Économies d’énergie : les plaquettes publicitaires sans valeur contractuelle

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Économies d’énergie : les plaquettes publicitaires sans valeur contractuelle
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Les économies d’énergies par installation de panneaux photovoltaïques annoncées par des plaquettes publicitaires n’ont pas de valeur contractuelle.

 

Au soutien de ces prétentions, Monsieur [O] fait valoir essentiellement qu’il lui a été présenté par le commercial une simulation fictive visant à lui faire croire que les revenus tirés de la production d’énergie fournie par l’installation photovoltaïque permettraient l’autofinancement de l’opération ; qu’il ne lui a été fourni aucun renseignement concernant le délai de raccordement, concernant l’assurance obligatoire à souscrire en cas d’acquisition de panneaux photovoltaïques, concernant la location obligatoire d’un compteur de production auprès de la société Edf et concernant la durée de vie des matériels notamment celle de l’onduleur électrique qui serait de cinq ans en moyenne et dont le coût de remplacement avoisine 2 500 €, quant au fait qu’il serait nécessaire de faire procéder à la désinstallation des matériels et à la remise de la toiture dans son état initial à l’issue de leur exploitation et une fois leur obsolescence constatée ; qu’il n’a pas davantage été fourni d’informations concernant le prix d’achat de l’électricité pratiqué par l’opérateur Edf ni les rendements envisageables alors qu’une installation photovoltaïque aurait pour seul intérêt ses rendements financiers ; qu’il a été fait état de partenariats mensongers pour pénétrer dans son habitation.

En définitive, tout l’argumentaire de Monsieur [O] repose sur le fait qu’il aurait été sciemment trompé sur la rentabilité de l’opération envisagée, en réalité ruineuse, dont le contrat stipulait qu’elle serait autofinancée, ce d’autant plus que des frais non prévus se rajoutent et qu’il n’aurait pas contracté s’il n’avait pas subi des man’uvres ainsi que des rétentions d’informations de la part du vendeur.

Or, Monsieur [O] ne justifie pas, autrement que par ses seules allégations et la production d’une plaquette publicitaire qui n’a pas valeur contractuelle, que, comme il le prétend, la question de la rentabilité soit entrée dans le champ contractuel et que le vendeur l’ait assuré d’un autofinancement de l’installation, notamment en lui présentant une simulation, ainsi qu’il le prétend.


 

5 juin 2023
Cour d’appel de Colmar
RG
21/05096

MINUTE N° 23/264

Copie exécutoire à :

– Me Christine BOUDET

– Me Claus WIESEL

Le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRET DU 05 Juin 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : 3 A N° RG 21/05096 – N° Portalis DBVW-V-B7F-HXH6

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 15 octobre 2021 par le juge des contentieux de la protection de Mulhouse

APPELANTE :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de BANQUE SOLFEA

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Christine BOUDET, avocat au barreau de COLMAR

INTIMÉS :

Monsieur [T] [O]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Claus WIESEL, avocat au barreau de COLMAR

S.E.L.A.R.L. BALLY M.J.

ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE, sous l’enseigne GROUPE SOLAIRE DE FRANCE

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 4]

[Localité 6]

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 20 mars 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme MARTINO, Présidente de chambre

Mme FABREGUETTES, Conseiller

M. LAETHIER, Vice-Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme HOUSER

ARRET :

– réputé contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Annie MARTINO, président et Mme Anne HOUSER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE

Dans le cadre d’un démarchage à domicile et suivant bon de commande accepté le 13 mai 2013, Monsieur [T] [O] a confié à la société Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France, exerçant à l’enseigne Groupe Solaire de France, la fourniture et la pose d’une centrale photovoltaïque au prix de 18 800 €, intégralement financé par la souscription le même jour d’un crédit affecté de même montant auprès de la société Banque Solféa.

Le 24 mai 2013, Monsieur [O] a signé une attestation de fin de travaux et a demandé en conséquence à la banque de décaisser les fonds au profit du vendeur.

La société Nouvelle Régie des Jonctions des Energies de France a été placée en redressement judiciaire puis en liquidation judiciaire, la Selarlu Bally étant désignée en qualité de mandataire liquidateur.

Par acte d’ huissier délivré le 26 mai 2019, Monsieur [O], qui déplore que l’installation n’a jamais été raccordée au réseau, a assigné la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solféa et la société Groupe solaire de France prise en la personne de son mandataire liquidateur, devant le tribunal d’instance de Mulhouse, aux fins de voir prononcer l’annulation du contrat de vente et corrélativement celle du contrat de crédit, voir ordonner le remboursement par la société BNP Paribas Personal Finance des sommes qui ont été versées au titre des échéances de remboursement du crédit et, subsidiairement, aux fins de voir condamner la société BNP Paribas Personal Finance à lui payer la somme de 18 300 €, sauf à parfaire, à titre de dommages intérêts du fait de la diligence fautive de la banque.

En tout état de cause, il a sollicité la condamnation de la défenderesse à lui payer les sommes de :

-3 688,74 € au titre de son préjudice financier,

-3 000 € au titre du préjudice moral,

-3 000 € en réparation du préjudice économique et du trouble de jouissance,

-3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

À titre infiniment subsidiaire, il a demandé de dire et juger qu’il reprendra le paiement mensuel des échéances du prêt.

La société BNP Paribas Personal Finance a conclu à titre principal, à l’irrecevabilité de la demande en nullité des contrats de vente et de crédit et, à titre subsidiaire a conclu au débouté des demandes et a demandé au tribunal d’ordonner aux demandeurs de poursuivre le règlement des échéances de prêt conformément aux stipulations du contrat de crédit affecté jusqu’à parfait paiement.

À titre très subsidiaire et dans le cas où la nullité des contrats serait prononcée, elle a sollicité la condamnation de Monsieur [O] au remboursement du montant du capital prêté, déduction faite des échéances déjà acquittées, à défaut d’une fraction du capital emprunté qui ne saurait être inférieure aux deux tiers du capital prêté. Elle a sollicité l’allocation d’une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement réputé contradictoire en date du 15 octobre 2021, le juge des contentieux de la protection au tribunal judiciaire de Mulhouse a :

-rejeté les fins de non-recevoir soulevées par la société BNP Paribas Personal Finance,

-prononcé l’annulation du contrat de vente du 13 mai 2013,

-constaté en conséquence l’annulation de plein droit du contrat de crédit affecté,

-constaté que la société BNP Paribas Personal Finance a commis une faute à l’égard de Monsieur [O] la privant de sa créance de restitution du capital prêté,

-condamné la société BNP Paribas Personal Finance à restituer à Monsieur [O] l’intégralité des échéances versées depuis l’origine en exécution du contrat de crédit affecté du 13 mai 2013 soit 18 600 €, sauf pour Monsieur [O] à prouver lors de l’exécution avoir versé d’autres sommes entre le mois d’avril 2021 et la décision,

-débouté la caisse société BNP Paribas Personal Finance de ses demandes à l’encontre de Monsieur [O],

-rejeté la demande de dommages intérêts de Monsieur [O],

-condamné la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens de l’instance et à payer à Monsieur [O] une somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société BNP Paribas Personal Finance a interjeté appel à l’encontre de cette décision suivant déclaration en date du 16 décembre 2021 et par dernières écritures notifiées le 9 décembre 2022, a conclu à l’infirmation de la décision intervenue et a demandé à la cour statuant à nouveau de :

Vu les articles 1304 ancien, 2224, 1134 ancien, 1108 ancien et suivants, 1338 ancien, 1315 devenu 1353 du code civil,

Vu les articles L110-4, L622-21 et L622-22 du code de commerce, 122 et 9 du code de procédure civile,

Vu les articles L311-32 et L311-33 anciens du code de la consommation ;

Vu la jurisprudence citée, les pièces versées aux débats,

À titre principal,

-déclarer Monsieur [O] irrecevable en ses prétentions pour cause de prescription de son action,

-à défaut, constater que Monsieur [O] ne justifie nullement de sa déclaration de créance alors qu’il a engagé son action postérieurement au jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire de la société Nouvelle Régie des Jonctions des Énergies de France,

-par conséquent dire et juger que Monsieur [O] est irrecevable à agir en nullité du contrat principal et en conséquence à agir en nullité du contrat de crédit affecté,

À titre subsidiaire,

-débouter Monsieur [O] de l’intégralité de ses demandes,

-dire et juger que le bon de commande du 13 mai 2013 respecte les dispositions des anciens articles L 121-23 et L 121-24 du code de la consommation,

