Droit de rétractation : 26 mai 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/03820

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Droit de rétractation : 26 mai 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/03820
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2ème Chambre

ARRÊT N° 271

N° RG 20/03820 – N° Portalis DBVL-V-B7E-Q26Z

(1)

S.A. COFIDIS

C/

Mme [B] [G] épouse [F]

M. [Y] [F]

S.A.R.L. AGENCE FRANCAISE POUR LA TRANSITION ENERGETIQUE

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

– Me Eric DEMIDOFF

– Me Luc BOURGES

– Me Marie BLAZE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 26 MAI 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,

GREFFIER :

Mme Aichat ASSOUMANI, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 14 Mars 2023 , tenue en double rapporteur , sans opposition des parties par Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre, et Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 26 Mai 2023 par mise à disposition au greffe

****

APPELANTE :

S.A. COFIDIS

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par Me Eric DEMIDOFF de la SCP GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Xavier HELAIN, Plaidant, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉS :

Madame [B] [G] épouse [F]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Luc BOURGES de la SELARL LUC BOURGES, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Karine LEBOUCHER, Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER

Monsieur [Y] [F]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Luc BOURGES de la SELARL LUC BOURGES, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me Karine LEBOUCHER, Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER

S.A.R.L. AGENCE FRANCAISE POUR LA TRANSITION ENERGETIQUE

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Marie BLAZE, Postulant, avocat au barreau de QUIMPER

Représentée par Me Binhas AOUIZERATE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

3

EXPOSÉ DU LITIGE :

À la suite d’un démarchage à domicile, Mme [G] épouse [K] [F] a, selon bon de commande du 25 avril 2018, commandé à la société Agence française de la transition énergétique (la société AFTE), la fourniture et la pose d’une centrale photovoltaïque en autoconsommation, d’une batterie de stockage et d’un chauffe-eau thermodynamique, moyennant le prix de 27 000 euros TTC.

En vue de financer cette opération, la société Cofidis a, selon offre acceptée le même jour, consenti à M. [K] [F] et à son épouse (les époux [F]) un prêt de 27 000 euros au taux de 3,31 % l’an, remboursable en 48 mensualités de 620,28 euros, hors assurance emprunteur, après un différé de remboursement de 6 mois.

Les fonds ont été versés à la société AFTE au vu d’une attestation de conformité du 23 mai 2018.

Prétendant que le bon de commande serait irrégulier, Mme [F] a vainement notifié au vendeur son intention de se rétracter le 5 avril 2019 puis a, par actes des 3 et 7 mai 2019, fait assigner la société AFTE et la société Cofidis devant le tribunal d’instance (devenu le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire) de Rennes en annulation ou en caducité des contrats de vente et de prêt.

M. [F] est intervenu volontairement à l’instance.

Par jugement du 16 juillet 2020, le premier juge a :

déclaré l’intervention volontaire de M. [F] recevable,

prononcé l’annulation du contrat conclu le 28 avril 2018 entre Mme [F] et la société AFTE,

prononcé l’annulation du contrat de crédit conclu le même jour entre les époux [F] et la société Cofidis,

débouté la société Cofidis de l’ensemble de ses demandes,

condamné la société Cofidis à restituer aux époux [F] les sommes déjà versées au titre du contrat de prêt,

condamné la société AFTE à prendre en charge le coût des travaux de dépose des panneaux et de remise en état pour un montant de 2 046 euros,

rejeté toutes ‘conclusions’ plus amples ou contraires,

condamné in solidum la société Cofidis et la société AFTE au paiement d’une somme de 2 400 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

condamné in solidum la société Cofidis et la société AFTE aux dépens,

ordonné l’exécution provisoire de la décision.

