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LC/IC
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
C/
[N] [E]
[L] [S] ÉPOUSE [E]
S.A.S. IC GROUPE
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le
COUR D’APPEL DE DIJON
2 e chambre civile
ARRÊT DU 29 JUIN 2023
N° RG 21/01114 – N° Portalis DBVF-V-B7F-FYP5
MINUTE N°
Décision déférée à la Cour : au fond du 15 juillet 2021,
rendue par le tribunal judiciaire de Dijon – RG : 1120000417
APPELANTE :
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social sis
[Adresse 1]
[Localité 6]
représentée par Me Anne-Line CUNIN, membre de la SELARL DU PARC – CABINET D’AVOCATS, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 91
assistée de Me Renaud ROCHE, membre de la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocat au barreau de LYON
INTIMÉS :
Monsieur [N] [E]
né le 15 Février 1951 à [Localité 9] (21)
domicilié :
[Adresse 3]
[Localité 2]
Madame [L] [S] épouse [E]
né le 31 Août 1949 à [Localité 8] (25)
domiciliée :
[Adresse 3]
[Localité 2]
représentés par Me Maxence PERRIN, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 108
assisté de Me Samuel HABIB, avocat au barreau de PARIS
S.A.S. IC GROUPE sous l’enseigne et anciennement IMMO CONFORT, prise en la personne de Maître [V] [Z], en qualité de mandataire liquidateur de ladite société, et domicilié à ce titre [Adresse 4]
[Adresse 5]
[Localité 7]
non représentée
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 mai 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Leslie CHARBONNIER, Conseiller, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la cour étant alors composée de :
Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre,
Sophie BAILLY, Conseiller,
Leslie CHARBONNIER, Conseiller,
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG, Greffier
DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 29 Juin 2023,
ARRÊT : rendu par défaut,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par un bon de commande n°5453 en date du 29 septembre 2015, faisant suite à un démarchage à domicile, M. [N] [E] et Mme [L] [S] épouse [E] ont signé un bon de commande auprès de la société Immo Confort, aux fins d’acquérir une installation de panneaux photovoltaïques.
Pour financer ladite installation, ils ont souscrit le même jour un crédit affecté, auprès de la banque Sygma Banque, aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance, d’un montant de 23 500 euros, remboursable en 180 mensualités de 228,23 euros, au taux de 4,84 %.
Une attestation de fin de travaux a été délivrée en date du 16 novembre 2015 et les fonds ont été débloqués, le raccordement de l’installation étant intervenu le 11 avril 2016.
Par jugement en date du 13 décembre 2018, le tribunal de commerce de Nanterre a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’encontre de la SAS IC Groupe, exercant sous l’enseigne Immo Confort, en désignant en qualité de mandataire liquidateur de la société, Maître [V] [Z].
Par actes d’huissier délivrés les 4 et 6 août 2020, M. [N] [E] et Mme [L] [S], épouse [E] ont fait assigner la societé BNP Paribas Personal Finance , ainsi que la SAS IC Groupe, exercant sous l’enseigne Immo Confort devant le tribunal judiciaire de Dijon, en annulation des contrats de vente et de crédit, en remboursement des sommes versées par eux et en réparation de leurs préjudices.
Subsidiairement, ils demandaient des dommages-intérêts à la banque et encore plus subsidiairement la déchéance du droit aux intérêts de la banque.
Dans ses dernieres écritures, la Société BNP Paribas Personal Finance concluait à l’irrecevabilité des demandes en l’absence de déclaration de créances et subsidiairement au débouté de l’ensemble de leurs demandes. A titre plus subsidiaire, elle demandait, en cas de nullité des contrats, la condamnation des consorts [E] à lui payer la somme de 23 500 euros et de fixer au passif de la SAS IC Groupe, exercant sous l’enseigne Immo Confort, prise en la-personne de son mandataire liquidateur, Maitre [V] [Z], la somme de 11 160,80 euros, au titre des intérêts perdus.
La SAS IC Groupe, exercant sous l’enseigne Immo Confort, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, n’a pas comparu en première instance.
Par jugement rendu le 15 juillet 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Dijon a :
– débouté la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande visant à dire irrecevables en leurs demandes M. [N] [E] et Mme [L] [S], épouse [E],
– prononcé la résolution du bon de commande n°5453, signé le 29 septembre 2015, entre M. [N] [E] et Mme [L] [S] épouse [E] et la SAS IC Groupe, exercant sous l’enseigne Immo Confort,
En conséquence,
– prononcé la résolution du contrat signé le 29 septembre 2015 entre Sygma Banque aux droits de qui vient la société BNP Paribas Personal Finance et M. [N] [E] et Mme [L] [S], épouse [E], en tant qu’emprunteurs,
– condamné la société BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la société Sygma Banque, à restituer à M. [N] [E] et Mme [L] [S] épouse [E] l’ensemble des échéances réglées par ces derniers au titre du crédit affecté, soit la somme de 11 639,73 euros (onze mille six cent trente neuf euros et soixante treize), arrêtée au mois de février 2021, et ce jusqu’au jour du jugement à intervenir, outre les mensualités postérieures acquittées, avec intéréts au taux légal, à compter de la décision,
– débouté M. [N] [E] et Mme [L] [S] épouse [E] de leur demande au titre de leur préjudice financier,
– débouté M. [N] [E] et Mme [L] [S] épouse [E] de leur demande au titre de leur préjudice économique, du trouble de jouissance et du préjudice moral,
– débouté les parties de toutes leurs autres prétentions,
– condamné la société BNP Paribas Personal Finance à payer à M. [N] [E] et Mme [L] [S] épouse [E] la somme de 2 000 euros (deux mille euros) en application de l’article 700 du code de procédure-civile,
– rappelé que les décisions de premiere instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement,
– condamné la société BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens.
La SA BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la SA Sygma Banque, a relevé appel de cette décision par déclaration au greffe en date du 20 août 2021.
Au terme de ses conclusions d’appelante notifiées le 18 novembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens au soutien de ses prétentions, la SA BNP Paribas Personal Finance demande à la cour, au visa des articles L111-1 et suivants et L311’1 et L312-56 du code de la consommation, 1241 et 1338 alinéa 2 du code civil, de :
‘ Infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Dijon du 15 juillet 2021 en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a :
– débouté M. [N] [E] et Mme [L] [S], épouse [E] de leur demande au titre de leur préjudice financier,
– débouté M. [N] [E] et Mme [L] [S] épouse [E] de leur demande au titre de leur préjudice économique, du trouble de jouissance et du préjudice moral,
Par conséquence, statuant à nouveau et y ajoutant,
A titre principal,
‘ dire et juger que M. [N] [E] et Mme [L] [E] sont irrecevables en leurs demandes en l’absence de déclaration de créances,
‘ dire et juger que les conditions de nullité des contrats de vente et de crédit ne sont pas réunies,
‘ dire et juger que M. [N] [E] et Mme [L] [E] ne peuvent plus invoquer la nullité du contrat de vente, et donc du contrat de prêt du fait de l’exécution volontaire des contrats, de sorte que l’action est irrecevable en application de l’article 1338 alinéa 2 du code civil,
‘ dire et juger qu’elle n’a commis aucune faute,
En conséquence,
‘ débouter M. [N] [E] et Mme [L] [E] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
‘ dire et juger que M. [N] [E] et Mme [L] [E] seront tenus d’exécuter les contrats jusqu’au terme,
À titre subsidiaire et dans l’hypothèse où la nullité des contrats serait prononcée,
‘ dire et juger que l’absence de faute de l’établissement de crédit laisse perdurer les obligations de restitutions réciproques,
‘ condamner solidairement M. [N] [E] et Mme [L] [E] à lui payer la somme de 23.500 euros (capital déduction à faire des règlements),
‘ fixer au passif de la liquidation de la société IC Groupe prise en la personne de son liquidateur, Maître [Z], la somme de 11.160,80 euros au titre des intérêts perdus,
À titre infiniment subsidiaire et dans l’hypothèse où la nullité des contrats serait prononcée et une faute des établissements de crédit retenue,
‘ débouter M. [N] [E] et Mme [L] [E] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
‘ condamner M. [N] [E] et Mme [L] [E] au paiement de la somme de 23.500 euros à titre de dommages et intérêts,
‘ fixer au passif de la liquidation de la société IC Groupe prise en la personne de son liquidateur, Maître [Z], la somme de 34.660,80 euros au titre du capital et des intérêts perdus.
