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2ème Chambre
ARRÊT N°406
N° RG 20/06004
N° Portalis DBVL-V-B7E-RERO
(2)
S.A. DOMOFINANCE
C/
Mme [U] [C]
Me [V] [T]
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
– Me CASTRES
– Me RENAUDIN
– Me LE BERRE BOIVIN
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,
GREFFIER :
Mme Aichat ASSOUMANI, lors des débats, et Mme Ludivine BABIN, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l’audience publique du 23 Mai 2023
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 15 Septembre 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANTE :
S.A. DOMOFINANCE
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Hugo CASTRES de la SCP LECLERCQ & CASTRES, postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Laure REINHARD du cabinet RD AVOCATS, plaidant, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉS :
Madame [U] [C]
née le 01 Juillet 1952 à [Localité 7] (44)
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Jean-Paul RENAUDIN de la SCP GUILLOU-RENAUDIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Linda ZAOUI-IFERGAN, Plaidant, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE
Maître [V] [T] es qualités de liquidateur judiciaire de la Société LES COMPAGNONS SOLAIRES
[Adresse 6]
[Localité 5]
Représenté par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Isilde QUENAULT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
EXPOSE DU LITIGE
A la suite d’un démarchage à domicile, Mme [U] [C] a, selon bon de commande du 18 décembre 2017, commandé à la société Les Compagnons Solaires (la société LCS) la fourniture et la pose d’une installation photovoltaïque, moyennant le prix de 28 900 euros TTC.
En vue de financer cette opération, la société Domofinance a, selon offre acceptée le même jour, consenti à Mme [C] un prêt de 28 900 euros au taux de 3,67 % l’an, remboursable en 140 mensualités de 257,99 euros, hors assurance emprunteur, après un différé d’amortissement de 5 mois.
Les fonds ont été versés à la société LCS au vu d’une fiche de réception des travaux du 9 janvier 2018.
Prétendant que le bon de commande était irrégulier, que l’installation ne permettait pas d’obtenir le rendement promis et qu’elle était affectée de malfaçons, Mme [C] a, par actes des 9 et 10 juillet 2019, fait assigner devant le tribunal d’instance, devenu le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nantes, la société LCS et la société Domofinance en annulation des contrats de vente et de prêt.
Par acte du 12 février 2020, elle a appelé à la cause M. [T], ès-qualités de mandataire judiciaire de la société LCS, dont le redressement judiciaire avait été prononcée par jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 26 décembre 2019.
La société Domofinance soulevait l’irrecevabilité de l’action de Mme [C] en l’absence de mise en cause de la société venderesse.
Par jugement du 17 novembre 2020, le premier juge a :
rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société Domofinance,
prononcé l’annulation du contrat conclu le 18 décembre 2017 entre Mme [C] et la société LCS,
prononcé l’annulation du contrat de crédit conclu le même jour entre Mme [C] et la société Domofinance,
débouté la société Domofinance de sa demande en restitution du capital emprunté,
dit que la société LCS devra reprendre l’ensemble des matériels posés au domicile de Mme [C] dans les deux mois suivant la signification du jugement, après en avoir prévenu cette dernière quinze jours à l’avance, et remettre la toiture en l’état antérieur, le tout à ses frais,
dit que faute par elle de le faire dans le délai précité, Mme [C] pourra disposer desdits matériels comme bon lui semblera,
fixé la créance chirographaire de la société Domofinance au passif de la société LCS à la somme de 14 450 euros,
condamné la société Domofinance aux dépens,
condamné la société Domofinance à payer à Mme [C] une somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
débouté les parties de toutes autres demandes différentes, plus amples ou contraires au présent dispositif.
La société Domofinance a relevé appel de ce jugement le 8 décembre 2020.