La société Cofidis a relevé appel de ce jugement le 14 août 2020, pour demander à la cour de :

dire les époux [F] et la société AFTE mal fondés en leurs demandes et les en débouter,

condamner solidairement les époux [F] au paiement de la somme de 30 713,61 euros, avec intérêts au taux contractuel de 3,96 % l’an à compter du 16 avril 2016,

à titre subsidiaire, si la cour venait à confirmer la nullité des conventions, condamner solidairement les époux [F] à rembourser à la société Cofidis le capital emprunté d’un montant de 27 000 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,

à titre plus subsidiaire, condamner la société AFTE au paiement de la somme de 29 773,32 euros, avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,

à titre infiniment subsidiaire, condamner la société AFTE au paiement de la somme de 27 000 euros avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,

en tout état de cause, condamner la société AFTE à garantir la société Cofidis de toute condamnation qui pourrait être prononcée au profit des époux [F],

condamner tout succombant au paiement d’une indemnité de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

La société AFTE, à présent dénommée Open Énergie, a relevé appel incident en demandant à la cour de juger le contrat principal valable, ou en tous cas tous vices de celui-ci couverts.

Les époux [F] concluent à titre principal à la confirmation du jugement attaqué.

Subsidiairement, ils demandent à la cour de :

constater la caducité du bon de commande signé avec la société AFTE suite à l’exercice du droit de rétractation de Mme [F],

condamner la société AFTE à verser en plus à Mme [F] une indemnité, au titre de la pénalité due en application de l’article L. 121-21-4 du code de la consommation,

par conséquent, condamner la société Cofidis à restituer toutes sommes d’ores et déjà versées par les époux [F] au titre de l’emprunt souscrit,

priver la société Cofidis de tout droit au remboursement du capital par les époux [F],

si la faute du prêteur n’était pas retenue, condamner la société AFTE à restituer aux époux [F] la somme de 27 000 euros correspondant au montant du bon de commande et priver rétroactivement la société Cofidis de son droit aux intérêts,

condamner solidairement les sociétés AFTE et Cofidis à prendre en charge le coût des travaux de remise en état, soit la somme de 2 046 euros,

à titre infiniment subsidiaire, priver la société Cofidis de son droit aux intérêts pour avoir octroyé un contrat de crédit abusif.

En toute hypothèse, les époux [F] sollicitent la condamnation solidaire des sociétés AFTE et Cofidis au paiement d’une indemnité de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens incluant, en cas d’exécution forcée, la totalité des émoluments de l’huissier instrumentaire.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions déposées pour la société Cofidis 10 novembre 2020, pour la société Open Énergie le 5 février 2021 et pour les époux [F] le 23 décembre 2022, l’ordonnance de clôture ayant été rendue le 12 janvier 2023.

EXPOSÉ DES MOTIFS :

Sur la nullité du contrat principal

Aux termes des articles L 121-18-1 et L. 121-17 devenus L. 221-9, L 221-5, L. 111-1, R. 111-1 et R. 111-2 du code de la consommation, les ventes et fournitures de services conclues à l’occasion d’une commercialisation hors établissement doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire est remis au client et notamment comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

le nom du professionnel, ou la dénomination sociale et la forme juridique de l’entreprise, l’adresse géographique de son établissement et, si elle est différente, celle du siège social, son numéro de téléphone et son adresse électronique,

le cas échéant, son numéro d’inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,

les informations relatives à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte,

son éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, ainsi que les coordonnées de l’assureur ou du garant,

les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du bien ou service concerné,

le prix du bien ou du service,

les modalités de paiement,

en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service,

les modalités prévues par le professionnel pour le traitement des réclamations,

s’il y a lieu, les informations relatives à la garantie légale de conformité, à la garantie des vices cachés de la chose vendue ainsi que, le cas échéant, à la garantie commerciale et au service après-vente,

la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation,

lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit, ainsi que le formulaire type de rétractation,

le numéro d’inscription du professionnel au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,

s’il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et identifié par un numéro individuel en application de l’article 286 ter du code général des impôts, son numéro individuel d’identification,

l’éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, les coordonnées de l’assureur ou du garant ainsi que la couverture géographique du contrat ou de l’engagement.

Pour annuler le bon de commande, le premier juge a retenu que :

ni la taille, ni le poids des panneaux photovoltaïques ne sont indiqués,

les caractéristiques relatives à l’onduleur, aux optimiseurs de puissance et à l’application Internet seraient trop vagues,

le prix des biens livrés ne serait pas mentionné dans l’exemplaire remis à l’acquéreur,

le nom patronymique du démarcheur n’est pas indiqué,

les conditions générales du contrat seraient reproduites avec une police de caractères de taille insuffisante pour les rendre lisibles.