En tout état de cause,
‘ condamner solidairement M. [N] [E] et Mme [L] [E] à lui payer une somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,
‘ condamner les mêmes aux entiers dépens de l’appel.
Au terme de leurs dernières conclusions d’intimés et d’appel incident notifiées le 23 février 2023, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens au soutien de leurs prétentions, les époux [E] demandent à la cour, au visa des articles L.111-1, L.111-8, L.112-1, L.221-5, L.221-7, L.211-1, L.311-1, L.312-14, L.312-55, L.314-25, L.312-12 du code de la consommation, L.121-23 du code de la consommation dans leur rédaction applicable au cas d’espèce, L.421-1 à L.421-5 et L.480-4 du code de l’urbanisme, L.313-5-1, L.519-1 et L.546-1 du code monétaire et financier, L.512-1 du code des assurances, 1130, 1137 et 1240 du code civil, 11, 514 et 700 du code de procédure civile, de :
– confirmer le jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Dijon, en ce qu’il a :
o débouté la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande visant à dire irrecevables leurs demandes
o prononcé la résolution du bon de commande n°5453, signé le 29 septembre 2015, avec la SAS IC Groupe, exerçant sous l’enseigne Immo Confort,
En conséquence,
o prononcé la résolution du contrat signé le 29 septembre 2015 avec Sygma Banque aux droits de qui vient la société BNP Paribas Personal Finance,
o condamné la société BNPParibas Personal Finance venant aux intérêts de la société Sygma Banque, à leur restituer l’ensemble des échéances réglées au titre du crédit affecté, soit la somme de 11.639,73 euros arrêtée au mois de février 2021, outre les mensualités postérieures acquittées, avec intérêts au taux légal à compter de la décision,
o débouté les parties de toutes leurs autres prétentions,
o condamné la société BNP Paribas Personal Finance à leur payer la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
o rappelé que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement,
o condamné la société BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens,
– infirmer le jugement susvisé pour le surplus,
et statuant de nouveau,
* condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de Sygma Banque à leur verser les sommes de :
– 7.590 euros, au titre de leur préjudice de financier
– 3.000 euros au titre de leur préjudice économique et du trouble de jouissance,
– 3.000 euros au titre de leur préjudice moral,
en tout état de cause,
* condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de Sygma Banque à leur payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
* condamner la société BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de Sygma Banque, au paiement des entiers dépens,
A titre subsidiaire, si la cour ne faisait pas droit à leurs demandes considérant que la banque n’a pas commis de fautes :
* prononcer la déchéance du droit de la banque BNP Paribas Personal Finance aux intérêts du crédit affecté.
A titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire, la cour venait à les débouter de l’intégralité de leurs demandes,
* dire et juger qu’ils reprendront le paiement mensuel des échéances du prêt.
La SA BNP Paribas Personal Finance a fait signifier la déclaration d’appel à la SA IC Groupe, représentée par son liquidateur, par acte remis à domicile le 27 septembre 2021 et ses conclusions par acte remis à personne morale le 22 novembre 2021.
Les époux [E] ont fait signifier leurs conclusions à la SA IC Groupe en la personne de son liquidateur par acte du 9 février 2022 remis à personne morale.
La clôture de la procédure a été prononcée le 04 avril 2023.
SUR CE
A titre liminaire, la cour observe que certaines des demandes tendant à voir ‘constater’, ‘dire et juger’, ‘déclarer’ … ne constituent qu’un rappel de moyens ou d’arguments mais ne contiennent aucune prétention au sens des articles 4, 5 et 954 du code de procédure civile. Elles ne saisissent donc pas la cour qui ne statuera pas sur ces ‘demandes’.