Aux termes de ses dernières conclusions du 11 janvier 2023, elle demande à la cour de :
réformer le jugement attaqué en ce qu’il a prononcé l’annulation des contrats et retenu une faute à l’encontre du prêteur le privant intégralement de son droit à restitution du capital prêté contre l’emprunteuse et partiellement de son droit à garantie du vendeur,
Statuant à nouveau,
dire n’y avoir lieu à prononcer l’annulation du contrat principal de vente et partant du contrat de crédit,
par conséquent, débouter Mme [C] de l’intégralité de ses demandes,
Subsidiairement, en cas d’annulation des contrats,
dire qu’elle n’a commis aucune faute et que Mme [C] ne justifie pas de l’existence d’un préjudice ainsi que d’un lien de causalité à l’égard du prêteur,
par conséquent, condamner Mme [U] [C] à lui rembourser la somme de 28 900 euros correspondant au montant du capital prêté, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition des fonds,
débouter Mme [C] de toute autre demande, fin ou prétention,
fixer sa créance, à titre chirographaire, au passif de la procédure de redressement judiciaire de la société LCS à hauteur de 28 900 euros,
A titre infiniment subsidiaire,
fixer le préjudice subi par Mme [C] à la somme maximale de 1 000 euros,
par conséquent, condamner Mme [U] [C] à lui rembourser la somme de 28 900 euros correspondant au montant du capital prêté, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition des fonds, sous déduction d’une indemnité de 1 000 euros, en réparation du préjudice subi,
débouter Mme [C] de toute autre demande, fin ou prétention,
fixer sa créance, à titre chirographaire, au passif de la procédure de redressement judiciaire de la société LCS à hauteur de 28 900 euros,
En tout état de cause,
condamner Mme [U] [C] à lui payer une indemnité de 1 500 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens d’instance.
Par ses dernières conclusions du 2 juin 2021, Mme [C] conclut quant à elle à la confirmation du jugement attaqué, sauf en ce qui concerne la restitution des sommes versées en exécution du contrat de prêt.
Formant appel incident, elle demande à la cour de :
dire que la société Domofinance lui sera redevable des échéances prélevées,
dire que les échéances pour le montant intégral donneront lieu à paiement d’intérêts à compter de l’assignation introductive d’instance,
confirmer les autres dispositions pour le surplus,
condamner la société Domofinance à lui payer une somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions du 30 novembre 2022, M. [T], ès-qualités de liquidateur de la société LCS, demande enfin à la cour de :
recevant l’appel incident, le disant bien fondé et y faisant droit,
A titre principal :
infirmer le jugement attaqué en ce qu’il a prononcé l’annulation du contrat de vente avec toutes conséquences de droit,
dire n’y avoir lieu à l’annulation du contrat conclu entre Mme [C] et la société LCS,
débouter Mme [C] de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires,
A titre subsidiaire :
infirmer le jugement attaqué en ce qu’il a dit que la société LCS devra reprendre l’ensemble des matériels et remettre la toiture en l’état antérieur, le tout à ses frais,
dire n’y avoir lieu à condamnation de la liquidation judiciaire de la société LCS à reprendre l’ensemble des matériels et remettre la toiture en l’état antérieur, le tout à ses frais,
débouter Mme [C] de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires
En tout état de cause :
débouter l’ensemble des parties de l’ensemble de leurs demandes, fins, moyens et conclusions autres ou contraires aux présentes,
condamner tout succombant à verser à M. [T], ès-qualités de liquidateur de la société LCS, la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions déposées par les parties, l’ordonnance de clôture ayant été rendue le 23 mars 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Les dispositions du jugement attaqué ayant rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société Domofinance tirée de la prétendue absence de mise en cause de la société venderesse, exemptes de critiques devant la cour, seront confirmées.
Sur la nullité du contrat principal
Aux termes des articles L 121-18-1 et L. 121-17 devenus L. 221-9, L 221-5, L. 111-1, R. 111-1 et R. 111-2 du code de la consommation, les ventes et fournitures de services conclues à l’occasion d’une commercialisation hors établissement doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire est remis au client et notamment comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :
le nom du professionnel, ou la dénomination sociale et la forme juridique de l’entreprise, l’adresse géographique de son établissement et, si elle est différente, celle du siège social, son numéro de téléphone et son adresse électronique,
le cas échéant, son numéro d’inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,
les informations relatives à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte,
son éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, ainsi que les coordonnées de l’assureur ou du garant,
les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du bien ou service concerné,
le prix du bien ou du service,
les modalités de paiement,
en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service,
les modalités prévues par le professionnel pour le traitement des réclamations,
s’il y a lieu, les informations relatives à la garantie légale de conformité, à la garantie des vices cachés de la chose vendue ainsi que, le cas échéant, à la garantie commerciale et au service après-vente,
la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation,
lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit, ainsi que le formulaire type de rétractation,
le numéro d’inscription du professionnel au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,
s’il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et identifié par un numéro individuel en application de l’article 286 ter du code général des impôts, son numéro individuel d’identification,
l’éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, les coordonnées de l’assureur ou du garant ainsi que la couverture géographique du contrat ou de l’engagement.
