Déchéance de marque : Cour d’appel de Rennes RG n° 23/00085 23 janvier 2024

·

·

Déchéance de marque : Cour d’appel de Rennes RG n° 23/00085 23 janvier 2024
Ce point juridique est utile ?

23 janvier 2024
Cour d’appel de Rennes
RG n°
23/00085

3ème Chambre Commerciale

ARRÊT N° 43

N° RG 23/00085 – N° Portalis DBVL-V-B7H-TMZ2

S.A.S.U. COGEDIS FORMATION

C/

S.A.S. ALTEOR

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me LE GALL-GUINEAU

Me THERSIQUEL

Copie certifiée conforme délivrée

le :

à : TJ de RENNES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 23 JANVIER 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Fabienne CLÉMENT, Présidente,

Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère, rapporteur

GREFFIER :

Monsieur Pierre DANTON, lors des débats, et Madame Frédérique HABARE lors du prononcé,

DÉBATS :

A l’audience publique du 21 Novembre 2023

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 23 Janvier 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE :

S.A.S.U. COGEDIS FORMATION

anciennement dénommée ALTEOR STRATEGIE, inscrite au RCS de BREST sous le n° 400 524 534, prise en la personne son Président, domicilié en cette qualité au siège

zone industrielle de [Localité 3]

[Localité 3]

Représentée par Me Sophie HERRBURGER de la SAS CABINET HERRBURGER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Représentée par Me Carole LE GALL-GUINEAU, Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉE :

S.A.S. ALTEOR Immatriculée au RCS d’Aix en Provence sous le n° 438 790 842 prise en la personne de son Président, domicilié en cette qualité au siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Laurence BRANDEHO de la SELARL ADENIUM AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

Représentée par Me Alice THERSIQUEL, Postulant, avocat au barreau de RENNES

PARTIE INTERVENANTE :

Monsieur [Z] [Y]

né le 26 Février 1961 à [Localité 7]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 1]

intervenant volontaire par conclusions du 03.07.2023

Représenté par Me Laurence BRANDEHO de la SELARL ADENIUM AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

Représenté par Me Alice THERSIQUEL, Postulant, avocat au barreau de RENNES

La S.A.S. ALTEOR est une société holding immatriculée au registre du commerce et des sociétés d’Aix-en-Provence, où elle a son siège, sous le numéro 438 790 842.

Elle a pour objet social la prise de participation dans toutes sociétés ayant pour objet l’exploitation d’agence de publicité, la gestion de tous supports publicitaires, l’organisation d’événements, le conseil en direction des affaires, les relations publiques et la communication et toutes sociétés susceptibles d’être partenaires desdites activités de façon à créer un groupe multiservices de communication.

Elle exerce également les activités de prestations de secrétariat administratif, comptable et de gestion technique, financière et commerciale afférentes envers les filiales ou sociétés apparentées, et d’opérations financières, commerciales, industrielles et immobilières se rapportant à son activité de société holding.

Elle dit être titulaire de la marque verbale ALTÉOR, déposée le 21 septembre 2000 par [Z] [Y], son directeur général, en classe 35 et enregistrée sous le n° 3 053 642 pour désigner les produits et services suivants :

‘Publicité ,gestion des affaires commerciales ; administration commerciale ; travaux de bureau ; diffusion de matériel publicitaire (tracts, prospectus, imprimés, échantillons) ; services d’abonnement à des journaux (pour des tiers) ; services d’abonnement à des services de télécommunications pour des tiers ; présentation de produits sur tout moyen de communication pour la vente au détail ; conseils en organisation et direction des affaires ; comptabilité ; reproduction de documents ; services de bureaux de placement ; gestion de fichiers informatiques ; organisation d’expositions à buts commerciaux ou de publicité ; publicité en ligne sur un réseau informatique ; location de temps publicitaire sur tout moyen de communication ; publication de textes publicitaires ; location d’espaces publicitaires ; diffusion d’annonces publicitaires ; relations publiques’.

Elle a déposé une marque ALTÉOR le 17 novembre 2011 en classe 35 et enregistrée sous le n° 3875758 pour les mêmes services.

Dans ce cadre la S.A.S. ALTEOR fournit des prestations à ses filiales, organise leur promotion commerciale et met à leur disposition sa marque.

Elle utilise également la marque pour son compte, afin de promouvoir l’activité de ses filiales.

La S.A.S. ALTEOR STRATÉGIE ‘ laquelle, constituée le 16 février 1995 sous le nom IMPC, a adopté son nom actuel le 19 février 2016 ‘ a son siège social dans le Finistère, où, faisant partie du GROUPE COGEDIS qui oeuvre dans le domaine de l’expertise comptable, elle exerce, aux termes de ses statuts, les multiples activités suivantes :

‘toutes études de marchés, tous conseils et activités annexes en matière de commerce et de marketing ; toutes prestations de services en matière d’accompagnement, d’organisation et de stratégie des entreprises de leurs dirigeants et des particuliers ; la vente de logiciels et la concession de licences informatiques ; la réalisation de formations et l’animation de séminaires ; toutes opérations industrielles, commerciales et financières, mobilières et immobilières pouvant se rattacher directement ou indirectement à l’objet social et à tous objets similaires ou connexes ; la participation de la société par tous moyens, à toutes entreprises ou sociétés créées ou à créer, pouvant se rattacher à l’objet social, notamment par voie de création de sociétés nouvelles, d’apport, commandite, souscription ou rachat de titres ou droits sociaux, fusion, alliance ou association en participation ou groupement d’intérêt économique ou de

location gérance.’

Considérant que la S.A.S. ALTEOR STRATÉGIE exploitait sa marque sans autorisation, dans le cadre d’une activité similaire à la sienne, la S.A.S. ALTEOR l’a mise en demeure de cesser d’utiliser le nom Altéor par courrier du 6 juin 2019.

Constatant ensuite que l’intéressée continuait d’utiliser le signe, notamment lors de l’événement DYNABUY CONNECT les 28 et 29 juin 2019 à [Localité 6], au cours duquel le directeur général d’ALTEOR STRATÉGIE se présentait comme directeur d’ALTEOR, la demanderesse a, aux termes d’une ordonnance sur requête du 24 juin 2019, obtenu l’annulation de la présentation envisagée et la saisie de documents comportant les mots ALTÉOR et ALTÉOR STRATÉGIE, opérées par huissier de justice le 27 juin suivant, aux termes d’un procès-verbal de saisie-contrefaçon.

Puis, par acte du 23 juillet 2019, la S.A.S. ALTEOR a fait assigner la S.A.S. ALTEOR STRATÉGIE devant le tribunal judiciaire sur le fondement de la contrefaçon.

Par conclusions notifiées le 5 novembre 2020, [Z] [Y] est volontairement intervenu à la procédure, en tant que titulaire de la marque ALTEOR et dirigeant de la société ALTEOR.

Par jugement du 07 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Rennes a:

– déclaré [Z] [Y] irrecevable en son intervention volontaire.

– constaté que la marque ALTÉOR n° 3 053 642 est expirée.

– débouté la S.A.S. ALTEOR STRATÉGIE de sa demande en déchéance de la marque ALTÉOR n°3875758. -21-

– débouté la S.A.S. ALTEOR STRATÉGIE de sa demande en nullité du procès-verbal de constat du 27 juin 2019.

– écarté des débats les pièces figurant en page 7 à 33 incluses du procès-verbal de ‘saisie-contrefaçon’ du 27 juin 2019 (pièce n° 14 de la demanderesse).

– débouté la S.A.S. ALTEOR STRATÉGIE de sa demande en nullité du procès-verbal de constat du 17 juillet 2019.

– débouté la S.A.S. ALTEOR de sa demande tendant à être autorisée à ouvrir le séquestre et faire décrire les documents saisis par huissier de justice le 27 juin 2019.

– dit qu’en utilisant le syntagme ‘ALTÉOR STRATÉGIE’ comme dénomination sociale, sur son site internet et sur divers supports de communication, la S.A.S. ALTEOR STRATÉGIE a commis des actes de contrefaçon de la marque ALTÉOR n° 3875758 dont la S.A.S. ALTEOR est titulaire.

– condamné la S.A.S. ALTEOR STRATÉGIE à payer à la S.A.S. ALTEOR la somme de 160.000 euros en réparation de ses préjudices.

– interdit à la S.A.S. ALTEOR STRATÉGIE de faire usage ou de concéder tout droit d’usage de la dénomination ALTEOR, sous quelque forme et de quelque titre et nature que ce soit, ce dans un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision, et passé ce délai, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, et ce, pendant une durée de trois mois, délai à l’issue duquel il sera de nouveau statué par le juge de l’exécution.

– interdit à la société ALTEOR STRATÉGIE de se prévaloir de la marque ALTEOR à tout événement professionnel relatif au développement d’une activité économique ou plus généralement relatif au secteur du conseil aux entreprises, de la communication, du digital ou du marketing, ce dans un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision, et passé ce délai, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, et ce, pendant une durée de trois mois, délai à l’issue duquel il sera de nouveau statué par le juge de l’exécution.

– interdit à la société ALTEOR STRATÉGIE de publier tout contenu sur support informatique et sur support physique faisant référence au nom ALTEOR dans l’activité de conseil aux entreprises, marketing, communication, organisation d’événements, publicité ou toutes activités accessoires ce dans un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision, et passé ce délai, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, et ce, pendant une durée de trois mois, délai à l’issue duquel il sera de nouveau statué par le juge de l’exécution.

– interdit à la société ALTEOR STRATÉGIE l’usage du nom ALTEOR comme moyen de référencement auprès des moteurs de recherche sur internet, et notamment comme mot clé sélectionné, pour des produits et services dans le domaine du conseil aux entreprises, marketing, communication, organisation d’événement, publicité ou toutes activités accessoires.

– ordonné la radiation du nom de domaine https://alteor-strategie.com appartenant à la société ALTEOR STRATÉGIE ce dans un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision, et passé ce délai, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, et ce, pendant une durée de trois mois, délai à l’issue duquel il sera de nouveau statué par le juge de l’exécution.

– ordonné la fermeture du site internet de la S.A.S. ALTEOR STRATÉGIE ayant comme nom de domaine alteor-strategie.com ainsi que celle de tout site internet qui s’y serait substitué et comportant le mot ‘altéor’.

– ordonné la destruction de tous supports publicitaires ou commerciaux portant la marque ALTÉOR.

– condamné la S.A.S. ALTEOR STRATÉGIE à changer de dénomination sociale en supprimant le mot Altéor, ce dans un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision, passé ce délai, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, et ce, pendant une durée de trois mois, délai à l’issue duquel il sera de nouveau statué par le juge de l’exécution.

– ordonné la publication dans deux journaux ou revues au choix de la S.A.S. ALTEOR, dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision de l’extrait suivant :

‘La S.A.S. ALTEOR STRATÉGIE a été jugée responsable d’actes de contrefaçon de la marque ALTÉOR n° 3875758 dont la S.A.S. ALTEOR est titulaire, en conséquence de quoi elle a été condamnée à verser la S.A.S. ALTEOR la somme de 160.000 euros en réparation de ses préjudices financier et moral’.

– dit que le coût de chaque publication ne pourra excéder 5.000 euros.

– rappelé que les dites publications sont ordonnées aux frais de la S.A.S. ALTEOR STRATÉGIE.

– débouté la S.A.S. ALTEOR de sa demande tendant à la résiliation des lignes téléphoniques portant les numéros 06.10.20.09.35 et 02.99.71.65.48.

– condamné la S.A.S. ALTEOR STRATÉGIE aux dépens.

– condamné la S.A.S. ALTEOR STRATÉGIE à payer à la S.A.S. ALTEOR la somme de 10.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile,

– ordonné l’exécution provisoire.

Appelante de ce jugement, la société COGEDIS FORMATION, anciennement dénommée ALTEOR STRATEGIE, par conclusions du 15 novembre 2023, a demandé à la Cour de :

SUR L’APPEL INCIDENT de la SAS ALTEOR

– REJETER comme irrecevables les prétentions nouvelles de la société ALTEOR de voir porter à 512 000 euros le montant des dommages et intérêts à payer par la société COGEDIS FORMATION en réparation du préjudice ;

– CONFIRMER le jugement du Tribunal Judiciaire de Rennes du 7 novembre 2022 en ce qu’il a :

– Rejeté l’intervention volontaire de Monsieur [Z] [Y] et constaté l’expiration de sa marque française n° 3053642;

– Ecarté des débats les pièces figurant en page 7 à 33 incluses du procès-verbal de constat du 27 juin 2019 ;

– Débouté la SAS ALTEOR de sa demande tendant à être autorisée à ouvrir le séquestre et faire décrire les documents saisis par huissier de justice le 27 juin 2019 ;

– Débouté la SAS ALTEOR de sa demande de mesures complémentaires consistant dans la résiliation des lignes téléphoniques portant les numéros 06 10 20 09 35 et 02 99 71 65 48 ;

SUR L’APPEL PRINCIPAL de la société COGEDIS FORMATION :

– INFIRMER le jugement du Tribunal Judiciaire de Rennes du 7 novembre 2022 en ce qu’il a :

– Débouté la SAS ALTEOR STRATEGIE de sa demande en déchéance de la marque ALTEOR n° 3875758,

– Dit qu’en utilisant le syntagme « ALTEOR STRATEGIE » comme

dénomination sociale, sur son site internet et sur divers supports de communication, la SAS ALTEOR STRATEGIE a commis des actes de contrefaçon de la marque ALTEOR n°3875758 dont la SAS ALTEOR est titulaire,

– Condamné la SAS ALTEOR STRATEGIE à payer à la SAS ALTEOR la somme de 160.000 euros en réparation de ses préjudices,

– Interdit à la SAS ALTEOR STRATEGIE de faire usage ou de concéder tout droit d’usage de la dénomination ALTEOR, sous quelque forme et de quelque titre et nature que ce soit, ce dans un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision, et passé ce délai, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, et ce pendant une durée de 3 mois, délai à l’issue duquel il sera de nouveau staté par le Juge de l’exécution,

– Interdit à la société ALTEOR STRATÉGIE de se prévaloir de la marque ALTEOR à tout événement professionnel relatif au développement d’une activité économique ou plus généralement relatif au secteur du conseil

aux entreprises, de la communication, du digital ou du marketing, ce dans un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision, et passé ce délai, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, et ce pendant

une durée de 3 mois, délai à l’issue duquel il sera de nouveau statué par le juge de l’exécution,

– Interdit à la société ALTEOR STRATEGIE de publier tout contenu sur support informatique et sur support physique faisant référence au nom ALTEOR dans l’activité de conseil aux entreprises, marketing, communication, organisation d’événement, publicité out toutes activités accessoires ce dans un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision, et passé ce délai, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, et ce pendant une durée de trois mois, délai à l’issue duquel il sera de nouveau statué par le Juge de l’exécution,

– Interdit à la société ALTEOR STRATEGIE l’usage du nom ALTEOR comme

moyen de référencement auprès des moteurs de recherche sur internet, et notamment comme mot clé sélectionné, pour des produits et services dans le domaine du conseil aux entreprises, marketing, communication, organisation d’événement, publicité ou toutes activités accessoires.

– Ordonné la radiation du nom de domaine https://alteor-strategie.com

appartenant à la société ALTEOR STRATEGIE ce dans ce dans un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision, et passé ce délai, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, et ce pendant une durée de trois mois, délai à l’issue duquel il sera de nouveau statué par le Juge de l’exécution,

– Ordonné la fermeture du site internet de la SAS ALTEOR STRATEGIE ayant

comme nom de domaine alteor-strategie.com ainsi que celle de toute site internet qui s’y serait substitué et comportant le mot « Altéor »,

– Ordonné la destruction de tous supports publicitaires ou commerciaux portant la marque Altéor,

– Condamné la SAS ALTEOR STRATEGIE à changer de dénomination sociale

en supprimant le mot Altéor, ce dans un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision, et passé ce délai, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, et ce pendant une durée de trois mois, délai à l’issue duquel il sera de nouveau statué par le Juge de l’exécution,

– Ordonné la publication dans deux journaux ou revues au choix de la SAS ALTEOR, dans le délai de deux mois, à compter de la signification de la présente décision de l’extrait suivant :

« La SAS ALTEOR STRATEGIE a été jugée responsable d’actes de contrefaçon de la marque ALTEOR n° 3875758 dont la SAS ALTEOR est titulaire, en conséquence de quoi elle a été condamnée à verser à la SAS ALTEOR la somme de 160.000 euros en réparation de ses préjudices financier et moral ».

– Dit que le coût de chaque publication ne pourra excéder 5.000 euros

– Rappelé que lesdites publications sont ordonnées aux frais de la SAS

ALTEOR STRATEGIE,

– Condamné la SAS ALTEOR STRATEGIE aux dépens,

– Condamné la SAS ALTEOR STRATEGIE à payer à la SAS ALTEOR la somme de 10.000 euros en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

STATUANT À NOUVEAU :

À titre principal,

– PRONONCER la déchéance totale des droits de la société ALTEOR sur la marque française n° 3875758 ALTEOR à compter de la date à laquelle est survenu un motif de déchéance, soit à compter du 17 novembre 2016,

– DÉBOUTER la société ALTEOR de sa demande en concurrence déloyale et parasitaire,

À titre subsidiaire :

– PRONONCER la déchéance partielle des droits de la société ALTEOR sur la marque française n° 3875758 ALTEOR à compter de la date à laquelle est survenu un motif de déchéance, soit à compter du 17 novembre 2016, pour les services suivants : « gestion des affaires commerciales ; administration commerciale ; travaux de bureau ; services d’abonnement à des journaux (pour des tiers) ; conseils en organisation et direction des affaires ; comptabilité ; reproduction de documents ; bureaux de placement ; gestion de fichiers informatiques ; relations publiques »,

– CONSTATER l’absence de risque de confusion entre l’usage de la marque ALTEOR STRATEGIE pour des services de conseils en stratégie d’entreprise et la marque ALTEOR pour services de « Publicité ; diffusion de matériel publicitaire (tracts, prospectus, imprimés, échantillons) ; organisation d’expositions à buts commerciaux ou de publicité ; publicité en ligne sur un réseau informatique ; location de temps publicitaire sur tout moyen de communication ; publication de textes publicitaires ; locations d’espaces publicitaires ; diffusion d’annonces publicitaires »,

– DÉBOUTER la société ALTEOR de sa demande en contrefaçon par usage d’ALTEOR STRATEGIE en relation avec des services de conseils en stratégie,

– CONSTATER l’absence de risque de confusion entre l’usage de la marque ALTEOR pour des services de formation et les services de « Publicité ; diffusion de matériel publicitaire (tracts, prospectus, imprimés, échantillons) ; organisation d’expositions à buts commerciaux ou de publicité ; publicité en ligne sur un réseau informatique ; location de temps publicitaire sur tout moyen de communication ; publication de textes publicitaires ; locations d’espaces publicitaires ; diffusion d’annonces publicitaires »,

– DÉBOUTER la société ALTEOR de sa demande en contrefaçon par usage d’ALTEOR STRATEGIE en relation avec des services de formation,

– CONSTATER que le préjudice de la société ALTEOR relatif à ses gains manqués s’élève à 7524,5 euros,

– CONSTATER que la société appelante n’a tiré aucun parti de la communication de la société ALTEOR,

– DÉBOUTER la société ALTEOR de sa demande de réparation du chef des économies réalisées par la société appelante du fait de l’usage d’ALTEOR STRATEGIE,

– CONSTATER que le préjudice moral de la société ALTEOR s’élève à 1000 euros,

EN TOUT ÉTAT DE CAUSE,

– CONDAMNER Monsieur [Z] [Y] à payer à la société COGEDIS FORMATION la somme de 5.000 euros en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

– CONDAMNER la société ALTEOR à payer à la société COGEDIS FORMATION la somme de 20.000 euros en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Par conclusions du 15 novembre 2023, la société ALTEOR et M. [Z] [Y] ont demandé à la Cour de :

REFORMER le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de Rennes en date du 7 novembre 2022 en ce qu’il a :

– déclaré [Z] [Y] irrecevable en son intervention volontaire et constaté que la marque ALTEOR n°3 053 642 est expirée ;

– écarté des débats les pièces figurant en page 7 à 33 incluses du procès-verbal de constat du 27 juin 2019 ;

– débouté la SAS ALTEOR de sa demande tendant à être autorisée à ouvrir le séquestre et faire décrire les documents saisis par huissier de justice le 27 juin 2019 ;

– condamné la SAS ALTEOR STRATEGIE à payer à la SAS ALTEOR la somme

de 160.000 euros en réparation de ses préjudices ;

Avant dire droit :

– AUTORISER la SCP Bertrand DELANOË à procéder à l’ouverture du séquestre et à établir un procès-verbal de constat contenant la description et la photo des documents saisis suite à l’ordonnance sur requête du 24 juin 2019 ;

Sur le fond :

A titre principal :

DÉCLARER [Z] [Y] irrecevable en son intervention volontaire ;

INTERDIRE à la société COGEDIS FORMATION de faire usage ou de concéder tout droit d’usage de la dénomination ALTEOR, sous quelque forme et de quelque titre et nature que ce soit, et ce, sous astreinte définitive et non comminatoire de 500 euros par jour d’infraction commise dans le délai d’un mois à compter de la signification du jugement de première instance ;

INTERDIRE à la société COGEDIS FORMATION de se prévaloir de la marque ALTEOR à tout événement professionnel relatif au développement d’une activité économique ou plus généralement dans le domaine de la stratégie d’entreprise, la gestion des affaires, à la formation aux entreprises ou dirigeant d’entreprise, au secteur du conseil aux entreprises, de la communication, du digital ou du marketing et ce, sous astreinte définitive et non comminatoire de 500 euros par jour d’infraction commise dans le délai d’un mois à compter de la signification du jugement de première instance;

INTERDIRE à la société COGEDIS FORMATION de publier tout contenu sur support informatique et sur support physique faisant référence au nom ALTEOR dans l’activité de conseil aux entreprises (y compris sous forme de formation), de la gestion et direction des affaires, du marketing, communication, organisation d’événements, publicité ou toutes activités accessoires et ce, sous astreinte définitive et non comminatoire de 500 euros par jour d’infraction commise dans le délai d’un mois à compter de la signification du jugement de première instance ;

INTERDIRE à la société COGEDIS FORMATION l’usage du nom ALTEOR comme moyen de référencement auprès des moteurs de recherche sur internet, et notamment comme mot clé sélectionné pour des produits et services dans le domaine du conseil aux entreprises (y compris sous forme de formation), de la gestion et direction des affaires, du marketing, communication, organisation d’événements, publicité ou toutes activités accessoires ;

ORDONNER la radiation du nom de domaine https://alteor-strategie.com ou de tout autre nom de domaine appartenant à la société COGEDIS FORMATION pour des produits et services dans le domaine du conseil aux entreprises (y compris sous forme de formation), de la gestion et direction des affaires, du marketing, communication, organisation d’événements, publicité ou toutes activités accessoires, dans un délai de dix jours à compter de la signification du jugement de première instance sous peine d’une astreinte définitive de 500 euros par jour de retard ;

ORDONNER la fermeture du site internet ayant comme nom de domaine « alteor-strategie.com » ainsi que celle de tout site internet qui s’y serait substitué et comportant le mot « ALTEOR » dans un délai de dix jours à compter de la signification du jugement de première instance sous peine d’une astreinte définitive de 500 euros par jour de retard ;

CONDAMNER la société COGEDIS FORMATION à changer de nom commercial en supprimant le mot Altéor dans un délai d’un mois à compter de la signification du jugement de première instance sous peine d’une astreinte définitive de 500 euros par jour de retard ;

ORDONNER la résiliation par la société COGEDIS FORMATION des contrats portant sur les lignes téléphoniques 06 10 20 09 35 et 02 99 71 65 48 dans un délai de dix jours à compter de la signification de la décision à intervenir sous peine d’une astreinte définitive de 500 euros par jour de retard;

ORDONNER la destruction de tous supports publicitaires ou commerciaux, notamment plaquettes, brochures, flyers portant la marque ou l’enseigne Altéor ;

CONDAMNER la société COGEDIS FORMATION au paiement de la somme de 512 000 euros en réparation des préjudices subis par la société ALTEOR ;

Subsidiairement :

DIRE ET JUGER que la société COGEDIS FORMATION a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire et engage en conséquence sa responsabilité envers la société ALTEOR ;

CONDAMNER la société COGEDIS FORMATION à payer à la société ALTEOR la somme de 512 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;

INTERDIRE à la société COGEDIS FORMATION tout usage du nom ALTEOR sous quelque forme que soit sous peine d’une astreinte définitive de 500 euros par jour de retard ;

CONDAMNER la société COGEDIS FORMATION à changer de dénomination sociale en supprimant le mot Altéor dans un délai d’un mois à compter de la signification de la décision à intervenir sous peine d’une astreinte définitive de 500 euros par jour de retard ;

ORDONNER la radiation du nom de domaine https://alteor-strategie.com ou de tout autre nom de domaine appartenant à la société COGEDIS FORMATION pour des produits et services dans le domaine du conseil aux entreprises (y compris sous forme de formation), de la gestion et direction des affaires, du marketing, communication, organisation d’événements, publicité ou toutes activités accessoires, dans un délai de dix jours à compter de la signification du jugement de première instance sous peine d’une astreinte définitive de 500 euros par jour de retard ;

ORDONNER la fermeture du site internet ayant comme nom de domaine « alteor-strategie.com » ainsi que celle de tout site internet qui s’y serait substitué et comportant le mot « ALTEOR » dans un délai de dix jours à compter de la signification du jugement de première instance sous peine d’une astreinte définitive de 500 euros par jour de retard ;

ORDONNER la destruction de tous supports publicitaires ou commerciaux, notamment plaquettes, brochures, flyers portant la marque ou l’enseigne Altéor ;

En tout état de cause :

ORDONNER la publication, en entier, de la décision à intervenir dans trois publications périodiques laissées au choix de la société ALTEOR et aux frais de la Société COGEDIS FORMATION ;

CONDAMNER la société COGEDIS FORMATION à verser à la société ALTEOR la somme 25 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre le paiement des entiers dépens ;

REJETER toutes les demandes de la société ALTEOR STRATEGIE comme étant infondées.

MOTIFS DE LA DÉCISION:

Sur l’intervention volontaire de M. [Z] [Y] :

M. [Y] n’est pas titulaire de la marque ALTEOR puisque la marque qu’il avait déposé le 21 septembre 2000 a expiré.

Le titulaire de la marque ALTEOR 3875758, déposée le 17 novembre 2011, est la SAS ALTEOR, dont il est le président.

Cette qualité de président ne se confond pas avec son intérêt à agir personnel, qui en l’espèce n’existe pas.

Le jugement est confirmé en ce qu’il a dit irrecevable son intervention volontaire.

La demande de levée de séquestre :

La société ALTEOR demande à ce que la Cour autorise la SCP Bertrand DELANOË à procéder à l’ouverture du séquestre et à établir un procès-verbal de constat contenant la description et la photo des documents saisis suite à l’ordonnance sur requête du 24 juin 2019.

A la lecture de l’ordonnance rendue sur requête le 24 juin 2019, le président du tribunal judiciaire de Rennes a notamment autorisé un huissier de justice à se rendre à l’événement DYNABUY CONNECT et à saisir tous documents publicitaires, brochures, cartes de visite et tous autres documents qui comporteraient la marque ALTEOR ou les mots ALTEOR STRATEGIE, en ordonnant que ces pièces soient conservées sous séquestre chez l’huissier instrumentaire et en refusant expressément qu’il puisse être procédé à l’ouverture du séquestre sur autorisation judiciaire.

L’ordonnance a été rendue sur le fondement des dispositions de l’article L716-6 du code de la propriété intellectuelle, selon lesquelles il peut être ordonné sur requête de toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou empêcher la poursuite d’actes argués de contrefaçon.

Il s’agissait en l’espèce d’empêcher la société ALTEOR STRATEGIE de participer à un salon professionnel en se prévalant de l’appellation ALTEOR.

La mesure ordonnée a atteint son objectif consistant à empêcher la diffusion des documents argués de contrefaçon.

Elle n’avait aucune visée probatoire et le juge a expressément rejeté toute levée ultérieure du séquestre.

Le demande de levée du séquestre est rejetée.

Sur la demande de déchéance de la marque :

La société ALTEOR STRATEGIE soutient, au visa des dispositions de l’article L716-3 du code de la propriété intellectuelle que la SAS ALTEOR doit être déchue de ses droits sur la marque ALTEOR 3875758, avec effet au 11 novembre 2016, pour défaut d’usage sérieux entre le 14 avril 2015 et le 14 avril 2020, date à laquelle la demande de déchéance a été présentée pour la première fois.

Elle soutient en substance que la société ALTEOR n’utilise pas la dénomination ALTEOR pour représenter ou signaler un produit ou un service mais comme simple dénomination commerciale.

La période significative durant laquelle doit être examiné l’usage sérieux fait de la marque ALTEOR ne fait pas débat.

La SAS ALTEOR est une société holding animant, sous la dénomination ‘GROUPE ALTEOR’ des filiales:

Les filiales sont nombreuses et comprennent notammen t:

– une société EXPRIMER: agence de publicité et de communication

– une société EMOSSION : marketing artistique

– une société ESPACE PROGRAMME : conception d’espaces de vente, de mobilier commercial, de signalétique de vente,

– une société ATELIER LIEGO : bureau de design et d’études, coordination tous corps de métier bâtiment,

– une société ESPACE INDUSTRIE : constructions en bois modulaires à usage d’habitation,

– une société WOOD DESIGN : constructions en bois pour les particuliers,

– une société SEXTANT : organisation de salons, notamment de l’immobilier.

Sont justifiés, sur la période considérée, une communication commune à l’égard du public du ‘GROUPE ALTEOR’: le terme ‘groupe’ n’est pas un élément d’identification juridique, et il s’en déduit que l’emploi du terme ‘GROUPE ALTEOR’ a pour objet de désigner un ensemble uni par une même dénomination significative.

Sont ainsi justifiés :

– d’une communication Facebook pour Noël 2017,

– des voeux de l’année 2016 du Groupe ALTEOR,

– des voeux de l’année 2017 du groupe ALTEOR

– dossier de présentation du salon RDV CONNECT de 2019 dans lequel figure une notice de présentation du ‘GROUPE ALTEOR’, qui organise le salon, en précisant ses objectifs, qui seraient communs à tous les groupes, et en insistant sur des données communes: nombre de collaborateurs, expertises diverses,

– un dossier de présentation du salon IMMEXPO de 2018, organisé par la société SEXTANT ‘GROUPE ALTEOR’

– l’article publicitaire d’une revue spécialisée de 2016 sur la fête organisée par ‘ALTEOR’ pour ses trente ans, qui a permis à ‘l’agence de démontrer son savoir faire dans différents domaine d’expertise’, les spécialités des différentes filiales étant rappelées,

– des invitations à un vernissage organisé par une galerie PHOEBUS dont l’article précédent apprenait qu’elle était désormais la propriété de la société ALTEOR, avec rappel du logo ALTEOR à plusieurs endroits,

– une revue de 2015 intitulée LE BOOK IMMO où les sociétés EXPRIMER et EMOSSIONS apparaissent comme les ‘expertises’ du Groupe ALTEOR.

Enfin, même si la pièce n’a pas date certaine, il est possible, compte tenu des pièces datées figurant au dossier, de prendre en considération la pièce numéro 40 de l’intimée, soit une plaquette de présentation du ‘GROUPE ALTEOR communication’, où l’accent est mis sur ce qui lie entre elles les différentes sociétés du groupe, qui évolueraient dans un même univers et permettrait ‘une communication plus pointue’ (nb: de leurs clients) grâce à la spécialisation des quatre sociétés ou établissements décrits dans la plaquette comme formant le ‘GROUPE ALTEOR’, dont le coeur de métier est celui d’agence publicitaire.

Ces motifs, ainsi que ceux pertinemments développés par le premier juge permettent sans difficulté d’établir un usage sérieux de la marque ALTEOR sur la période litigieuse afin de désigner à la clientèle une prestation de service caractéristique dans les domaines suivants :

‘Publicité ,gestion des affaires commerciales ; administration commerciale ; travaux de bureau ; diffusion de matériel publicitaire (tracts, prospectus, imprimés, échantillons) ; services d’abonnement à des journaux (pour des tiers) ; services d’abonnement à des services de télécommunications pour des tiers ; présentation de produits sur tout moyen de communication pour la vente au détail ;; organisation d’expositions à buts commerciaux ou de publicité ; publicité en ligne sur un réseau informatique ; location de temps publicitaire sur tout moyen de communication ; publication de textes publicitaires ; location d’espaces publicitaires ; diffusion d’annonces publicitaires ; relations publiques’.

En revanche, l’usage sérieux d’une marque ne peut résulter de prestations internes au titulaire de la marque, puisque, ainsi qu’il a été rappelé plus haut, la marque doit être utilisée pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou services protégés par la marque, qui garantit leur authenticité.

Il en résulte que les services rendus par la société holding ALTEOR à ses filiales ne sont pas constitutives d’un usage sérieux de la marque au sens précité.

La charge de la preuve de l’usage sérieux dans toutes les rubriques de la classe 35 repose sur le titulaire de la marque.

Les pièces produites ne permettent pas de retenir cet usage sérieux dans les rubriques suivantes, aucun document ne faisant état de services de ce type proposés par l’un ou l’autre des éléments du ‘GROUPE ALTEOR’:

‘comptabilité ; services de bureaux de placement ;’

Sur cette dernière rubrique (bureau de placement), la diffusion d’annonces de recrutement pour soi-même ne se confond pas avec l’activité de proposition de main-d’oeuvre à autrui.

Les pièces permettent en revanche de considérer un usage sérieux dans les rubriques contestées suivantes :

– travaux de bureau,

– conseils en organisation et direction des affaires,

– gestion de fichiers informatiques,

– reproduction de documents.

En effet, ainsi que le démontrent les documents versés aux débats par les deux parties la frontière est très ténue entre les services ‘gestion des affaires commerciales, administration commerciale’ et ‘conseils en organisation et direction des affaires’, cette dernière rubrique pouvant inclure des conseils en matière commerciale, ou des conseils en matière d’objectifs commerciaux, caractéristiques du métier du GROUPE ALTEOR.

Il en est de même des travaux de bureau, de la reproduction de documents et de la gestion de fichiers informatiques, termes très larges pouvant être des services annexes à des prestations de publicité ou de conseils en communication.

La demande de déchéance de la marque est acceptée pour les services de comptabilité ; services de bureaux de placement et rejetée pour les autres services de la classe 35.

Sur la contrefaçon :

Le premier juge a longuement développé, pages 15, 16, et 17 du jugement, les motifs pour lesquels la contrefaçon pouvait être retenue et notamment, la similarité des activités, la similarité des signes, et le risque de confusion en résultant pour la clientèle de chefs d’entreprise visée par les deux sociétés, ALTEOR (titulaire de la marque) et ALTEOR STRATEGIE désormais COGEDIS FORMATION d’autre part.

Il doit en effet être rappelé qu’au delà des dénominations similaires, des logos avec des couleurs similaires sont utilisés par les parties.

D’autre part, si les parties ont leur sièges sociaux dans des régions différentes (Sud Est pour l’une, Grand Ouest pour l’autre), elles ont toutes deux initié désormais un développement national les conduisant à ouvrir des établissements ou agences sur d’autres points du territoire sur lesquelles elles peuvent se retrouver en concurrence.

Les motifs pertinents du premier juge sont repris à son compte par la Cour, sauf à dire qu’il n’existe ni similarité, ni risque de confusion pour les services ‘comptabilité’ et ‘bureau de placement’, qui au demeurant ne sont plus protégés par la marque.

Dans ses conclusions d’appel, la société COGEDIS FORMATION s’attache principalement à démontrer qu’il ne pourrait y avoir de risque de confusion entre le conseil en stratégie d’entreprise, qui est sa principale activité, et les activités d’agence publicitaire qui sont le métier principal des sociétés du GROUPE ALTEOR.

Un tel argument ne peut être retenu dans la mesure où la pièce numéro 9 de l’intimée confirme l’analyse précédente de la Cour à savoir que la frontière entre les conseils en stratégie d’entreprise et les conseils en communication d’entreprise est ténue sinon poreuse.

La pièce numéro 9 est ainsi une communication internet de la société COGEDIS FORMATION lorsqu’elle s’appelait encore ALTEOR STRATEGIE, et il y est proposé un ‘audit marketing et commercial’, des ‘études et conseils marketing’, un ‘développement par le web’, toutes activités relevant sans difficultés des services protégés par la marque.

Le risque de confusion est patent et la contrefaçon avérée.

S’agissant de l’activité ‘formation’, la pièce numéro 4 de l’intimée est l’inscription au Registre National des Entreprises de la société COGEDIS FORMATION.

Celle-ci y déclare comme activité principale ‘toutes études de marché, tous formations et animations de séminaires, tous conseils et activités annexes en matière de commerce et de marketing, toutes prestations de services en matière d’accompagnement’, c’est à dire une activité principalement tournée vers le marketing, dans laquelle s’insère des prestations de formation.

Compte tenu des services de la classe 35 pour lesquels la marque est protégée, le risque de confusion est difficilement contestable, le marketing étant l’activité essentielle du ‘GROUPE ALTEOR’.

Le risque de confusion est donc certain aussi pour l’activité formation et la contrefaçon avérée compte tenu de la protection de la marque.

Les mesures de réparation :

Les mesures visant à faire cesser la contrefaçon :

Les mesures de restriction d’usage ordonnées par le premier juge sont confirmées et étendues aux activités de conseil aux entreprises dispensées sous forme de formations.

En revanche, aucun motif de protection de la marque ne justifie que soit ordonnée la radiation de tous les noms de domaine https détenus par la société COGEDIS FORMATION, celle-ci étant libre de fournir tous conseils aux entreprises du moment qu’elle n’utilise pas le mot ALTEOR.

La seule radiation du nom de domaine alteor-strategie.com ordonnée par le premier juge est ainsi suffisante à assurer la protection de la marque.

Aucun motif ne justifie non plus qu’il soit ordonné la résiliation des lignes téléphoniques de la société COGEDIS FORMATION, une telle mesure n’étant pas de nature à assurer la protection de la marque ALTEOR

Enfin, la mesure de publication ordonnée par le premier juge est suffisante.

Les mesures indemnitaires :

Les dispositions de l’article L716-4-10 du code de la propriété intellectuelle prévoient que pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :

1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;

2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;

3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.

Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.

L’augmentation de la demande indemnitaire en cause d’appel est une prétention accessoire à la demande indemnitaire initiale et est recevable par application des dispositions 566 du code de procédure civile.

Le préjudice moral :

Ce préjudice a été fixé à 10.000 euros par le premier juge, réparant l’atteinte à la distinctivité de la marque et au regard des développements qui précèdent, sa réalité est incontestable.

Le jugement est confirmé de ce chef.

Le préjudice économique :

Les principes posés par les dispositions de l’article L716-4-10 précitées ne dispensent pas la partie lésée d’apporter la preuve des préjudices lui ayant été causés, le principe de préjudice résultant de la démonstration de la contrefaçon ne se confondant pas avec son quantum.

En l’espèce, s’il a été constaté plus haut que les deux sociétés avaient initié un développement national, aucune démonstration n’est apportée, alors que la société COGEDIS FORMATION est située dans le Finistère et la société ALTEOR à [Localité 4], que de manière effective la société COGEDIS FORMATION, lorsqu’elle utilisait la dénomination ALTEOR STRATEGIE, ait conclu des marchés empiétant sur la clientèle de la société ALTEOR.

Notamment, aucune des parties n’a pris la peine de d’indiquer le lieu de situation de chacune de ses agences ou établissement pour les comparer avec ceux de l’autre partie, alors même que le conseil aux entreprises, même dédié au marketing, à la communication et à la publicité, nécessite pour de nombreux aspects une certaine proximité avec le client, ne s’exerce pas totalement de manière dématérialisée et exige des relations de proximité avec les entreprises clientes, qui souvent souhaitent des relations personnalisées.

D’autre part, la présente juridiction n’est pas le juge de l’exécution de la décision de première instance tandis que la société COGEDIS FORMATION ne peut être tenue débitrice que de ses propres actions et non de celles des autres sociétés du groupe dont elle fait partie.

Ensuite, la société ALTEOR ne verse aux débats aucun état comptable, ce dont il résulte l’absence de base certaine pour tenter d’apprécier un préjudice d’exploitation, tandis que sa pièce numéro 52 constitue des lignes d’écritures comptables non certifiées par un professionnel du chiffre, censées justifier de ses dépenses de communication et de développement.

Elle n’a pas non plus tenté d’obtenir par un incident les états comptables de la société COGEDIS FORMATION et considère que son préjudice peut se calculer au regard de l’augmentation de chiffre d’affaire apparaissant en 2016 au RCS pour les comptes déposés par COGEDIS FORMATION.

Alors que cette dernière utilisait auparavant une dénomination différente, elle s’est appelée ALTEOR STRATEGIE à compter de 2016 et a vu croître son chiffre d’affaires de 100.000 euros sur une année.

La société ALTEOR considère qu’il peut être considéré que 50% de cette augmentation est imputable à la contrefaçon de sa marque, renouvelée pour chaque année postérieure.

Il doit être relevé que le premier juge, qui a fixé un montant de préjudice de 150.000 euros, avait relevé le peu de données fournies.

La société COGEDIS FORMATION, pour sa part, verse aux débat en cause d’appel une pièce numéro 18 en noir et blanc contenant une liste de clients dont la couleur – non visible par la Cour – serait censée indiquer l’origine par une autre société de son groupe (expertise comptable, formation etc …).

L’attestation de M. [H], expert comptable exerçant en qualité de Directeur Adjoint de l’Association COGEDIS ne peut être retenue comme probante en raison de la proximité entre la société COGEDIS FORMATION et l’association COGEDIS.

La société COGEDIS FORMATION ne verse donc aux débat aucun état comptable et les chiffres qu’elle invoque dans ces conclusions ne sont confirmés par aucune pièce.

Dès lors, les dispositions de l’article L716-4-10 précité permettant une indemnisation forfaitaire et le premier juge ayant suivi un raisonnement cohérent pour s’approcher le plus possible des gains tirés de l’usage de la marque par le contrefaisant, le jugement est confirmé en ce qu’il a fixé à 150.000 euros l’indemnisation de la société ALTEOR.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

La société COGEDIS FORMATION, qui succombe majoritairement dans son recours, supportera la charge des dépens et paiera à la société ALTEOR la somme de 10.000 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Infirme le jugement déféré en ce qu’il a débouté la société ALTEOR STRATEGIE désormais dénommée COGEDIS FORMATION de sa demande de déchéance de la marque ALTEOR 3875758 pour les services de la classe 35 ‘comptabilité’ et ‘bureau de placement’.

Statuant à nouveau :

Prononce la déchéance de la marque ALTEOR 3875758 pour les services ‘comptabilité’ et ‘bureau de placement’ de la classe 35.

Confirme pour le solde le jugement déféré.

Y ajoutant :

Dit que l’interdiction faite à la société ALTEOR STRATEGIE désormais dénommée COGEDIS FORMATION de ‘publier tout contenu sur support informatique et sur support physique faisant référence au nom ALTEOR dans l’activité de conseil aux entreprises, marketing, communication, organisation d’événements, publicité ou toutes activités accessoires, ce dans un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision, et passé ce délai, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, et ce, pendant une durée

de trois mois, délai à l’issue duquel il sera de nouveau statué par le juge de l’exécution’ est étendue à l’activité de conseil aux entreprise délivrés sous forme de formations.

Rejette le surplus des demandes.

Condamne la société COGEDIS FORMATION aux dépens d’appel.

17

Condamne la société COGEDIS FORMATION à payer à la société ALTEOR la somme de 10.000 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel.

Le Greffier, Le Président,

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x