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LC/IC
S.A. CREATIS
C/
[C] [X]
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le
COUR D’APPEL DE DIJON
2ème chambre civile
ARRÊT DU 29 JUIN 2023
N° RG 21/01130 – N° Portalis DBVF-V-B7F-FYSJ
MINUTE N°
Décision déférée à la Cour : au fond du 02 juillet 2021,
rendue par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Chalon sur Saône
RG : 11-21-000150
APPELANTE :
S.A. CREATIS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au siège social sis :
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Anne-Line CUNIN, membre de la SELARL DU PARC – CABINET D’AVOCATS, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 91
assistée de Me Renaud ROCHE, membre de la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocat au barreau de LYON
INTIMÉ :
Monsieur [C] [X]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
non représenté
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 mai 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Leslie CHARBONNIER, Conseiller, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la cour étant alors composée de :
Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre,
Sophie BAILLY, Conseiller,
Leslie CHARBONNIER, Conseiller,
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG, Greffier
DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 29 Juin 2023,
ARRÊT : réputé contradictoire,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
Par acte d’huissier délivré le 9 février 2021, la SA Creatis a fait assigner M. [C] [X] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Chalon sur Saône afin de le voir condamner au paiement de la somme de 25 849,66 euros, outre intérêts au taux contractuel de 6,90% l’an à compter du 19 mars 2020, outre 350 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 2 juillet 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Chalon sur Saône a :
– Prononcé la déchéance du droit aux intérêts stipulés dans le contrat de prêt souscrit le 21 avril 2015 entre M. [C] [X] et la SA Creatis,
– Condamné M. [C] [X] à payer la somme de 7 551,00 euros à la SA Creatis au titre du prêt souscrit le 21 avril 2015, s’y ajoutant les intérêts légaux courant à compter du 19 mars 2020, intérêts non majorés de 5 points comme énoncé ci-après,
– Dit et ordonné que cette somme ne portera pas intérêts au taux légal majoré de plein droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice comme énoncé à l’article L313-3 du code monétaire et financier, et ce afin d’assurer le caractère effectif et dissuasif de la déchéance du droit aux intérêts, conformément à l’arrêt CJUE du 27/03/2014, C-565/12,
– Ordonné que l’article L313’3 du code monétaire et financier ne reçoive aucune application sur la somme de 7 551,00 euros,
– Accordé à M. [C] [X] sur le fondement de l’article 1343-5 du Code civil, les délais suivants pour payer la somme due à la SA Creatis : 100 euros par mois à compter du 15 du mois suivant la signification de la présente, puis 100 euros tous les 15 des 22 mois suivants, et enfin la somme de 5 251 euros le 24ème mois,
– Ordonné que les paiements s’imputent déjà sur le capital, et que M. [C] [X] puisse payer des échéances plus importantes s’il le souhaite sans qu’il ne renonce de ce fait aux délais de paiement judiciaires ;
– Rappelé que les paiements sont portables et non quérables,
– Dit et ordonné qu’en cas de non-respect d’une seule de ces échéances par M. [C] [X], et sans aucune mise en demeure ni autre formalité, la présente clause relative aux délais de paiement sera caduque, la mesure concernant la condamnation à la somme de 7 551,00 euros et sous réserve des paiements intervenus, reprenant tous ses effets,
– Débouté la SA Creatis de toutes ses autres prétentions,
– Condamné M. [C] [X] aux dépens,
– Rappelé l’exécution de droit à titre provisoire de la présente décision telle qu’énoncée à l’article 514 du code de procédure civile.
La société Creatis a relevé appel de cette décision par déclaration au greffe du 27 août 2021.
Au terme de ses conclusions d’appelante notifiées le 26 novembre 2021, la SA Creatis demande à la cour, au visa des articles L312-39 du code de la consommation, 1217 et 1224 du code civil, de :
‘ Réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 2 juillet 2021 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Chalon sur Saône sauf en ce qu’il a condamné M. [X] aux dépens,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
A titre principal,
‘ Constater l’acquisition de la clause résolutoire et la déchéance du terme,
A titre subsidiaire,
‘ Prononcer la résiliation du contrat et la déchéance du terme pour manquement aux obligations contractuelles,
En tout état de cause :
‘ Condamner M. [C] [X] à lui payer au titre du contrat du 21 avril 2015, la somme de 25 849,66 euros, outre les intérêts contractuels au taux de 6,90 % à compter du 19 mars 2020,
‘ Condamner M. [C] [X] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
‘ Condamner M. [C] [X] aux entiers dépens de l’instance avec autorisation à Me [F] de les recouvrer conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
La SA Creatis a signifié la déclation d’appel à l’intimé par acte d’huissier du 8 novembre 2021 et ses conclusions par acte du 22 novembre 2021.
M. [X] n’a pas constitué avocat.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions de l’appelante pour un exposé complet de ses moyens.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 4 avril 2023.
Sur ce la cour,
Il résulte des pièces au dossier que la société Creatis a consenti, par contrat en date du 21 avril 2015, à M. [C] [X] un prêt personnel, d’un montant de 29 100 euros, remboursable en 120 mensualités de 361,84 euros, au taux d’intérêt fixe de 6,90 %.
M. [C] [X] a saisi la commission de surendettement des particuliers qui a établi un plan le 13 septembre 2018 avec une entrée en vigueur le 31 décembre 2018 prévoyant que la créance de la société Creatis fixée à la somme de 23 266,39 euros serait remboursée, après un moratoire de 5 mois, en 5 mensualités de 20 euros puis 74 mensualités de 321,71 euros.
Les engagements de remboursement n’étant plus respectés à compter du mois de novembre 2019, la société Creatis a prononcé la déchéance du terme le 19 mars 2020.
M. [C] [X] a de nouveau saisi la commission de surendettement des particuliers le 17 janvier 2020 qui a adopté des mesures recommandées en juillet 2020 avec application au 31 octobre 2020.
Aux termes de celles-ci, la créance de la société Creatis était fixée à la somme de 24 747,89 euros, remboursable, après un moratoire de 31 mois, en deux mensualités de 144,06 euros puis en 39 mensualités de 291,6 euros avec un effacement partiel de 13 087,37 euros.
Cette procédure de surendettement ne prive pas la SA Creatis de la possibilité d’obtenir un titre exécutoire à l’encontre de M. [X] afin de garantir sa créance.
Le premier juge a prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la banque aux motifs que :
– la consultation du fichier des incidents de paiement était hors délai légal,
– l’organisme de crédit ne prouvait pas la remise du bordereau de rétractation.
Il a déduit de la créance outre les intérêts, les cotisations d’assurance estimant que l’assureur est un tiers et que la société de crédit ne pouvait les réclamer.
Il a estimé que la sanction serait inefficace s’il était appliqué la majoration du taux légal prévue à l’article L313-3 du code monétaire et financier.
Il a réduit la clause pénale à 1,15 euros aux motifs que la société de crédit ne subissait aucun préjudice dès lors qu’elle répercutait ses pertes sur les gains générés par les contrats qui sont honorés.
La société Creatis soutient que le contrat est parfaitement régulier et conforme aux dispositions du code de la consommation.
M. [X], qui n’a pas constitué, est, conformément à l’article 954 dernier alinéa du code de procédure civile, réputé s’approprier les motifs du jugement déféré.
Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels
L’article L311-12 du code de la consommation dans sa version applicable du 1er mai 2011 au 1er juillet 2016 prévoit que l’emprunteur peut se rétracter sans motifs dans un délai de quatorze jours calendaires révolus à compter du jour de l’acceptation de l’offre de contrat de crédit comprenant les informations prévues à l’article L311-18. Afin de permettre l’exercice de ce droit de rétractation, un formulaire détachable est joint à son exemplaire du contrat de crédit.
Au terme de l’article L311-48 du même code, dans sa version applicable, le prêteur qui accorde un crédit sans communiquer à l’emprunteur les informations précontractuelles dans les conditions fixées par les articles L311-6 ou L311-43, sans remettre et faire signer ou valider par voie électronique la fiche mentionnée à l’article L. 311-10, ou sans remettre à l’emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées par les articles L311-11, L311-12, L311-16, L311-18, L311-19, L311-29, le dernier alinéa de l’article L311-17 et les articles L. 311-43 et L311-46, est déchu du droit aux intérêts.
Or, selon arrêt de la 4ème chambre de la CJUE rendu le 18 décembre 2014 dans l’affaire C-449/13, CA Consumer Finance SA c. Ingrid Bakkaus et autres, les dispositions de la directive 2008/48/CE du 23 avril 2008 «d’une part, s’opposent à une réglementation nationale selon laquelle la charge de la preuve de la non-exécution des obligations prescrites aux articles 5 et 8 de la directive 2008/48 repose sur le consommateur et d’autre part, s’opposent à ce que, en raison d’une clause type, le juge doive considérer que le consommateur a reconnu la pleine et correcte exécution des obligations précontractuelles incombant au prêteur, cette clause entraînant ainsi un renversement de la charge de la preuve de l’exécution desdites obligations de nature à compromettre l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48.’» La CJUE a précisé que «la clause type en question constitue un indice qu’il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments de preuve pertinents.’»
Tel que l’a rappelé le premier juge, dans un arrêt rendu le 21 octobre 2020 n°19-18971, la première chambre civile de la Cour de cassation a jugé qu’il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à ses obligations précontractuelles et que la signature par l’emprunteur de l’offre préalable comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur lui a remis le bordereau de rétractation constitue seulement un indice qu’il incombe à celui-ci de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires.
En l’espèce, la SA Creatis ne justifie pas davantage à hauteur de cour que l’exemplaire de l’offre de crédit remis aux emprunteurs était accompagné d’un bordereau de rétractation.
Si la signature de l’offre de crédit, laquelle comporte une mention type relative à la reconnaissance de la remise de ces documents, constitue un indice de ce que l’organisme de crédit a honoré ses obligations, il n’est toutefois pas suffisant pour l’établir, contrairement à ce que soutient encore la SA Creatis.
Faute d’apporter des éléments complémentaires, c’est à bon droit que le premier juge a déchu la SA Creatis de son droit aux intérêts contractuels de sorte que le jugement doit être confirmé sur ce point.
Sur le montant de la créance
Au terme de l’article L. 311-48 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable, lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu. Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux de l’intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.
En application de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.
Le montant de la créance retenue, après déchéance du terme par le premier juge, n’est pas discuté de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a condamné M. [X] à payer à la SA Creatis la somme de 7 551 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 19 mars 2020.
La société de crédit ne discute pas davantage le rejet de l’application des dispositions de l’article L313-3 du code monétaire et financier et la réduction de la clause pénale.
Le jugement déféré est donc confirmé en toutes ses dispositions de ces chefs.
Sur les délais de paiement
La société Creatis conclut à la réformation du jugement sur ce point au motif que le premier incident de paiement non régularisé est déjà ancien de sorte que M. [X] s’est déjà octroyé les plus larges délais de paiement.
Le premier juge n’a pas motivé sa décision sur ce point.
Alors que M. [X] bénéficie d’un plan de surendettement, il n’y a pas lieu de lui accorder des délais de paiement de sorte que la décision déférée est infirmée et, statuant à nouveau M. [X] est débouté de sa demande de ce chef.
Sur les autres demandes
Le jugement déféré est confirmé sur les dépens et l’indemnité prévue à l’article 700 du code de procédure civile.
La SA Creatis, succombant pour l’essentiel en son appel, est condamnée aux dépens d’appel.
Elle est déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a accordé des délais de paiement à M. [C] [X],
Statuant à nouveau de ce chef,
Déboute M. [C] [X] de sa demande de délais de paiement,
Y ajoutant,
Condamne la SA Creatis aux dépens d’appel,
Déboute la SA Creatis de sa demande formulée en application de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur de cour,
Rappelle que durant l’exécution des mesures recommandées, le créancier ne peut pas mettre en oeuvre des procédures d’exécution.
Le Greffier, Le Président,