Ainsi que l’a exactement relevé le premier juge, les mentions portées sur le bon de commande sont succinctes et ne satisfont pas aux dispositions précitées de comporter, à peine de nullité, les caractéristiques essentielles des bien et services commandés.
En effet, le bon de commande ne mentionne ni la marque, ni la puissance des panneaux fournis, alors pourtant que, s’agissant d’une installation à haut niveau de développement technologique destinée à produire de l’énergie, la marque, dont la fonction est de garantir l’origine d’un produit commercialisé, est une caractéristique essentielle pour le consommateur démarché qui doit ainsi pouvoir identifier le fabricant garant de la qualité, de la pérennité et de la sécurité de ses produits, et qui doit aussi pouvoir procéder utilement à des comparaisons de prix durant le délai de rétractation qui lui est ouvert par la loi.
En outre, le délai de livraison et d’exécution de la prestation accessoire de pose n’est pas davantage mentionné dans le bon de commande, et aucune indication n’est donnée non plus sur les modalités de pose des panneaux.
Enfin, il ressort de l’examen du bon de commande que les informations relatives aux conditions et modalités du droit de rétractation sont erronées.
En effet, les conditions générales du contrat ne reproduisent pas les dispositions du code de la consommation applicables à la cause relativement aux modalités d’exercice du droit de rétractation, mais les dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-26 du code de la consommation abrogées au moment de la conclusion du contrat.
D’autre part, le bordereau de rétractation vise également les mêmes dispositions légales abrogées au moment de la conclusion du contrat.
La société Domofinance, sans remettre en cause ces irrégularités, soutient que celles-ci ne seraient sanctionnées que par une nullité relative que Mme [C] aurait renoncé à invoquer en signant le bon de commande après avoir pris connaissance des dispositions des articles L. 121-23 et suivants du code de la consommation, et en acceptant la livraison et la pose des matériels.
Cependant, la confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et l’intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l’époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée.
A cet égard, les dispositions de l’article L. 121-23 ancien du code de la consommation relative à l’indication des caractéristiques essentielles du produit ou de la prestation fournie, dont la teneur est identique à celle de l’article L. 111-1 issu de la loi du 17 mars 2014 applicable à la cause, étaient effectivement reproduites au verso du bon de commande, portant ainsi à la connaissance de Mme [C] que celui-ci devait comporter, à peine de nullité, les caractéristiques essentielles des biens et services commandés, ainsi que les conditions d’exécution du contrat, notamment les modalités de pose et les délais d’exécution.
Dès lors, en laissant l’entreprise poser les panneaux et en signant le procès-verbal de réception des travaux, Mme [C] a, en pleine connaissance de cause, confirmé le bon de commande en dépit de ce qu’il ne mentionnait pas les caractéristiques essentielles des biens et services commandés, ni les modalités de pose et les délais d’exécution.
En revanche, ainsi qu’il a été précédemment exposé, les conditions générales du contrat ne reproduisaient pas les dispositions du code de la consommation applicables à la cause relativement aux modalités d’exercice du droit de rétractation, mais les dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-26 du code de la consommation abrogées au moment de la conclusion du contrat.
Dès lors, rien ne démontre que Mme [C] avait connaissance de ce vice du bon de commande lorsqu’elle a laissé la société LCS intervenir à son domicile et signé le procès-verbal de réception des travaux.
Il n’est donc pas établi que la consommatrice ait, en pleine connaissance de l’irrégularité de ce contrat de vente, entendu renoncer à la nullité en résultant et qu’elle aurait de ce fait manifesté une volonté non équivoque de couvrir les irrégularités de ce document.
Il convient donc d’écarter le moyen tiré de la confirmation du contrat irrégulier, et de confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat conclu le 18 décembre 2017 entre Mme [C] et la société LCS.
Si, au titre des restitutions réciproques des parties consécutives à l’annulation du contrat de vente, la société LCS devrait pouvoir reprendre le matériel installé et remettre la toiture en l’état, la mise en liquidation judiciaire de cette entreprise et sa cessation d’activité excluent qu’elle puisse être contrainte judiciairement à le faire.
Après réformation du jugement sur ce point, cette demande sera déclarée irrecevable.
Par ailleurs, la disposition du jugement ayant dit que le matériel était réputée abandonné passé le délai de deux mois après la signification de la décision se heurte au droit de propriété du liquidateur, redevenu propriétaire après annulation du contrat, et sera également réformée.
Sur la nullité du contrat de prêt
Aux termes des dispositions de l’article L. 311-32 devenu L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
Il n’est pas contesté que le crédit consenti par la société Domofinance est un crédit accessoire à une vente ou à une prestation de services.
En raison de l’interdépendance des deux contrats, l’annulation du contrat principal conclu avec la société LCS emporte donc annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu avec la société Domofinance.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a constaté la nullité du contrat de prêt conclu entre Mme [C] et la société Domofinance.
La nullité du prêt a pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu’elle doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d’autre, c’est à dire du capital versé par le prêteur et des échéances réglées par l’empruntrice.
A cet égard, la société Domofinance sollicite l’infirmation du jugement en ce qu’il a retenu des fautes la privant de son droit à restitution du capital emprunté, en soutenant que le prêteur n’est pas tenu de conseiller l’emprunteur sur l’efficacité juridique d’un contrat auquel il est tiers, et, d’autre part, qu’elle s’est libérée des fonds sur la base d’une fiche de réception des travaux par laquelle Mme [C] a attesté prononcer la réception sans réserve des travaux.
Mme [C] soutient quant à elle que le prêteur se serait fautivement dessaisi des fonds sans vérifier la régularité formelle du contrat principal au regard des dispositions du code de la consommation qui n’étaient pas visées au verso des conditions générales de vente, et, d’autre part, sans s’assurer de l’exécution complète du contrat principal, et sans disposer de l’attestation de raccordement au réseau général.
Le prêteur, qui n’a pas à assister l’emprunteur lors de l’exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d’une installation exempte de vice ou la conformité du matériel livré aux stipulations contractuelles, ne commet pas de faute lorsqu’il libère les fonds au vu d’une attestation de livraison qui lui permet de s’assurer de l’exécution complète du contrat principal.
Or, en l’occurrence, la fiche de réception des travaux signée par Mme [C] le 9 janvier 2018 faisait ressortir sans ambiguïté que celle-ci ‘après avoir procédé à la visite des travaux exécutés’, déclarait que’ l’installation (livraison et pose) est terminée ce jour’ et, en conséquence de quoi, elle prononçait ‘la réception des travaux sans réserve avec effet à la date du 9 janvier 2018 (et demandait) à Domofinance d’adresser à l’entreprise […] un règlement de 28 900 euros correspondant au financement de cette opération.’
Cependant, il est aussi de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu’il libère la totalité des fonds, alors qu’à la simple lecture du contrat de vente il aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile.
Or, il a été précédemment relevé que le bon de commande conclu avec la société LCS, par l’intermédiaire de laquelle la société Domofinance faisait présenter ses offres de crédit, comportait des irrégularités formelles apparentes.
En outre, si Mme [C] a en connaissance de cause renoncé à la nullité du contrat tirée du défaut d’indication des caractéristiques essentielles des biens et services commandés, ainsi que des modalités de pose et délais d’exécution, il demeure que la société Domofinance, professionnelle des opérations de crédit affecté, aurait dû relever que les conditions générales du contrat ne reproduisaient pas les dispositions du code de la consommation applicables au moment de la conclusions du contrat, notamment celles relatives aux modalités d’exercice du droit de rétractation, mais les dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-26 du code de la consommation abrogées au moment de la conclusion du contrat, et que le bordereau de rétractation visait également ces mêmes dispositions légales abrogées, et qu’elle n’aurait donc pas dû libérer des fonds entre les mains du fournisseur avant d’avoir à tout le moins vérifié auprès de Mme [C] qu’elle entendait confirmer, pour ce vice, l’acte irrégulier.
Le prêteur n’avait certes pas à assister l’empruntrice lors de la conclusion du contrat principal, mais il lui appartenait néanmoins de relever les anomalies apparentes du bon de commande, ce dont il résulte qu’en versant les fonds entre les mains du fournisseur, sans procéder à des vérifications complémentaires sur la régularité formelle du contrat principal, la société Domofinance, qui ne pouvait ignorer les énonciations du bon de commande au vu duquel elle a apporté son concours, a commis une faute susceptible de la priver du droit d’obtenir le remboursement du capital emprunté.
Toutefois, la société Domofinance fait valoir à juste titre que cette dispense de remboursement du capital emprunté est subordonnée à la démonstration par l’empruntrice de l’existence d’un préjudice en lien causal avec la faute du prêteur.