Cependant, rien ne démontre que la taille et le poids des panneaux ainsi que la puissance ou d’autres éléments techniques de l’onduleur Solar Edge et des optimiseurs de puissance Solar Edge P300 constituent des caractéristiques essentielles de la centrale photovoltaïque entrées dans le champ contractuel et devant, à peine de nullité, figurer dans le bon de commande.

De même, l’application de l’internet ‘Smart energy home management Solar Edge’ est suffisamment caractérisée par l’indication qu’il s’agit d’un outil de monitoring et d’optimisation de l’autoconsommation par supervision du compteur avec fourniture de trois prises commandées.

D’autre part, contrairement à ce que le jugement attaqué relève, le total général du prix des fournitures et de la prestation de pose figure bien sur le bon de commande produit par les époux [F] (24 933,19 euros HT et 27 000 euros TTC), ce qui, étant rappeler qu’il n’existe aucune obligation légale de mentionner le détail du prix de chacun des éléments fournis et de la main d’oeuvre, satisfait à l’obligation de mentionner le prix global à payer.

En outre, contrairement à ce que relève là encore le jugement attaqué, les dispositions de l’article L. 111-1, 4° du code de la consommation n’exige pas la mention du nom du démarcheur, obligation légale qui était antérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 17 mars 2014, mais seulement l’identité et les coordonnées postales, téléphoniques et électroniques du professionnel cocontractant, c’est-à-dire en l’occurrence la société AFTE qui bien fait figurer toutes ces informations à deux reprises en pied de deux des pages du bon de commande.

Enfin, les conditions générales du contrat, reproduites de façon aérée sur trois pages du bon de commande avec une police de caractère de taille suffisante ainsi qu’un interlignage conséquent et un titrage de chacune des clauses en caractères gras, sont parfaitement lisibles et compréhensibles.

Les causes de nullité retenues par le jugement attaqué doivent donc être écartées, mais les époux [F] font aussi valoir au soutien de leur appel que :

leur exemplaire du bon de commande serait dans son ensemble quasiment illisible,

la marque des panneaux ne serait pas mentionnée, seul le nom du fabricant l’étant,

le délai d’installation de 4 mois serait imprécis,

le point de départ du délai de rétractation mentionné dans le bon de commande fixé au jour de la conclusion du contrat serait erroné, ce délai devant courir à compter de la livraison,

les conditions générales ne renseigneraient pas correctement sur la garantie légale de conformité,

le bon de commande ne mentionnerait pas l’existence de la souscription par l’installateur d’une assurance décennale des constructeurs,

et il ne mentionnerait pas davantage le nom du médiateur dont relève l’entreprise.

Si, en effet, les mentions manuscrites de l’exemplaire de la liasse autocopiante du bon de commande laissé en la possession des époux [F] sont peu contrastées, elles demeurent néanmoins lisibles.

En outre, l’établissement des différents exemplaires du bon de commande au moyen d’une liasse autocopiante n’est nullement prohibé par les textes précités, l’exemplaire laissé en possession de l’acquéreur constituant bien un double original de l’acte établi sur support durable et signé par le consommateur au sens de l’article L. 121-18-1 devenu L. 221-9 du code de la consommation.

D’autre part, il est indiqué dans ce bon de commande que la centrale photovoltaïque de 3 000 Wc fournie est composée de 10 modules monocritallins ‘Solutex’, de sorte qu’ à supposer même que ce dernier terme désigne le nom du fabricant et non la marque du produit, il demeure qu’il est ainsi suffisamment satisfait à l’obligation d’indication des caractéristiques essentielles du bien livré puisque l’origine de celui-ci est correctement définie par l’identification du fabricant, garant de la qualité, de la pérennité et de la sécurité de ses produits.