-à défaut, constater, dire et juger que Monsieur [O] a amplement manifesté sa volonté de renoncer à invoquer la nullité

des contrats au titre des prétendus vices les affectant sur le

fondement des anciens articles L 121-23 et suivants du code de la consommation et ce, en toute connaissance des dispositions applicables,

-constater la carence probatoire de Monsieur [O],

-dire et juger que les conditions d’annulation du contrat principal de vente de panneaux photovoltaïques sur le fondement d’un prétendu dol ou d’une prétendue absence de cause ne sont pas réunis et qu’en conséquence le contrat de crédit affecté conclu par Monsieur [O] n’est pas annulé,

-en conséquence, ordonner à Monsieur [O] de poursuivre le règlement des échéances du prêt entre les mains de la société BNP Paribas Personal Finance conformément aux stipulations du contrat de crédit affecté accepté le 13 mai 2013,

À titre très subsidiaire si le tribunal estimait devoir confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé l’annulation du contrat principal de vente et de manière subséquente constaté l’annulation de plein droit du contrat de crédit affecté,

-constater, dire et juger que la banque n’a commis aucune faute en procédant à la délivrance des fonds ni aucune faute dans l’octroi du crédit,

-par conséquent, condamner Monsieur [O] à rembourser à la société BNP Paribas Personal Finance le montant du capital prêté, déduction faite des échéances d’ores et déjà acquittées par l’emprunteur,

À titre infiniment subsidiaire, si la cour considérait que la banque a commis une faute dans le déblocage des fonds,

-dire et juger que le préjudice subi du fait de la perte de chance de ne pas contracter le contrat de crédit affecté litigieux ne peut être égal au montant de la créance de la banque,

-constater, dire et juger que si Monsieur [O] allègue de ce que la société Nouvelle Régie des Jonctions des Énergies de France n’aurait pas exécuté la prestation de raccordement des panneaux photovoltaïques par la suite, il ne produit pas la moindre pièce au soutien de cette affirmation de sorte qu’il n’établit aucunement que la centrale photovoltaïque n’aurait pas été achevée ni en quoi elle serait défectueuse,

-à défaut, dire et juger que Monsieur [O] conservera l’installation des panneaux solaires photovoltaïques qui ont été livrés et posés à son domicile puisque le vendeur est en liquidation judiciaire, que Monsieur [O] ne justifie absolument pas d’un quelconque dysfonctionnement qui affecterait les matériels livrés

et installés à son domicile et qu’il dispose de la faculté de faire raccorder l’installation photovoltaïque au réseau Erdf au regard de la convention régularisée entre les parties mais aussi au regard du montant du crédit affecté lui permettant ainsi de percevoir des revenus énergétiques grâce à l’installation photovoltaïque litigieuse,

-par conséquent, dire et juger que la société BNP Paribas Personal Finance ne saurait être privée de la totalité de sa créance de restitution, compte tenu de l’absence de préjudice avéré pour Monsieur [O],

– condamner Monsieur [O] à rembourser à la société BNP Paribas Personal Finance le montant du capital prêté, déduction faite des échéances d’ores et déjà acquittées par l’emprunteur,

-à défaut, réduire à de biens plus justes proportions le préjudice subi par Monsieur [O] et le condamner à restituer à la société BNP Paribas Personal Finance une fraction du capital prêté, qui ne saurait être inférieure aux deux tiers du capital prêté,

En tout état de cause,

-débouter Monsieur [O] de l’intégralité de ses demandes en paiement de dommages intérêts complémentaires à défaut de justifier d’une faute imputable au prêteur et à défaut de justifier la réalité et le sérieux d’un quelconque préjudice,

-débouter Monsieur [O] de sa demande en paiement de dommages intérêts au titre de la remise en état de la toiture et de la désinstallation des panneaux,

-condamner Monsieur [O] aux entiers dépens y compris ceux d’appel et à payer la somme de 1 500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Par dernières écritures notifiées le 16 février 2023, Monsieur [O] demande à la cour de :

Vu les articles précités du code de la consommation, du code de l’urbanisme, du code monétaire et financier, du code des assurances, du Code civil, du code de procédure civile, dans la rédaction applicable au cas d’espèce,

Vu les pièces produites,

-confirmer la décision déférée sauf en ce qu’elle a rejeté la demande de dommages intérêts de Monsieur [O] à l’encontre de la société BNP Paribas Personal Finance,

Et statuant à nouveau :

-débouter la société BNP Paribas Personal Finance de l’ensemble de ses demandes,

-dire les demandes de Monsieur [O] recevables et les déclarer bien fondées,

À titre subsidiaire :

-condamner la société BNP Paribas Personal Finance à verser à Monsieur [O] la somme de 18 300 €, sauf à parfaire, à titre de dommages intérêts, du fait de la négligence fautive de la banque,

En tout état de cause

-condamner la société BNP Paribas Personal Finance à lui payer les sommes de :

-3 688,74 € au titre de son préjudice financier,

-3 000 € au titre de son préjudice économique et du trouble de jouissance,

-3 000 € au titre du préjudice moral

-condamner la société BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens ainsi qu’au paiement de la somme de 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

La déclaration d’appel a été signifiée à la Selarl Bally ès- qualités de liquidateur judiciaire de la société Nouvelle Régie des Jonctions des Énergies de France le 2 mars 2022 par remise de l’acte à personne morale et les conclusions d’appel lui ont été de la même manière signifiées le 15 mars 2022.

La société Nouvelle Régie des Jonctions des Énergies de France, représentée par son liquidateur judiciaire, la Selarl Bally M.J. n’a pas constitué avocat.

L’ordonnance de clôture est en date du 20 février 2023.

MOTIFS

Vu les dernières écritures des parties ci-dessus spécifiées et auxquelles il est référé pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens, en application de l’article 455 du code de procédure civile ;

Vu les pièces régulièrement communiquées ;

À titre liminaire il est rappelé que :

-aux termes de l’article 954, alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n’examine les moyens au soutien de ses prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion,

-ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile les demandes des parties tendant à  »dire et juger », ‘constater », en ce que, hors les cas prévus par la loi, elles ne sont pas susceptibles d’emporter de conséquences juridiques, mais constituent en réalité des moyens ou arguments, de sorte que la cour ne statuera pas sur ces demandes dans le dispositif de l’arrêt.

Sur la recevabilité des demandes au regard des dispositions de l’article L622-21 du code du commerce

La société BNP Paribas Personal Finance persiste à hauteur d’appel à soutenir qu’en vertu des dispositions de l’article L622-21 du code de commerce, les demandes de Monsieur [O] seraient irrecevables dès lors qu’ « elles tendent indirectement mais nécessairement au paiement d’une somme d’argent puisque le prononcé de la nullité génère une créance de restitution du prix et l’obligation de faire liée à la reprise du matériel ne pouvant elle-même se traduire que par une créance » . Elle fait également grief à Monsieur [O] de ne pas avoir déclaré sa créance à la liquidation judiciaire de la société Nouvelle Régie des Jonctions des Énergies de France.

Or, le jugement d’ouverture interrompant ou interdisant, selon l’article L622-21, 1°, du code de commerce, toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n’est pas mentionnée à l’article L622-17,I, du code du commerce et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent ou à la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent, la demande d’annulation d’un contrat de vente formée par un emprunteur, fondée sur la violation de l’article L121-23 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 14 mars 2016 et sa demande subsidiaire d’annulation pour dol, ne se heurte pas à l’interdiction des poursuites, en l’absence de toute demande de condamnation du vendeur au paiement d’une somme d’argent ni invocation du défaut de paiement d’une telle somme, ni même réclamation de la restitution du prix de vente. (Cass Civ 7 octobre 2020).

De même, Monsieur [O], qui ne réclame paiement d’aucune somme au vendeur n’avait pas à déclarer sa créance à la liquidation judiciaire de la société Nouvelle Régie des Jonctions des Énergies de France.

C’est donc par une parfaite application de la règle de droit et par des motifs pertinents que la cour approuve, que le premier juge a écarté la fin de non-recevoir tirée de l’interdiction des poursuites individuelles.

La décision déférée devra donc être confirmée de ce chef.

Sur la recevabilité de la demande en nullité du contrat de vente pour irrégularité formelle du bon de commande au regard des dispositions de l’ancien article L 121-23 du code de la consommation

La société appelante soutient que l’action en annulation du contrat de vente pour méconnaissance des dispositions de l’article L 121-23 ancien du code de la consommation est prescrite dès lors que, par application de l’article 2224 du code civil, le point de départ du délai de prescription se situe nécessairement à la date de signature du contrat de vente dès lors que c’est son contenu même qui fonde l’action en nullité, en raison de ses insuffisances alléguées.

Monsieur [O] prétend au contraire que le point de départ de la prescription ne saurait être fixé au jour de la conclusion du contrat dans la mesure où la nullité de l’acte ne pouvait lui apparaître de manière évidente et non équivoque à cette date.

En l’espèce, l’article 2224 du code civil dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

Or, Monsieur [O] produit l’original du bon de commande qui permet de se convaincre de ce que l’article L 121-23 du code de la consommation ainsi que le texte des articles L 121-24 à L 121-26 du même code sont reproduits au verso du bon de commande dans une police et une mise en page remarquablement lisibles.

L’article L 121-23 ainsi reproduit, dispose que les opérations visées à l’article L 121-21 doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion du contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

1° nom du fournisseur et du démarcheur

2° adresse du fournisseur

3° adresse du lieu de conclusion du contrat

4° désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés

5° conditions d’exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens ou d’exécution de la prestation de services

6° prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit ainsi que le taux nominal de l’intérêt et le taux effectif global de l’intérêt déterminé dans les conditions prévues à l’article L313-1

7° faculté de renonciation prévue à l’article L 121-25 ainsi que les conditions d’exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L 121-23, L 121-24, L 121-25 et L 121-26.

Ainsi, dès la signature du contrat de vente, Monsieur [O], dûment informé de la législation applicable, connaissait ou aurait dû connaître les causes évidentes de nullité du contrat notamment en ce que le bon de commande qui lui a été remis ne désigne pas précisément les caractéristiques de la centrale photovoltaïque, ne comporte pas l’indication du délai de livraison ou d’exécution de la prestation de services non plus que le nom du démarcheur et n’est aucunement renseigné en ce qui concerne les modalités du crédit.

Il lui était, en tant que de besoin, dès ce moment loisible de prendre conseil auprès d’un professionnel pour voir confirmer que le bon de commande ne satisfaisait pas aux prescription de l’article 121-23 du code la consommation de sorte que la nullité était encourue.

Le délai de la prescription quinquennale a donc couru de ce chef à compter du 13 mai 2013 et la prescription de l’action en nullité sur le fondement de l’article L121-23 était acquise le 26 mai 2019, date d’assignation.

Il y a donc lieu d’infirmer la décision déférée en ce qu’elle a déclaré recevable comme non prescrite l’action en nullité de Monsieur [O] fondée sur l’inobservation des dispositions de l’article L 121-23 du code de la consommation.

Sur la recevabilité de la demande en nullité pour dol

L’article 1304 ancien, devenu 1144 du code civil dans sa version résultant de l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, dispose que la prescription quinquennale de l’action en nullité pour dol a pour point de départ le jour où le contractant a découvert l’erreur qu’il allègue.

Monsieur [O] soutient avoir été trompé par le vendeur qui lui aurait fait croire à l’autofinancement de l’opération alors que le raccordement de l’installation à Erdf n’a jamais été réalisé, de

sorte qu’il a réglé des mensualités de crédit sans tirer le moindre profit des panneaux photovoltaïques posés.

Il postule qu’il n’a eu connaissance du caractère mensonger et illusoire de l’autofinancement promis, et donc du dol dont il a été victime, qu’à compter de la connaissance de l’absence de raccordement de son installation, soit le jour de l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la société Groupe Solaire de France, le 12 novembre 2014.

Il ressort des courriers recommandés adressés par Monsieur [O] au vendeur et des échanges par courriel qu’en effet, si le bon de commande prévoyait que le raccordement de l’onduleur au compteur de production était à la charge du Groupe Solaire de France, cette société n’a pas été en mesure d’exécuter cette prestation, malgré les nombreux rappels de l’intimé.

Par courrier recommandé en date du 9 septembre 2014, qui fait suite à l’envoi de deux lettres recommandées reçues par la société Groupe Solaire de France en juillet 2014 dans lesquelles Monsieur [O] déplorait que l’installation n’était toujours pas raccordée et sollicitait un rendez-vous avec le vendeur, courriers demeurés lettres mortes, Monsieur [O] a informé la société Banque Solféa de sa décision de suspendre le prélèvement automatique relatif au crédit affecté.

Il expliquait dans cette lettre que cette position faisait suite au non-respect par le vendeur du contrat souscrit en mai 2013 alors que les panneaux photovoltaïques installés le 27 mai 2013 n’étaient toujours pas raccordés malgré d’innombrables relances et promesses du vendeur non tenues.

Monsieur [O] ajoutait : « à ce jour, ce groupe (Groupe Solaire de France) est injoignable et reste muet après deux courriers adressés avec accusé de réception. Je vous remercie de prendre acte de ma décision et vous tiendrai informé des suites juridiques de cette affaire ».

Ainsi, c’est à la date de ce courrier du 9 septembre 2014 que Monsieur [O], qui constatait ne plus pouvoir entrer en contact avec le vendeur, a pu se convaincre qu’il ne bénéficierait pas du raccordement de l’installation et se penser victime d’une tromperie.

Dès lors, la date du 12 novembre 2014, date de prononcé du jugement de liquidation judiciaire de la société Groupe Solaire de France, ne saurait être retenue comme point de départ de la prescription de l’action en nullité pour dol.

Il n’en demeure pas moins que le délai de prescription quinquennale de l’action en nullité, qui a commencé à courir le 9 septembre 2014, n’était pas acquis le 26 juillet 2019 date d’assignation.

Il s’en déduit que l’action est recevable.

Sur le bien fondé de l’action en nullité pour dol

Il appartient à celui qui prétend que son consentement a été vicié par dol ou réticence d’apporter la preuve d’une erreur déterminante de son consentement provoqué par des man’uvres, des mensonges ou bien par une dissimulation intentionnelle d’informations que l’autre partie savait être déterminantes de son consentement.

Au soutien de ces prétentions, Monsieur [O] fait valoir essentiellement qu’il lui a été présenté par le commercial une simulation fictive visant à lui faire croire que les revenus tirés de la production d’énergie fournie par l’installation photovoltaïque permettraient l’autofinancement de l’opération ; qu’il ne lui a été fourni aucun renseignement concernant le délai de raccordement, concernant l’assurance obligatoire à souscrire en cas d’acquisition de panneaux photovoltaïques, concernant la location obligatoire d’un compteur de production auprès de la société Edf et concernant la durée de vie des matériels notamment celle de l’onduleur électrique qui serait de cinq ans en moyenne et dont le coût de remplacement avoisine 2 500 €, quant au fait qu’il serait nécessaire de faire procéder à la désinstallation des matériels et à la remise de la toiture dans son état initial à l’issue de leur exploitation et une fois leur obsolescence constatée ; qu’il n’a pas davantage été fourni d’informations concernant le prix d’achat de l’électricité pratiqué par l’opérateur Edf ni les rendements envisageables alors qu’une installation photovoltaïque aurait pour seul intérêt ses rendements financiers ; qu’il a été fait état de partenariats mensongers pour pénétrer dans son habitation.

En définitive, tout l’argumentaire de Monsieur [O] repose sur le fait qu’il aurait été sciemment trompé sur la rentabilité de l’opération envisagée, en réalité ruineuse, dont le contrat stipulait qu’elle serait autofinancée, ce d’autant plus que des frais non prévus se rajoutent et qu’il n’aurait pas contracté s’il n’avait pas subi des man’uvres ainsi que des rétentions d’informations de la part du vendeur.

Or, Monsieur [O] ne justifie pas, autrement que par ses seules allégations et la production d’une plaquette publicitaire qui n’a pas valeur contractuelle, que, comme il le prétend, la question de la rentabilité soit entrée dans le champ contractuel et que le vendeur l’ait assuré d’un autofinancement de l’installation, notamment en lui présentant une simulation, ainsi qu’il le prétend.

En tout état de cause, en l’absence alléguée de raccordement, de production et de revente de l’électricité produite, Monsieur [O] se trouve dans l’incapacité d’établir que l’installation n’aurait, à coup sûr , pas été rentable et autofinancée

si elle avait fonctionné, de sorte qu’il ne peut soutenir que le vendeur a commis une réticence dolosive en omettant de lui fournir les informations propres à le convaincre que le projet n’était pas autofinancé.

Monsieur [O] énonce à juste titre que l’auteur du dol doit avoir eu l’intention de tromper son cocontractant.

Or, il n’établit pas davantage que le vendeur se savait, dès la signature de l’acte, dans l’incapacité de prendre en charge le raccordement de l’installation, qui a un coût relativement faible.

Il ne peut arguer des omissions du contrat de vente au regard des dispositions de l’article L 121-23 du code de la consommation, comme constituant des réticences dolosives, alors que mis en situation de constater la nullité du contrat, il a laissé son action en nullité se prescrire.

Il ne peut davantage sérieusement prétendre avoir été trompé sur le montant de l’opération puisqu’il a signé le même jour que celui de la signature du bon de commande un contrat de crédit affecté prévoyant le montant du crédit, la durée du crédit, le nombre d’échéances, le taux effectif global fixe, le taux débiteur fixe, le montant de chaque mensualité et le montant total du crédit, soit la somme de 26 166 €.

De même, si le bon de commande porte un tampon « partenaire Gdf Suez » aucun élément du dossier ne permet de retenir que le vendeur aurait déclaré être mandaté par les sociétés Edf Gdf Suez pour procéder à des relevés ou à l’établissement d’un quelconque diagnostic énergétique afin de convaincre Monsieur [O] de lui ouvrir la porte de sa maison.

En définitive, Monsieur [O] échoue à administrer la preuve du dol qu’il invoque et la décision déférée sera infirmée en ce qu’elle a prononcé la nullité des contrats de vente et de crédit affecté.

Sur l’obligation à remboursement du crédit

Il est de règle que les obligations de l’emprunteur vis à vis du prêteur ne prennent naissance que lorsque le contrat principal a été totalement exécuté et la preuve de l’exécution complète du contrat principal incombe au prêteur.

Or, alors que le bon de commande met expressément à la charge du vendeur le raccordement de l’onduleur au compteur de production, l’obtention du contrat de rachat de l’électricité produite ainsi que l’obtention de l’attestation de conformité (consuel), l’attestation de fin de travaux signée par Monsieur [O]

indique «  les travaux, objets du financement (qui ne couvrent pas le raccordement au réseau éventuel et autorisations administra- tives éventuelles) sont terminés et sont conformes au devis.

Ainsi, le contrat principal n’était pas complètement exécuté au jour ou la banque a décaissé les fonds, ce dont elle pouvait se convaincre encore au vu du peu de temps écoulé entre la signature du contrat principal et la date de signature de l’attestation de fin de travaux.

Dès lors qu’elle a réclamé le remboursement du crédit, il appartient à la banque, alors que Monsieur [O] affirme que l’installation n’a jamais été raccordée et produit en ce sens une attestation en date du 20 décembre 2020, d’établir que le contrat a été totalement exécuté.

Il convient d’inviter les parties à présenter leurs observations de droit et de fait sur le moyen relevé d’office tiré des dispositions de l’article L311-31 du code de la consommation dans sa rédaction en vigueur au jour de la signature du contrat de vente.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement et réputé contradictoirement,

INFIRME la décision déférée en ce qu’elle a prononcé l’annulation du contrat de vente ayant lié Monsieur [T] [O] à la société Nouvelle Régie des Jonctions des Énergies de France en liquidation judiciaire, et constaté consécutivement la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre Monsieur [T] [O] et la société Banque Solféa, aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance,

Et statuant à nouveau de ces chefs,

DECLARE prescrite l’action en annulation du contrat principal pour vice de forme et en annulation consécutive du contrat de crédit,

DEBOUTE Monsieur [T] [O] de sa demande tendant à voir annuler le contrat principal de vente du 13 mai 2013 pour dol ainsi que le contrat de crédit affecté conclu le même jour,

Avant dire droit,

INVITE les parties à présenter leurs observations de droit et de fait sur le moyen, relevé d’office, des dispositions de l’article L311-31 du code de la consommation, dans sa rédaction contemporaine de la signature des contrats litigieux et la banque à justifier de l’exécution complète du contrat de vente,

RENVOIE à cet effet l’affaire à l’audience du lundi 4 décembre 2023 à 9 heures étant précisé que la société BNP Paribas Personal Finance devra avoir conclu pour le 2 octobre 2023 au

plus tard et Monsieur [O] pour le 13 novembre 2023 au plus tard,

RESERVE les droits des parties.

La Greffière La Présidente

 


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