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En matière de diffamation sur Youtube, une mesure de blocage ou retrait de contenus doit être proportionnée et mise en balance avec la liberté d’expression. Par ailleurs, sans l’identification des auteurs, il ne peut être envisagé de procéder au retrait pur et simple des propos litigieux.
En l’espèce, les premiers juges ont justement relevé que l’action engagée en application des dispositions de l’article 6.I.8 de la LCEN oppose, non pas la personne qui s’estime diffamée à la personne qui l’aurait diffamée mais la personne s’estimant diffamée aux hébergeurs du contenu critiqué. Ainsi aucun débat contradictoire n’est rendu possible pour évaluer la réalité de l’atteinte.
Les premiers juges ont valablement retenu que «’seul un abus caractérisé de la liberté d’expression peut justifier que le juge prenne des mesures telles qu’un retrait de contenu ou un blocage de sites, mesures devant être adaptées et proportionnées au dommage dont la réalisation ou l’imminence est reconnue dès lors qu’elles portent atteinte a la liberté fondamentale qu’est la liberté d’expression.’»
Malgré le caractère diffamatoire et injurieux des propos allégué par les appelants et justement repris par le tribunal judiciaire de Paris, en l’absence de contradiction possible de la part des auteurs des propos qui seraient susceptibles de les avoir mis en ligne, la cour a fait sienne l’appréciation du tribunal selon laquelle la mesure de retrait n’était pas proportionnée à l’atteinte ainsi envisagée à la liberté d’expression
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 2 – Chambre 7
ARRET DU 31 MAI 2023
(n° 14/2023, 7 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/09327 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFZ3Y
Décision déférée à la cour : Jugement du 20 avril 2022 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J.EXPRO, JCP de Paris RG n° 22/51815
APPELANTS
Monsieur [F] [I]
[Adresse 1]
[Localité 8]
né le [Date naissance 4] 1959 à [Localité 13]
Représenté par Maître Jean-Didier MEYNARD de la SCP BRODU – CICUREL – MEYNARD – GAUTHIER – MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P240, avocat plaidant
Assisté de Maître Luc BROSSOLLET et Maître Olivier D’ANTIN, avocats au barreau de PARIS, toque : P336, substitués par Maître BAILLY Margot, avocat au barreau de PARIS, toque : P336, avocat plaidant
Monsieur [E] [R]
[Adresse 6]
[Localité 9]
né le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 9]
Représenté par Maître Jean-Didier MEYNARD de la SCP BRODU – CICUREL – MEYNARD – GAUTHIER – MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P240, avocat postulant
Assisté de Maître Virginie TESNIERE du cabinet NOUVELLES, avocat au barreau de PARIS, toque : P12, avocat plaidant
Monsieur [H] [Z]
[Adresse 12]
[Localité 9]
né le [Date naissance 3] 1948 à [Localité 14] (93)
Représenté par Maître Jean-Didier MEYNARD de la SCP BRODU – CICUREL – MEYNARD – GAUTHIER – MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P240, avocat postulant
Assisté de Maître Luc BROSSOLLET et Maître Olivier D’ANTIN, avocats au barreau de PARIS, toque : P336, substitués par Maître BAILLY Margot, avocat au barreau de PARIS, toque : P336, avocat plaidant
Monsieur [U] [P]
[Adresse 5]
[Localité 9]
né le [Date naissance 7] 1956 à [Localité 9]
Représenté par Maître Jean-Didier MEYNARD de la SCP BRODU – CICUREL – MEYNARD – GAUTHIER – MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P240, avocat postulant
Assisté de Maître Vincent TOLEDANO, avocat au barreau de PARIS, toque : A859, avocat plaidant
INTIMEE
Société GOOGLE IRELAND LIMITED société de droit irlandais agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 10] (IRLANDE)
N° SIRET : 368 047
Représentée par Maître Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34, avocat postulant
Assisté de Maître Alexandra NERI de la société HERBERT SMITH FREEHILLS, avocat au barreau de PARIS, toque : J25, substituée par Maître Laure CARDINET de la société HERBERT SMITH FREEHILLS, avocat au barreau de PARIS, toque : J25, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 19 avril 2023, en audience publique, devant la cour composée de :
M. Jean-Michel AUBAC, président
Mme Anne RIVIERE, assesseur
un rapport a été présenté à l’audience par Mme RIVIERE dans les conditions prévues par les articles 804 et 805 du code de procédure civile.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Jean-Michel AUBAC, président
Mme Anne RIVIERE, assesseur
Mme Anne CHAPLY, assesseur
Greffier, lors des débats : Mme Margaux MORA
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Jean-Michel AUBAC, président, et par Margaux MORA, greffier, présente lors de la mise à disposition.