Par ailleurs, il est mentionné aux conditions particulières du contrat que ‘l’installation interviendra au plus tard dans les 4 mois suivant la signature du bon de commande’, ce qui, satisfait aux prescriptions de l’article L. 111-1 du code de la consommation puisque, sauf à ajouter à la loi en contradiction avec ses objectifs qui sont de renseigner le consommateur sur le délai global d’exécution du contrat, celui-ci n’exige pas nécessairement un engagement sur un planning, qu’au surplus ‘l’installation’ de la centrale visée par la clause litigieuse incluait nécessairement l’approvisionnement préalable de des biens fournis sur le chantier ainsi que la réalisation des démarchages administratives de déclaration de travaux, et que, s’agissant d’une centrale photovoltaïque fonctionnant, selon les énonciations expresses du contrat, en autoconsommation avec batterie de stockage de l’électricité produite, la société AFTE ne s’était nullement engagée à réaliser ou faire réaliser le raccordement au réseau public d’électricité postérieurement à son installation.

En revanche, si le bon de commande rappelle que le client a la possibilité, en cas de litige, de recourir à une médiation conventionnelle auprès des instances de médiation sectorielles existantes, il ne précise pas, en contravention aux dispositions de l’article R. 111-1, 6° du code de la consommation, les coordonnées de celui-ci.

En outre, alors que la prestation de pose des panneaux en intégration au bâti et d’installation d’un chauffe-eau raccordé au réseau de distribution d’eau chaude sanitaire relevaient de travaux mettant en oeuvre des techniques du bâtiment susceptibles, en cas de malfaçon, de provoquer des désordres sur l’immeuble existant, il appartenait à la société AFTE, conformément aux articles L. 111-2 et R. 111-2, 9° du code de la consommation, de communiquer ou mettre à la disposition de Mme [F] les caractéristiques de son assurance de garantie décennale, ce qu’elle ne justifie pas avoir fait.

À cet égard, si les conditions générales du contrat indiquent que la société AFTE a souscrit une assurance de responsabilité décennale dont il sera justifié au client à l’ouverture du chantier, elles ne précisent pas les coordonnées de l’assureur, et l’entreprise ne justifie nullement avoir donné cette information à Mme [F] au moment des travaux.

Enfin, le contrat litigieux, qui portait sur la livraison de panneaux photovoltaïques et d’un chauffe-eau, ainsi que sur une prestation de service d’installation et de mise en service, doit être assimilé à un contrat de vente en application de l’article L. 221-1, II, du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à la cause, de sorte que le droit de rétractation du consommateur courrait à compter de la réception du bien par le consommateur ou le tiers désigné par lui.

Ainsi, le bon de commande, qui mentionne que ce délai devait courir à compter de la conclusion du contrat, comporte une information erronée sur les modalités de la faculté de rétractation offerte au consommateur.

Or, il résulte de l’article L. 121-18-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à la cause, que, lorsque les informations relatives à l’exercice du droit de rétractation mentionnées à l’article L. 121-17, I, 2° dudit code ne figurent pas dans un contrat conclu hors établissement, la nullité de ce contrat est encourue, de sorte qu’une telle sanction peut être invoquée par le souscripteur du contrat, au même titre que la prolongation du délai de rétractation prévue par l’article L. 121-21-1 du même code.

Le contrat principal est donc irrégulier.

Les sociétés AFTE et Cofidis soutiennent que ces irrégularités ne seraient sanctionnées que par une nullité relative que Mme [F] aurait renoncé à invoquer en acceptant la livraison et la pose des matériels, et en signant sans réserve le procès-verbal de réception.

Cependant, la confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et l’intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l’époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée.

Or, en l’occurrence, rien ne démontre que Mme [F] ait pu, lorsqu’elle a laissé les travaux se réaliser et prononcé leur réception, avoir connaissance des vices entachant le bon de commande, ni les dispositions de l’article R. 111-1, 6°, ni celles de l’article R. 111-2, 9° du code de la consommation n’étant reproduites dans les conditions générales.

Il n’est donc pas établi que le consommateur ait, en pleine connaissance de l’irrégularité de ce contrat, entendu renoncer à la nullité en résultant et qu’il aurait de ce fait manifesté une volonté non équivoque de couvrir les irrégularités de ce document.

Il convient donc d’écarter le moyen tiré de la confirmation du contrat irrégulier et de confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat conclu le 25 avril 2018 entre Mme [F] et la société AFTE.

Au titre de la remise en état des parties consécutivement à l’annulation du contrat, le premier juge a à juste titre condamné la société AFTE à prendre en charge le coût des travaux de dépose des panneaux et de remise en état pour un montant de 2 046 euros.

Il sera seulement précisé que, dans les trois mois du règlement de cette somme, le matériel devra être mis par Mme [F] à la disposition de la société AFTE.

Mais, l’annulation du contrat principal implique aussi la restitution par la société AFTE devenue Open Énergie du prix de 27 000 euros à Mme [F].

Le jugement attaqué sera complété en ce sens, et la société Open Énergie condamnée au paiement de cette somme.

Sur la nullité du contrat de prêt

Aux termes des dispositions de l’article L. 311-32 devenu L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Il n’est pas contesté que le crédit consenti par la société Cofidis est un crédit accessoire à une vente ou à une prestation de service.

En raison de l’interdépendance des deux contrats, l’annulation du contrat principal conclu avec la société AFTE emporte donc annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu avec la société Cofidis.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a constaté l’annulation de plein droit du contrat de prêt.

La nullité du contrat de prêt a pour conséquence de priver de fondement la demande de la société Cofidis de condamner les époux [F] au paiement de la somme de 30 713,61 euros, assortie des intérêts au taux contractuel de 3,96 %, en exécution de ce contrat.

Cette demande sera donc rejetée.

La nullité du prêt a aussi pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu’elle doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d’autre, c’est à dire du capital versé par le prêteur et des échéances réglées par l’emprunteur.

Au soutien de son appel, la société Cofidis fait valoir qu’elle s’est, sans commettre de faute, dessaisie des fonds sur remise d’une attestation de livraison signée de l’emprunteuse, certifiant qu’elle avait disposé du délai légal de rétractation, obtenu et accepté sans réserve la livraison du matériel, constaté que tous les travaux prévus au bon de commande avaient été réalisés, reconnu que la société AFTE avait mis en service l’installation et autorisé le prêteur à se dessaisir des fonds entre les mains du l’entreprise.

Les époux [F] demandent quant à eux à la cour de confirmer le jugement attaqué les ayant dispensés de rembourser le capital emprunté, en faisant valoir que le prêteur se serait fautivement dessaisi des fonds sans vérifier la régularité formelle du bon de commande, et, d’autre part, sans s’assurer de l’exécution complète du contrat principal, au vu d’une attestation de fin de travaux insuffisamment précise pour rendre compte de la complexité de l’opération financée, qu’il aurait par surcroît dû leur soumettre, eu égard à la nature de la prestation financée, une offre de crédit immobilier, plus protectrice du droit des emprunteurs, et qu’il aurait enfin manqué de vigilance en confiant la distribution de ses crédits à une entreprise qui ne leur aurait pas délivré les informations adéquates.

Le contrat de prêt, qui portait sur une somme de moins de 75 000 euros en vue de financer une prestation financée par le crédit ainsi consenti par l’intermédiaire du prestataire, constituait un crédit lié se trouvant bien soumis, conformément à l’article L. 311-3, 2° et L. 312-2, c du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la cause, au régime des crédits à la consommation, et non des crédits immobiliers.

Le prêt a en outre été consenti après remise d’une fiche d’information précontractuelle et l’établissement d’une fiche de dialogue, les emprunteurs ne précisant pas en quoi les informations délivrées et recueillies auraient été insuffisantes, et moins encore en quoi cette circonstance aurait été de nature à priver le prêteur de son droit à la restitution du capital prêté après annulation de plein droit de son contrat du fait de l’annulation du contrat principal.

Enfin, le prêteur, qui n’a pas à assister l’emprunteur lors de l’exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d’une installation exempte de vice ou la conformité du matériel livré aux stipulations contractuelles, ne commet pas de faute lorsqu’il libère les fonds au vu d’une attestation de livraison qui lui permet de s’assurer de l’exécution complète du contrat principal.

Or, en l’occurrence, l’attestation de livraison signée par Mme [F] faisait ressortir sans ambiguïté qu’elle avait bénéficié d’un délai de rétractation et qu’elle a accepté l’installation sans réserve.

Cependant, il est aussi de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu’il libère la totalité des fonds, alors qu’à la simple lecture du contrat principal il aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile.

Or, si le défaut d’identification de l’assureur de garantie décennale de la société AFTE n’était pas décelable par la société Cofidis puisque l’entreprise n’avait pas à le mentionner dans le bon de commande mais seulement à mettre cette information à la disposition de son client, il a aussi été précédemment relevé que le bon de commande n’identifiait ni le médiateur compétent en cas de litige et que l’information sur le point de départ du délai de rétractation était erronée.

Le prêteur n’avait certes pas à assister l’emprunteur lors de la conclusion et de l’exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d’une installation exempte de vice ou la conformité du matériel livré aux stipulations contractuelles, mais il lui appartenait néanmoins de relever les anomalies apparentes du bon de commande, ce dont il résulte qu’en versant les fonds entre les mains du prestataire, sans procéder à des vérifications complémentaires sur la régularité formelle de ce bon de commande, la société Cofidis a commis une faute susceptible de la priver du droit d’obtenir le remboursement du capital emprunté.

Toutefois, cette dernière fait valoir à juste titre que cette dispense de remboursement du capital emprunté est subordonnée à la démonstration par l’emprunteur de l’existence d’un préjudice en lien causal avec la faute du prêteur.

En effet, la société AFTE étant condamnée à restituer le prix du marché annulé et à supporter les frais de remise en état de la toiture, il ne subsiste aucun préjudice en lien causal suffisant avec cette faute.

Il n’y a dès lors pas lieu de dispenser les époux [F] de rembourser le capital emprunté.

Après réformation du jugement attaqué, il convient par conséquent de condamner solidairement les époux [F] à rembourser le capital emprunté de 27 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du jour du présent arrêt, la disposition du jugement attaqué ayant condamné la société Cofidis à restituer aux époux [F] les sommes déjà versées au titre du contrat de prêt étant par ailleurs confirmée.

Puisque les époux [F] ont été condamnés à rembourser à la société Cofidis le capital emprunté, les demandes plus subsidiaire et infiniment subsidiaire du prêteur en condamnation de la société AFTE devenue Open Énergie au paiement des sommes de 29 773,32 euros ou de 27 000 euros sont sans objet.

Sur les autres demandes

Parties l’une et l’autre succombantes devant le juge des contentieux de la protection, les sociétés Open Énergie et Cofidis ont été à juste titre condamnées in solidum aux dépens de première instance et, en toute équité, au paiement aux époux [F] d’une indemnité de 2 400 euros au titre de leurs frais irrépétibles de première instance.

Les sociétés Open Énergie et Cofidis étant l’une et l’autre fautives dans d’égales proportions, la demande de garantie formée par la seconde contre la première ne sera admise qu’à due concurrence de 50 %.

Parties l’une et l’autre succombantes devant la cour, la sociétés Open Énergie et les époux [F] supporteront in solidum les dépens d’appel.

Toutefois, il n’y a pas matière à application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de quiconque en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Infirme le jugement rendu le 16 juillet 2020 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Rennes en ce qu’il a débouté la société Cofidis de sa demande en restitution du capital emprunté ;

Statuant à nouveau de ce chef et complétant le jugement attaqué,

Condamne la société Open Énergie à payer à Mme [G] épouse [K] [F] la somme de 27 000 euros au titre de la restitution du prix ; 

Dit que, passé un délai de trois mois à compter du paiement de la somme de 4 554 euros au titre des frais de dépose de l’installation et de remise en état de la toiture, Mme [G] épouse [K] [F] devra laisser le matériel fourni à la disposition de la société Open Énergie, qui le récupérera à ses frais ;

Condamne solidairement les époux [K] [F] à payer à la société Cofidis la somme de 27 000 euros au titre de la restitution du capital emprunté, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt ;

Confirme le jugement attaqué en ses autres dispositions ;

Condamne la société Open Énergie à garantir la société Cofidis des condamnations prononcées à son encontre par le jugement attaqué en application de l’article 700 du code de procédure civile et au titre des dépens à due concurrence de 50 % ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

Condamne in solidum la société Open Énergie et les époux [K] [F] aux dépens d’appel ;

Accorde le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile à l’avocat de la société Cofidis ;

Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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