1/Sur la recevabilité de l’action en nullité du contrat de vente et subséquemment du contrat de crédit
L’article L.622-7 du Code de commerce dispose que le jugement ouvrant la procédure emporte, de plein droit, interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d’ouverture, à l’exception du paiement par compensation de créances connexes. Il emporte également, de plein droit, interdiction de payer toute créance née après le jugement d’ouverture, non mentionnée au I de l’article L. 622-17. Ces interdictions ne sont pas applicables au paiement des créances alimentaires.
Aux termes de l’article L 622-21 du code de commerce, applicable à la liquidation judiciaire en vertu de l’article L 641-3 du même code “I.-Le jugement d’ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n’est pas mentionnée au I de l’article L 622-17 et tendant : 1° A la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent ; 2° A la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent (…)”.
L’interdiction des actions visée à cet article concerne exclusivement les points 1° et 2° qui y sont visés ; ainsi, ne sont pas interdites une action en nullité, ou une action pour inexécution d’une obligation de faire.
En outre, dès lors que la nullité de la vente a été prononcée après l’ouverture de la procédure collective, la créance de restitution du prix née de l’annulation de la vente est une créance postérieure non visée par l’interdiction des poursuites prévue à l’article L.622-21 du code de commerce.
En l’espèce, lors de l’ouverture de la procédure collective de la société IC Groupe, aucune instance n’était en cours devant la juridiction civile, l’assignation ayant été délivrée postérieurement au prononcé de sa liquidation judiciaire.
L’action initiée par les époux [E] porte sur l’annulation du contrat pour manquement de la société IC Groupe à ses obligations dans la rédaction du bon de commande, et pour vice du consentement.
En tant que telle, cette action n’est pas prohibée par les textes précités.
Il est par ailleurs observé que les époux [E] ne formulent aucune demande indemnitaire à l’encontre de la société IC Groupe.
Dès lors que l’exigence de la mise en cause du liquidateur judiciaire posée par l’article L 641-9 du code de commerce a été satisfaite leur action en nullité du contrat principal est recevable et il en est de même de l’action en nullité du contrat de crédit affecté sans que la première action fût soumise à une déclaration préalable de créance à la procédure collective.
En conséquence, le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a déclaré l’action engagée par les époux [E] recevable.
2/ Sur la nullité du contrat principal
Le contrat étant daté du 29 septembre 2015, sont applicables :
– les dispositions du code civil antérieures à l’ordonnance du 10 février 2016 entrée en vigueur le 1er octobre 2016
– et les dispositions du code de la consommation dans leur rédaction antérieure à l’ordonnance du 14 mars 2016, entrée en vigueur le 1er juillet 2016.
Il n’est pas contesté que le contrat dont s’agit a été conclu après démarchage à domicile de sorte qu’il est soumis aux dispositions des articles L121-17 et suivants du code de la consommation, dans leur rédaction applicable lors de la conclusion du contrat.
L’article L121-17 ancien du code de la consommation prévoit que préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, notamment les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ou encore, lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat.
La charge de la preuve concernant le respect des obligations d’information pèse sur le professionnel.
L’article L111-1 du code de la consommation dispose, dans sa version applicable, qu’avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1 ;
3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que, s’il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles. La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d’Etat.
L’article L218-1 du code de la consommation, dans sa version applicable, prévoit que le contrat comprend, à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l’article L 121-17.
En l’espèce, il est relevé que le bon de commande ne mentionne ni la taille ni le poids des panneaux ce qui ne permet pas de vérifier la faisabilité de l’opération ni de connaître le nombre de panneaux nécessaires en fonction de la surface de toit mais encore et comme l’a relevé le premier juge, le contrat est parfaitement silencieux quant à la marque des panneaux et de l’onduleur de sorte que les consommateurs n’étaient pas en mesure d’appréhender réellement la qualité du matériel vendu comme ne pouvant effectuer aucune comparaison valable avec d’autres offres.
Le premier juge a pu en déduire de manière légitime que le contrat encourait la nullité de ce chef sans avoir à apprécier les autres griefs.
La BNP Paribas Personal Finance estime toutefois que la nullité a été couverte par la volonté des époux [E] aux motifs que ces derniers ont :
– signé le bon de commande et ainsi pris connaissance des conditions générales de vente reproduisant les dispositions du code de la consommation rappelant les mentions obligatoires ce qui leur permettait d’avoir connaissance des non conformités,
– renoncé à faire usage de leur droit de rétractation,
– signé une attestation de fin de travaux sans réserve indiquant que les travaux étaient terminés et conformes à leur demande,
– ordonné à la banque de débloquer les fonds pour financer l’opération,
– remboursé régulièrement les mensualités.
Il résulte de l’article 1338 du code civil, dans sa rédaction applicable, que la confirmation d’un acte nul procède de son exécution volontaire en connaissance du vice qui l’affecte.
La reproduction lisible, dans un contrat conclu hors établissement, des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à ce type de contrat permet au souscripteur de prendre connaissance du vice résultant de l’inobservation de ces dispositions.
Or, en l’espèce si les conditions générales de vente reprennent les dispositions des articles L 211-17, L121-18-1, L121-18-2, L121-21, L121-21-1, L121-21-2, L121-21-3, L121-21-4 et L121-21-7 du code de la consommation, elles ne font aucunement référence aux obligations du vendeur quant aux informations qu’il doit communiquer au consommateur concernant les caractéristiques du bien tel que précisées à l’article L111-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable.
Le fait que les époux [E] aient pu signer le bon commande ainsi que le bon de livraison sans réserve, ordonner le déblocage des fonds et régler les mensualités du prêt, alors qu’il n’est pas établi qu’ils avaient connaissance des irrégularités affectant le bon de commande, ne saurait suffire à valoir renonciation à se prévaloir de la nullité du contrat.
Le premier juge a, toutefois, commis une erreur en prononçant la résolution du contrat alors que les irrégularités affectant le bon de commande sont sanctionnées par la nullité du contrat.
Il convient donc d’infirmer le jugement déféré et de prononcer la nullité du contrat principal.
3/ Sur la nullité du crédit souscrit auprès de la BNP Paribas Personal finance
Par application de l’article L311-32 du code de la consommation dans sa rédaction applicable la nullité du contrat principal entraîne celle de plein droit du contrat de crédit affecté.
La décision déférée est encore confirmée sur ce point sauf à prononcer la nullité du contrat et non sa résolution.
4/ Sur la créance de restitution
La nullité du contrat de crédit entraîne la remise des parties en l’état antérieur à sa conclusion, et donc le remboursement par les emprunteurs du capital versé en leur nom par la société de crédit au vendeur sauf pour eux à démontrer l’existence d’une faute privant l’établissement de crédit de sa créance de restitution.
Pour s’opposer à la restitution des fonds versés par l’organisme de crédit, M. et Mme [E] lui reprochent d’avoir :
– octroyé un crédit accessoire d’un contrat nul,
– débloqué l’intégalité des fonds entre les mains de l’installateur sans s’être assuré que celui-ci avait exéxuté son obligation.
Le premier juge a estimé que la banque devait être privée de sa créance de restitution au motif qu’elle avait commis des fautes faisant preuve à minima de légèreté blâmable pour avoir libéré les fonds, au vu d’un bon de commande violant manifestement les règles d’ordre public, en matière de protection des consommateurs et de démarchage à domicile.
Il est exact qu’en sa qualité de professionnel, la SA Sygma Banque, aux droits de qui vient la BNP Paribas Personal Finance, pouvait sans difficulté relever les irrégularités grossières retenues par le tribunal au regard des dispositions du code de la consommation du bon de commande et qu’elle aurait dû refuser d’accorder ledit financement en exécution de son obligation de vérification et de conseil.
Elle confie, en effet, à une société, dont les manquements sont manifestes, ses formulaires de prêt, apportant à cette dernière un appui. En ne vérifiant pas le respect des dispositions protectrices du code de la consommation, et en débloquant les fonds alors que le bon de commande était entaché de nullité, elle a eu un comportement fautif.
Toutefois, les dispositions des articles L311-31 et L311-32 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure au 1er juillet 2016, n’édictent pas une sanction de déchéance de droit de réclamer le paiement des sommes dues lorsque la livraison et la fourniture de la prestation sont réellement intervenues, ce qui est le cas en l’espèce.
En outre, le comportement fautif de la banque ne pourrait la priver de sa créance de restitution qu’au regard d’un préjudice actuel et certain subi par les consommateurs en lien avec sa faute.
Or, en l’espèce, il est constant que les panneaux photovoltaïques ont été livrés et installés le 16 novembre 2015 et que l’installation a été mise en service, même si les consorts [E] précisent dans leurs conclusions que le raccordement n’a pu être réalisé que le 11 avril 2016.
Ces derniers précisent également que ce n’est qu’à compter du 11 avril 2017, soit un an après la mise en service, qu’ils ont perçu leurs premiers revenus énergétiques, ce dont il se déduit que l’installation fonctionne et produit de l’électricité, quand bien même ils font valoir leur déception quant au rendement réel de l’opération la qualifiant de ruineuse.
De plus, la société IC Groupe ayant été placée en liquidation judiciaire, il est improbable que le liquidateur judiciaire demande la restitution du matériel qui impliquerait pour lui la restitution du prix, de sorte que, malgré l’annulation du contrat de vente, les consorts [E] vont demeurer propriétaires d’une installation produisant de l’électricité.
Rien n’indique à ce jour qu’ils vont mener à bien leur projet de désinstallation de la centrale et de remise en état de la toiture dès lors qu’ils restent propriétaires de l’installation et que la nécessité d’enlever cette dernière n’est pas justifiée.
Par ailleurs, si les époux [E] soutiennent qu’il s’agirait d’une opération ruineuse, ils ne justifient aucunement d’un engagement du vendeur, connu de l’organisme de crédit, quant à la rentabilité de l’installation en terme de prix de revente de l’électricité.
En outre, la faible rentabilité invoquée en terme de revente possible d’énergie constitue un préjudice, à le supposer vérifié, qui est sans lien avec un éventuel manquement de la banque, dont la collusion frauduleuse avec le vendeur n’est pas établie.
En conséquence, le jugement déféré doit être infirmé en ce qu’il a débouté la banque de sa demande de restitution du capital, déduction faites des échéances.
Le jugement déféré étant confirmé sur la nullité du contrat de crédit, la banque ne peut obtenir restitution que du capital emprunté, après déduction des échéances réglées par les époux [E].
Il n’est pas contesté que les époux [E] n’ont jamais cessé de régler les échéances du prêt.
Dans leurs dernières conclusions en page 33, ils indiquent de manière contradictoire qu’au 22 février 2021, ils auront réglé la somme de 11 639,73 euros tandis qu’en page 34 ils précisent avoir remboursé le prêt par anticipation sans toutefois le justifier.
Faute d’une telle démonstration, au jour où la cour statue, ils ont donc réglé la somme de 18 030,17 euros (soit 79 x 228, 23) arrêtée au 15 juin 2023.
Statuant à nouveau, il convient donc de condamner conjointement et non solidairement (le contrat de crédit étant annulé) les époux [E] à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 5 469,83 euros (23 500 – 18 030,17) et ce en deniers ou quittances valables.
Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
A supposer que la demande de la banque tendant à la fixation d’une créance de 11 160,80 euros à la liquidation judiciaire du vendeur soit recevable, alors que la banque ne justifie pas d’une déclaration de cette créance auprès du mandataire judiciaire, elle n’est pas fondée, la perte des intérêts du prêt étant la conséquence de sa propre faute.
5/ Sur l’appel incident des époux [E] portant sur les demandes de dommages-intérêts
La cour observe que si les consorts [E] demandent, à titre subsidiaire dans le corps de leurs conclusions, la condamnation de la banque fautive en paiement de dommages-intérêts à hauteur de 11 600 euros en réparation de leur préjudice financier, ils ne formulent plus cette demande dans leur dispositif qui seul lie la cour de sorte qu’il n’y a pas lieu de statuer sur ce point.
Ils sollicitent, au titre de leur appel incident, le dédommagement de leur préjudice économique et de jouissance aux motifs qu’ils :
– n’ont pas été pleinement informés par la banque compte tenu de ses obligations en sa qualité de dispensateur de crédit,
– n’ont pas pleinement consenti à un tel crédit, la banque ayant sciemment et fautivement octroyé un crédit accessoire à un contrat nul,
– ont subi le remboursement d’un crédit à un taux d’intérêt d’emprunt exorbitant imposé par la banque qu’ils ont dû rembourser par anticipation pour limiter le coût,
– ont dû renoncer à différents projets personnels (vacances, acquisitions, travaux notamment).
Enfin, les intimés se prévalent d’un préjudice moral invoquant les désagréments liés à la réalisation d’importants travaux pour l’installation solaire extrêment onéreuse, aussi inutile qu’inesthétique, mais encore le temps perdu dans les démarches administratives ainsi que l’angoisse d’avoir à supporter de très longues années le remboursement d’un crédit ruineux, ayant en outre le réel sentiment de s’être fait escroquer.
Or, contrairement à ce qu’ils allèguent, les intimés ne démontrent ni le caractère dérisoire des revenus tirés de la vente de leur électricité alors qu’aucun engagement du vendeur à ce sujet n’est justifié ni ne justifient de la perte financière considérable alléguée.
Ils ne peuvent valablement invoquer les conditions exorbitantes du crédit ni l’angoisse d’avoir à supporter durant de très longues années le remboursement d’un crédit ruineux alors que le contrat de crédit a été annulé en suite de l’annulation du contrat principal, tandis qu’ils obtiennent restitution des échéances versées à la banque au titre du crédit annulé et qu’ils vont rester propriétaires du matériel.
En tout état de cause, les préjudices invoqués ne sont pas en lien avec les fautes reprochées à la banque.
Sur la demande relative au titre des frais d’installation du matériel et de remise en état de la toiture, il est relevé là encore que le coût de la remise en état de la toiture n’est pas la conséquence directe de la faute de la société de crédit qui ne saurait, en conséquence, l’assumer alors, au demeurant, que le vendeur ayant été placé en liquidation judiciaire, il n’est pas certain que les intimés y procèdent.
Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu’il a débouté les consorts [E] de leurs demandes de dommages-intérêts.
6/ Sur les demandes accessoires
Le jugement déféré est infirmé sur les dépens et les frais irrépétibles non compris dans les dépens.
Chacune des parties succombant partiellement en ses demandes, elles conserveront la charge de leurs propres dépens de première instance et d’appel et l’équité commande de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme le jugement déféré en ce qu’il a :
– déclaré recevables les demandes formulées par les consorts [E] tendant à la nullité des contrats,
– débouté M. et Mme [E] de leurs demandes de dommages-intérêts dirigées à l’encontre de la SA BNP Paribas Personal Finance au titre des préjudices financier, économique, moral et du trouble de jouissance,
– débouté la SA BNP Paribas de sa demande de fixation de créance à la liquidation judiciaire de la société IC Groupe au titre des intérêts perdus,
L’infirme pour le surplus et statuant à nouveau,
Prononce la nullité du contrat de vente conclue le 29 septembre 2015 entre la SAS IC Groupe et les époux [N] [E] / [L] [S],
Prononce consécutivement la nullité du contrat de crédit souscrit le même jour auprès de la société Sygma Banque aux droits de laquelle se trouve la SA BNP Paribas Personal Finance,
Condamne conjointement M. [N] [E] et Mme [L] [E] née [S] à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 5 469,83 euros, arrêtée au 15 juin 2023, en deniers ou quittances valables, outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens de première instance et d’appel,
Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,