Or, l’installation a été livrée, posée et mise en service le 25 juillet 2018, ainsi qu’il ressort du courrier adressés par Enedis le 6 août 2018, alors que, du fait de la liquidation judiciaire de la société LCS, aucune demande de restitution du matériel n’a été sollicitée et accordée.
Si Mme [C] produit un courrier de la société Avenir Eco du 5 juillet 2019 faisant état de défauts ayant conduit à la mise en arrêt de l’installation pour des raisons de sécurité, il demeure cependant que ces désordres apparus postérieurement à la délivrance des fonds à l’entreprise sont sans lien avec la cause de nullité non ratifiée du bon de commande et la faute de la banque de n’avoir pas su déceler l’irrégularité du bordereau de rétractation.
Il convient par conséquent d’infirmer le jugement attaqué en ce qu’il a débouté la société Domofinance de sa demande de restitution du capital de 28 900 euros, et de condamner Mme [C] au paiement de cette somme, sauf à déduire l’ensemble des règlements effectuée par l’empruntrice au prêteur au cours de la période d’exécution du contrat de prêt.
Il est par ailleurs de principe que les intérêts d’une créance de restitution consécutive à l’annulation d’un contrat sont dus, conformément à l’article 1231-6 du code civil, à compter du jour de la demande en justice, formée en l’espèce à l’audience du juge des contentieux de la protection du 22 septembre 2020.
Ayant obtenu la condamnation de Mme [C] à lui restituer le capital de 28 900 euros, la société Domofinance ne justifie à ce titre d’aucun préjudice de nature à justifier par surcroît la fixation de cette créance au passif de la liquidation judiciaire de la société LCS.
En revanche, elle a été privée du gain des intérêts du prêt annulé, par la faute du fournisseur, qui a proposé à l’adhésion de l’acquéreur un bon de commande comportant des indications erronées relativement à l’exercice de son droit de rétractation, ce qui a eu pour effet d’entraîner l’annulation de plein droit du contrat de prêt postérieurement au déblocage des fonds.
Il convient donc de fixer à titre chirographaire cette créance de 7 218,60 euros, soit le coût total du crédit de 36 118,60 euros diminué du capital prêté de 28 900 euros, au passif de la liquidation judiciaire de la société LCS.
Sur les autres demandes
Partie principalement succombante en première instance, la société Domofinance a été à juste titre condamnée à supporter les dépens de première instance.
En outre, c’est par d’exactes considérations d’équité que le premier juge a alloué à Mme [C] une indemnité de 1 200 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance.
En revanche, partie principalement succombante devant la cour, Mme[C] supportera les dépens d’appel.
Mais il n’y a pas matière à application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de quiconque au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Infirme le jugement rendu le 17 novembre 2020 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nantes en ce qu’il a :
débouté la société Domofinance de sa demande en restitution du capital emprunté,
dit que la société Les Compagnons Solaires devra reprendre l’ensemble des matériels posés au domicile de Mme [C] dans les deux mois suivant la signification du jugement, après en avoir prévenu cette dernière quinze jours à l’avance, et remettre la toiture en l’état antérieur, le tout à ses frais,
dit que faute par elle de le faire dans le délai précité, Mme [C] pourra disposer desdits matériels comme bon lui semblera,
fixé la créance chirographaire de la société Domofinance au passif de la société Les Compagnons Solaires à la somme de 14 450 euros,
Condamne Mme [U] [C] à payer à la société Domofinance la somme de 28 900 euros au titre de la restitution du capital emprunté, sauf à déduire l’ensemble des règlements effectués par l’empruntrice au prêteur au cours de la période d’exécution du contrat de prêt, avec intérêts au taux légal à compter du 22 septembre 2020 ;
Déclare irrecevable la demande de condamnation de la société Les Compagnons Solaires à reprendre les matériels posés au domicile de Mme [C] ;
Déboute Mme [C] de sa demande tendant à dire que le matériel est réputé abandonné passé 2 mois après la signification du jugement ;
Fixe, à titre chirographaire, la créance de la société Domofinance au passif de la liquidation judiciaire de la société Les Compagnons Solaires à la somme de 7 218,60 euros ;
Confirme le jugement attaqué en ses autres dispositions ;
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;
Condamne Mme [U] [C] aux dépens d’appel ;
Accorde à l’avocat de M. [T], ès-qualités de liquidateur de la société Les Compagnons Solaires, le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT