à payer à la société Eneopro la somme de 850 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– ordonné l’exécution provisoire du jugement à intervenir.
Par déclaration reçue par le greffe de la cour le 11 juin 2021, la société Cofidis a relevé appel du jugement en ce qu’il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels, l’a condamnée à payer à M. [X] la somme de 17’421,69 euros avec intérêts au taux légal, et l’a déboutée de ses demandes.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 25 février 2022, la société Cofidis demande à la cour de :
– donner acte à la société Cofidis qu’elle s’en rapporte sur la nullité des conventions et sur les fautes qui lui sont reprochées,
à titre principal, si la cour confirmait le jugement sur la nullité des conventions et la déchéance du droit aux intérêts,
– infirmer le jugement sur le quantum de la condamnation de M. [X],
– infirmer le jugement ce qu’il a condamné la société Cofidis à payer à M. [X] la somme de 17’421,69 euros au taux légal à compter de la signification de la décision,
statuant à nouveau,
– condamner la société Cofidis à payer à M. [X] la somme de 2 574,39 euros au taux légal à compter de la signification de l’arrêt à intervenir,
à titre subsidiaire, si la cour prononçait la nullité des conventions :
– juger que le capital remboursé par anticipation par M. [X] à la société Cofidis d’un montant de 29’900 euros lui reste acquis en l’absence de préjudice,
– condamner M. [X] à rembourser à la société Cofidis la somme de 17’421,69 euros perçus en vertu de l’exécution provisoire du jugement,
– condamner la société Cofidis à payer à M. [X] la somme de 2 574,39 euros au taux légal à compter de la signification de l’arrêt à intervenir correspondant aux seuls intérêts perçus,
à titre plus subsidiaire, si la cour condamnait la société Cofidis à rembourser à M. [X] l’intégralité des sommes perçues en capital et intérêts,
– infirmer le jugement toutes ses dispositions,
statuant à nouveau,
– condamner la société Eneopro à payer à la société Cofidis la somme de 47’322 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,
à titre infiniment subsidiaire,
– condamner la société Eneopro à rembourser à la société Cofidis la somme de 29’900 euros sur le fondement de l’enrichissement sans cause,
en tout état de cause,
– condamner la société Eneopro à relever et garantir la société Cofidis de toute condamnation qui pourrait être mise à sa charge au profit M. [X],
– condamner tout succombant à payer à la société Cofidis une indemnité d’un montant de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 6 décembre 2021, M. [X] demande à la cour de :
– confirmer le jugement en ce qu’il a,
– dit que la nullité du contrat de vente est encourue,
– prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels du contrat de crédit souscrit le 21 avril 2016 entre M. [X] et la société Cofidis,
– condamné la société Cofidis à payer à M. [X] la somme de 17’421,69 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision,
– débouté la société Eneopro et la société Cofidis du surplus de leurs demandes,
– infirmer le jugement pour le surplus,
– constater et en tant que de besoin prononcer la nullité du contrat de vente conclu entre la société Eneopro et M. [X],
– condamner la société Eneopro à restituer à M. [X] l’intégralité du prix de vente de l’installation litigieuse à savoir la somme de 29’900 euros,
– condamner la société Eneopro à procéder à la reprise du matériel litigieux et à la remise en état de l’immeuble de M. [X] dans les 15 jours de la signification de la décision à intervenir, après avoir pris les dispositions auprès de M. [X],
– constater et en tant que de besoin, prononcer la nullité du contrat de prêt affecté conclu entre M. [X] et la société Cofidis,
– constater que la société Cofidis a commis une faute dans le déblocage des fonds et par conséquent qu’elle doit être privée de sa créance de restitution du capital emprunté,
– condamner solidairement la société Eneopro et la société Cofidis à verser à M. [X] les sommes suivantes :
– 29’900 euros correspondant intégralité du prix de vente de l’installation,
– 17’421,69 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés par M. [X] à la société Cofidis en exécution du prêt souscrit,
– 5 000 euros au titre du préjudice moral,
– 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile tant de première instance que d’appel,
– rejeter toutes demandes, prétentions plus amples ou contraires aux présentes,
– condamner solidairement la société Eneopro et la société Cofidis à supporter les dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 22 février 2022, la société Eneopro demande à la cour de :
A titre principal,
– confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Lille du 19 mars 2021 en ce qu’il a débouté M. [X] de sa demande de nullité du contrat de vente du 20 avril 2016 et du contrat de crédit affecté conclu avec la société Cofidis,
– confirmer le jugement en ce qu’il a condamné M. [X] au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens d’instance, et en ce qu’il a ordonné l’exécution provisoire,
– infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Lille du 19 mars 1021 ce qu’il a débouté la société Eneopro du surplus de ses demandes,
y ajoutant par voie d’infirmation, et statuant à nouveau,
– déclarer M. [X] mal fondé en toutes ses demandes, fins et conclusions et l’en débouter,
– débouter la société Cofidis de toutes ses prétentions à l’encontre de la société Eneopro,
– déclarer le contrat conclu le 21 avril 2016 valide,
à titre subsidiaire, si la cour prononçait la nullité du contrat principal et la nullité du contrat de crédit :
– déclarer que la société Cofidis a commis une faute,
– condamner la société Cofidis à restituer la somme de 29’900 euros, soit l’intégralité du prix de vente de l’installation photovoltaïque à M. [X],
– condamner la société Cofidis aux frais de l’enlèvement de l’installation,
à titre infiniment subsidiaire, si la cour prononçait la nullité du contrat principal et la nullité du contrat de crédit,
– ordonner la restitution de l’installation photovoltaïque ainsi que le ballon thermodynamique aux frais de M. [X],
– ordonner la restitution de la valeur des fruits tirés de la production d’électricité, en ce compris les économies réalisées et des fruits tirés de la revente depuis la mise en service en date du 5 octobre 2016,
en tout état de cause,
– condamner solidairement tout succombant à payer à la société Eneopro la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance, outre la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l’exposé de leurs moyens.
La clôture de l’affaire a été rendue le 12 avril 2023, et l’affaire fixée pour être plaidée à l’audience du 10 mai 2023.
MOTIFS
Sur la nullité du contrat de vente
Le contrat de vente ayant été conclu le 1er avril 2016, il y a lieu d’appliquer les dispositions du code la consommation issue de la loi n° 2014-344 du 20 décembre 2014.
En vertu des articles L.121-18-1 du code de la consommation, les contrats conclus hors établissement doivent faire l’objet d’un contrat écrit et daté dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat. Il comprend, à peine de nullité, toutes les informations prévues au I de l’article L.121-17, dont les informations prévues aux articles L.111-1 et L.111-2 du code de la consommation, et lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit. Le contrat doit être accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L.121-17.
Selon l’article L.111-1 du code de la consommation, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° les caractéristiques essentielles du bien ou du service compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné,
2° le prix du bien ou du service en application de l’article L.113-3 et L.113-3-1,
3° en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service,
4° les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que s’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique, et le cas échéant, à son intéropérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en oeuvre des garanties et autres conditions contractuelles. La liste et le contenu de ces informations sont fixées par décret en conseil d’Etat ; (…)’
En l’espèce, l’exemplaire du bon de commande produit aux débats porte sur la fourniture et la pose d’un Kit photovoltaïque de 6 Kwc de marque Solarworld composé de 24 panneaux de 250 Wc chacun, avec un onduleur centralisé de marque Schneider et d’un ballon thermodynamique de marque Atlantic d’une contenance de 270 litres. La société Eneopro s’est engagée à accomplir l’ensemble des démarches administratives et de raccordement, dont les frais sont à sa charge.
M. [X] fait valoir que le bon de commande comporte plusieurs irrégularités en ce qu’ils ne mentionne pas les caractéristiques essentielles des bien offerts à la vente, notamment la marque, la taille, le poids, les dimensions et le prix unitaires des panneaux, ni le délai de livraison, ce que conteste la société Eneopro qui affirme que le bon de commande est suffisamment renseigné quant aux caractéristiques essentielle des biens et aux modalités et délais de livraison, le délai maximal de livraison indiqué au contrat étant de 6 mois à compter de sa signature.
En application de l’article L.111-1 du code de la consommation, seules doivent figurer au bon de commande les caractéristiques essentielles des biens offerts à la vente, de façon à permettre au consommateur d’appréhender clairement la portée de son engagement, ce qui ne comprend pas de désignation particulièrement précise comme le poids, la taille, la surface des panneaux, qui n’ont donc pas à être mentionnés obligatoirement au bon de commande à peine de nullité.
En l’espèce, la marque des panneaux(Solaword), leur puissance (250 Wc), la marque de l’onduleur (Schneider), et celle du chauffe- eau thermodynamique (Atlantic) et sa contenance (270 Litres) renseignent suffisamment le consommateur sur les caractéristiques essentielles des biens offerts à la vente et lui permettent d’appréhender clairement l’étendue de ses engagements et de comparer les caractéristiques de la centrale et du chauffe-eau avec les autres types de centrales et de chauffe-eau sur le marché photovoltaïque.
Par ailleurs, en vertu de l’article L.111-1 2° le bon de commande doit comporter ‘le prix du bien ou du service en application de l’article L.112-1 à L.112-4, L42″. Il n’y a pas lieu d’ajouter à la loi une condition qu’elle ne comporte pas, en sorte que la mention d’un prix global, sans référence au prix unitaire des panneaux, est suffisante.
S’agissant du délai de livraison, le bon de commande prévoit au recto que ‘la date maximale le livraison est de 6 mois à compter de la date de ce contrat d’équipement’.
Or, alors que le contrat conclu implique des opérations à la fois matérielles de livraison et d’installation du matériel commandé, mais également des démarches administratives et de raccordement, cette mention est insuffisante pour répondre aux exigences de l’article L. 111-1, 3°du code de la consommation, dès lors qu’il n’est pas distingué entre le délai de pose des modules, et autres matériels et celui de réalisation des prestations à caractère administratif et qu’un tel délai global, particulièrement imprécis, ne permet pas aux acquéreurs de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aurait exécuté ses différentes obligations.
Dès lors, sur ce point, le bon de commande litigieux contrevient manifestement aux dispositions du code de la consommation prescrites à peine de nullité sans que le consommateur ait à démontrer le caractère déterminant pour son consentement des informations manquantes, s’agissant d’une nullité d’ordre public.
La société venderesse fait valoir que M. [X], consommateur averti pour avoir déjà acquis une centrale photovoltaïque, a confirmé la nullité invoquée dans le mesure où il a exécuté volontairement le contrat en connaissance des éventuels vices affectant le bon de commande.
Si la violation du formalisme prescrit par les dispositions précitées du code de la consommation, et qui a pour finalité la protection des intérêts de l’acquéreur démarché, est sanctionnée par une nullité relative à laquelle il peut renoncer par une exécution volontaire de son engagement irrégulier, il résulte des dispositions de l’article 1338 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable à la date de conclusion du contrat, que la confirmation tacite d’un acte nul est subordonnée à la double condition que son auteur ait eu connaissance du vice l’affectant et qu’il ait eu l’intention de le réparer.
La renonciation à se prévaloir de la nullité du contrat par son exécution doit, dès lors que la confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et l’intention de le réparer, être caractérisée par sa connaissance préalable de la violation des dispositions destinées à le protéger.
La circonstance selon laquelle M. [X] avait déjà souscrit un contrat de fourniture de panneaux photovoltaïques n’est pas suffisante à le considérer comme étant averti.
En outre, le rappel aux conditions générales du bon de commande des dispositions du code de la consommation ne sauraient suffire à établir que l’acquéreur a agi en toute connaissance de cause et renoncé à invoquer les vices de forme du contrat de vente alors que, pour que la confirmation soit valable, il faut que son auteur ait pris conscience de la cause de nullité qui affecte l’acte et que la connaissance certaine de ce vice ne peut résulter, pour un consommateur profane, du seul rappel des dispositions du code de la consommation.
Par conséquent, aucun de ses actes postérieurs à la signature du bon de commande ne saurait être considéré comme une confirmation tacite de la nullité par l’acheteur.
Il y a donc lieu d’infirmer le jugement entrepris, et d’annuler le contrat de vente conclu entre la société Enepro et M. [X] le 21 avril 2016.
L’annulation du contrat de vente conduit à remettre les parties en l’état antérieur à la conclusion du contrat de vente.
La société Eneopro sera donc condamnée à restituer à M. [X] le prix de vente de 29 900 euros.
Elle sera également condamnée, à ses frais, à enlever l’installation photovoltaïque litigieuse et à remettre en état le toit de l’immeuble appartenant à M. [X], et ce sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard commençant à courir 2 mois après la signification de la présente décision, et ce pendant 3 mois.
Par ailleurs, si les fruits et revenus doivent en principe être restitués avec le bien lui-même, il y a lieu de dispenser de cette restitution le contractant de bonne foi, qui ignorait le vice qui entachait le contrat, et qui a pu les consommer. Cette dispense prend fin au jour où le contractant apprend la cause de nullité.
Il y a donc lieu de condamner M. [X] à restituer à la société Eneopro les revenus tirés de la centrale photovoltaïque, et ce à compter du 12 août 2020, date de l’assignation à laquelle il a nécessairement connu les vices entachant le bon de commande susceptibles d’entraîner sa nullité.
Sur l’annulation du crédit accessoire
En application du principe de l’interdépendance des contrats constatée par l’article L.311-32 dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 du code de la consommation, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
Dès lors, il y a lieu d’infirmer le jugement et de constater la nullité de plein droit du contrat accessoire de crédit du 21 avril 2016 conclu entre M. [X] et la société Cofidis, en application des dispositions susvisées.
Sur les conséquences de l’annulation du contrat de crédit
Les annulations prononcées entraînent en principe la remise des parties en l’état antérieur à la conclusion des contrats. Ainsi, l’annulation du contrat de prêt en conséquence de celle du contrat de vente qu’il finançait emporte, pour l’emprunteur, l’obligation de rembourser au prêteur le capital prêté, peu important que ce capital ait été versé directement au vendeur par le prêteur, sauf si l’emprunteur établi l’existence d’une faute du prêteur et d’un préjudice consécutif à cette faute. Elle emporte également pour le prêteur l’obligation de restituer les sommes déjà versées par l’emprunteur.
Cependant, le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution peut être privé de tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
En l’espèce, à défaut de délai de livraison mentionné, le bon de commande était manifestement affecté d’un vice de forme au regard des dispositions du code de la consommation, et la banque, professionnelle dispensatrice de crédits affectés, a commis une faute en ne vérifiant pas sa régularité avant le déblocage des fonds.
Cependant, en l’espèce, de par l’effet de plein droit de l’annulation du contrat de vente prononcée, la société Eneopro qui ne fait l’objet d’aucune procédure collective et est in bonis, doit restituer les prix de vente à M. [X], lequel correspond au capital emprunté, de sorte que ce dernier ne subit pas de préjudice et ne saurait en conséquence être dispensé de rembourser le capital emprunté.
Dans ces conditions, il convient de condamner M. [X] à rembourser à la société Cofidis le capital emprunté de 29 900, et de condamner la société Cofidis à rembourser à M. [X] l’ensemble des sommes versées par lui en exécution du contrat de crédit;
Il résulte de l’historique du compte produit aux débats par la société Cofidis que M. [X] a remboursé le prêt par anticipation le 20 juin 2017 et lui a ainsi réglé la somme totale de 32 474,39 euros, et non la somme retenue à tort par le premier juge de 47 321,69 euros.
Dès lors, après compensation entre les sommes dues entre les parties, il y a lieu de réformer le jugement et de condamner la société Cofidis à payer à M. [X] la somme de 2 574,39 euros.
Le contrat de crédit ayant été annulé, il n’y a pas lieu d’examiner la déchéance du prêteur de son droits aux intérêts contractuels.
Sur les demandes de dommages et intérêts
Selon l’article 9 du code de procédure civile ‘Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.’
M. [X] sollicite la condamnation de la société Eneopro et de la société cofidis à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de préjudice moral du fait de ‘la prise de conscience de ce qu’il a été dupé par l’installateur compte tenu de la non-réalisation des performances et du rendement annoncé.’
Cependant, l’intimé ne rapportent pas la preuve qui lui incombe des manoeuvres ou mensonges de la société venderesse, ni que la rentabilité de l’installation était entrée dans le champs contractuel et l’a déterminé à contracter. M. [X] ne rapporte donc pas la preuve d’une faute de la société Eneopro à ce titre, ni n’explique en quoi son prétendu préjudice serait consécutif à la faute de la banque.
Confirmant le jugement déféré, M. [X] sera en conséquence débouté de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral formée à l’encontre de la société venderesse et de la banque.
Sur les demandes formées par la société Cofidis à l’encontre du vendeur
Sur le fondement de l’article 6 de la convention de partenariat signée avec la société Eneopro en date le 6 janvier 2016 qui stipule ‘le vendeur est responsable à l’égard de Cofidis de la bonne exécution des obligations mises à sa charge lors de l’accord de crédit et plus généralement au titre de la présente convention. Il assume les conséquences financières qui pourraient découler de non-respect de ses obligation par lui et par ses préposés et supportera toute perte pouvant en résulter pour les établissements de crédit en capital, intérêts et frais’, la banque demande la condamnation de la société Eneopro à lui payer la somme de 47 311 euros, correspondant au capital et intérêts du crédit affecté. Elle formule la même demande sur le fondement de la faute délictuelle commise par la société venderesse.
Toutefois, la société Cofidis n’est pas privée de sa créance de restitution du capital prêté par les emprunteurs et par ailleurs, a elle-même commis des fautes dans l’opération litigieuse en acceptant de financer un contrat de vente affecté de causes de nullité, en sorte qu’elle sera déboutée de ses demandes en paiement et en garantie formées à l’encontre de la société venderesse.
Elle sera également déboutée de sa demande à l’encontre la société Eneopro fondée sur l’enrichissement sans cause dont elle ne rapporte pas la preuve, dès lors qu’elle obtient la restitution du capital prêté et que la venderesse doit, sans le cadre de l’annulation du contrat de vente, restituer à M. [X] le prix de vente de 29 900 euros.
Sur les demandes accessoires
Le jugement sera réformé en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.
Les société Eneopro et Cofidis, succombant principalement, seront condamnées in solidum aux dépens de première instance et d’appel en application de l’article 696 du code de procédure civile, ainsi qu’à payer à M. [X] la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt contradictoire ;
Réforme le jugement en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant ;
Prononce l’annulation du contrat de vente conclu entre M. [X] et la société Eneopro le 21 avril 2016 ;
Constate en conséquence la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté conclu entre M. [X] et la société Cofidis le 21 avril 2016 ;
Condamne la société Eneopro à payer à M. [X] la somme de 29 900 euros en restitution du prix de vente ;
Condamne la société Eneopro à enlever l’installation photovoltaïque litigieuse et à remettre en état le toit de l’immeuble appartenant à M. [X], le tout à ses frais, et ce sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard commençant à courir 2 mois après la signification du présent arrêt, et ce pendant 3 mois ;
Condamne la société Cofidis à payer à M. [X] la somme de 2 574,39
euros ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Condamne in solidum la société Eneopro et Cofidis à payer à M. [X] la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure
civile ;
Condamne in solidum la société Eneopro et la société Cofidis aux dépens de première instance et d’appel.
Le greffier
Gaëlle PRZEDLACKI
Le président
Yves BENHAMOU