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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 9 – A
ARRÊT DU 22 JUIN 2023
(n° , 17 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/04674 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBT3C
Décision déférée à la Cour : Jugement du 9 janvier 2020 – Juge des contentieux de la protection de MEAUX – RG n° 11-18-001559
APPELANTE
La société EDF ENR, société par actions simplifiée à associé unique représentée par son représentant légal domicilié audit siège en cette qualité
N° SIRET : 433 160 900 00455
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS – AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055
assistée de Me Christophe BELLOC, avocat au barreau de PARIS, toque : W15
INTIMÉS
Madame [C] [E]
née le 19 juillet 1963 à [Localité 8] (93)
[Adresse 3]
[Localité 6]
représentée par Me Audric DUPUIS, avocat au barreau de PARIS, toque: C1162
Monsieur [S] [L]
né le 8 septembre 1957 à [Localité 7] (ALGERIE)
[Adresse 3]
[Localité 6]
représenté par Me Audric DUPUIS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1162
La société DOMOFINANCE, société anonyme agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié ès-qualités audit siège
N° SIRET : 450 275 490 00057
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Coralie-Alexandra GOUTAIL de l’EURL Goutail Avocat, avocat au barreau de PARIS, toque : A0201
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 10 mai 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre
Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère
Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère
Greffière, lors des débats : Mme Ophanie KERLOC’H
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans le cadre d’un démarchage à domicile, le 10 mars 2017, M. [S] [L] et Mme [C] [E] ont acquis de la société EDF ENR, une centrale solaire composée de 12 panneaux photovoltaïques au prix de 13 275 euros.
Un contrat de crédit affecté a été conclu le même jour par M. [L] et Mme [E] avec la société Domofinance afin de financer cette installation et prévoyant un financement en capital de 13 275 euros au taux d’intérêts contractuel de 1,93 % l’an remboursable en 100 échéances mensuelles de 143,82 euros chacune.
L’ouvrage a fait l’objet d’une réception sans réserve le 17 juin 2017 et les fonds ont été débloqués le 4 juillet 2017 sur la base de la fiche de réception de travaux signée par M. [L].
M. [L] et Mme [E] ont cessé de régler les échéances du crédit et la société Domofinance s’est prévalue de la déchéance du terme du contrat de prêt au 3 avril 2018.
Suivant acte d’huissier délivré le 13 novembre 2018, la société Domofinance a fait assigner M. [L] et Mme [E] devant le tribunal d’instance de Meaux aux fins de les voir condamner solidairement à lui verser la somme de 13 070,70 euros avec intérêts au taux de 1,93 % l’an à compter du 4 avril 2018 outre la somme de 983,18 euros au titre de l’indemnité de résiliation avec capitalisation des intérêts.
Suivant acte d’huissier délivré le 3 mai 2019, M. [L] et Mme [E] ont fait assigner la société EDF ENR devant cette même juridiction et ont demandé à titre principal, outre la jonction des deux procédures, l’annulation du contrat de vente et celle du contrat de crédit, avec privation de la banque de son droit à restitution du capital prêté et de son droit à intérêts, la dépose des matériels par la société venderesse et la remise en état antérieur de leur toiture et à titre subsidiaire, la déchéance du droit aux intérêts de la banque.
Le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Meaux, par un jugement contradictoire rendu le 9 janvier 2020, a :
– ordonné la jonction des deux procédures,
– déclaré recevable l’action de la société Domofinance,
– prononcé la nullité du contrat de vente et constaté celle du contrat de crédit affecté,
– condamné la société EDF ENR à faire procéder à la dépose des panneaux photovoltaïques installés au domicile de M. [L] et de Mme [E] puis à faire procéder à la réparation du toit dans le délai d’un mois suivant la signification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard pendant un délai de cinq mois à l’issue duquel il pourra être à nouveau statué avec réservation du droit de liquider l’astreinte,
– condamné la société Domofinance à restituer à M. [L] et à Mme [E] les échéances du prêt déjà remboursées avec obligation de préciser sa méthode de calcul et de joindre au versement un historique de compte complet et précis,
– débouté la société Domofinance de l’ensemble de ses demandes formées à l’encontre de M. [L] et de Mme [E],
– condamné la société EDF ENR à verser à la société Domofinance la somme de 13 275 euros,
– condamné in solidum les sociétés EDF ENR et Domofinance à payer la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles de M. [L] et de Mme [E],
– dit que les dépens sont partagés entre les deux sociétés.
Après avoir reçu la société Domofinance en son action en paiement, le tribunal a relevé que le bon de commande ne comportait pas les mentions exigées par les articles L. 111-1, L. 221-5 et L. 221-9 du code de la consommation à défaut de préciser le poids et la surface des panneaux vendus de sorte que l’annulation du contrat était encourue sans confirmation de la part des acquéreurs.
Il a considéré que la banque avait commis une faute dans la délivrance des fonds sans vérifier la conformité du bon de commande aux dispositions du code de la consommation sur la base d’un bon de livraison laconique ne mentionnant pas le raccordement de l’installation au réseau électrique et sans s’assurer que l’ensemble des démarches administratives avait bien été réalisé. Il a privé la banque de son droit à restitution du capital prêté, rejeté les demandes en paiement et condamné la banque à rembourser les sommes acquittées par les emprunteurs puis a condamné la société EDF ENR à restituer à la banque le montant perçu en capital de 13 275 euros.
