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COUR D’APPEL DE BORDEAUX
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 21 SEPTEMBRE 2023
N° RG 20/01397 – N° Portalis DBVJ-V-B7E-LQIN
Monsieur [S] [R]
c/
Monsieur [E] [K]
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 11 février 2020 (R.G. 17/02768) par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de BORDEAUX suivant déclaration d’appel du 13 mars 2020
APPELANT :
[S] [R]
né le 02 Janvier 1956 à [Localité 4]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]
Représenté par Me Albane RUAN de la SELARL RUAN, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉ :
[B] [K]
né le 15 Novembre 1969 à [Localité 3]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]
Représenté par Me Sylvie ROBERT, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 juin 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Christine DEFOY, Conseiller chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Paule POIREL, Président,
Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller
Madame Christine DEFOY, Conseiller,
Greffier lors des débats : Mme Chantal BUREAU
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE :
Par acte sous seing privé du 26 février 2008, M [R] a acquis auprès de la SCI Bart des terrains constructibles par l’intermédiaire de la société Groupe Alonso immobilier, dont M. [K] est le gérant.
M. [R] a remis un dépôt de garantie de 10 000 euros à la SARL Groupe Alonso immobilier à titre de séquestre.
Par lettre recommandée du 6 mars 2008, M. [R] a renoncé à cette acquisition en usant de son droit de rétractation et a sollicité le retour de son dépôt de garantie.
Par acte du 24 mars 2009, M. [R] a assigné la SARL Groupe Alonso immobilier devant le tribunal de grande instance de Bordeaux aux fins de paiement.
Le 18 novembre 2009, la SARL Groupe Alonso immobilier a été placée en liquidation judiciaire avec désignation de la SELARL Christophe Mandon es qualité de mandataire liquidateur.
Par acte du 10 novembre 2016, M. [R] a fait délivrer un commandement de payer la somme de 12 197,38 euros à la SELARL Christophe Mandon, es qualité de mandataire de la SARL Groupe Alonso immobilier.
Par acte du 16 mars 2017, M. [R] a assigné M. [K] aux fins de condamnation à lui payer une somme principale de 12 197,38 euros.
Par jugement du 11 février 2020, le tribunal judiciaire de Bordeaux a :
– débouté M. [S] [R] de sa demande,
– dit que chaque partie conserve à sa charge les frais engagés non compris dans les dépens,
– condamné M. [R] aux dépens.
M. [R] a relevé appel du jugement le 13 mars 2020 en ce qu’il :
– l’a débouté de sa demande,
– dit que chaque partie conserve à sa charge les frais engagés non compris dans les dépens,
– l’a condamné aux dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 23 septembre 2020, M. [R] demande à la cour, sur le fondement de l’article 1240 du code civil, de l’article L223-22 du code du commerce, de l’article 3 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, de l’article 49 du décret n°72-678 du 20 juillet 1972 fixant les conditions d’application de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et fonds de commerce, de :
– dire et juger recevable et bien fondé son appel,
– réformer le jugement rendu le 11 février 2020 en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau :
– dire et juger que M. [K] a commis une faute séparable de ses fonctions de gérant de la SARL Groupe Alonso immobilier en ne souscrivant pas de Garantie obligatoire au titre de son activité,
– dire et juger que M. [K] a commis une faute séparable de ses fonctions de gérant de la SARL Groupe Alonso immobilier en n’encaissant pas le chèque de dépôt de garantie de M. [R] sur les comptes de la SARL Groupe Alonso immobilier,
– dire et juger que M. [K] engage sa responsabilité personnelle vis-à-vis des tiers créanciers de la société,
– condamner M. [K] à lui payer la somme de 12 197,38 euros à titre de dommages-intérêts,
– le condamner au paiement de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la première instance, outre 3 000 euros en cause d’appel,
– le condamner aux entiers dépens y compris ceux rendus nécessaires par l’exécution forcée de la décision à intervenir,
– le débouter de toutes demandes plus amples et contraires.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 26 juin 2020, M. [K] demande à la cour de :
– déclarer recevable mais infondé l’appel interjeté par M. [R],
En conséquence,
– confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
Y ajoutant,
– condamner en outre M. [R] au paiement au profit de M. [K] d’une indemnité de 2500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour la présente procédure et aux entiers dépens d’appel.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions des parties pour un exposé détaillé de leurs préterntions et moyens.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 juin 2023.
L’affaire a été évoquée à l’audience du 21 juin 2023 et mise en délibéré au 21 septembre 2023.
MOTIFS :
Sur l’action en responsabilité civile délictuelle dirigée contre le gérant,
L’article 1240 du code civil, qui fait suite à l’ancien article 1382 du même code, dispose que tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
De plus, l’article L223-22 du code de commerce indique que les gérants sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou règlementaires applicables aux sociétés, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion.
En l’espèce, M. [R] critique le jugement entrepris qui l’a débouté de son action en responsabilité civile délictuelle dirigée contre M. [K], gérant de la société Group Alonso Immobilier, laquelle a fait l’objet d’une liquidation judiciaire pour insuffisance d’actifs le 1er septembre 2016, en sorte qu’il n’a pu obtenir restitution de la somme de 10 000 euros remise à l’agence à titre de sequestre, alors que la vente n’a en fin de compte pas été finalisée.
A cette fin, M. [R] fait valoir que M. [K] a commis une faute détachable de ses fonctions à l’origine de son préjudice, puisqu’il n’a pas procédé à l’assurance de la société Group Alonso Immobilier, qui, de facto s’est trouvée dans l’impossibilité de lui rembourser le dépôt de garantie versé; qu’en effet, M. [K] en tant que professionnel de l’immobilier, devait justifier d’une assurance souscrite pour le compte de la société, ce qui n’est pas le cas, puisque l’avis joint au courrier adressé le 11 janvier 2010 par la FNAIM au conseil de M. [R] indique qu’au jour du versement des fonds par ce dernier, la société Groupe Alonzo immobilier n’était plus garantie.
M. [R] fait également grief à M. [K] de ne pas avoir trouvé trace de l’encaissement du chèque litigieux dans les comptes de la société, alors qu’il a par ailleurs été débité, ce qui constitue une nouvelle faute séparable de ses fonctions.
M. [K] conteste pour sa part avoir commis une quelconque faute détachable de l’exercice de ses fonctions, indiquant que, comme l’atteste l’ancien directeur de la société Groupe Alonso immobilier, une assurance avait été régulièrement souscrite pour l’année 2008, ce d’autant plus qu’elle était indispensable à la délivrance de la carte professionnelle qu’il ne peut toutefois fournir aux débats, puisqu’il a été contraint de la restituer lors de la cessation d’activité de la société.
S’il est exact, comme le soutient l’appelant, que le dirigeant d’une société engage sa responsabilité civile délictuelle envers les tiers en cas de faute détachable de l’exercie de ses fonctions, il incombe à celui qui agit sur ce fondement de rapporter la preuve de l’existence d’une telle faute, laquelle est caractérisée dès lors qu’elle présente, non seulement un caractère intentionnel, mais également qu’elle est incompatible avec l’exercice normal des fonctions de gérant, compte-tenu de sa particulière gravité.
Or en l’espèce, M. [R], auquel incombe la charge de cette preuve, défaille à démontrer que M. [K] se soit rendu coupable d’une telle faute. En effet, il ressort des pièces 3, 4 et 5 versées aux débats que la société Groupe Alonso Immobilier était dûment assurée auprès de la CEGI (Compagnie européenne de garanrtie immobilière) pour la période considérée à savoir du 1er janvier au 31 décembre 2008. Deux autres attestations d’assurance, constituant les pièces 6 et 7 de l’intimé, démontrent que ladite société était également assurée auprès de la CEGC.
Toutefois, M. [R] conteste la validité de ces attestations, considérant que la preuve de l’assurance est subordonnée au fait que la SARL Groupe Alonso Immobilier justifie de l’existence d’une carte professionnelle.
Or, le courrier émanant de la Préfecture de la Gironde, daté du mois de mars 2009, par lequel celle-ci sollicite à M. [K] la restitution de sa carte professionnelle, du fait de sa cessation d’activité, démontre que l’intimé disposait bien de ladite carte sur la période considérée.
Enfin, la démonstration de l’appelant tend à établir que la société Groupe Alonson Immobilier n’était plus adhérente, durant cette même période, à la chambre FNAIM de la Gironde est inopérante dès lors qu’une telle adhésion n’est pas obligatoire et que ladite société était garantie auprès d’un autre organisme.
En outre, l’absence de déclaration de sinistre auprès de l’assureur ne permet nullement d’établir que M. [K] n’était pas assuré en sorte que M. [K] ne s’est donc rendu coupable d’aucune faute détachable de l’exercice de ses fonctions de ce chef.
M. [R] excipe alors de ce qu’il n’a été trouvé aucune trace de l’encaissement du chèque litigieux dans les comptes de la société, alors que pourtant, il a été dûment débité.
Toutefois ce moyen sera également écarté par la cour, dès lors que l’appelant ne démontre nullement, pièces comptables à l’appui, que ce chèque n’a pas été encaissé et qu’en tout état de cause, à supposer ce grief avéré, il ne s’en évince pas nécessairement l’existence d’une faute détachable des fonctions pour le gérant.
Par conséquent, en l’absence de faute dûment qualifiée imputable à M. [K], la cour ne pourra que confirmer le jugement déféré qui a débouté M. [R] de son action en responsabilité civile délictuelle dirigée contre son adversaire.
Sur le préjudice allégué,
M. [R] soutient que du fait du comportement de M. [K] il a subi un préjudice total égal à 12 197, 38 euros, selon décompte détaillé figurant dans le commandement aux fins de saisie-vente délivré le 10 novembre 2016 en ce compris le montant du chèque de 10 000 euros, des frais irrépétibles à hauteur de 2000 euros, outre des frais de procédure.
Une telle demande sera également rejetée en l’absence de faute détachable du service imputable à M. [K].
Sur les autres demandes,
Il ne paraît pas inéquitable de condamner M. [R], qui succcombe en son appel, à payer à M. [K] la somme de 2500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens d’appel.
L’appelant sera pour sa part débouté de ses demandes formées à ces titres.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire, mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
Dans les limites de l’appel ,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne M. [S] [R] à payer à M. [E] [K] la somme de 2500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [S] [R] aux entiers dépens d’appel,
Déboute M. [S] [R] de ses demandes formées à ces titres.
Le présent arrêt a été signé par M. Alain DESALBRES, conseiller en remplacement de Mme Paule POIREL, président légitimement empêché et par Mme Audrey COLLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Conseiller