Vu l’assignation, selon la procédure dite accélérée au fond délivrée par [F] [I], [E] [R] et [H] [Z] le 4’février 2022 devant le tribunal judiciaire de Paris à l’encontre de la société GOOGLE IRELAND LIMITED qui demande, au visa des articles’481-l du code de procédure civile, 6.1.2, 6.I.5, 6.I.8, 6.II, 6.III de la loi pour la confiance en l’économie numérique du 21’juin 2004 (LCEN) telle que modifiée par la loi n°’2021-1109 du 24’août 2021, le décret n°’202 l-1362 du 20’octobre 2021, l’article L.34-I du code des postes et des télécommunications électroniques, l’article 29 alinéa 1er et 32 alinéa 1er du 29’juillet 1881′:
– de dire et juger que le maintien en ligne des propos reproduits dans l’acte introductif d’instance publiés sur la chaîne YouTube ‘LES DOSSIERS DU ROCHER’, dont le service est exploité par la société GOOGLE IRELAND LIMITED, constitue un dommage occasionné par le contenu d’un service de communication au public en ligne qu’il convient de faire cesser dès lors que ces propos sont manifestement constitutifs du délit de diffamation publique envers un particulier prévu et réprimé par les articles’29 alinéa 1er et 32 alinéa 1er de la loi du 29’juillet 1881,
– d’ordonner à la société GOOGLE IRELAND LIMITED de supprimer lesdits propos sous astreinte de 2’000’euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir,
– d’ordonner à la société GOOGLE IRELAND LIMITED de communiquer sous astreinte de 1’000’euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir, les données complètes d’identification et de connexion de la chaîne YouTube ‘LES DOSSIERS DU ROCHER’,
– de condamner la société GOOGLE IRELAND LIMITED à verser à chacun des demandeurs la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– de condamner ladite société aux entiers dépens,
– de constater que l’exécution provisoire est de droit et que rien ne justifie qu’elle soit écartée.
Vu le jugement contradictoire rendu le 20’avril 2022 par le tribunal judiciaire de Paris selon la procédure accélérée au fond qui a’:
– reçu [U] [P] en son intervention volontaire,
– rejeté la demande tendant à la suppression des propos contenus dans les supports incriminés, publiés sur la plateforme YouTube «’LES DOSSIERS DU ROCHER’»,
– enjoint à la société GOOGLE IRELAND LIMITED de communiquer dans les sept jours à compter de la signification du présent jugement à Maître [Y], conseil de [F] [I], [H] [Z] et [E] [R], requérants, les données complètes d’identification et de connexion de la chaîne YouTube «’LES DOSSIERS DU ROCHER’» et notamment’:
les nom et prénom, la date et le lieu de naissance ou la raison sociale ainsi que les nom et prénom, date et lieu de naissance de la personne agissant en son nom si le compte est ouvert au nom d’une personne morale, renseignés par l’utilisateur à l’origine dudit compte,
les adresses postales, numéros de téléphone et adresses de courrier électronique renseignées par l’utilisateur de ce compte,
l’adresse IP et autres données correspondant à la création du compte et les adresses IP et autres données correspondant aux dernières connexions enregistrées de l’utilisateur dudit compte,
– enjoint à la société GOOGLE IRELAND LIMITED de communiquer, dans les sept jours à compter de la signification du présent jugement, à Maître TOLEDANO, conseil de [U] [P], requérant, les données complétées d’identification et de connexion de la chaîne YouTube «’LES DOSSIERS DU ROCHER’» et notamment’:
les nom et prénom la date et le lieu de naissance ou la raison sociale, ainsi que les nom et prénom date et lieu de naissance de la personne agissant en son nom si le compte est ouvert au nom d’une personne morale renseignés par l’utilisateur à l’origine dudit compte,
– les adresses postales, numéros de téléphone et adresses de courrier électronique renseignés par l’utilisateur de ce compte,
– l’adresse IP et autres données correspondant à la création du compte et les adresses IP et autres données correspondant aux dernières connexions enregistrées de l’utilisateur dudit compte,
– débouté [F] [I], [E] [R], [H] [Z] et [U] [P] du surplus de leurs demandes,
– dit n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la société GOOGLE IRELAND LIMITED aux dépens.
