Droit de rétractation : 31 mai 2023 Cour d’appel de Besançon RG n° 21/01970

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Droit de rétractation : 31 mai 2023 Cour d’appel de Besançon RG n° 21/01970
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ARRÊT N°

MW/FA

COUR D’APPEL DE BESANÇON

– 172 501 116 00013 –

ARRÊT DU 31 MAI 2023

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

Réputé contradictoire

Audience publique

du 28 Mars 2023

N° de rôle : N° RG 21/01970 – N° Portalis DBVG-V-B7F-EODU

S/appel d’une décision

du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de LONS-LE-SAUNIER

en date du 15 septembre 2021 [RG N° 20/00554]

Code affaire : 50A

Demande en nullité de la vente ou d’une clause de la vente

S.A. FRANFINANCE C/ [I] [B], [Y] [J] épouse [B], S.E.L.A.R.L. JEROME ALLAIS

PARTIES EN CAUSE :

S.A. FRANFINANCE

sise [Adresse 3], inscriste au RCS de Nanterre sous le numéro 719 807 406

Représentée par Me Valérie GIACOMONI de la SCP MAYER-BLONDEAU GIACOMONI DICHAMP MARTINVAL, avocat au barreau de BESANCON

APPELANTE

ET :

Monsieur [I] [B]

né le 16 Février 1958 à [Localité 5]

de nationalité française, retraité,

demeurant [Adresse 1]

Représenté par Me Jean-Yves REMOND, avocat au barreau de JURA

Madame [Y] [J] épouse [B]

née le 15 Juin 1952 à [Localité 4]

de nationalité français, retraitée,

demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me Jean-Yves REMOND, avocat au barreau de JURA

S.E.L.A.R.L. JEROME ALLAIS Es qualité de « liquidateur judiciaire » de la « SAS LAFIEE » dont le siège est [Adresse 2], inscrite au RCS de Lyon sous le numéro 831 950 589

[Adresse 6]

N’ayant pas constitué avocat

INTIMÉS

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats :

MAGISTRATS RAPPORTEURS : Monsieur M. WACHTER, Président de Chambre, et Madame B. MANTEAUX, conformément aux dispositions des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile, avec l’accord des Conseils des parties.

GREFFIER : Madame F. ARNOUX, Greffier.

Lors du délibéré :

Monsieur M. WACHTER, Président de Chambre a rendu compte conformément à l’article 786 du Code de Procédure Civile aux autres magistrats :

Monsieur J.F LEVEQUE et Madame B. MANTEAUX, conseillers.

L’affaire, plaidée à l’audience du 28 mars 2023 a été mise en délibéré au 31 mai 2023. Les parties ont été avisées qu’à cette date l’arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

Par bon de commande du 6 février 2019, M. [I] [B] et son épouse, née [Y] [J], ont confié à la SAS Lafiee des travaux d’isolation dans leur maison, moyennant un prix de 15 900 euros, intégralement financé au moyen d’un crédit affecté souscrit auprès de la SA Franfinance.

Les travaux ont été réalisés et réceptionnés le 26 février 2019, et la société Franfinance a libéré les fonds au vu d’un bon de livraison signé le même jour.

Par exploits du 29 juin 2020, les époux [B] ont fait assigner la société Lafiee et la société Franfinance devant le tribunal judiciaire de Lons Le Saunier aux fins d’annulation des contrats.

Par jugement du 28 octobre 2020, le tribunal de commerce de Lyon a prononcé la liquidation judiciaire de la société Lafiee.

La SELARL Jérôme Allais, désigné en qualité de mandataire liquidateur, a été appelée en cause.

Les époux [B] ont sollicité l’annulation du contrat de vente pour non-respect des dispositions du code de la consommation, avec fixation d’une créance de 34 672,72 euros à l’encontre de la société Lafiee, l’annulation consécutive du contrat de prêt, avec remboursement des échéances payées et rejet de la demande en restitution du capital eu égard à la faute commise par la société Franfinance, qui ne leur a pas signalé l’irrégularité du contrat principal.

La société Franfinance s’est opposée aux demandes de nullité, au motif que les contrats avaient été exécutés et qu’en tout état de cause ils étaient conformes aux dispositions applicables, subsidiairement a réclamé la condamnation des demandeurs à lui rembourser le capital mis à disposition, encore plus subsidiairement a conclu à l’inscription au passif de la société Lafiee d’une somme de 15 900 euros.

Par jugement rendu le 15 septembre 2021 en l’absence de comparution de la SELARL Jérôme Allais, ès qualités, le tribunal a :

– annulé le contrat conclu entre [I] [B] et son épouse [Y] [J] et la SAS Lafiee le 6 février 2019 ;

– annulé le contrat de crédit conclu entre [I] [B] et son épouse [Y] [J] et la société Franfinance ;

– fixé la créance des époux [B] à l’égard de la société SAS Lafiee à la somme de 34 672,72 euros ;

– déclaré la demande des demandeurs tendant la remise en état de leur comble irrecevable ;

– condamné [I] [B] et son épouse [Y] [J] à payer la somme de 4 470 euros à la société Franfinance sous déduction des mensualités du crédit assurance comprise payées par eux au titre de la restitution partielle du capital prêté ;

– reçu le recours en garantie exercé par la société Franfinance à l’égard de la société SAS Lafiee, fixé la créance de la société Franfinance à l’égard de la société SAS Lafiee à la somme de 5 456,64 euros ;

– débouté les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires ;

– condamné la société Franfinance aux dépens et à payer une somme de 1500 euros à [I] [B] et son épouse [Y] [J] en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– dit qu’il sera fait application de l’article 699 du code de procédure civile.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu :

– qu’il n’était pas en débat que le contrat avait été signé hors établissement ; que le contrat ne mentionnait aucune date de livraison ; qu’aucune indication de prix ventilé par prestation n’était donnée sur le bon de commande laissé aux clients, seule une référence au montant total financé permettant de savoir que le coût du contrat s’élevait à 15 900 € TTC pour l’ensemble des prestations contractuelles ; que l’indication des biens vendus était oubliée et que leurs caractéristiques n’étaient pas renseignées ; qu’il était par ailleurs justifié qu’en date du 15 février 2019, le professionnel avait envoyé un document signé de sa part, qui était entré dans le champ contractuel, faisant état d’une aide de 70 % et d’un reste à charge de 4 770 euros avec des mensualités de 33,12 euros au titre la prestation promise, sans que cette mention ne soit visée dans le bon de commande ; qu’il résultait de cette distorsion une absence de mention du prix unitaire réel sur le bon de commande ; qu’en outre, les conditions générales de vente se trouvant au verso du bon de commande s’avéraient difficilement lisibles et ne permettaient pas d’appréhender avec clarté le délai de rétractation ce qui permettait d’admettre que les consommateurs n’avaient pas été avisés loyalement du délai de rétractation ; que le contrat de vente devait donc être annulé ;

– que la confirmation du contrat alléguée par la société Franfinance ne pouvait être retenue, dès lors que l’attestation de travaux n’avait été signée que par M. [B], et non par son épouse, et dès lors qu’en février 2019 les époux [B] ignoraient que leur installation ne leur permettrait pas d’obtenir l’aide de l’Etat de 70 % mentionnée sur le document qui leur avait été remis par le vendeur ;

– que la demande de remise en état des combles, qui se résolvait en dommages et intérêts, était irrecevable au regard de l’ouverture de la procédure collective ;

– que le contrat de prêt était annulé de plein droit du fait de l’annulation du contrat principal ; que la banque, qui n’avait pas relevé l’indigence du bon de commande, et qui avait en outre commis une faute personnelle pour avoir connu les pratiques de son partenaire, avait directement contribué à la conclusion de l’opération trompeuse ; que l’isolation était posée, et qu’il n’y avait pas de désordre ; que les époux [B] devaient rembourser à la société Franfinance la somme de 4 470 euros qui aurait dû rester à leur charge, sous déduction des mensualités versées ;

– que la banque disposait du recours prévu par l’article L.312-56 du code de la consommation en cas d’annulation du contrat du fait du vendeur, mais que la banque ayant commis une faute personnelle, son recours devait être limité au montant des intérêts non perçus, soit 5 456,64 euros.

La société Franfinance a relevé appel de cette décision le 8 novembre 2021.

Par conclusions transmises le 24 janvier 2022, l’appelante demande à la cour :

Vu les articles L. 1111-1 et suivants du code de la consommation,

Vu les articles L. 311-2 et suivants du code de la consommation,

Vu les articles 1130 et suivants du code civil,

Vu l’article 1138, alinéa du code civil,

Vu l’article 1241 du code civil,

– d’infirmer le jugement déféré en ce qu’il a :

* annulé le contrat de crédit (sic) conclu entre M. et Mme [B] et la SAS Lafiee le 6 février 2019 ;

* annulé le contrat de crédit conclu entre M. et Mme [B] et la société Franfinance ;

* fixé la créance des époux [B] à l’égard de la société Lafiee à la somme de 34 672,72 euros ;

* déclaré la demande des demandeurs tendant à la remise en état de leur comble irrecevable ;

* condamné M. et Mme [B] à payer la somme de 4 470 euros à la société Franfinance sous déduction des mensualités du crédit assurance comprise, payées par eux au titre de la restitution partielle du capital prêté ;

* reçu le recours en garantie exercée par la société Franfinance à l’égard de la société Lafiee et fixé la créance de la société Frnfinance à l’égard de la société Lafiee à la somme de 5 456, 64 euros ;

* débouté les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires ;

* condamné la société Franfinance aux dépens et à payer une somme de 1500 euros à M. et Mme [B] en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

* dit qu’il sera fait application de l’article 699 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

A titre principal,

– de dire et juger que les conditions de nullité du contrat de vente et de crédit ne sont pas réunies ;

– de dire et juger que M. et Mme [B] ne peuvent invoquer la nullité du contrat de vente et du contrat de prêt du fait de l’exécution volontaire des contrats, de sorte que leur action est irrecevable en application de l’article 1138 alinéa 2 du code civil ;

– de déclarer M. et Mme [B] irrecevables en leurs demandes ;

– de débouter M. et Mme [B] de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

A titre subsidiaire, si la nullité des contrats devait être prononcée,

– de dire et juger que la société Franfinance n’a commis aucune faute ;

– de condamner M. et Mme [B] à rembourser à la société Franfinance la somme de 15 900 euros sauf à déduire les échéances de crédit remboursées par les emprunteurs au 15 mai 2020 avec garantie du vendeur sur le fondement de l’article L312- 56 du code de la consommation ;

A titre infiniment subsidiaire, dans l’hypothèse où la nullité des contrats serait prononcée et une faute de l’établissement retenue,

– de dire et juger que M. et Mme [B] n’apportent nullement la preuve d’un préjudice ;

– de débouter M. et Mme [B] de leurs demandes de restitution des sommes versées au titre du contrat et de leurs autres demandes ;

A titre encore plus infiniment subsidiaire, si la faute du prêteur dans le versement des fonds était retenue et si la démonstration de l’existence d’un préjudice était apportée par les époux [B] lui faisant perdre son droit à obtenir le remboursement des sommes financées,

– de condamner la société Lafiee à payer à la société Franfinance la somme de 15 900 euros correspondant au montant du financement avec intérêts au taux légal à compter de la décision

à intervenir ;

– de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Lafiee la créance de la société Franfinance d’un montant de 15 900 euros ;

– en tout état de cause, de condamner solidairement M. et Mme [B] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– de les condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Giacomoni SCP aux offres et affirmations de droit en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions transmises le 9 avril 2022, les époux [B] demandent à la cour :

Vu les articles L. 111-1 , 221-1, 221-5, 221-18, 221-28, 242-1 du code de la consommation,

Vu les articles 1122, 1137, 1178 et 1217 du code civil,

Sur l’appel principal,

– de confirmer intégralement le jugement déféré ;

– de condamner la société Franfinance à verser à M. [I] [B] et Mme [Y] [J]

la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– de condamner la société Franfinance aux entiers dépens et à l’intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement avec possibilité de recouvrement direct au profit de Me [P] en application de l’article 699 du code de procédure civile ;

Sur l’appel incident,

– de prononcer la nullité pour dol du contrat conclu entre M. [I] [B] et Mme [Y] [J] et la société Lafiee ;

– de prononcer la nullité du contrat conclu entre M. [I] [B] et Mme [Y] [J] et la société Lafiee, eu égard à l’exercice du droit de rétractation par M. [I] [B] et Mme [Y] [J] ;

– de fixer la créance de M. [I] [B] et Mme [Y] [J] à l’égard de la société Lafiee à la somme de 34 672,72 euros ;

– de juger que M. [I] [B] et Mme [Y] [J] se sont rétractés du contrat conclu avec la société Lafiee le 1er octobre 2019 ;

– de juger que la société Lafiee n’a jamais procédé au remboursement de M. [I] [B] et Mme [Y] [J] ;

– de juger que la société Franfinance a commis une faute en n’avisant pas M. [I] [B] et Mme [Y] [J] de la nullité du contrat principal ;

– en conséquence, de juger que la société Franfinance ne pourra pas obtenir restitution du crédit auprès de M. [I] [B] et Mme [Y] [J] ;

– de condamner la société Franfinance à rembourser à M. [I] [B] et Mme [Y] [J] les échéances du crédit et les échéances d’assurances déjà versées ;

– de condamner la société Franfinance à verser à M. [I] [B] et Mme [Y] [J] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– de condamner la société Franfinance aux entiers dépens et à l’intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement avec possibilité de recouvrement direct au profit de Me [P] en application de l’article 699 du code de procédure civile ;

La société Franfinance a fait signifier sa déclaration d’appel à la SELARL Jérôme Allais, ès qualités, par acte du 16 décembre 2021 remis à personne morale.

La SELARL Jérôme Allais, ès qualités, n’a pas constitué avocat.

Il sera statué par arrêt réputé contradictoire.

La clôture de la procédure a été prononcée le 8 mars 2023.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l’exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.

Sur ce, la cour,

Sur la nullité du contrat principal

1° sur la conformité aux dispositions du code de la consommation

Il n’est pas contesté que le contrat litigieux a été conclu hors établissement, de sorte qu’il doit répondre aux exigences des articles L. 111-1, L. 221-5, L. 221-9 du code de la consommation dans leur rédaction applicable à la date de signature.

Contrairement à ce qu’a retenu le premier juge, le contrat précise que la livraison interviendra ‘sous 3 mois maximum’. Par ailleurs, le prix global de la prestation est indiqué, soit 15 900 euros TTC, aucune disposition n’exigeant que le prix soit ventilé par prestation, alors surtout qu’en l’espèce la prestation consiste en un unique pack à prix forfaitaire. C’est encore à tort que le premier juge a retenu que l’indication des biens objets du contrat était oubliée, alors qu’il a lui-même relevé qu’il résultait d’une mention manuscrite apposée dans la rubrique ‘autres packs’ que la prestation concernée consistait dans un ‘détuilage + évacuation ancien isolant + insufflation ouate de cellulose + fibre de bois sous rampant sur 29 m²’. Cette indication est suffisante pour désigner la nature et le volume des prestations à exécuter, sans qu’il y ait lieu à indication de caractéristiques supplémentaires.

Le tribunal a ensuite retenu à mauvais escient qu’il résultait d’un mail intitulé ‘confirmation du projet’, adressé le 19 février 2019 par la société Lafiee à Mme [B], faisant état d’aides à hauteur de 70 % du projet et d’un reste à charge de 4 770 euros une absence de mention du prix unitaire réel sur le bon de commande, alors, d’une part, que ce document est postérieur de 13 jours à la signature du contrat, lequel, au sujet des aides, se borne à indiquer de manière hypothétique que les travaux d’isolation peuvent être éligibles au crédit d’impôt pour la transition énergétique, d’autre part, et en tout état de cause, que l’éventuel octroi d’aides n’a pas pour effet de modifier le prix contractuellement convenu de l’installation, mais seulement d’en alléger la charge finale pour le client.

Enfin, le premier juge ne pouvait, sans vérifier le corps de texte utilisé, et au moyen de motifs dubitatifs, considérer que les conditions générales de vente figurant au verso du bon de commande étaient difficilement lisibles, et en déduire que cela ‘permettait d’admettre’ que les consommateurs n’avaient pas été loyalement avisés du délai de rétractation. En tout état de cause, aucun manquement n’est caractérisé à ce sujet en l’état des pièces versées aux débats, étant observé que les parties ne fournissent aucun exemplaire original du contrat, mais uniquement des copies, qui ne permettent pas de procéder à un mesurage précis en l’absence de garantie de reproduction à l’échelle exacte, les copies produites respectivement par l’appelante et les intimés apparaissant d’ailleurs diverger sur ce point.

Les époux [B] évoquent ensuite au rang des causes de nullité du contrat l’irrégularité des mentions relatives au droit de rétractation. Toutefois, en application de l’article L.221-20 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable, la méconnaissance des exigences posées concernant les informations relatives au droit de rétractation est sanctionnée, non par la nullité du contrat, mais par la prolongation de ce délai pour une période de douze mois à compter de l’expiration du délai de rétractation initial.

La décision entreprise sera en définitive infirmée en ce qu’elle a prononcé la nullité du contrat conclu entre les époux [B] et la société Lafiee pour défaut de conformité aux règles protectrices du code de la consommation.

2° Sur le dol

Les époux [B] concluent subsidiairement à l’annulation du contrat litigieux pour dol, en faisant valoir que la société Lafiee les avait volontairement trompés en leur promettant des aides représentant plus des deux tiers du prix, auxquelles il n’étaient finalement pas éligibles.

Toutefois, force est de constater que les intimés échouent à faire la preuve qui leur incombe d’une contractualisation des aides contemporaines à la signature du contrat. En effet, leur argumentation repose exclusivement sur un mail du 19 février 2019, dont il a été souligné précédemment qu’il est largement postérieur à la conclusion du contrat, de sorte qu’il ne permet pas de démontrer que son contenu ait été contractualisé entre les parties, alors que le contrat ne comporte en lui-même aucun engagement du vendeur concernant l’octroi de primes ou d’aides au client. En effet, seule figure dans la convention une mention d’ordre général, au demeurant exprimée de manière hypothétique, selon laquelle l’opération concernée pouvait être éligible à une aide sous forme de crédit d’impôt.

Le moyen de nullité tiré du dol devra donc être rejeté.

3° Sur la rétractation

Les époux [B] font curieusement grief au jugement de ne pas s’être prononcé sur l’exercice de leur droit de rétractation, alors qu’ayant annulé le contrat sur leur demande principale, le premier juge n’avait bien évidemment plus à examiner la question d’une éventuelle rétractation.

L’argument tiré de la rétractation doit cependant être examiné à hauteur de cour, dès lors qu’il n’a pas été fait droit aux demandes tendant à la nullité du contrat principal.

Il a d’ores et déjà été statué sur l’inanité du manquement tiré de la taille trop réduite de la police utilisée pour l’impression des conditions générales du contrat, parmi lesquelles figurent les mentions relatives à l’exercice du droit de rétractation.

Les époux [B] font valoir que, tel qu’il est indiqué sur le bordereau de rétractation annexé au contrat, le délai annoncé est faux comme revenant à accorder au client un délai effectif de 13 jours pour se rétracter, au lieu des 14 jours imposés par le code de la consommation. Ils ajoutent qu’au regard de cette irrégularité ils avaient, conformément à l’article L. 221-20 du code de la consommation, valablement exercé leur droit le 1er octobre 2019, soit dans les douze mois de l’expiration du délai initial, de sorte que le contrat était annulé et qu’ils pouvaient prétendre au remboursement des sommes versées, augmentées de la majoration prévue à l’article L. 242-4 du code de la consommation.

L’article L. 221-18 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable, dispose que le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement, et l’article L. 221-19 1° précise que, conformément au règlement n° 1182/71/ CEE du Conseil du 3 juin 1971 portant détermination des règles applicables aux délais, aux dates et aux termes, le jour où le contrat est conclu ou le jour de la réception du bien n’est pas compté dans le délai mentionné à l’article L. 221-18.

En l’espèce, le bordereau de rétractation annexé au contrat mentionne qu’il doit être envoyé à la société Lafiee ‘au plus tard le 14ème jour à partir de la conclusion du contrat, autrement dit, du jour de la présente commande ; si ce délai expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prorogé au premier jour ouvrable suivant.’ Le client est en conséquence informé qu’une éventuelle rétractation doit être effectuée au plus tard le 14ème jour à partir de celui au cours duquel le contrat a été signé, ce qui correspond bien à un délai de 14 jours, et non de 13, puisque le jour de la commande n’est pas inclus dans les 14 jours, contrairement à ce que soutiennent les intimés.

Dès lors ainsi que l’information fournie relativement à la rétractation est conforme, les dispositions de l’article L. 221-20 relatifs à la prorogation du délai sont inapplicables à l’espèce, de sorte que les époux [B] ne pouvaient pas se rétracter valablement le 1er octobre 2019.

Le moyen tiré de la rétractation sera donc également rejeté.

Sur la nullité du contrat de financement

Dès lors que le contrat principal n’est pas annulé, le contrat de crédit conclu entre les époux [B] et la société Franfinance n’encourt pas l’annulation, qui n’est sollicitée qu’à titre de corollaire.

L’infirmation s’impose donc en ce que le tribunal a annulé le contrat de financement.

Sur les autres demandes

L’issue du litige rend sans objet les demandes relatives à la confirmation du contrat, à la remise des parties dans leur état antérieur et aux restitutions réciproques, les dispositions correspondantes du jugement étant infirmées.

L’infirmation s’impose également s’agissant des dépens et des frais irrépétibles.

Les époux [B] seront condamnés aux dépens de première instance et d’appel, avec faculté de recouvrement direct conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, ainsi qu’à payer à la société Franfinance la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs

Statuant par arrêt réputé contradictoire, après débats en audience publique,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 15 septembre 2021 par le tribunal judiciaire de Lons le Saunier ;

Statuant à nouveau, et ajoutant :

Rejette l’ensemble des demandes formées par M. [I] [B] et son épouse, née [Y] [J] ;

Condamne M. [I] [B] et son épouse, née [Y] [J], aux entiers dépens de première instance et d’appel, avec faculté de recouvrement direct conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile;

Condamne M. [I] [B] et son épouse, née [Y] [J], à payer à la SA Franfinance la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Ledit arrêt a été signé par Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré et Fabienne Arnoux, greffier.

Le greffier, Le président,

 


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