Le tribunal a retenu la responsabilité contractuelle de la SARL Bironneau Paysage pour manquement à l’obligation de livrer un ouvrage exempt de vice compte tenu du caractère dissociable de l’ouvrage des lames de bois ; qu’aucune prescription ne pouvait être invoquée par la société Valcke En Zoon compte tenu de la suspension des délais pendant l’expertise ; que le bois était en principe adapté à son usage au vu du certificat de traitement établi, mais qu’il était certain que, soit le traitement autoclave avait été mal réalisé, soit le bois vendu avait été traité trop récemment ; que la responsabilité du poseur était toutefois mineure dans la survenance du sinistre.
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ARRÊT DU
22 Février 2023
DB/CR
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N° RG 21/00874
DBVO-V-B7F-C5Y6
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SA VALCKE EN ZOON (GARDIVAL)
C/
[R] [Y],
[U] [B],
MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES,
S.A. MMA IARD,
S.A.R.L.
BIRONNEAU PAYSAGE
——————
GROSSES le
à
ARRÊT n°
COUR D’APPEL D’AGEN
Chambre Civile
LA COUR D’APPEL D’AGEN, 1ère chambre dans l’affaire,
ENTRE :
SA VALCKE EN ZOON (GARDIVAL)
Société anonyme de droit belge dont le siège social est :
[Adresse 5]
[Adresse 5]
BELGIQUE
Représentée par Me Guy NARRAN, avocat postulant inscrit au barreau d’AGEN et par Me Antoine GAUTIER SAUVAGNAC, avocat plaidant inscrit au barreau de PARIS
APPELANTE d’un Jugement du tribunal d’AGEN en date du 06 Avril 2021, RG 18/00830
D’une part,
ET :
Monsieur [R] [Y]
né le 08 Octobre 1966 à [Localité 6]
de nationalité Française
Madame [U] [B]
née le 19 Janvier 1967 à [Localité 3]
de nationalité Française
Domiciliés :
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentés par Me Rémy CERESIANI, avocat inscrit au barreau d’AGEN
Société d’assurance mutuelle
MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
[Adresse 1]
[Adresse 1]
S.A. MMA IARD
[Adresse 1]
[Adresse 1]
S.A.R.L. BIRONNEAU PAYSAGE
[Adresse 7]
[Adresse 7]
Représentées par Me Hélène GUILHOT, avocate inscrite au barreau d’AGEN
INTIMÉES
D’autre part,
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 05 Décembre 2022, sans opposition des parties, devant la cour composée de :
Dominique BENON, Conseiller faisant fonction de président, qui a fait un rapport oral à l’audience
Cyril VIDALIE, Conseiller
qui en ont rendu compte dans le délibéré de la cour composée outre eux-mêmes de :
Benjamin FAURE, Conseiller
en application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile et après qu’il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés,
Greffières : Lors des débats : Charlotte ROSA, adjointe administrative faisant fonction de greffière
Lors de la mise à disposition : Nathalie CAILHETON, greffière
ARRÊT : prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
* * *
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FAITS :
Selon devis accepté le 23 novembre 2011, [R] [Y] et [U] [B] ont passé commande auprès de la SARL Bironneau Paysage (assurée auprès de la SA MMA IARD et de la société d’assurance mutuelle MMA IARD Assurances Mutuelles) pour la maison située ‘[Adresse 4] (47) dont ils étaient alors propriétaires, de travaux d’aménagement extérieurs comprenant, notamment, la réalisation d’une terrasse avec surface en bois de pin à l’arrière de leur maison sur le pourtour de leur piscine et au niveau du pool house.
Le prix total de la prestation a été fixé à 35 000 Euros TTC.
La SARL Bironneau Paysage s’est fournie en bois d’essence ‘pin rouge du Nord’ auprès du fabricant belge la SA Valcke En Zoon, exerçant sous l’appellation Gardival.
La commande portait sur des ‘planches en pin anti-dérapantes, grande rainure, 28 x 145″ pour un prix de 3 695,76 Euros.
Les travaux ont été réalisés, terminés le 17 avril 2012, et payés pour un coût réduit d’un commun accord à 33 437 Euros TTC dans des conditions en valant acceptation tacite sans réserve.
Constatant, dès l’été suivant, que les lames de bois généraient des échardes, M. [Y] et Mme [B] ont fait intervenir la SARL Bironneau Paysage qui a procédé au changement de lames sur une surface de 90 m².
Les désordres sont néanmoins apparus de nouveau.
Le 4 juin 2015, M. [Y] et Mme [B] ont fait constater, par Me [G], huissier de justice, que les lames de pin présentaient d’importantes échardes se soulevant, pouvant être pointues, et que la terrasse en bois se déformait.
Le cabinet Ixi, mandaté par leur assureur de protection juridique, a établi un rapport le 2 juillet 2015 constatant la réalité des désordres.
Par acte du 2 décembre 2015, M. [Y] et Mme [B] ont fait assigner la SARL Bironneau Paysage devant le juge des référés qui, par ordonnance du 19 janvier 2016, a ordonné une expertise des désordres confiée à [J] [D].
Par ordonnance du 17 janvier 2017, les opérations d’expertise ont été déclarées communes à la société Valcke En Zoon.
M. [D] a établi son rapport le 1er février 2018.
Il a constaté la réalité des désordres et estimé le coût de réfection à 24 219 Euros TTC.
Par acte délivré les 13 et 16 avril 2018, M. [Y] et Mme [B] ont fait assigner la SARL Bironneau Paysage, la société Valcke En Zoon, et la SA MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles devant le tribunal de grande instance d’Agen afin d’être indemnisés des désordres qui affectent la terrasse.
Par jugement rendu le 6 avril 2021, le tribunal judiciaire d’Agen a :
– dit que la SARL Bironneau Paysage a engagé sa responsabilité à l’égard de [R] [Y] et [U] [B],
– dit que la société Valcke En Zoon (Gardival) a engagé sa responsabilité à l’égard de [R] [Y] et [U] [B],
– dit que les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles doivent garantir ce sinistre en qualité d’assureurs de la SARL Bironneau Paysage,
– condamné en conséquence in solidum la SARL Bironneau Paysage, la société Valcke En Zoon (Gardival), la société MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles à payer à [R] [Y] et [U] [B] les sommes suivantes :
* 24 219 Euros au titre des travaux de reprise de la terrasse,
* 10 000 Euros au titre du préjudice de jouissance,
– condamné in solidum la SARL Bironneau Paysage, la société Valcke En Zoon (Gardival), la société MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles aux dépens y compris ceux de référé et les frais d’expertise judiciaire,
– condamné la SARL Bironneau Paysage, la société Valcke En Zoon (Gardival), la société MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles à payer à [R] [Y] et [U] [B] la somme de 3 000 Euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que dans les rapports entre co-obligés, et au besoin les y a condamné, la charge finale des condamnations y compris au titre des dépens et sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile sera répartie ainsi qu’il suit :
* 80 % pour la société Valcke En Zoon (Gardival)
* 20 % pour la SARL Bironneau Paysage et ses assureurs MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles,
– ordonné l’exécution provisoire,
– rejeté le surplus des demandes.
Le tribunal a retenu la responsabilité contractuelle de la SARL Bironneau Paysage pour manquement à l’obligation de livrer un ouvrage exempt de vice compte tenu du caractère dissociable de l’ouvrage des lames de bois ; qu’aucune prescription ne pouvait être invoquée par la société Valcke En Zoon compte tenu de la suspension des délais pendant l’expertise ; que le bois était en principe adapté à son usage au vu du certificat de traitement établi, mais qu’il était certain que, soit le traitement autoclave avait été mal réalisé, soit le bois vendu avait été traité trop récemment ; que la responsabilité du poseur était toutefois mineure dans la survenance du sinistre.
Par acte du 13 septembre 2021, la SA Valcke En Zoon a déclaré former appel du jugement en désignant la SA MMA IARD, la société MMA IARD Assurances Mutuelles, [R] [Y], [U] [B] et la SARL Bironneau Paysage en qualité de parties intimées et en indiquant que l’appel porte sur les dispositions du jugement qui ont :
– dit que la société Valcke En Zoon (Gardival) a engagé sa responsabilité à l’égard de [R] [Y] et [U] [B],
– condamné en conséquence in solidum la SARL Bironneau Paysage, la société Valcke En Zoon (Gardival), la société MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles à payer à [R] [Y] et [U] [B] les sommes suivantes :
* 24 219 Euros au titre des travaux de reprise de la terrasse,
* 10 000 Euros au titre du préjudice de jouissance,
– condamné in solidum la SARL Bironneau Paysage, la société Valcke En Zoon (Gardival), la société MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles aux dépens y compris ceux de référé et les frais d’expertise judiciaire,
– condamné la SARL Bironneau Paysage, la société Valcke En Zoon (Gardival), la société MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles à payer à [R] [Y] et [U] [B] la somme de 3 000 Euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que dans les rapports entre co-obligés, et au besoin les y a condamné, la charge finale des condamnations y compris au titre des dépens et sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile sera répartie ainsi qu’il suit :
* 80 % pour la société Valcke En Zoon (Gardival)
* 20 % pour la SARL Bironneau Paysage et ses assureurs MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles,
– ordonné l’exécution provisoire,
– rejeté le surplus des demandes.
La clôture a été prononcée le 26 octobre 2022 et l’affaire fixée à l’audience de la Cour du 5 décembre 2022.
* * *
PRETENTIONS ET MOYENS :
Par conclusions d’appelante notifiées le 13 décembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l’argumentation, la SA de droit belge Valcke En Zoon présente l’argumentation suivante :
– Elle a fourni des matériaux conformes :
* la SARL Bironneau Paysage, professionnel de la conception de jardins et piscines paysagés, lui a commandé des ‘planches en pin antidérapante, grande rainure, 28 x 145″ qui ont été traitées selon les normes applicables, notamment en autoclave.
* elle n’avait pas connaissance de l’usage de ces produits que se proposait de faire sa cliente, qui peuvent être utilisés pour des portes en bois, des panneaux, des bacs à fleurs ou des bûchers, et aucun cahier des charges n’a été porté à sa connaissance.
* en tout état de cause, ce type de bois ne présente pas de contre-indication à un usage de terrasse.
* aucune réserve n’a été émise par la SARL Bironneau Paysage lors de la livraison de la marchandise.
– Les désordres ne lui sont pas imputables :
* le bois est un matériau vivant qui évolue avec le temps et peut générer des échardes.
* le matériau est garanti contre le pourrissement à condition qu’il n’ait pas été scié ou perforé, condition non réunie, la SARL Bironneau Paysage ayant procédé à des découpes sans l’en informer.
* elle n’est pas responsable des désaffleurements.
– Les indemnisations accordées sont excessives : l’expert a calculé le coût de réfection sur la base d’un remplacement de l’ensemble des lames, soit 255 m², alors qu’il faut seulement en remplacer une partie.
– La SARL Bironneau Paysage doit se voir imputer une part de responsabilité plus importante :
* l’expert a mis en évidence un défaut de coupe, une trop grande longueur de coupe, et une mise en place trop rapide.
* la responsabilité de cette société, qui n’a pas pris conseil auprès d’elle, est engagée.
Au terme de ses conclusions, elle demande à la Cour de :
– infirmer le jugement en ce qu’il a prononcé condamnation à son encontre,
– débouter M. [Y] et Mme [B] de leurs demandes,
– subsidiairement :
– fixer une nouvelle répartition de la charge finale de la dette,
– en toutes hypothèses :
– condamner M. [Y] et Mme [B] à lui payer la somme de 10 000 Euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et mettre les dépens à leur charge.
*
* *
Par dernières conclusions notifiées le 14 juin 2022, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l’argumentation, [R] [Y] et [U] [B] présentent l’argumentation suivante :
– La responsabilité de la SARL Bironneau Paysage est engagée :
* la responsabilité décennale peut être invoquée compte tenu de la nature des travaux qui ont nécessité, démolition, terrassement, empierrement, de sorte qu’il y a eu construction d’un ouvrage au sens de l’article 1792 du code civil.
* les dommages sont de trois types : échardes, pourrissement, désaffleurements, qui rendent l’ouvrage impropre à sa destination.
* subsidiairement, la responsabilité contractuelle de cette société peut être retenue pour manquement à l’obligation de délivrer un ouvrage exempt de vice et de mettre en place des matériaux adaptés, alors que le ‘pin rouge du Nord’ ne se prête pas à une installation au bord d’une piscine.
– La responsabilité contractuelle de la société Valcke En Zoon est également engagée :
* ils disposent d’une action contractuelle directe contre cette société qui n’a pas fourni un matériau adapté aux tours de piscine.
* cette société ne peut opposer le fait que les bois ont été sciés et perforés, ce qui relève de l’usage normal de ces planches.
– Les indemnisations accordées doivent être augmentées :
* le coût de réfection doit être assorti de l’indice BT 01.
* ils ont été privés de la période d’utilisation de la piscine.
* la maison a été vendue le 23 novembre 2021, mais il a été convenu avec les acheteurs que les vendeurs conservent la charge de toute procédure et qu’ils ne les subrogent pas dans leur action en responsabilité.
Au terme de leurs conclusions, ils demandent à la Cour de :
– réformer le jugement sur le montant des indemnités qui leur ont été allouées,
– condamner in solidum la SARL Bironneau Paysage, la SA Valcke En Zoon (Gardival), la SA MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles à leur payer :
* 24 219 Euros au titre du coût des travaux avec indexation sur l’indice BT 01 depuis février 2018,
* 17 000 Euros en réparation du préjudice de jouissance,
– subsidiairement,
– confirmer le jugement,
– en tout état de cause :
– confirmer les dispositions du jugement sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile, et l’attribution des dépens,
– rejeter les demandes présentées par les autres parties,
– condamner in solidum la SARL Bironneau Paysage, la SA Valcke En Zoon (Gardival), la SA MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles à leur payer les somme de 7 000 Euros + 7 000 Euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et mettre les dépens à leur charge.
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* *
Par dernières conclusions notifiées le 7 juin 2022, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l’argumentation, la SARL Bironneau Paysage, la SA MMA IARD et la société d’assurance mutuelle MMA IARD Assurances Mutuelles présentent l’argumentation suivante :
– La garantie décennale n’est pas applicable :
* les désordres portent sur des lames de bois constituant un élément dissociable de l’ouvrage pouvant être déposées sans atteinte aux fondations.
* les désordres ont une nature intermédiaire de sorte qu’ils n’engagent la responsabilité de l’entreprise que pour faute prouvée, en l’espèce inexistante.
– La responsabilité des désordres incombe à la société Valcke En Zoon :
* l’expert a conclu que les matériaux de classe IV fournis par cette société présentent des défauts de nature différente, qui ont également affecté les lames remplacées.
* les désordres ne relèvent pas d’une mauvaise pose, mais d’un défaut du matériau qui a été mis en vente trop tôt après être sorti de l’autoclave.
* cette société ne lui a pas indiqué que les lames en question n’auraient pas été adaptées à un pourtour de terrasse, alors que dans son catalogue publicitaire, elles présentent des lames installées en pourtour d’une piscine.
* les quelques pourrissements qui ont été constatés ne résultent pas de la pose des lames et le désaffleurement est insignifiant.
* les défauts de coupes sont imputables à l’arrêt des travaux notifié par M. [Y].
* la société Valcke En Zoon devra la relever indemne de toute éventuelle condamnation pour un montant supérieur aux 80 % évalués par le premier juge.
– L’indemnisation sollicitée pour le préjudice de jouissance est excessive :
* les quelques échardes n’ont pas empêché M. [Y] et Mme [B] de profiter tant de la terrasse que de la piscine.
* tout au plus faut-il éviter de s’y promener pieds nus.
* le jugement a été exécuté et les sommes allouées ont été versées, de sorte que tout préjudice a cessé.
Au terme de leurs conclusions, elles demandent à la Cour de :
– rejeter l’appel formé par la SA Valcke En Zoon (Gardival) et l’appel incident de M. [Y] et Mme [B],
– infirmer le jugement en ses dispositions les concernant,
– rejeter les demandes présentées à l’encontre de la SARL Bironneau Paysage,
– subsidiairement,
– réduire les demandes à de plus justes proportions,
– condamner la SA Valcke En Zoon à les garantir dans une proportion supérieure à 80 %,
– condamner toute partie succombante à leur payer la somme de 5 000 Euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
* * *
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MOTIFS :
1) Sur la responsabilité de la SARL Bironneau Paysage :
a : principe :
Aux termes de l’article 1792 du code civil, tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination.
En l’espèce, le devis accepté le 23 novembre 2011 indique que la SARL Bironneau Paysage a procédé aux travaux suivants pour la réalisation de la terrasse en litige :
– démolition de béton avec évacuation des produits à la décharge,
– implantation et terrassement avec nivellement des terres,
– ouverture de tranchées pour fondations,
– mise en oeuvre de béton avec ferraillage,
– élévation de blocs creux,
– poteaux raidisseurs en béton armé tous les 2 m,
– chaînage horizontal armé,
– crépis,
– façons de gablons,
– empierrement calcaire,
– géotextile,
– pose du plancher en pin,
– garde-corps.
Les travaux en question ont consisté, non pas seulement à poser des lames de bois, mais à réaliser une terrasse complète avec ses fondations en béton, avec utilisation des techniques de gros-oeuvre du bâtiment.
La terrasse constitue ainsi un ouvrage au sens de l’article 1792 du code civil et les lames de pin ne peuvent en être considérés comme des éléments d’équipements.
En effet, il s’agit d’une matière première utilisée comme matériau de surface de la terrasse destinée à assurer sa finition, et qui en fait partie intégrante par vissage.
Ensuite, l’expert judiciaire a constaté que la surface en bois de la terrasse présente des échardes, des fissurations et détériorations, des noeuds avec éclatement et creusement du bois, des taches générées par des remontées de résine, et un pourrissement avancé de quelques planches.
Ces désordres, et plus particulièrement la présence d’échardes de bois, rendent la terrasse impropre à son usage.
Il s’ensuit que la SARL Bironneau Paysage est responsable de plein droit des désordres envers M. [Y] et Mme [B], maîtres de l’ouvrage, en application de l’article 1792 du code civil.
Le jugement qui a retenu la responsabilité contractuelle de cette société doit être réformé sur ce point, mais confirmé sur la condamnation de cette société avec ses assureurs.
b : préjudices :
En premier lieu, le tribunal a justement mis à la charge de la SARL Bironneau Paysage la somme de 24 219 Euros TTC correspondant au coût de réfection de la terrasse, tel que calculé par l’expert qui a mis en évidence la nécessité de déposer le plancher existant et de le remplacer, en conservant les lambourdes.
Il sera seulement ajouté l’indexation sur l’indice symbole BT 01 du 1er février 2018 jusqu’à ce jour.
En second lieu, il est acquis que de l’été 2013 à l’été 2021 (la propriété ayant été vendue à l’automne 2021), c’est à dire pendant 9 saisons de baignade, les désordres ont provoqué un trouble de jouissance à M. [Y] et Mme [B].
Ainsi, si la baignade dans la piscine a pu se faire normalement, M. [Y] et Mme [B] ont néamoins été contraints de prendre des précautions, par exemple avec de jeunes enfants, en veillant à ce que les utilisateurs ne se promènent pas pieds nus autour de la piscine lors des baignades.
En outre, en dehors de s’y promener pieds nus, ils ont pu utiliser la terrasse.
Ce trouble de jouissance sera indemnisé par une somme de 600 Euros par année, soit 5 400 Euros.
Le jugement sera réformé sur le montant alloué.
2) Sur l’action de M. [Y] et Mme [B] à l’encontre de la Société Valcke En Zoon :
Vu l’article 1641 du code civil,
L’expert judiciaire a constaté que les désordres ne concernent que la partie supérieure de la terrasse, c’est-à-dire les planches de pin qui ont été posées.
Il a remarqué qu’en principe, ce type de bois ‘pin rouge du Nord’ ‘du fait de son traitement autoclave, est traité contre le pourrissement et les insectes’ de sorte qu’il est anormal qu’il se gorge d’eau en partie superficielle en hiver et qu’il génère des échardes en été.
Il a également remarqué que les désordres étaient particulièrement accentués pour les planches exposées au soleil, et que la partie abritée de la terrasse en bois ‘présente moins de désordres’et a expliqué qu’il s’agit pourtant, dans le catalogue du fabricant, de bois de classe IV destiné, notamment, à une utilisation extérieure.
Il a interrogé la société Valcke En Zoon sur le procédé de fabrication du lot de planches posé chez M. [Y] et Mme [B].
L’expert a finalement identifié ainsi les causes possibles des désordres :
– bois inadapté à l’usage de terrasse extérieure,
– mauvais traitement autoclave,
– mise en vente trop rapide des lames après autoclave.
Il a toutefois privilégié la dernière cause en retenant que ce type de désordre est ‘fréquent lorsque le bois traité en classe IV est mis en oeuvre alors qu’il sort tout juste de l’autoclave’ car il est alors saturé en eau.
Il l’a expressément indiqué en réponse à un dire de la société Valcke En Zoon dans les termes suivants ‘ce bois a été mis en vente beaucoup trop rapidement après imprégnation’.
C’est ensuite à juste titre que le tribunal a rappelé que cette société répond, envers M. [Y] et Mme [B], utilisateurs finals, du vice interne du matériau qu’elle a commercialisé, étant précisé que la société Valcke En Zoon ne saurait valablement opposer que les planches de pin ont été sciées dès lors que la pose de ce type de matériau pour composer une terrasse impose d’en scier certaines pour les adapter à la surface couverte.
D’ailleurs, la documentation technique de cette société ne prohibe pas le sciage de tels produits.
Le jugement qui a condamné in solidum la société Valcke En Zoom avec la SARL Bironneau Paysage et ses assureurs doit être confirmé, mais reformulé.
3) Sur la contribution à la dette :
Comme indiqué supra, l’expertise a mis en évidence que la cause majeure des désordres provient du vice des lames de pin, commercialisées trop rapidement après leur passage en autoclave.
Si M. [D] a identifié quelques malfaçons dans la pose imputables à la SARL Bironneau Paysage (découpe sans traitement des embouts, désaffleurements provoqués par un défaut de pose des lambourdes), il s’agit de défauts très mineurs, comme il l’a indiqué dans les termes suivants ‘ces désordres sont minimes en considération de la qualité du bois, et hormis les deux zones de pourrissement’.
Dès lors, la responsabilité du sinistre doit être imputée à la société Valcke En Zoon à hauteur de 90 %.
Le jugement sera réformé en ce sens.
Enfin, l’équité nécessite de condamner l’appelante à payer, en cause d’appel, à M. [Y] et Mme [B], la somme de 4 000 Euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
L’équité n’impose pas l’application de ce texte au profit d’autres parties.