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N° RG 20/02612 – N° Portalis DBVX-V-B7E-M6TD
Décision du Tribunal de Commerce de SAINT-ETIENNE du 18 février 2020
RG : 2016j00090
S.A.S. LOCAM
C/
[H]
S.A.R.L. HYDRO SERVICES PROVENCE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
3ème chambre A
ARRET DU 14 Septembre 2023
APPELANTE :
S.A.S. LOCAM au capital de 11 520 000 €, immatriculée au RCS de SAINT ETIENNE sous le numéro B 310 880 315, agissant poursuites et diligences par son dirigeant domicilié és qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Michel TROMBETTA de la SELARL LEXI, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
INTIMES :
Me [F] [H] pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SAS INPS GROUPE (anciennement dénommée COPY MANAGEMENT), désigné à ces fonctions par jugement du tribunal de commerce d’AIX-EN-PROVENCE du 14 juin 2018
[Adresse 3]
[Localité 1]
non représenté
S.A.R.L. HYDRO SERVICE PROVENCE (HSP) au capital social de 37.622 euros, inscrite au Registre du Commerce de DRAGUIGNAN sous le numéro 424 235 422 , prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié
[Adresse 5]
Zone d’activité commerciale Nicopolis
[Localité 6]
Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES – LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938, postulant et ayant pour avocat plaidant Me Hedy SAOUDI de la société d’Avocats Fidal, avocat au barreau de MARSEILLE
* * * * * *
Date de clôture de l’instruction : 01 Avril 2021
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 07 Juin 2023
Date de mise à disposition : 14 Septembre 2023
Audience présidée par Aurore JULLIEN, magistrate rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière.
Composition de la Cour lors du délibéré :
– Patricia GONZALEZ, présidente
– Marianne LA-MESTA, conseillère
– Aurore JULLIEN, conseillère
Arrêt par défaut rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Patricia GONZALEZ, président, et par Clémence RUILLAT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSÉ DU LITIGE
Le 3 février 2015, la SARL Hydro Service Provence (ci-après la société Hydro Service) aurait conclu avec la SAS Location Automobiles Matériels (ci-après « la société Locam ») un contrat de location portant sur deux imprimantes multifonctions fournies par la SAS INPS Groupe, moyennant le règlement de 21 loyers trimestriels de 2.094 euros HT. Un procès-verbal de livraison et de conformité aurait été signé.
Par courrier recommandé du 26 mars 2015, la société Hydro Service a indiqué à la société Locam n’avoir souscrit aucun contrat avec elle.
Par courrier recommandé du 29 septembre 2015, la société Locam a mis en demeure la société Hydro Service de régler les échéances impayées sous peine de déchéance et de l’exigibilité de toutes sommes dues au titre du contrat.
Par acte d’huissier du 12 novembre 2015, la société Locam a assigné la société Hydro Service devant le tribunal de commerce de Saint-Étienne afin d’obtenir la somme principale de 60.414,43 euros.
Par acte d’huissier du 18 décembre 2017, la société Hydro Service a appelé dans la cause la société INPS Groupe. L’affaire a été jointe à la précédente par jugement du 9 janvier 2018.
Par jugement du 14 juin 2018, le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence a ouvert une procédure de liquidation judiciaire au bénéfice de la société INPS Groupe et désigné Me [H] en qualité de liquidation judiciaire.
Par acte d’huissier du 7 août 2018, la société Hydro Service a appelé dans la cause Me [H], ès-qualités. L’affaire a été jointe aux précédentes par jugement du 2 octobre 2018.
Par jugement réputé contradictoire du 18 février 2020, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a :
– dit les observations et demandes formulées par la société Hydro Service Provence au terme de sa note en délibéré en date du 30 octobre 2019 irrecevables,
– constaté la production aux débats par la société Locam du bon de commande signé le 3 février 2015, liant la société Hydro Service Provence et la société INPS Groupe,
– constaté l’interdépendance et l’indivisibilité des contrats liant d’une part la société Hydro Service Provence et la société INPS Groupe et d’autre part la société Hydro Service Provence et la société Locam,
– dit la clause de non recours insérée à l’article 7 des conditions générales du contrat de location réputée non écrite,
– dit que les conditions d’application des dispositions de l’article L. 221-3 du code de la consommation sont en l’espèce réunies,
– dit que les dispositions consuméristes afférentes à l’obligation d’information précontractuelle et au droit de rétractation sont applicables au contrat, objet du présent litige,
– prononcé la nullité du contrat de location conclu le 3 février 2015 entre la société Hydro Service Provence et la société Locam,
– débouté la société Locam de l’ensemble de ses demandes,
– condamné la société Locam à payer la somme de 2.000 euros à la société Hydro Service Provence au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que les dépens sont à la charge de la société Locam,
– rejeté la demande d’exécution provisoire du jugement,
– débouté la société Hydro Service Provence du surplus de ses demandes.
La société Locam a interjeté appel par acte du 13 mai 2020 à l’encontre de la société société Hydro Service.
Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 12 août 2020 fondées sur les articles 1134 et suivants et 1149 ancien du code civil, les articles L. 221-2 4° (anciennement L. 121-16-1 4°) et L. 222-1 du code de la consommation et les articles 311-2 et 511-21 du code monétaire et financier, la société Locam demande à la cour de :
– dire bien fondé son appel,
– réformer le jugement entrepris en ce qu’il a annulé le contrat de location et l’a débouté de ses demandes et condamné à payer une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société Hydro Service Provence à lui régler la somme principale de 60.414,43 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure délivrée le 7 octobre 2015,
– débouter la société Hydro Service Provence de toutes ses demandes,
– la condamner à lui régler une indemnité de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société Hydro Service Provence en tous les dépens d’instance et d’appel.
Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 4 novembre 2020 et signifiées à Me [H], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société INPS Groupe le 9 novembre 2020 fondées sur les articles L. 221-1 et suivants du code de la consommation et les articles 1108, 1315 et 1134 anciens du code civil, la société Hydro Service Provence demande à la cour de :
sur l’appel principal,
– confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré en ce qu’il a :
– constaté l’interdépendance et l’indivisibilité des contrats la liant, d’une part avec la société INPS Groupe, et d’autre part, avec la société Locam
– dit la clause de non recours insérée à l’article 7 des conditions générales du contrat de location réputée non écrite,
– dit que les conditions d’application des dispositions de l’article L. 221-3 du code de la consommation sont en l’espèce réunies,
– dit que les dispositions consuméristes afférentes à l’obligation d’informations précontractuelles et au droit de rétractation sont applicables au contrat, objet du présent litige,
– prononcé la nullité du contrat de location qu’elle a conclu le 3 février 2015 avec la société Locam,
– débouté la société Locam de l’ensemble de ses demandes,
– condamné la société Locam à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que les dépens sont à la charge de la société Locam,
sur l’appel provoqué,
– juger recevable l’appel provoqué à l’encontre de Me [H], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société INPS Groupe,
sur l’appel incident,
– juger que les documents contractuels ne sont donc pas valables motif pris que Mme [I] n’avait aucun pouvoir pour passer ces contrats en son nom,
– juger que les dispositions consuméristes afférentes à l’obligation précontractuelle et au droit de rétractation sont applicables au contrat de fourniture matérialisé par le bon de commande en date du 3 février 2015 la liant à la société INPS Groupe,
– prononcer la nullité du contrat de fourniture matérialisé par le bon de commande en date du 3 février 2015 la liant à la société INPS Groupe,
– prononcer la nullité du contrat de location en raison de leur interdépendance et indivisibilité,
– juger que les conditions générales et particulières du contrat de location lui sont inopposables car elles ne sont ni signées ni paraphées par elle,
en tout état de cause,
– condamner la société Locam à lui payer la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– la condamner aux entiers dépens d’instance et d’appel avec droit de recouvrement pour ceux d’appel.
Me [H], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société INPS Groupe, à qui la déclaration d’appel a été signifiée par acte du 9 novembre 2020, n’a pas constitué avocat.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 1 avril 2021, les débats étant fixés au 7 juin 2023.
Pour un plus ample exposé des moyens et motifs des parties, renvoi sera effectué à ses dernières écritures conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de Procédure Civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les demandes de la société Locam
S’agissant de la non-application des dispositions du droit de la consommation au contrat de location financière, la société Locam fait valoir :
– l’application à sa situation du Code Monétaire et Financier étant une filiale à 100% de la caisse régionale Loire et Haute Loire du Crédit Agricole, et sa qualité de société de financement enregistrée auprès de l’ACPR
– sa qualité de société de financement et l’exclusion dès lors des dispositions relatives au droit de la consommation
– les dispositions des article L511-21 et L511-3 du Code Monétaire et Financier
– l’exclusion par l’article L222-1 du code de la consommation des opérations connexes aux opérations de banque
– le fait que les opérations connexes de location simple participent des services financiers qu’elle dispense en tant que société de financement et la non application en conséquence des dispositions de l’article L221-2 4°
– le récapitulatif des sommes dues par la société Hydro Service.
Pour sa part, la société Hydro Service fait valoir :
– l’application des dispositions de l’article L221-2 4° du code de la consommation concernant le droit de rétractation et l’article 2 de la directive européenne 2011/83/UE
– la qualité de simple bailleur au titre d’un contrat de louage de la société Locam et non de fournisseur financier
– la juste application par les premiers juges de l’article L221-27 du code de la consommation
– la qualification du contrat principal en tant que « convention d’aide à l’équipement » et du contrat accessoire avec Locam de contrat de location, dépendant du premier sans lequel il n’aurait pas existé
– le fait qu’un contrat de location ne relève pas des services financiers visés par le Code Monétaire et Financier et encore moins d’activités bancaires comme c’est le cas pour les opérations de crédit ou de crédit-bail
– l’absence d’informations pré-contractuelles nécessaires mais aussi de bordereau de rétractation au contrat de location financière
– l’objet du contrat qui n’entre pas dans le champ de son activité principale puisqu’il s’agissait de la fourniture d’un copieur, et le fait que sur a période de conclusion du contrat, hors établissement de la société Locam, l’intimée n’employait que quatre salariés.
Selon l’article L221-3, les dispositions du code de la consommation applicables aux relations entre consommateurs et professionnels sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l’objet de ces contrats n’entre pas dans le champ de l’activité principal du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieure ou égal à cinq.
Il ressort des dispositions des articles L221-5 et L221-20 du code de la consommation que lorsque les éléments concernant le droit de rétractation ne sont pas indiqués au contrats, à savoir le délai initial de 14 jours, ce délai est prolongé d’une année.
L’article L221-27 du code de la consommation dispose que l’exercice du droit de rétractation met fin à l’obligation des parties soit d’exécuter le contrat à distance ou le contrat hors établissement, soit de le conclure lorsque le consommateur a fait une offre et que l’exercice du droit de rétractation d’un contrat principal à distance ou hors établissement met automatiquement fin à tout contrat accessoire, sans frais pour le consommateur autres que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25.
Enfin, l’article L221-29 du code de la consommation dispose que toute dérogation aux textes susvisés serait nulle et de nul effet, les dispositions ayant vocation à s’appliquer de plein droit.
Il convient dans un premier temps de vérifier si la société Hydro Service peut prétendre au bénéfice des dispositions de l’article L221-3 du code de consommation.
En l’espèce, il convient de rappeler que les contrats liant les parties portent, entre la société Hydro Service et la société INPS, sur la fourniture d’un bien, et entre la société Locam et la société Hydro Service, sur une location, le contrat entre ces dernières reprenant les termes de « locataire » et bailleur, sans autre mention particulière, et la société Locam intervenant en sa qualité de bailleur de matériels.
La société Locam indique intervenir dans le cadre d’un contrat de location financière qui, à son sens, est exclu des dispositions du code de la consommation régissant les contrats conclus hors établissement, puisque n’étant pas un service financier au sens défini par l’article 3.3 de la Directive 2011/83 UE et exclu par l’article L221-2 du code de la consommation.
Or, le contrat conclu entre la société Hydro Service et la société Locam n’est pas assimilable à une opération de crédit car la location n’est pas assortie d’une option d’achat et la directive invoquée rappelle qu’un service financier est défini comme « tout service ayant trait à la banque, au crédit, à l’assurance aux pensions individuelles, aux investissements ou aux paiements ». Dès lors, le contrat liant les parties n’est pas exclu du champ de l’application de l’article L221-3 du code de la consommation comme n’étant pas une opération connexe aux opérations de banque.
La société Hydro Service rapporte la preuve de ce qu’elle entre dans les autres critères du texte à savoir, l’existence d’un contrat signé hors établissement, sur un objet n’entrant pas dans le champ de son activité de « négoce de composants hydrauliques, de transmission de produits industriels et accessoires, puisque portant sur la location de deux photocopieurs qui ne sont pas des éléments fondamentaux pour l’exercice de l’activité principale de la société intimée.
En outre, la société Hydro Service rapporte la preuve de ce qu’à la date de signature du contrat de location, elle n’employait que quatre salariés.
Il est constant par ailleurs que la société Locam ne rapporte pas la preuve de ce que les contrats contestés comportent des bordereaux de rétractation, ne respectant pas en cela les dispositions du code de la consommation, cette absence étant sanctionnée par la nullité des conventions.
Dès lors, la société Hydro Service remplit les critères lui permettant de demander l’application du droit de la consommation et de ses dispositions d’ordre public, ainsi que des sanctions qui y sont attachées.
Ainsi, il est relevé que le contrat de location financière ne comporte pas de bordereau de rétractation concernant l’engagement, et qu’en outre, aucune information pré-contractuelle précise n’est rapportée concernant la nature de son engagement, mais aussi sa durée, et son caractère irrévocable.
Dès lors, la nullité du contrat de location financière du 5 février 2015 entre la société Hydro Service et la société Locam, avec comme fournisseur, la société INPS ne peut qu’être prononcée.
Il convient en conséquence de confirmer la décision déférée sur ce point.
Sur les demandes de la société Hydro Service aux fins de nullité du contrat de fourniture avec la société INPS
Sur ce point, la société Hydro Services fait valoir :
– l’application à son profit des dispositions du droit de la consommation
– l’absence de tout bordereau de rétractation.
Eu égard à ce qui précède et en vertu de l’interdépendance des contrats, le prononcé de la nullité du contrat de location financière a immanquablement des conséquences sur l’existence du contrat de fourniture, liant notamment la société Locam et la société INPS.
De fait, les documents versés aux débats démontrent que le bon de commande de la société INPS ne comporte aucun éléments concernant les conditions générales, et ne comporte aucun élément concernant la vente, tout étant reporté sur le contrat de location financière dont la nullité est établie.
Dès lors, il convient également de prononcer la nullité du contrat de fourniture du 3 février 2015 entre la société Hydro Service et la société INPS concrétisé par la signature du bon de commande.
Sur les demandes accessoires
La société Locam échouant en ses prétentions, elle sera condamnée à supporter les entiers dépens de la procédure d’appel.
L’équité commande d’accorder à la société Hydro Service une indemnisation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. En conséquence, la société Locam sera condamnée à lui verser la somme de 3.500 euros à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, dans les limites de l’appel
Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions,
Y ajoutant
Prononce la nullité du contrat de fourniture entre la SARL Hydro Service Provence et la SAS INPS Groupe prise en la personne de Me [F] [H], ès qualité de liquidateur judiciaire,
Condamne la SAS Locam à supporter les entiers dépens de la procédure d’appel,
Condamne la SAS Locam à payer à la SARL Hydro Service Provence la somme de 3.500 euros à titre d’indemnisation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE