Droit de rétractation : 15 septembre 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/05711

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Droit de rétractation : 15 septembre 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/05711
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2ème Chambre

ARRÊT N°404

N° RG 20/05711

N° Portalis DBVL-V-B7E-RDAX

(2)

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

C/

M. [I] [N]

Mme [J] [F]

M. [W] [B]

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

– Me CASTRES

– Me LE BERRE BOIVIN

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,

GREFFIER :

Mme Aichat ASSOUMANI, lors des débats, et Mme Ludivine BABIN, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l’audience publique du 23 Mai 2023

ARRÊT :

Rendu par défaut, prononcé publiquement le 15 Septembre 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE :

BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de SYGMA BANQUE,

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Hugo CASTRES de la SCP LECLERCQ & CASTRES, postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Laure REINHARD du CABINET RD AVOCATS, plaidant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉS :

Monsieur [I] [N] employé commercial

né le 10 Août 1988 à [Localité 7] (56)

[Adresse 6]

[Localité 2]

Madame [J] [F]

née le 14 Février 1984 à [Localité 8] (35)

[Adresse 6]

[Localité 2]

Tous représentés par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, postulant, avocat au barreau de RENNES

Tous représentés par Me Samuel HABIB, plaidant, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [W] [B] es qualité de mandataire ad hoc de la société SUNGOLD

[Adresse 3]

[Localité 5]

Assigné par acte d’huissier en date du 02/03/2021, délivré à étude, n’ayant pas constitué

EXPOSE DU LITIGE :

Le 2 mars 2015, Mme [J] [F] et M. [I] [N] ont commandé à la Société Sungold, exerçant sous l’enseigne Institut des nouvelles énergies, l’installation d’un système d’alimentation photovoltaïque dans leur maison au prix total de 24 900 euros et ont contracté auprès de la Société Sygma Banque une offre de crédit de ce montant, afin de financer cette installation.

Les travaux ont été réalisés le 17 mars 2015. L’attestation de fin de travaux a été signée le même jour par Mme [J] [F]. La Société Sygma Banque a procédé au déblocage des fonds le 18 mars 2015 au profit de la Société Sungold.

Les emprunteurs ont remboursé le 18 avril 2016 à la Société Sygma Banque le solde de leur prêt, soit la somme de 26 763,79 euros.

La Société Sungold, a été placée en liquidation judiciaire par jugement prononcé le 6 septembre 2016 par le Tribunal de Commerce de Nanterre. La clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif a été prononcée le 28 juin 2019.

Se plaignant d’une absence de conformité de l’installation aux stipulations contractuelles, M. [I] [N] et Mme [J] [F] ont fait assigner M. [W] [B] es qualité de mandataire ad’hoc de la Société Sungold et la Société BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la Société Sygma Banque, par actes d°huissier de justice délivrés les 13 janvier et 16 mars 2020 devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Rennes.

Par jugement du 15 octobre 2020, le tribunal a :

Prononcé l’annulation du contrat de vente conclu le 02 mars 2015 entre M. [I] [N], Mme [J] [F] et la Société Sungold;

Prononcé l’annulation du contrat de crédit conclu le 02 mars 2015 entre M. [I] [N], Mme [J] [F] et la Société Sygma Banque;

Dit que la Société BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la Société Sygma Banque, est privée de sa créance de restitution et ne pourra conserver le bénéfice du capital prêté et des intérêts, remboursés par anticipation par les emprunteurs;

Condamné la Société BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la Société Sygma Banque, à rembourser à M. [I] [N] et Mme [J] [F] la somme de 26 763,79 euros;

Rejeté toutes conclusions plus amples ou contraires;

Condamné la Société BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la Société Sygma Banque, à payer à M. [I] [N] et Mme [J] [F] la somme de 2 200 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile;

Condamné la Société BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la Société Sygma Banque, aux dépens ;

Déclaré la décision opposable à M. [W] [B] es qualité de mandataire ad hoc de la Société Sungold ;

La société BNP Paribas Personal Finance a formé appel du jugement et par dernières conclusions notifiées le 27 février 2023 elle demande de :

Réformer le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé l’annulation des contrats de vente et de crédit affecté liés, qu’il a retenu la responsabilité de BNP Paribas Personal Finance et a ainsi condamné cette dernière à restituer aux emprunteurs l’ensemble des sommes perçues au titre du crédit

Statuant à nouveau,

Juger n’y avoir lieu à prononcer l’annulation du contrat principal de vente

Juger n’y avoir lieu à prononcer l’annulation du contrat de crédit

Par conséquent,

Débouter M. [N] et Mme [F] de l’intégralité de leurs demandes

Subsidiairement, en cas d’annulation des contrats

Juger que Sygma Banque aux droits de laquelle vient BNP Paribas Personal Finance n’a commis aucune faute

Juger que les consorts [N]-[F] ne justifient pas de l’existence d’un préjudice et d’un lien de causalité à l’encontre du prêteur

Juger que les consorts [N]-[F] ont remboursé intégralement le crédit par anticipation

Par conséquent

Juger que BNP Paribas Personal Finance conservera le bénéfice du capital prêté, remboursé par anticipation

Dire que BNP Paribas Personal Finance ne devra restituer à M. [N] et Mme [F] les frais et intérêts versés (à l’exclusion du capital prêté), qu’après justification de leur part de la résiliation du contrat conclu avec EDF, de la restitution à EDF des sommes perçues au titre de la revente d’électricité, et au trésor Public des crédits d’impôts perçus

Débouter M. [N] et Mme [F] de toute autre demande, fin ou prétention

Confirmer la décision entreprise pour le surplus

Et y ajoutant,

Condamner solidairement M. [I] [N] et Mme [J] [F] à porter et payer à BNP Paribas Personal Finance une indemnité à hauteur de 2 500 euros, sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d’appel

Par dernières conclusions notifiées le 20 février 2023, M [N] et Mme [F] demandent de :

Confirmer le jugement rendu le 15 octobre 2020 par le Tribunal Judiciaire de Rennes en ce qu’il a :

– Prononcé l’annulation du contrat de vente conclu entre les Consorts [N]-[F] et la société Sungold ;

– Prononcé l’annulation du contrat de crédit conclu entre les Consorts [N]-[F] et la société Sygma Banque ;

– Dit que la société BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la société Sygma Banque, est privée de sa créance de restitution et ne pourra conserver le bénéfice du capital prêté et des intérêts, remboursés par anticipation par les emprunteurs ;

– Condamné la société BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la société Sygma Banque, à rembourser aux Consorts [N]-[F], la somme de 26 763,79 euros ;

– Condamné la société BNP Paribas Personal Finance à payer aux Consorts [N]-[F] la somme de 2 200 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– Condamné la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens.

Réformer le jugement déféré en ce qu’il a débouté les concluants de leurs demandes de dommages intérêts pour leurs préjudices financier, économique et moral

Et statuant à nouveau de ces chefs

– Condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de Sygma Banque à verser à M. [N] et Mme [F] la somme de :

– 7 172 euros, au titre de leur préjudice financier ;

– 4 000 euros au titre de leur préjudice économique et le trouble de jouissance ;

– 3 000 euros au titre de leur préjudice moral ;

Condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de Sygma Banque à payer à M. [N] et Mme [F] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Condamner la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de Sygma Banque au paiement des entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile ;

Rejeter toutes demandes, fins et conclusions autres ou contraires aux présentes.

M. [W] [B] ès qualité de mandataire ad’hoc de la société Sungold, n’a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions visées.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 23 mars 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

La société BNP Paribas Personal Finance fait grief au jugement d’avoir prononcé la nullité du contrat de vente

Aux termes des articles L 121-18-1 et L. 121-17 devenus L. 221-9, L 221-5, L. 111-1, R. 111-1 et R. 111-2 du code de la consommation, les ventes et fournitures de services conclues à l’occasion d’une commercialisation hors établissement doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire est remis au client et notamment comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

le nom du professionnel, ou la dénomination sociale et la forme juridique de l’entreprise, l’adresse géographique de son établissement et, si elle est différente, celle du siège social, son numéro de téléphone et son adresse électronique,

le cas échéant, son numéro d’inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,

les informations relatives à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte,

son éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, ainsi que les coordonnées de l’assureur ou du garant,

les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du bien ou service concerné,

le prix du bien ou du service,

les modalités de paiement,

en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service,

les modalités prévues par le professionnel pour le traitement des réclamations,

s’il y a lieu, les informations relatives à la garantie légale de conformité, à la garantie des vices cachés de la chose vendue ainsi que, le cas échéant, à la garantie commerciale et au service après-vente,

la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation,

lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit, ainsi que le formulaire type de rétractation,

le numéro d’inscription du professionnel au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,

s’il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et identifié par un numéro individuel en application de l’article 286 ter du code général des impôts, son numéro individuel d’identification,

l’éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, les coordonnées de l’assureur ou du garant ainsi que la couverture géographique du contrat ou de l’engagement.

Pour annuler le contrat de vente régularisé le 2 mars 2015, le premier juge a estimé que le bon de commande comportait des imperfections. Il relève que l’objet de la vente porte sur une installation photovoltaïque d’une puissance globale de 3 000 Wc comprenant 12 panneaux photovoltaïques de marque Thomson et de puissance de 250 Wc, un ballon thermo-dynamique de manquer Chaffoteaux le raccordement et les démarches administratives.

Le premier juge en déduit que, faisaient défaut pour désigner précisément la nature et les caractéristiques des biens et des services offerts, la taille et le poids des panneaux ainsi que les caractéristiques de l’onduleur et de l’installation électrique.

Cependant rien ne démontre que la taille, le poids, ainsi que les caractéristiques techniques détaillées soient entrés dans le champ contractuel et aient déterminé le consentement des consommateurs, de sorte qu’ils ne peuvent être regardés comme des caractéristiques essentielles de l’installation fournie.

Par ailleurs, les textes précités n’exigent nullement que le prix unitaire de chacun des biens fournis ou de chacune des prestations accessoires de pose et de démarches administratives promises soient mentionnées dans le contrat, seul l’indication du prix global à payer étant requise.

Il ressort des énonciations préimprimées du bon de commande qu’il était prévu un onduleur de marque Schneider alors que le vendeur a installé un l’onduleur de marque Easton. Si les consorts [N]-[F] font valoir à bon droit l’existence d’une irrégularité de ce chef, il conviendra cependant de relever que cette modification a été portée à leur connaissance comme étant mentionnée sur la facture.

Dès lors, en prononçant, le 17 mars 2015 la réception sans réserve des travaux tout en signant, le même jour, un appel de fonds donnant ordre au prêteur de verser le financement emprunté entre les mains du fournisseur après installation alors qu’ils ne pouvaient ignorer, que l’onduleur installé était d’une marque différente de celle mentionnée au bon de commande, ils ont en pleine connaissance entendu renoncer à toute irrégularité de ce chef.

Les consorts [N]-[F] soulèvent l’irrégularité du bon de commande à défaut de comporter un bordereau de rétractation conforme au code de la consommation.

Il sera constaté que le bordereau de rétractation joint au bon de commande est ainsi rédigé :

‘Annulation de commande : Code de la consommation articles L. 121-23 à L. 121-26.*

Conditions d’annulation : Compléter et signer ce formulaire, l’envoyer par lettre recommandée avec avis de réception à l’adresse figurant au dos, au plus tard le quatorzième jour à partir du jour de la commande ou, si ce délai expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férie ou chôme, le premier jour ouvrable suivant.

Je soussigné (..)

Déclare annuler ma commande n° (…) En date du (…) Date et signature.’

Il convient de constater que le bordereau ne répond pas aux prescriptions légales et réglementaires de l’article R. 121-1 en stipulant que le consommateur devait formaliser sa rétractation par lettre recommandée avec accusé de réception alors que si par application de l’article L. 121-21-2 la charge de la preuve de l’exercice du droit de rétractation lui incombe, il demeure par application de ce même article libre de la formalisation de la déclaration par laquelle il entend exprimer sa volonté de se rétracter soit en usant du bordereau détachable soit par tout autre moyen pour autant que sa volonté soit exprimée de manière dénuée d’ambiguïté.

C’est également à tort que le bordereau stipule que délai de 14 jours d’exercice du droit de rétractation commençait à courir à compter de la commande. En effet, le bon de commande ne portait pas seulement sur la livraison du matériel mais comprenait également une prestation de service de pose de sorte que par application des dispositions de l’article L. 121-21 2ème le contrat ayant pour objet à la fois la livraison de biens et la fourniture de prestation de services le délai de rétractation commençait à courir à compter de la livraison et non de la commande.

Si par application de l’article L. 121-21-1 le délai de rétractation offert aux consorts [N]-[F] a été prorogé de 12 mois à compter de la livraison du bien, cette circonstance ne fait pas obstacle à l’exercice de l’action en nullité que les consommateurs demeurent habile à engager lorsque, comme en l’espèce, le bordereau ne respecte pas les dispositions de l’article R. 121-1 du code de la consommation conformément aux dispositions de l’article L. 121-17 du même code, et ce à peine de nullité par application de l’article L. 121-18-1 du même code.

Si la société BNP Paribas Personal Finance soutient que la nullité ainsi encourue pourrait avoir été couverte par les consorts [N]-[F] dès lors que ceux-ci ont accepté les travaux d’installation des biens fournis, il sera rappelé que la confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et l’intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l’époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée.

Or, en l’occurrence, aucun acte ne révèle qu’entre la conclusion et l’exécution du contrat, les consorts [N]-[F] aient eu connaissance de la violation du formalisme imposé par le code de la consommation, étant à cet égard observé que les dispositions de l’article R. 121-1 du code de la consommation qui fixe les mentions obligatoires du bordereau de rétractation n’étaient pas reproduites dans les conditions générales de vente annexées au bon de commande.

Il convient donc d’écarter le moyen tiré de la confirmation du contrat irrégulier, et de confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a annulé le contrat conclu le 2 mars 2015 entre les consorts [N]-[F] et la société Sungold.

Sur la nullité du contrat de prêt :

Aux termes des dispositions de l’article L. 311-32 devenu L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Il n’est pas contesté que le crédit consenti par la société BNP Paribas Personal Finance est un crédit accessoire à une vente ou à une prestation de services.

En raison de l’interdépendance des deux contrats, l’annulation du contrat principal conclu avec la société Sungold emporte donc annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu avec la société BNP Paribas Personal Finance.

Comme le rappelle à juste titre cette dernière, la nullité du prêt a en principe pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu’elle doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d’autre.

Si c’est à bon droit que le premier juge a retenu que commet une faute le prêteur qui se dessaisit des fonds prêtés alors même qu’en sa qualité de professionnel du crédit il ne pouvait ignorer l’irrégularité du bon de commande et l’existence d’une cause de nullité, cette faute ne saurait faire échec à la restitution des sommes prêtées en capital qu’autant que le consommateur établisse avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.

Pour demander la confirmation du jugement qui les a dispensés du remboursement du capital prêté à la société BNP Paribas Personal Finance, les consorts [N]-[F] font valoir que l’installation n’a pas permis d’atteindre le rendement escompté malgré les engagements de la société Sungold ; que l’absence de rentabilité de l’installation, les place dans une situation de précarité financière ; qu’ils subissent en conséquence un préjudice de jouissance et vont devoir supporter les frais de démontage de l’installation et de remise en état de leur toiture qu’ils ont du faire réparer.

Les consorts [N]-[F], soutiennent avoir été victimes de pratiques trompeuses de la société Sungold qui leur aurait fait une présentation fictive leur laissant croire que l’installation photovoltaïque générerait des revenus supérieurs au coût de l’emprunt affecté pour la financer, alors qu’elle ne pouvait ignorer que les perspectives de rendement nécessaires, ne pouvaient être atteintes, au regard de la puissance installée et du prix de revente à EDF à la signature du contrat.

Cependant, le dol ne se présume pas et suppose la démonstration par la victime de l’intention dolosive du cocontractant.

Or, rien ne démontre que le fournisseur ait sciemment fourni des informations mensongères, la rentabilité de l’installation comportant nécessairement un aléa. Le fait que la société Sungold ait par courrier du 11 mars 2015 entendu garantir la rentabilité de l’installation en s’engageant à rembourser la différence entre les échéances du prêt et les revenus de la revente d’électricité est insuffisant à établir une intention dolosive ce qui ne saurait résulter du fait que la société Sungold n’a pas satisfait à la demande de remboursement qui lui a été adressée après l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire ; cette preuve ne résulte pas davantage du fait que le professionnel ayant examiné l’installation à la demande des consorts [N]-[F] a relevé des erreurs d’installation.

La cause de nullité affectant la régularité du contrat et le déblocage des fonds n’apparaissent pas avoir par elle-même causé un préjudice aux emprunteurs qui bénéficient d’une installation mise en service, ce qu’ils ont confirmé au prêteur par leur attestation de livraison, et qui produit de l’électricité qu’ils revendent à EDF conformément aux termes du contrat conclu.

Le fait que l’installation n’ait pas le rendement attendu n’a nécessairement été révélé que postérieurement à la mise en service et la conclusion du contrat de rachat. Le préjudice découlant du non respect par la société Sungold de sa garantie financière est sans rapport avec la faute de la société BNP Paribas Personal Finance dont il n’est nullement établi qu’elle ait été informée de l’engagement du fournisseur dans son courrier du 11 mars 2015.

Les emprunteurs qui disposent d’une installation fonctionnelle ne sauraient imputer au préteur un préjudice résultant d’un fonctionnement insuffisant de l’installation et de ce que la société Sungold n’a pas exécuté son engagement de garantie, ce préjudice financier étant sans lien causal avec la faute du prêteur.

Il en résulte que, disposant d’une installation raccordée au réseau, mise en service, restant à leur disposition du fait de la liquidation judiciaire du fournisseur il n’est dès lors pas démontré que les causes de nullité non ratifiées du bon de commande soient à l’origine d’un préjudice pour les emprunteurs susceptible de justifier qu’il soient dispensés de rembourser au prêteur les capitaux empruntés.

De même les demandes en paiement du coût de dépose de l’installation et de remise en état de la toiture, de réparation d’un trouble de jouissance et de préjudice moral seront rejetées, dès lors que les préjudices résultent de manquements du fournisseur et que, tiers au contrat principal, le prêteur ne saurait se voir imputer les conséquences dommageables de l’exécution de sa prestation par la société Sungold.

Il sera enfin constaté que si les consorts [N]-[F] entendent imputer au prêteur un manquement à son devoir de mise en garde relativement à l’évaluation de leur capacité financières au moment de l’octroi du prêt, il sera relevé que les emprunteurs ont été en mesure de procéder au remboursement anticipé du prêt ce qui établit qu’ils disposaient des fonds nécessaires au financement de l’opération et que cette dernière ne les exposaient dès lors pas à un risque d’endettement excessif. Le prêteur n’est pour le surplus pas tenu d’une obligation de conseil sur l’opportunité de l’opération.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté les consorts [N]-[F] de leurs demandes de dommages-intérêts.

M. [N] et Mme [F], ne sauraient en conséquence être dispensés de procéder au remboursement du capital emprunté le jugement étant infirmé en conséquence.

Pour avoir remboursé le prêt par anticipation, ils sont en revanche fondés à obtenir de la société BNP Paribas Personal Finance le remboursement des intérêts et frais versés en exécution du contrat de prêt annulé.

L’obligation à restitution réciproque résultant de l’annulation de la convention de prêt, la société BNP Paribas Personal Finance sera déboutée de ses demandes tendant à subordonner son obligation à restitution des échéances payées à des justifications de remboursement auquel les consorts [N]-[F] pourraient être tenus envers des tiers.

Partie succombante en première instance, le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens de première et a alloué aux consorts [N]-[F] une indemnité justement évaluée en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

Le jugement sera confirmé de ces chefs.

Partie succombante en cause d’appel les consorts [N]-[F] supporteront les dépens d’appel sans qu’il y ait lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de quiconque.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Infirme le jugement rendu le 15 octobre 2020 par le tribunal judiciaire de Rennes en ce qu’il a :

Dit que la Société BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la Société Sygma Banque, est privée de sa créance de restitution et ne pourra conserver le bénéfice du capital prêté et des intérêts, remboursés par anticipation par les emprunteurs;

Condamné la Société BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la Société Sygma Banque, à rembourser à M. [I] [N] et Mme [J] [F] la somme de 26 763,79 euros;

Statuant à nouveau sur les chefs réformés,

Déboute M. [I] [N] et Mme [J] [F] de leurs demandes tendant à obtenir d’être dispensés de rembourser au prêteur le capital prêté,

Vu le remboursement du prêt par anticipation

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Sygma Banque à rembourser à M. [I] [N] et Mme [J] [F], toutes sommes versées par eux en sus de la somme de 24 900 euros correspondant au capital emprunté et ce avec intérêts au taux légal à compter du 13 janvier 2020.

Confirme le jugement pour le surplus.

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

Condamne M. [I] [N] et Mme [J] [F] in solidum aux dépens d’appel.

Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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