Par une déclaration enregistrée le 4 mars 2020, la société EDF ENR a relevé appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions remises le 12 mai 2022, la société EDF ENR demande à la cour :
– d’infirmer le jugement entrepris,
– de réparer l’omission de statuer affectant ledit jugement,
– et statuant à nouveau, de débouter M. [L] et Mme [E] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
– de débouter la société Domofinance de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– de condamner M. [L] et Mme [E] ou tout succombant à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Elle soutient que le bon de commande est conforme aux exigences de l’article L. 111-1 du code de la consommation et que contrairement à ce qu’indique le premier juge, le poids et la surface des panneaux ne constituent pas une caractéristique essentielle au sens de cette disposition. Elle soutient que les informations relatives aux caractéristiques essentielles de l’équipement ont été fournies au client avant la conclusion du contrat de vente, comme cela résulte de la clause signée par le client et que la description du matériel est suffisante.
Elle précise que l’avantage client « Mon Soleil et Moi Installation » constitue une remise commerciale sur les frais d’installation d’un montant de 1 000 euros TTC et que par conséquent les frais d’installation ne sont pas d’un montant de 1 540 euros TTC comme le soutiennent à tort les intimés, mais de 540 euros TTC après application de cette remise dont le montant est parfaitement déterminable.
Elle fait valoir que selon les dispositions de l’article L. 221-18 du code de la consommation applicable au cas d’espèce, le point de départ du droit de rétractation est bien la date de conclusion du contrat et pas celle de réception du bien comme le soutiennent les intimés. Elle ajoute qu’un défaut d’information portant sur le droit de rétractation n’est aucunement sanctionné par la nullité du contrat selon l’article L. 221-20 du même code. Elle indique que si les intimés soutiennent que leur droit de rétractation pouvait être exercé jusqu’au 1er juillet 2018, ils n’établissent aucunement avoir exercé de rétractation dans ce délai dès lors que le courrier versé aux débats n’est pas signé et mentionne seulement une proposition de résolution amiable et pas d’annulation.
Elle rappelle que la confirmation d’une nullité relative peut être tacite, que les consorts [L]-[E] étaient selon elle parfaitement informés des dispositions du code de la consommation qu’ils invoquent dans la présente instance dès lors que celles-ci sont reproduites au bon de commande et au sein des conditions générales qu’ils ont acceptés. Elle estime que c’est donc en parfaite connaissance de cause que les clients ont confirmé le contrat de vente et d’installation en l’exécutant volontairement, en signant le 17 juin 2017 le procès-verbal de réception de l’installation sans réserve, en payant la facture de vente et d’installation de l’équipement et en bénéficiant, depuis la mise en service de l’équipement, d’une production d’énergie électrique d’origine photovoltaïque leur permettant de réduire leurs factures d’électricité.
Elle fait observer que devant le premier juge, la société Domofinance sollicitait à titre subsidiaire de voir condamner la société EDF ENR à lui payer la somme de 13 275 euros au titre de la garantie de remboursement du capital prêté et la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts, que la société EDF ENR a conclu au rejet de ces demandes mais qu’il n’a pas été statué sur ce point dans le jugement déféré. Elle demande à la cour de réparer cette omission de statuer et subsidiairement d’infirmer le jugement entrepris en jugeant irrecevable et en tout état de cause infondé l’appel incident de la société Domofinance aux termes duquel elle sollicite de voir condamner la société EDF ENR à garantir l’emprunteur de la restitution des fonds au prêteur et subsidiairement, à restituer la somme de 13 275 euros sur le fondement d’une faute alléguée et plus subsidiairement, à restituer cette même somme, sur le fondement de la répétition de l’indu. Elle indique que la condamnation du vendeur à garantir le prêteur du remboursement du prêt n’est qu’une simple faculté qui peut être écartée en cas de faute du prêteur, laquelle prive ce dernier de son droit de réclamer à l’emprunteur la restitution du capital emprunté et de son droit à appeler en garantie le vendeur. Elle estime que la société Domofinance a libéré les fonds au vu du contrat d’installation, ce dont il résulte que cet organisme a libéré les fonds en toute connaissance des éléments du dossier, cette faute le privant de la faculté d’appeler en garantie la société EDF ENR.
Aux termes de leurs dernières écritures remises le 15 juin 2021, M. [L] et Mme [E] demandent à la cour :
– de juger infondé l’appel formé par la banque EDF ENR à l’encontre du jugement et de la débouter de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à leur encontre,
– de débouter la société Domofinance de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l’encontre de leurs intérêts,
– de faire droit à leurs demandes, fins et conclusions,
– à titre principal, de confirmer le jugement en ce qu’il a prononcé l’annulation des contrats, dont l’annulation du contrat de crédit qui déchoit la société Domofinance de son droit aux intérêts,
– de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société EDF ENR à déposer le matériel vendu et à remettre en état leur habitation dans son état antérieur à la conclusion de ce contrat,
– à titre subsidiaire, si par impossible la cour d’appel ne confirmait pas à titre principal l’annulation des contrats en cause, de prononcer la déchéance du droit aux intérêts de la banque,
– en tout état de cause, de confirmer le jugement en ce qu’il a retenu une faute de la banque dans le déblocage des fonds, la privant de son droit à restitution du capital prêté, leur ayant causé un préjudice de 13 275 euros équivalent au montant de ce capital,
– ou si par impossible la cour d’appel considérait que la faute de la banque ne leur causait pas un préjudice de 24 500 euros, de juger subsidiairement que cette faute leur a causé un préjudice de 13 142,25 euros,
– de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la banque à leur restituer le montant total des échéances du prêt déjà remboursées,
– de condamner solidairement les sociétés EDF ENR et Domofinance à leur payer la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre le paiement solidaire des entiers dépens.
Ils soutiennent que le contrat principal doit être qualifié de contrat de vente de biens et que le droit de rétractation de 14 jours doit s’exercer à compter de la livraison des biens, qu’ils n’en ont pas été informés et que d’ailleurs la législation relative au droit de rétractation n’est pas reproduite au contrat, en particulier les articles L. 221-18 et L. 221-20 du code de la consommation. Ils font valoir que dans ces conditions, l’article L. 221-20 a vocation à s’appliquer et que le droit de rétractation court dans un délai de 14 jours plus 12 mois à compter de la date de livraison des biens soit pour une livraison au 17 juin 2017, une possibilité de rétractation jusqu’au 1er juillet 2018. Ils prétendent avoir fait jouer ce droit par deux courriers adressés le 15 mars 2018 à chacune des deux sociétés et que la société EDF ENR ne pouvait refuser de reprendre le matériel en leur restituant le montant du capital emprunté non remboursé ce qui constitue un refus délibéré d’appliquer la loi en vigueur dont les dispositions avaient été passées sous silence dans la rédaction d’un bon de commande dispensant, au-delà, de fausses informations sur son bordereau de rétractation. Ils soutiennent que la rétractation du bon de commande étant valable, le contrat de crédit affecté est résilié de plein droit en application de l’article L. 312-54 du code de la consommation.
Ils font valoir que le bon de commande n’est pas conforme aux dispositions des articles L. 221-5 et suivants du code de la consommation, qu’il encourt l’annulation, que le bordereau de rétractation n’est pas conforme aux exigences légales et que les informations dispensées par le bon de commande relatives aux conditions d’exercice de ce droit sont fausses, que plusieurs caractéristiques essentielles font défaut (marque, modèle, type des panneaux, marque, modèle, puissance de l’onduleur), que les prestations de services vendues et leur consistance sont indéterminables au regard de la mention ambiguë « Avantage client Mon Soleil Moi Installation » au prix 1 000 euros TTC.
Ils contestent toute confirmation de l’irrégularité, toute connaissance du vice et une intention de le réparer, en soulignant une reproduction partielle des articles du code de la consommation dans le bon de commande. Ils rappellent ne pas avoir réglé les échéances du crédit et adressé des courriers d’annulation de commande le 15 mars 2018.
Ils sollicitent confirmation de la dépose du matériel et de la remise en état, de la privation de la banque de son droit à restitution des intérêts à raison de l’annulation de son contrat et de son obligation de restitution des mensualités du crédit.
Ils demandent à titre subsidiaire de voir priver la banque de son droit à intérêts en ce qu’ils n’ont jamais reçu le tableau d’amortissement du crédit malgré une demande écrite de leur part et qu’ils ont découvert ce tableau au moment de l’assignation.
Ils reprochent une faute à la société Domofinance pour avoir débloqué les fonds dans le délai de rétractation et pour n’avoir pas tenu compte de la rétractation de leur consentement, pour avoir consenti un crédit et débloqué les fonds sur la base d’un bon de commande nul, sans procéder à des vérifications en ce sens.
Si la cour juge valide l’exercice du droit de rétractation, ils requièrent la résiliation judiciaire de plein droit du contrat de crédit affecté, le caractère non opposable du déblocage des fonds et qu’il soit constaté qu’ils ne sont redevables d’aucune somme au titre du contrat de crédit sauf les éventuels frais de dossier.
Si la cour estime qu’ils n’ont subi qu’une perte de chance de rétracter leur consentement à l’opération contractuelle par la faute de la société Domofinance, ils proposent de calculer cette perte de chance à 99 % du montant du capital du prêt soit un préjudice de 13 142,25 euros.
Aux termes de ses dernières écritures enregistrées le 29 novembre 2021, la société Domofinance demande à la cour :
– d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il l’a reçue en son action,
statuant à nouveau,
– à titre principal, de dire et juger valables les contrats de vente et de crédit affecté du 10 mars 2017 et en conséquence, de débouter M. [L] et Mme [E] de l’ensemble de leurs demandes,
– de dire et juger recevables et bien fondées ses demandes,
– de condamner solidairement M. [L] et Mme [E] à lui payer la somme de 14 053,88 euros en principal, outre intérêts au taux de 1.93 % l’an sur la somme de 13 070,70 euros à compter du 4 avril 2018 jusqu’au jour du parfait paiement,
– à titre subsidiaire, de dire et juger que M. [L] et Mme [E] ont commis une faute en ne poursuivant pas le règlement de leurs échéances de prêt et de prononcer la résiliation judiciaire de l’offre de prêt, et en conséquence, de les condamner solidairement à lui payer la somme de 14 053,88 euros en principal, outre intérêts au taux de 1.93 % à compter de la décision à intervenir,
– subsidiairement, dans l’hypothèse où serait prononcée l’anéantissement du contrat de vente, et subséquemment celui du contrat de crédit affecté, de dire et juger que les parties devront être remises dans l’état antérieur à la conclusion desdits contrats et que M. [L] et Mme [E] devront restituer le montant du crédit,
– de dire et juger qu’elle n’a commis aucune faute,
– de dire et juger que la société EDF ENR devra garantir M. [L] et Mme [E] du remboursement du prêt et en conséquence,
– de condamner solidairement M. [L] et Mme [E] et la société EDF ENR à lui verser la somme de 13 275 euros correspondant au montant du capital emprunté,
– subsidiairement, de dire et juger que la société EDF ENR a participé, par son comportement fautif, à l’anéantissement du contrat de vente et subséquemment du contrat de crédit et en conséquence, de la condamner à lui verser la somme de 13 275 euros à titre de dommages et intérêts correspondant au montant du capital versé entre ses mains,
– à titre infiniment subsidiaire dans l’hypothèse où la faute de la société Domofinance serait retenue, de dire et juger que la société EDF ENR a participé, par son comportement fautif, à l’anéantissement du contrat de vente et subséquemment du contrat de crédit et en conséquence, la condamner à lui verser la somme de 13 275 euros à titre de dommages et intérêts correspondant au montant du capital versé entre ses mains,
– à titre très infiniment subsidiaire de dire et juger qu’elle est bien fondée à solliciter, sur le fondement de l’enrichissement sans cause, le versement d’une somme qui ne saurait être inférieure au montant du capital emprunté et de condamner la société EDF ENR à lui verser la somme de 13 275 euros au titre de l’enrichissement sans cause,
– en tout état de cause, de débouter M. [L] et Mme [E] et la société EDF ENR de l’ensemble de leurs demandes,
– de condamner toute partie succombante à lui verser la la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Elle conteste toute méconnaissance des articles L. 111-1, L. 221-5 et L. 221-9 du code de la consommation et s’associe aux observations de la société EDF ENR sur la régularité du bon de commande. Elle soutient que M. [L] et Mme [E] ont confirmé l’acte prétendument nul, qu’ils avaient parfaitement connaissance de l’article L. 111-1 du code de la consommation reproduit in extenso au sein des conditions générales de vente, qu’ils ont accepté la livraison et l’installation des panneaux sans réserve, qu’ils ont réglé les échéances mensuelles en exécution du contrat de prêt depuis le mois d’août 2017 et ont joui des fruits de l’acquisition puisque l’installation a été raccordée, qu’elle fonctionne et qu’elle produit de l’électricité qui est rachetée par EDF.
Elle fait observer que la prétendue lettre d’annulation ou de rétractation du 25 mars 2018 est en réalité une réponse à la lettre de mise en demeure qu’ils ont réceptionnée de la part de la banque le 14 mars 2018, d’avoir à régulariser les échéances impayées du prêt, que n’étant plus en capacité financière de rembourser le prêt après plusieurs mois d’échéances réglées sans aucune contestation, ils ont imaginé de réclamer l’annulation des contrats et que leurs courriers sont d’ailleurs intitulés « proposition de résolution amiable ».
Sur la demande en paiement, elle indique que les emprunteurs ont cessé le versement des échéances du prêt, délibérément, et sans y être aucunement autorisés ni par l’organisme de crédit ni par une quelconque juridiction, que le premier incident de paiement se situe en novembre 2017 et que son action est recevable. Elle indique avoir fait jouer la déchéance du terme du contrat au 3 avril 2018 après des tentatives amiables de règlement et que les emprunteurs restent redevables de 780,95 euros au titre des mensualités impayées, de 12 289,75 euros au titre du capital restant dû et de 983,18 euros au titre de l’indemnité de résiliation. A défaut elle sollicite la résiliation du contrat.
Elle conteste toute faute, rappelle que l’organisme de financement n’a pas pour mission de contrôler que ce soit sur place, auprès des administrations ou des organismes partenaires, tels qu’ERDF ou du CONSUEL que le certificat de livraison est conforme à la réalité, qu’elle n’est pas compétente pour vérifier la validité d’un bon de commande par rapport à des dispositions du code de la consommation applicables dans la relation vendeur-acquéreurs, lesdites dispositions étant au demeurant susceptibles d’interprétations diverses et qu’elle n’a pas à s’immiscer dans un contrat auquel elle n’est pas partie. Elle affirme avoir procédé au déblocage des fonds dans le respect des dispositions légales et des termes contractuels au vu d’un certificat de livraison signé par M. [L] le 17 juin 2017. Elle fait enfin remarquer que préalablement à la signature de l’offre de prêt, l’attention des emprunteurs a été attirée à plusieurs reprises sur les conséquences de la régularisation du certificat de livraison, soit en l’espèce, le versement du capital financé directement entre les mains du vendeur notamment par des mentions figurant au sein de la fiche d’informations précontractuelles.
Elle conteste tout déblocage des fonds avant achèvement du délai de rétractation puisque le contrat a été signé le 10 mars 2017, le délai de rétractation expirait le 24 mars 2017, la fiche de réception de travaux a été signée le 17 juin 2017 et les fonds ont été débloqués le 4 juillet 2017. Elle soutient que même à supposer que le délai de rétractation du contrat principal n’ait pas commencé à courir à la date de signature du contrat mais à la date de livraison, cela n’a aucun effet sur la validité du déblocage des fonds par le prêteur.
Elle estime que la société EDF ENR ne saurait faire valoir sa propre faute ayant conduit à l’annulation des contrats pour en déduire une faute de la banque et que si la nullité du contrat principal entraîne la nullité du contrat de crédit, c’est bien du fait de la société EDF ENR qui doit garantir l’emprunteur de la restitution des fonds au préteur.
Dans l’hypothèse où les acheteurs seraient exonérés de leur obligation de restitution du montant du capital emprunté et où la garantie de la société EDF ENR serait écartée, elle estime que la société EDF ENR se trouverait dans une situation d’enrichissement sans cause puisqu’elle récupérerait le matériel installé de sorte qu’elle sollicite sa condamnation à rembourser le montant perçu au titre du contrat principal.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 17 mai 2022 et l’affaire a été appelée à l’audience du 10 mai 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour constate :
– que n’est pas discutée à hauteur d’appel la disposition du jugement ayant déclaré recevable la société Domofinance en son action,
– que le contrat de vente conclu le 10 mars 2017 entre M. [L] et Mme [E] d’une part et la société EDF ENR d’autre part est soumis aux dispositions des articles L. 221-5 suivants du code de la consommation dans leur version postérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 dès lors qu’il a été conclu dans le cadre d’un démarchage à domicile,
– que le contrat de crédit affecté conclu le 10 mars 2017 entre M. [L] et Mme [E] et la société Domofinance est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu’il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation postérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,
– qu’il convient de faire application des dispositions du code civil en leur version postérieure à l’entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.
Il résulte du dernier alinéa de l’article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.
Sur la demande d’annulation du contrat principal
– Sur le moyen tiré d’une annulation du contrat par suite de l’exercice du droit de rétractation
En application de l’article L. 221-5 du code de la consommation en sa version applicable au contrat, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique notamment au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 du même code ainsi que lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par l’article R. 221-1 et à son annexe.
L’article L. 221-8 prévoit que dans le cas d’un contrat conclu hors établissement, le professionnel fournit au consommateur, sur papier ou, sous réserve de l’accord du consommateur, sur un autre support durable, les informations prévues à l’article L. 221-5. Ces informations sont rédigées de manière lisible et compréhensible.
L’article L. 221-9 dispose que le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties. Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l’article L. 221-5. Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L. 221-5.
L’article L. 242-1 du même code précise que les dispositions de l’article L. 221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
Selon l’article L. 111-1, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;
3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte ;
5° S’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence de toute restriction d’installation de logiciel, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;
6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.
Aux termes des dispositions des articles L. 221-18 et L. 221-20 du code de la consommation, le consommateur dispose d’un délai de 14 jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d’autres coûts que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25. Le délai court à compter du jour :
– de la conclusion du contrat pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l’article L. 221-4 ;
– de la réception du bien par le consommateur ou un tiers autre que le transporteur désigné par lui pour les contrats de vente de biens. Pour les contrats conclus hors établissement, le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.
Lorsque les informations relatives au droit de rétractation n’ont pas été fournies au consommateur dans les conditions prévues au 2° de l’article L. 221-5, le délai de rétractation est prolongé de douze mois à compter de l’expiration du délai de rétractation initial. Toutefois, si la fourniture de ces informations intervient pendant cette prolongation, le délai de rétractation expire au terme d’une période de quatorze jours à compter du jour où le consommateur a reçu ces informations.
M. [L] et Mme [E] se prévalent de la violation des dispositions légales relatives au droit de rétractation concernant le point de départ de celui-ci et soutiennent que s’agissant d’un contrat mixte prévoyant à la fois la vente d’un bien et la fourniture de prestations de services, le délai pour exercer le droit de rétractation de 14 jours, court, non à compter de la signature du bon de commande, mais à compter de la livraison des biens s’agissant d’un contrat de vente comme le prévoit l’article L. 221-1 du code de la consommation. Ils font valoir que l’information figurant sur le bon de rétractation qui mentionne qu’il convient de l’expédier au plus tard le quatorzième jour à partir du jour de la commande est irrégulière et que le bon de commande qui ne précise pas les bonnes conditions d’annulation mais reprend des mentions inexactes de nature à induire le consommateur en erreur, ils étaient en droit d’exercer leur droit de rétractation dans un délai de 12 mois et 14 jours comme le prévoit l’article L. 221-20.
Il résulte de l’article L. 221-18 du code de la consommation dans sa formulation applicable au litige, que le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu hors établissement, et que ce délai court de la conclusion du contrat pour les contrats de prestation de services visés au 1° de cet article mais aussi pour les contrats de vente visés au 2° de cet article.
Le bon de commande signé le 10 mars 2017 informe le client de l’option d’annulation de la commande dans un délai de 14 jours à compter de la conclusion du contrat tout en précisant les modalités d’exercice de ce droit et notamment l’adresse où le formulaire peut être adressé à EDF ENR Solaire à Limonest outre la possibilité d’utiliser le formulaire joint. Aucune disposition textuelle n’impose de voir reproduire les dispositions des articles L. 221-18 et L. 221-20 du code de la consommation comme le soutiennent les intimés. Le contrat reproduit en revanche le texte des articles L. 111-1 du code de la consommation.
L’information délivrée par la société EDF ENR aux acquéreurs est donc conforme à la réglementation applicable et les acquéreurs ont reconnu en signant le bon de commande avoir reçu un exemplaire des conditions générales en vigueur et en accepter les termes, ces conditions, le bon de commande et les annexes faisant partie intégrante du contrat. Ils ont également reconnu avoir reçu et compris avant signature, de manière lisible et compréhensible, les informations précontractuelles visées à l’article L. 111-1 du code de la consommation, article reproduit au sein des conditions générales de vente.
Il résulte de ce qui précède que les acquéreurs disposaient donc d’un délai de 14 jours jusqu’au 24 mars 2017 pour faire valoir leur droit de rétractation auprès de la société EDF ENR comme ils en ont été correctement informés et que le courrier du 15 mars 2018 dont ils se prévalent est tardif et ne saurait valoir rétractation de la commande sur le fondement des dispositions de l’article L. 221-20 du code de la consommation, étant observé qu’il n’est communiqué aux débats que la copie d’un courrier adressé au vendeur, non signé, sans aucun justificatif d’envoi alors qu’il est évoqué un envoi par courrier recommandé.
Le moyen soulevé à hauteur d’appel ne peut donc prospérer.
– Sur le moyen tiré d’une nullité formelle du contrat
M. [L] et Mme [E] soutiennent que plusieurs caractéristiques essentielles font défaut (marque, modèle, type des panneaux, marque, modèle, puissance de l’onduleur), que les prestations de services vendues et leur consistance sont indéterminables au regard de la mention ambiguë « Avantage client Mon Soleil Moi Installation » au prix de 1 000 euros TTC. Le premier juge a annulé le contrat motif pris qu’il ne mentionnait pas le poids et la surface des panneaux.
Le bon de commande du 10 mars 2017 décrit ainsi l’installation objet du contrat :
« Equipement photovoltaïque :
Référence des panneaux : PW 250 WC
Nombre de panneaux : 12
Puissance crête installée : 3,00 kWc
Référence onduleur : EDF ENR Solaire
Nombre d’onduleurs : 1
12 735 euros TTC
Dont éco-participation : 15,84 €
Installation de l’équipement :
Frais d’installation 1 540 €
Travaux supplémentaires 0€
Avantage client Mon Soleil et Moi Installation 1 000
Total 13 275 ».
La cour observe que les équipements et prestations objets du contrat sont suffisamment détaillés au regard des exigences de l’article L. 111-1 susvisé qui n’impose pas de préciser dans le détail le poids, la surface, la marque, le modèle, le type des panneaux ou de l’onduleur ou encore la puissance. Cette description permettait aux acquéreurs de comparer utilement les produits proposés avec d’autres produits présents sur le marché et de vérifier la complète installation des éléments avant de signer l’attestation de fin de travaux.
La cour constate au demeurant que les informations relatives aux caractéristiques essentielles de l’équipement ont été fournies aux clients avant la conclusion du contrat. En effet, aux termes du bon de commande validé et signé, il est expressément stipulé, juste au-dessus des signatures, que les souscripteurs reconnaissant avoir reçu avant signature les informations précontractuelles visées par l’article L. 111-1 du code de la consommation, un exemplaire du contrat et pris connaissance et accepté l’intégralité des conditions générales de vente en vigueur à la date de la commande, pris connaissance du fait que certaines caractéristiques de la commande sont plus amplement détaillées sur sa version électronique qu’ils ont pu lire dans son intégralité sur leur ordinateur personnel concomitamment à la vente.
M. [L] et Mme [E] prétendent qu’un « Avantage client Mon Soleil et Moi Installation » leur a été vendu en réalité au prix de 1 000 euros TTC, qu’il leur a été expliqué oralement que cette stipulation comprenait la prise en charge du raccordement et de la mise en service, dans ses aspects techniques et financiers, que cependant cette explication ne découle pas logiquement de cette stipulation pour le moins ambigüe et que par conséquent les prestations de services vendues sont indéterminables.
La simple lecture du bon de commande validé par les acquéreurs permet de constater qu’il ne s’agit pas d’une prestation mais bien d’une remise commerciale sur les frais d’installation d’un montant de 1 000 euros TTC déduite des frais de 1 540 euros TTC, ce qui porte en définitive les frais d’installation à la somme totale de 540 euros TTC, après application de la remise. Cette stipulation du contrat est dépourvue de toute ambiguïté et le moyen manque donc de sérieux et ne saurait fonder une quelconque annulation du contrat.
Il résulte de ce qui précède que c’est donc à tort que le premier juge a prononcé la nullité du contrat principal et constaté l’annulation du contrat de crédit affecté. Il convient donc d’infirmer le jugement.
Sur la responsabilité de la société Domofinance
M. et Mme [E] invoquent une faute de la banque devant la priver de son droit à restitution du capital emprunté pour avoir débloqué les fonds dans le délai de rétractation et pour n’avoir pas tenu compte de la rétractation de leur consentement.
Il résulte des motifs qui précèdent que les intimés ne peuvent se prévaloir de l’exercice régulier d’un droit de rétractation au 15 mars 2018 dès lors que le délai expirait en réalité au 24 mars 2017, qu’ils ont attesté sans réserve de l’installation de l’équipement au 17 juin 2017 et que les fonds ont été débloqués le 4 juillet 2017. Aucune faute n’est donc imputable à la société Domofinance.
Ils soutiennent également que la banque a commis pour avoir consenti un crédit et débloqué les fonds sur la base d’un bon de commande nul, sans procéder à des vérifications en ce sens auprès des acquéreurs.
Les motifs qui précèdent rendent sans fondement ce moyen dès lors que le bon de commande n’est pas annulé.
Le premier juge a retenu une faute de la banque dans le décaissement des fonds sur la base d’une attestation de livraison laconique, ne mentionnant pas le raccordement au réseau électrique et en ne s’assurant pas que l’ensemble des démarches administratives avait été réalisé.
En application de l’article L. 312-48 du code de la consommation dans sa rédaction en vigueur depuis le 1er juillet 2016, les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation. En cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, les obligations prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d’interruption de celle-ci.
Il incombe donc au prêteur de vérifier que l’attestation de fin de travaux suffit à déterminer que la prestation promise a été entièrement achevée.
En revanche, il n’appartient pas au prêteur de s’assurer par lui-même de l’exécution des prestations et il ne saurait être garant de l’exécution du contrat principal.
Il est rappelé que la société Domofinance a procédé au déblocage des fonds le 4 juillet 2017 au vu d’un procès-verbal de réception de l’installation sans réserve signée par M. [L] le 17 juin 2017 aux termes duquel le déblocage des fonds est sollicité avec la mention que le délai légal de rétractation est expiré.
L’attestation renvoie sans ambiguïté au bon de commande souscrit le 10 mars 2017 auprès de la société EDF ENR et reprend le descriptif des matériels installés à savoir 12 modules photovoltaïques, 250 Wc-PW2350F-cadre noir, avec onduleur et câblage et accessoires et il ne saurait être reproché à la société Domofinance de ne pas avoir procédé à des vérifications complémentaires qu’elle n’était pas tenue d’opérer quant aux éventuelles autorisations administratives délivrées par des tiers ou quant à la réalité du raccordement au réseau électrique relevant également de la compétence d’une entreprise tierce.
Aucune faute ne peut donc être reprochée au prêteur sur ce fondement, étant précisé que M. [L] et Mme [E] ne font pas la démonstration d’un préjudice en lien avec la libération du capital de 13 275 euros.
Il résulte de ce qui précède que le contrat principal et le contrat de crédit affecté n’étant pas nuls, la décision contestée doit être infirmée en ce qu’elle a prononcé la nullité des contrats, condamné la société EDF ENR à faire procéder à la dépose des panneaux photovoltaïques et à la réparation du toit dans le délai d’un mois suivant la signification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard, condamné la société Domofinance à restituer à M. [L] et à Mme [E] les échéances du prêt déjà remboursées avec obligation de préciser sa méthode de calcul et de joindre au versement un historique de compte complet et précis, condamné la société EDF ENR à verser à la société Domofinance la somme de 13 275 euros.
Sur la demande de réparation de l’omission de statuer
L’article 463 du code de procédure civile permet à une juridiction ayant omis de statuer sur un chef de demande, sur simple requête de l’une des parties ou sur requête commune, de compléter son jugement sans porter atteinte à la chose jugée quant aux autres chefs, sauf à rétablir s’il y a lieu le véritable exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens. La requête doit être présentée un an au plus tard après que la décision est passée en force de chose jugée.
La société EDR ENR soutient que la décision querellée n’a pas statué sur la demande formée par la société Domofinance tendant à voir à titre subsidiaire, condamner la société EDF ENR à lui payer la somme de 13 275 euros au titre de la garantie de remboursement du capital prêté et au paiement de la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts, demandes auxquelles elle s’est opposée.
Il ne résulte pas du jugement querellé une quelconque omission de statuer, la société EDF ENR ayant été condamnée à rembourser la somme de 13 275 euros directement à la banque par application de l’article L. 312-56 du code de la consommation sans dommages et intérêts.
Sur la demande en paiement, en résiliation du contrat et sur la demande de déchéance du droit aux intérêts de la banque
La société Domofinance sollicite que soit constatée la déchéance du terme du contrat et la condamnation solidaire des intimés au paiement des sommes restant dû au titre du contrat de crédit. Elle sollicite à titre subsidiaire la résiliation du contrat au vu de l’arrêt des règlements des échéances du crédit depuis le mois de novembre 2017.
Aux termes de l’article 1124 du code civil, la résolution du contrat résulte soit de l’application d’une clause résolutoire, soit en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.
Il résulte de l’historique de compte que les échéances du crédit ont été réglées du 5 août 2017 au 5 novembre 2017 sans qu’aucun règlement ne soit intervenu depuis lors. Le contrat signé le 10 mars 2017 contient une clause de déchéance du terme du contrat en cas de défaillance de l’emprunteur dans le remboursement du crédit.
La société Domofinance justifie avoir adressé un courrier recommandé avec avis de réception le 12 mars 2018 valant mise en demeure de payer sous 10 jours la somme de 830,91 euros correspondant aux échéances impayées sous peine de voir prononcer la déchéance du terme du contrat et de rendre exigible le capital restant dû et les indemnités et autres pénalités prévues au contrat. Suivant courriers recommandés avec avis de réception adressés le 3 avril 2018, réceptionnés par les emprunteurs le 7 avril 2018, elle prend acte de cette déchéance du terme à défaut de régularisation et les met en demeure de régler la somme totale de 14 054,57 euros sous 8 jours.
C’est donc de manière légitime que la société Domofinance se prévaut de la déchéance du terme du contrat et de l’exigibilité des sommes dues.
Les emprunteurs invoquent une déchéance du droit aux intérêts de la banque pour ne pas leur avoir communiqué le tableau d’amortissement du crédit au moment de la souscription du contrat, se fondant sur les dispositions des articles L. 312-28, R. 312-10 et L. 341-4 du code de la consommation. Ils précisent que le tableau produit aux débats mentionne la date du 6 août 2018,
Les dispositions de l’article L. 312-28 du code de la consommation dans leur rédaction applicable au contrat, prévoient que le contrat de crédit est établi par écrit ou sur un autre support durable. Un encadré, inséré au début du contrat, informe l’emprunteur des caractéristiques essentielles du crédit.
Le non-respect de ces dispositions est sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts aux termes de l’article L. 341-4 du même code.
L’article R. 312-10 du même code fixe la liste des informations devant figurer au contrat et dans l’encadré mentionné à l’article L.312-28, lesquelles doivent être rédigées en caractères dont la hauteur ne peut être inférieure à celle du corps huit, en termes clairs et lisibles. Doivent notamment y figurer :
« 6°Une rubrique sur les informations relatives à l’exécution du contrat qui mentionne notamment dans l’ordre choisi par le prêteur :
(‘)
e) Pour les opérations de crédit amortissable à durée déterminée, lesquelles excluent la location-vente et la location avec option d’achat, le droit de l’emprunteur de recevoir un relevé sous la forme d’un tableau d’amortissement, à sa demande et sans frais, à tout moment durant toute la durée du contrat ».
Le contrat mentionne expressément en page 3 dans un paragraphe intitulé et rédigé en gras « Tableau d’amortissement », la possibilité pour l’emprunteur à tout moment et sans frais, de demander au prêteur de lui adresser un tableau d’amortissement, détaillant les montants, périodes et conditions des échéances ainsi que la ventilation de chaque échéance entre l’amortissement du capital, les intérêts et le cas échéant les coûts additionnels.
La société Domofinance a donc bien rempli ses obligations d’information et n’encourt donc pas la déchéance du droit à percevoir les intérêts du crédit.
Au demeurant, si les emprunteurs produisent la copie d’un courrier non signé daté du 15 mars 2018 qu’ils indiquent avoir adressé à la société Domofinance et aux termes duquel il est sollicité de la banque plusieurs documents dont le tableau d’amortissement, il n’est pas justifié de l’envoi de ce courrier pourtant mentionné comme un courrier recommandé avec avis de réception.
La société Domofinance justifie par ailleurs du respect de ses obligations précontractuelles et contractuelles d’information en produisant aux débats outre l’offre validée dotée d’un bordereau de rétractation, les fiches de renseignements et d’explications, la fiche d’information relative à l’assurance, la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées, les éléments d’identité et de solvabilité remis par les emprunteurs, les résultats de consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits.
En application de l’article L. 312-39 du code de la consommation dans sa version applicable au contrat, en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l’emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l’application de l’article 1231-5 du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret.
La créance de la société Domofinance peut être fixée au vu du décompte produit de la manière suivante :
– échéances impayées : 780,95 euros
– capital restant dû à la date de déchéance du terme : 12 289,75 euros
soit une somme totale de 13 070,60 euros.
M. [L] et Mme [E] sont condamnés solidairement au paiement de cette somme augmentée des intérêts au taux contractuel de 1,93 % l’an à compter du 4 avril 2018.
Selon l’article D. 312-16 du code de la consommation, lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l’article L. 312-39, il peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.
Il s’infère de cette disposition que la notion de capital restant dû fait référence au capital rendu exigible par l’effet de la déchéance du terme.
La somme demandée de 983,18 euros qui correspond à 8 % du capital restant dû doit être réduite compte tenu de son caractère excessif au regard du préjudice réellement subi par le prêteur. Il convient de la réduire à la somme de 1 euro, somme à laquelle sont condamnés solidairement les intimés, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 4 avril 2018.
Les dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles doivent être infirmées. M. [L] et Mme [E] qui succombent sont tenus in solidum aux dépens de première instance et d’appel. Ils sont condamnés in solidum sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, à payer à la société Domofinance et à la société EDF ENR chacune la somme de 1 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Les parties sont déboutées de leurs demandes plus amples ou contraires.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant en dernier ressort, après débats en audience publique, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
Infirme le jugement sauf en ce qu’il a déclaré recevable l’action de la société Domofinance ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Déboute M. [S] [L] et Mme [C] [E] de l’intégralité de leurs demandes ;
Dit n’y avoir lieu à réparer une omission de statuer affectant le jugement dont appel ;
Constate le jeu de la clause résolutoire insérée au contrat de crédit ;
Dit n’y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts de la société Domofinance ;
Condamne solidairement M. [S] [L] et Mme [C] [E] à payer à la société Domofinance les sommes de 13 070,60 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 1,93 % l’an à compter du 4 avril 2018 et de 1 euro augmentée des intérêts au taux légal à compter du 4 avril 2018 ;
Rappelle que les parties restent redevables de plein droit du remboursement des sommes perçues en exécution du jugement qui est infirmé ;
Rejette le surplus des demandes ;
Condamne in solidum M [S] [L] et Mme [C] [E] aux dépens de première instance et d’appel ;
Condamne in solidum M. [S] [L] et Mme [C] [E] à verser à la société EDF ENR et à la société Domofinance chacune la somme de 1 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente