Droit de rétractation : 6 juillet 2023 Cour d’appel de Caen RG n° 21/00021

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Droit de rétractation : 6 juillet 2023 Cour d’appel de Caen RG n° 21/00021
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AFFAIRE : N° RG 21/00021 –

N° Portalis DBVC-V-B7F-GVBT

 

ARRÊT N°

JB.

ORIGINE : DECISION du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CHERBOURG OCTEVILLE

en date du 05 Novembre 2020 – RG n° 19/000479

COUR D’APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 06 JUILLET 2023

APPELANTE :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

N° SIRET : 542 097 902

[Adresse 1]

[Localité 5]

prise en la personne de son représentant légal

représentée par Me France LEVASSEUR, avocat au barreau de CAEN,

assistée de Me Laure REINHARD, avocat au barreau de NIMES

INTIMES :

Madame [X] [I]

née le 26 Juin 1977 à [Localité 8]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Monsieur [H] [N]

né le 06 Mai 1975 à [Localité 7]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentés par la SELARL SEROT-MINET AVOCATS, avocat au barreau de CAEN,

assistés de Me Samuel HABIB, avocat au barreau de PARIS

S.E.L.A.R.L. BALLY MJ mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la société AGENCE FRANCE ECOLOGIE

[Adresse 4]

[Localité 6]

prise en la personne de son représentant légal

non représentée, bien que régulièrement assignée

DEBATS : A l’audience publique du 15 mai 2023, sans opposition du ou des avocats, M. GOUARIN, Conseiller, a entendu seul les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme LE GALL, greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme EMILY, Président de Chambre,

Mme COURTADE, Conseillère,

M. GOUARIN, Conseiller,

ARRÊT prononcé publiquement le 06 juillet 2023 à 14h00 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Madame EMILY, président, et Mme COLLET, greffier

* * *

EXPOSE DES FAITS, DE LA PROCEDURE ET DES PRETENTIONS

Par acte sous seing privé conclu le 30 avril 2015 dans le cadre d’un démarchage à domicile, M. [H] [N] et Mme [X] [I] (les acquéreurs) ont commandé auprès de la SARL Agence France écologie une installation photovoltaïque, moyennant un prix de 20.000 euros TTC.

Ce bon de commande portait sur une installation solaire photovoltaïque d’une puissance globale de 3.000 Wc comprenant 12 panneaux photovoltaïques certifiés NF EN 61215 classe II de type monocristallin, un système d’intégration au bâti, un onduleur, des coffrets de protection, des disjoncteurs, des coffrets parafoudre ainsi que sur la mise en service, le consuel, le tirage des câbles entre le compteur et l’onduleur, les démarches administratives (mairie, ERDF, consuel, etc…) et le coût du raccordement au réseau ERDF.

Le même jour, la société Sygma banque, aux droits de laquelle vient la SA BNP Paribas personal finance (la banque), a consenti aux acquéreurs un crédit affecté d’un montant de 20.000 euros destiné à financer cette installation, remboursable en 132 mensualités hors différé d’amortissement, au taux d’intérêt nominal de 5,86 % l’an.

Le 22 mai 2015, M. [N] a signé un certificat de livraison, attestant que les travaux avaient été réalisés par l’Agence France écologie et demandant le versement des fonds au profit de cette dernière.

Le 27 mai 2015, la banque a procédé au déblocage des fonds au profit du vendeur.

Le 4 juin 2015, le maire de la commune où était située l’installation a pris un arrêté de non-opposition.

Le 29 juillet 2015, le consuel a établi une attestation de conformité de l’installation en cause.

Le raccordement de l’installation a été effectué le 10 septembre 2015, un contrat d’achat étant signé le 2 décembre 2015 entre les acquéreurs et EDF à effet au 10 septembre 2015.

Le mensualités du crédit affecté sont régulièrement payées par les acquéreurs.

Par jugement rendu le 8 février 2017 par le tribunal de commerce de Bobigny, la société Agence France écologie a été placée en liquidation judiciaire et la SELARLU Bally MJ a été désignée comme mandataire liquidateur.

Suivant actes d’huissier du 28 juin 2019, les acquéreurs ont fait assigner la SELARLU Bally MJ, ès qualités de mandataire liquidateur de l’Agence France écologie et la banque devant le tribunal de grande instance de Cherbourg aux fins, notamment, de voir annuler le contrat de vente et, par voie de conséquence, le contrat de crédit affecté.

Par jugement du 5 novembre 2020, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Cherbourg-en-Cotentin a :

– déclaré recevables les demandes formées par les demandeurs,

– prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 30 avril 2015 entre, d’une part, l’Agence France écologie, représentée par la SELARLU Bally MJ, ès qualités, et, d’autre part, M. [N] et Mme [I],

– constaté la nullité de plein droit du contrat de prêt affecté conclu le 30 avril 2015 entre, d’une part, les demandeurs et, d’autre part, la banque,

– condamné la banque à restituer aux emprunteurs l’ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit affecté conclu le 30 avril 2015, soit la somme de 10.661,42 euros au titre des sommes versées au 5 janvier 2020 inclus,

– condamné l’Agence France écologie, représentée par la SELARLU Bally MJ, ès qualités, à payer aux acquéreurs la somme de 4.587,23 euros correspondant au devis de remise en état de la toiture, en réparation du préjudice subi,

– fixé cette créance de 4.587,23 euros au passif de la liquidation judiciaire de l’Agence France écologie, représentée par la SELARLU Bally MJ, ès qualités,

– débouté la banque de demande tendant au remboursement du capital prêté et à l’octroi de dommages-intérêts,

– débouté les demandeurs de leur demande de dommages-intérêts à l’encontre de la banque,

– débouté les parties du surplus de leurs demandes,

– condamné in solidum l’Agence France écologie, représentée par la SELARLU Bally MJ, ès qualités, et la banque à payer aux demandeurs la somme de 1.000 euros à titre d’indemnité de procédure ainsi qu’aux dépens.

Selon déclaration du 5 janvier 2021, la banque a interjeté appel de cette décision.

Par dernières conclusions du 4 avril 2023, l’appelante demande à la cour de juger recevable et bien-fondé son appel, de réformer le jugement attaqué en ce qu’il a prononcé l’annulation des contrats, retenu l’existence d’une faute du prêteur et privé ce dernier de son droit à restitution du capital prêté, statuant à nouveau, de dire n’y avoir lieu de prononcer l’annulation du contrat principal de vente, de dire n’y avoir lieu à prononcer l’annulation du contrat de crédit, de déclarer irrecevable la demande des intimés tendant à voir prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels ou, à tout le moins, de déclarer cette demande mal-fondée, de débouter en conséquence les intimés de toutes leurs demandes.

Subsidiairement, elle demande à la cour de dire que la banque n’a commis aucune faute, de dire que les intimés ne justifient pas de l’existence d’un préjudice et d’un lien de causalité à l’égard du prêteur, de condamner solidairement M. [N] et Mme [I] à lui rembourser la somme de 20.000 euros correspondant au capital prêté, outre intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition des fonds, de dire que la banque devra rembourser aux emprunteurs les échéances versées, après justification de leur part de la résiliation du contrat conclu avec EDF, de la restitution à EDF des sommes perçues au titre de la revente d’énergie et au Trésor public des crédits d’impôts perçus, de débouter les acquéreurs de toute autre prétention et, en tout état de cause, de condamner ceux-ci à lui verser la somme de 1.000 euros à titre d’indemnité de procédure ainsi qu’aux entiers dépens.

Par dernières conclusions du 29 mars 2023, M. [N] et Mme [I] demandent à la cour de confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 30 avril 2015 entre, d’une part, l’Agence France écologie, représentée par la SELARLU Bally MJ, ès qualités, et, d’autre part, M. [N] et Mme [I], constaté la nullité de plein droit du contrat de prêt affecté conclu le 30 avril 2015 entre, d’une part, les demandeurs et, d’autre part, la banque, condamné la banque à restituer aux emprunteurs l’ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit affecté conclu le 30 avril 2015, soit la somme de 10.661,42 euros au titre des sommes versées au 5 janvier 2020 inclus, débouté la banque de demande tendant au remboursement du capital prêté et à l’octroi de dommages-intérêts, condamné in solidum l’Agence France écologie, représentée par la SELARLU Bally MJ, ès qualités, et la banque à leur payer la somme de 1.000 euros à titre d’indemnité de procédure ainsi qu’aux dépens

Ils sollicitent l’infirmation du jugement entrepris en ce qu’il les a déboutés de leur demande de dommages-intérêts à l’encontre de la banque et, statuant à nouveau de ce chef, de condamner la banque à leur verser la somme de 10.700 euros à titre de dommages-intérêts sauf à parfaire.

À titre infiniment subsidiaire, ils demandent à la cour, si la faute de la banque n’était pas retenue, de prononcer la déchéance du droit de cette dernière aux intérêts du crédit affecté et d’ordonner la poursuite du paiement des échéances mensuelles du prêt hors intérêts et assurance selon un nouveau tableau d’amortissement.

En tout état de cause, ces intimés demandent à la cour de condamner la banque au paiement des sommes de 4.587,23 euros au titre de leur préjudice financier, 3.000 euros au titre de leur préjudice économique et de leur trouble de jouissance et 3.000 euros au titre de leur préjudice moral, celle de 3.000 euros à titre d’indemnité de procédure ainsi qu’aux entiers dépens.

À titre infiniment subsidiaire, si la cour les déboutait de toutes leurs demandes, ils demandent qu’il soit dit et jugé qu’ils reprendront le paiement mensuel des échéances du prêt.

La SELARLU Bally MJ, ès qualités, n’a pas constitué avocat, la déclaration d’appel lui ayant été signifiée à personne le 19 février 2021.

La mise en état a été clôturée le 12 avril 2023.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens, il est référé aux dernières écritures des parties.

MOTIFS DE LA DECISION

1. Sur la recevabilité de la demande des intimés tendant à voir prononcer la déchéance du droit de la banque aux intérêts contractuels

Aux termes de l’article 564 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

Au visa de ce texte, la banque demande que soient déclarée irrecevable comme nouvelle en appel la demande formée par les emprunteurs tendant à voir le prêteur déchu de son droit aux intérêts conventionnels.

Il ressort des énonciations du jugement entrepris ainsi que des dernières conclusions signifiées par M. [N] et Mme [I] en première instance que la demande tendant à voir le prêteur déchu de son droit aux intérêts conventionnels n’a pas été formée devant le premier juge.

Cette demande ne tend pas aux mêmes fins au sens de l’article 565 du code de procédure civile que celles tendant à l’annulation des contrats litigieux formées en première instance, dès lors que celles-ci ont pour effet de mettre à néant lesdits contrats, alors que la demande tendant à voir prononcer la déchéance du droit aux intérêts conventionnels du prêteur laisse ces contrats subsister.

Elle ne constitue pas davantage l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaires des prétentions initiales au regard de l’article 566 du code de procédure civile ou encore une demande reconventionnelle au sens de l’article 567.

Cette demande sera donc déclarée irrecevable.

2. Sur la validité des contrats de vente et de prêt

2.1 Sur la régularité du contrat de vente

Sur la régularité du contrat de vente au regard des dispositions du code de la consommation

Dans les contrats conclus hors établissement, doivent être fournies au consommateur, en complément des informations pré-contractuelles générales précitées, les informations précisées à l’article L. 121-17 ancien du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige, qui dispose:

‘I. Préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’État ;

3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;

4° L’information sur l’obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d’un contrat de prestation de services, de distribution d’eau, de fourniture de gaz ou d’électricité et d’abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l’exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l’article L. 121-21-5 ;

5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l’article L. 121-21-8, l’information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation;

6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l’utilisation de la technique de communication à distance, à l’existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’État’

Par ailleurs, l’article L. 121-18-1 ancien du même code énonce:

‘Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties. Ce contrat comprend, à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l’article L. 121-17.

Le contrat mentionne, le cas échéant, l’accord exprès du consommateur pour la fourniture d’un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l’expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l’exercice de son droit de rétractation.

Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° du I de l’article L. 121-17.’

L’absence d’une seule mention obligatoire justifie le prononcé de la nullité du contrat.

Selon l’article L. 121-18-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige, le professionnel fournit au consommateur un exemplaire du contrat conclu hors établissement sur papier signé ou sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties. Ce contrat comprend, à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l’article L. 121-17, lequel renvoie à l’article L. 111-1.

Aux termes de l’article L. 111-1 du code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi n°2014-344 du 17 mars 2014, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° les caractéristiques essentielles du bien ou du service compte tenu du support de communication utilisé ou du bien ou service concerné ;

2° le prix du bien ou du service en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1 ;

3° en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4° les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques ou électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte ainsi que, s’il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles. La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d’État

Le professionnel est tenu de communiquer au consommateur les informations figurant à l’article R. 111-1 dans sa rédaction issue du décret n°2014-1061 du 17 septembre 2014 applicable au contrat en cause.

Ces dispositions sont d’ordre public en application de l’article L. 111-7.

En l’espèce, le bon de commande signé le 30 avril 2015 par M. [N] et Mme [I] mentionne une installation solaire photovoltaïque d’une puissance globale de 3.000 Wc comprenant 12 panneaux photovoltaïques certifiés NF EN 61215 classe II de type monocristallin, un système d’intégration au bâti, un onduleur, des coffrets de protection, des disjoncteurs, des coffrets parafoudre ainsi qu’un forfait d’installation de l’ensemble, la mise en service, le consuel, le tirage des câbles entre le compteur et l’onduleur, les démarches administratives (mairie, ERDF, consuel, etc…) et le coût du raccordement au réseau ERDF pour un prix de 20.000 euros TTC.

Pour annuler le contrat de vente litigieux au visa des articles L. 121-18-1, L. 121-7 et L. 111-1 du code de la consommation, le premier juge a retenu que le bon de commande ne comportait pas la marque des matériels fournis, le poids et la surface des panneaux, le prix unitaire de ceux-ci, le prix hors taxes, toutes taxes comprises tant des panneaux que du système d’intégration à la toiture, de délai de livraison ni ses modalités, ne distinguait pas le prix des matériaux et de la main-d”uvre, ne précisait pas la durée et les modalités de réalisation des travaux, reprenait de manière insuffisante les modalités de règlement en ce que la société de crédit, la réglementation sur la vente à crédit n’était pas indiquée, si bien que les acquéreurs n’avaient pas été à même de comprendre leurs engagements contractuels et les modalités du contrat souscrit.

Cependant, ni le poids ni la surface unitaire des panneaux ne constituent des caractéristiques essentielles du bien commandé, pas davantage que la marque de l’onduleur.

Il en est de même du prix unitaire et hors taxes et de la distinction entre le prix des matériaux et de la main-d”uvre

Il en résulte que les principaux éléments de l’installation sont désignés de façon suffisamment précise pour garantir l’information complète des acquéreurs à laquelle le vendeur est tenu.

Dès lors que la nature et les caractéristiques du bien commandé sont indiquées, aucune disposition n’impose de détailler le prix unitaire de chacun des composants de la prestation, notamment de mentionner le prix unitaire de chaque panneau, de distinguer le coût des matériaux de celui de la main-d”uvre ou de préciser le prix hors taxes.

En effet, l’installation en cause constitue un tout indissociable dont le consommateur ne peut acheter chaque élément séparément, de sorte que la mention du prix unitaire ne saurait être exigée à peine de nullité du contrat, seul la mention du prix global de l’installation constituant une condition de validité de la commande.

Les dispositions des articles L. 113-3 du code de la consommation applicables au litige n’exigent pas que soient indiquées sur le bon de commande les modalités de paiement du prix, notamment le recours à un crédit affecté et son taux effectif global.

Les dispositions de l’article L. 121-3 du code de la consommation invoquées par les acquéreurs dans leurs dernières conclusions, antérieures à la loi n°2014-344 du 17 mars 2014, ne sont pas applicables au contrat litigieux, conclu le 30 avril 2015.

Au demeurant, le bon de commande litigieux mentionne le mode de règlement du prix, indiquant que celui-ci sera assuré par un crédit d’un montant de 20.000 euros dont les caractéristiques sont précisées, en ce compris le coût total de ce crédit.

Par ailleurs, M. [N] et Mme [I] ont souscrit, le 30 avril 2015, auprès de la société Sygma banque une offre préalable de crédit affecté mentionnant le montant du capital emprunté, la durée et les modalités de son remboursement ainsi que le taux d’intérêt, offre dont la conformité aux dispositions du code de la consommation n’est pas discutée.

Concernant le délai et les modalités de livraison, le bon de commande ne mentionne aucune date de livraison. Les conditions générales de vente figurant au dos du bon de commande précisent en leur article 5 que « la livraison des produits et matériels, dans la limite des stocks disponibles, est déterminée avec le distributeur qui fixe avec le client une date de livraison/installation respectant obligatoirement les dispositions du code de la consommation en matière de vente à domicile et dans la limite de 60 jours maximum à compter du présent bon de commande pour l’étude et l’acceptation du dossier de financement choisi par le client » et que « par principe, la société s’efforcera de respecter un délai de livraison et une installation de la commande dans un délai de 15 jours à compter de la signature du bon de commande ».

Comme le soutiennent à juste titre les acquéreurs, cette indication est insuffisante pour répondre aux exigences de l’article L. 111-1 3° du code de la consommation, dès lors qu’il n’est pas distingué entre le délai de pose des modules et celui de réalisation des prestations à caractère administratif et qu’un tel délai global ne permet pas aux acquéreurs de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aurait exécuté ses différentes obligations (Civ. 1, 15 juin 2022, n°21-11.747 et 1er mars 2023, n°22-10.361).

Sur le bon de commande et les conditions générales figurent des mentions relatives aux garanties applicables, évoquant sur le bon de commande une « garantie constructeur longue durée rendement des panneaux photovoltaïques 25 ans », une « garantie constructeur onduleur longue durée 20 ans » et, dans les conditions générales, une garantie d’un an pièces et main-d”uvre s’agissant de la prestation d’installation, les autres éléments étant garantis un an.

Ces mentions sont insuffisantes au regard des exigences des articles L. 111-1 4° et R. 111-1 c) du code de la consommation, dès lors que ne sont pas rappelées l’existence et les modalités d’exercice de la garantie légale de conformité mentionnée aux articles L. 211-4 à L. 211-13 du code de la consommation et de celle des défauts de la chose vendue dans les conditions prévues aux articles 1641 à 1648 et 2232 du code civil.

Contrairement à ce que soutient la banque, cette irrégularité est une cause de nullité du contrat de vente conformément à l’article 6 du code civil, les dispositions de l’article L. 111-1 du code de la consommation étant d’ordre public.

Les moyens tirés de l’absence de plan technique, du défaut de précision de l’impact visuel, de l’orientation et de l’inclinaison des panneaux sont inopérants ; celui tiré du caractère insuffisamment apparent des conditions générales manque en fait dès lors que celles-ci sont lisibles.

À ces motifs, il y a lieu de constater que le contrat conclu le 30 avril 2015 entre, d’une part, M. [N] et Mme [I] et, d’autre part, l’Agence France écologie est affecté de vices susceptibles d’entraîner son annulation.

Sur la confirmation du contrat de vente

Il résulte de l’article 1338 du code civil dans sa version antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 que la confirmation d’un acte nul procède de son exécution volontaire en connaissance du vice qui l’affecte et que la reproduction lisible, dans un contrat conclu hors établissement, des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à ce type de contrat permet au souscripteur de prendre connaissance du vice résultant de l’inobservation de ces dispositions lorsque les dispositions reproduites sur le bon de commande sont précisément celles qui fixent les règles dont l’inobservation fonde la demande d’annulation formée par le consommateur (Civ. 1, 1er mars 2023, n°22-10.361).

Pour écarter la confirmation du contrat litigieux, le premier juge, dont les acquéreurs s’approprient les motifs, a relevé que figurait sur le bon de commande une mention selon laquelle l’acheteur reconnaissait avoir pris connaissance des dispositions des articles L. 121-21 à L. 121-26 du code de la consommation et a retenu que la connaissance du vice l’affectant ne pouvait résulter du seul rappel dans les conditions générales de ces dispositions et que la banque ne rapportait pas la preuve de ce que les acheteurs avaient exécuté le contrat en cause en connaissance des vices l’affectant et avaient renoncé à s’en prévaloir.

Cependant, la banque soutient à juste titre que les acheteurs ont confirmé le contrat principal affecté de causes de nullité, dès lors que le bon de commande comprend en son verso la reproduction lisible pour des consommateurs normalement attentifs des dispositions des articles L. 111-1, L. 111-2, L. 121-17, L. 121-21 à L. 121-21-8 du code de la consommation, lesquelles sont précisément celles qui fixent les règles dont l’inobservation fonde la demande d’annulation formée par les consommateurs, que, le 22 mai 2015, M. [N] a attesté sans réserve de la livraison et de l’installation des panneaux photovoltaïques commandés ainsi que de la réalisation de la prestation de service sollicitée, que cette installation est fonctionnelle, que les acquéreurs ont conclu un contrat de vente d’énergie avec EDF et que les mensualités du crédit affecté à son financement sont régulièrement réglées.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 30 avril 2015 et constaté la nullité du contrat de crédit affecté signé le même jour entre les parties au motif que le contrat de vente ne serait pas conforme aux dispositions du code de la consommation.

Sur la validité du contrat de vente au regard des vices du consentement

Au visa des articles 1109 et 116 du code civil, les acquéreurs soutiennent avoir reçu du vendeur des informations mensongères ou que celui-ci a fait preuve de réticence dolosive en ne leur donnant pas d’information sur le délai de raccordement, l’assurance obligatoire à souscrire en cas d’acquisition de tels matériels, sur la location obligatoire d’un compteur de production auprès d’EDF pendant 20 ans, sur la durée de vie des matériels, notamment de l’onduleur qui devra être remplacé trois fois sur 20 ans, sur le coût de désinstallation des matériels et de remise en état de la toiture à l’issue de leur exploitation, sur le prix d’achat de l’électricité produite par EDF et sur le rendement envisageable, alors que leur intention était de produire une énergie propre sans que l’installation photovoltaïque ne leur coûte rien.

Ils reprochent également au vendeur d’avoir fait état de partenariat mensonger avec GDF-Suez ou EDF par la mention « partenariat EDF bleu ciel » sur la plaquette d’information, de présenter de manière fallacieuse la rentabilité de l’installation en faisant état d’une « garantie rendement des panneaux photovoltaïques 25 ans » sur le bon de commande et, sur la facture, d’une « garantie de rendement panneaux : 25 ans à 90 % et 10 ans à 80 % de la puissance nominale » ainsi que d’une « garantie onduleur 20 ans » alors qu’il est impossible pour quiconque de garantir un rendement pendant une durée si longue et qu’une installation d’une puissance de 3.000 watt-crêtes a une capacité maximale de production de 3.000 watt-crêtes par an.

Les acquéreurs dénoncent encore comme man’uvres dolosives l’apposition par le vendeur de la mention « crédit d’impôt + économies d’énergie + revente à EDF = placement rentable ! » sur sa plaquette commerciale.

Enfin, ils font grief au vendeur d’avoir présenté leur engagement comme une candidature pour l’obtention de l’installation photovoltaïque en cause et non comme un engagement immédiat, ce qui les a trompés sur le caractère définitif de leur engagement.

Toutefois, les acquéreurs ne rapportent pas la preuve, qui leur incombe, de l’existence de man’uvres dolosives sans lesquelles ils n’auraient pas conclu le contrat de vente en cause.

En effet, le contrat de vente ne comprend aucun engagement du vendeur sur la rentabilité de l’installation photovoltaïque objet du contrat, la garantie rendement des panneaux mentionnée sur ledit contrat s’entendant seulement de la garantie de ce que les panneaux livrés seront en capacité de produire durant 25 ans 90 % de leur capacité maximale de 3.000 watt-crêtes et, durant les 10 années suivantes 80 % de cette capacité, étant relevé que ces dernières précisions figurent sur la facture établie postérieurement à l’installation des panneaux, laquelle ne constitue pas un document contractuel et que le contrat de revente d’électricité a pris effet le 10 septembre 2015, soit moins de 5 mois après la commande, alors que les acquéreurs n’ont commencé à rembourser leur prêt qu’en juin 2016.

L’Agence France écologie ne s’est pas davantage engagée sur le prix de revente de l’électricité produite à EDF, lequel est fixé par cette dernière société et non par le vendeur de l’installation photovoltaïque. Il en est de même de l’obligation de louer un compteur auprès d’EDF, qui dépend de cette dernière société.

Il ne peut être reproché au vendeur d’une installation photovoltaïque de ne pas avoir informé les acquéreurs sur la durée de vie de l’onduleur, le coût de son remplacement, le coût de la remise en état de la toiture à l’issue de l’exploitation de cette installation, ces informations relevant de l’obligation de se renseigner incombant au consommateur normalement attentif.

Les acquéreurs ne peuvent invoquer comme information mensongère la mention dans la documentation commerciale du vendeur d’un partenariat avec GDF-Suez ne figurant pas dans les pièces produites (pièces n°2 et 19 intimés), d’un partenariat avec EDF, alors que les acquéreurs ont bien conclu un contrat de revente d’énergie avec EDF.

Il ne saurait être reproché au vendeur l’apposition de la mention « crédit d’impôt + économies d’énergie + revente à EDF = placement rentable ! » sur sa plaquette commerciale, dès lors qu’aucun engagement de rentabilité ne figure sur le bon de commande et n’est, partant, entré dans le champ contractuel, étant relevé que les acquéreurs ne justifient pas des crédits d’impôt éventuellement obtenus.

La terminologie employée dans le bon de commande intitulé « contrat d’achat » ne laisse subsister aucun doute sur la portée de l’engagement des acquéreurs, qui ont bénéficié du délai légal de rétractation.

La demande d’annulation du contrat de vente formée par les acheteurs sera donc rejetée.

2.2 Sur la validité du contrat de prêt

Conformément à l’article L. 311-32 du code de la consommation, la demande d’annulation du contrat de vente en vue duquel a été conclu le contrat de crédit affecté entre M. [N], Mme [I] et la banque ayant été rejetée, il n’y a pas lieu de constater l’annulation de plein droit de ce contrat de prêt.

Les intimés soutiennent que le contrat de crédit affecté conclu entre eux et la banque est nul en ce que, en violation des dispositions de l’article L. 311-13 du code de la consommation, l’établissement de crédit ne leur a pas fait connaître expressément sa décision de leur accorder le crédit en cause dans un délai de 7 jours à compter de l’acceptation de son offre, la demande de crédit étant réputée refusée lorsqu’à l’expiration de ce délai aucune décision du prêteur n’est intervenue. Ils affirment qu’en l’espèce le formulaire de crédit a été signé le 30 avril 2015 et que l’accord du crédit n’a été accordé que le 28 mai suivant, de sorte que le contrat n’a jamais été formé.

Or, selon l’article L. 311-13 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige, l’agrément de la personne de l’emprunteur parvenu à sa connaissance après l’expiration du délai invoqué reste néanmoins valable si celui-ci entend toujours bénéficier du crédit, ce qui est le cas en l’espèce.

En outre, la banque a mis à disposition les fonds prêtés le 27 mai 2015, conformément à la demande formée par M. [N] dans le certificat de livraison du 22 mai 2015, cette mise à disposition des fonds au-delà du délai de 7 jours mentionné à l’article 311-14 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige valant agrément de l’emprunteur par le préteur selon l’article L. 311-13 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige.

La demande des intimés tendant à voir annuler le contrat de crédit affecté conclu entre les parties sera donc rejetée.

3. Sur la responsabilité de la banque

Les demandes des intimés tendant à l’annulation des contrats de vente et de crédit affecté étant rejetées, il convient de débouter les emprunteurs de toutes leurs demandes formées à l’encontre de la banque de ce chef.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a privé la banque du droit au remboursement du capital prêté.

Par ailleurs, M. [N] et Mme [I] ne rapportent pas la preuve, qui leur incombe, de l’existence d’un lien de causalité entre le déblocage des fonds par la banque avant l’achèvement de l’installation photovoltaïque en cause et les préjudices allégués, qu’ils soient financier au titre du coût de démontage de l’installation photovoltaïque litigieuse et de remise en état du toit de leur maison, économique et de jouissance au titre de la charge de remboursement du prêt litigieux et de l’absence du rendement annoncé de leur installation ou moral tenant aux nuisances sonores, esthétiques de l’installation et au temps perdu dans les démarches administratives la concernant.

A ces motifs, le rejet des demandes indemnitaires formées par ces intimés sera confirmé.

4. Sur les demandes accessoires

Les dispositions du jugement entrepris relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance seront infirmées.

M. [N] et Mme [I], qui succombent en leurs principales prétentions, seront condamnés aux dépens de première instance et d’appel, déboutés de leur demande d’indemnité de procédure et condamnés à verser à la banque la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe,

Déclare irrecevable la demande de M. [H] [N] et Mme [X] [I] tendant à voir prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels de la SA BNP Paribas personal finance ;

Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 30 avril 2015 entre, d’une part, l’Agence France écologie, représentée par la SELARLU Bally MJ, ès qualités, et, d’autre part, M. [N] et Mme [I], a constaté la nullité de plein droit du contrat de prêt affecté conclu le 30 avril 2015 entre, d’une part, les demandeurs et, d’autre part, la banque, a condamné la banque à restituer aux emprunteurs l’ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit affecté conclu le 30 avril 2015, soit la somme de 10.661,42 euros au titre des sommes versées au 5 janvier 2020 inclus, a débouté la banque de demande tendant au remboursement du capital prêté et a condamné in solidum l’Agence France écologie, représentée par la SELARLU Bally MJ, ès qualités, et la banque à payer aux demandeurs la somme de 1.000 euros à titre d’indemnité de procédure ainsi qu’aux dépens ;

Statuant à nouveau dans les limites de l’appel du chef des dispositions infirmées et y ajoutant,

Déboute M. [H] [N] et Mme [X] [I] de toutes leurs prétentions ;

Confirme le jugement entrepris pour le surplus de ses dispositions soumises à la cour ;

Condamne M. [H] [N] et Mme [X] [I] aux dépens de première instance et d’appel et à payer à la SA BNP Paribas personal finance la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute M. [H] [N] et Mme [X] [I] de leur demande d’indemnité de procédure.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

M. COLLET F. EMILY

 


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