Vu l’appel interjeté le 10’mai 2022 par [F] [I], [H] [Z], [E] [R] et [U] [P],
Vu les conclusions au fond des parties, soit en dernier lieu et en l’état les conclusions transmises le 9’mars 2023 par les appelants et le 20’octobre 2022 pour la société GOOGLE IRELAND LIMITED, intimée,
Les appelants demandent à la cour de’:
– infirmer le jugement du 20’avril 2022 en ce qu’il a rejeté les demandes tendant à la suppression des propos contenus dans les supports incriminés, publiés sur la plateforme YouTube «’LES DOSSIERS DU ROCHER’»,
– constater que l’injonction faite à la société GOOGLE IRELAND LIMITED de communiquer les données complètes d’identification et de connexion de la chaîne YouTube «’les dossiers du Rocher’» a été suivie d’effet mais n’a pas permis l’identification du ou des utilisateurs dudit compte,
Statuant à nouveau’:
– dire et juger que le maintien en ligne des propos litigieux sur la chaîne YouTube «’LES DOSSIERS DU ROCHER’» dont le service est exploité par la société GOOGLE IRELAND LIMITED, constitue un dommage occasionné par le contenu d’un service de communication au public en ligne qu’il convient de faire cesser,
– dire et juger que la suppression par la société GOOGLE IRELAND LIMITED des propos diffamatoires et injurieux apparaît la seule mesure nécessaire, adaptée et proportionnée pour faire cesser le dommage subi par Messieurs [R], [Z], [P] et [I],
– ordonner à la société GOOGLE IRELAND LIMITED de supprimer les passages litigieux des pages internet mentionnées dans les conclusions ou d’en rendre l’accès impossible, sous astreinte de 2’000’euros par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir,
– condamner la société GOOGLE IRELAND LIMITED à verser à chacun des appelants la somme de 5’000’euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société GOOGLE IRELAND LIMITED aux entiers dépens.
La société GOOGLE IRELAND LIMITED, intimée, demande à la cour de’:
– dire et juger qu’il n’est pas fait appel du chef du jugement prononçant l’injonction de communiquer «’les données complètes d’identification et de connexion de la chaîne YouTube ‘LES DOSSIERS DU ROCHER”», laquelle a été entièrement exécutée à cette date par GOOGLE IRELAND LIMITED,
Dans les limites de l’effet dévolutif de l’appel,
– dire et juger que [F] [I], [E] [R], [H] [Z] et [U] [P] ne justifient d’aucune démarche visant à identifier les titulaires de la chaîne YouTube ‘LES DOSSIERS DU ROCHER’ à la suite de la communication des données par GOOGLE,
– donner acte à la société GOOGLE IRELAND LIMITED de ce qu’elle s’en remet à justice concernant la demande de suppression des vidéos litigieuses,
– débouter [F] [I], [E] [R], [H] [Z] et [U] [P] de leur demande d’assortir d’une astreinte de 2’000’euros par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir la mesure éventuelle de suppression des propos figurant dans les vidéos litigieuses,
– débouter [F] [I], [E] [R], [H] [Z] et [U] [P] de leur demande visant à la condamnation de GOOGLE IRELAND LIMITED au versement à chacun des appelants la somme de 2’500’euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouter [F] [I], [E] [R], [H] [Z] et [U] [P] de leur demande visant à la condamnation de GOOGLE IRELAND LIMITED aux entiers dépens,
Y ajoutant’:
– condamner [F] [I], [E] [R], [H] [Z] et [U] [P] au paiement de la somme de 10’000’euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner [F] [I], [E] [R], [H] [Z] et [U] [P] aux entiers dépens en application de l’article 696 du code de procédure civile.
Vu l’ordonnance de clôture du 19’avril 2023,
Vu l’article 455 du code de procédure civile,
Rappel des faits
Les appelants contestent les contenus de 6 vidéos publiées sur la plateforme YouTube par une chaîne nommée ‘LES DOSSIERS DU ROCHER’ accessible dès le 23’septembre 2021 selon le procès-verbal de constat d’huissier établi le 12’octobre 2021.
L’objet général de la chaîne est ainsi présenté’:
‘Les Dossiers Du Rocher
Exposant des personnalités (sic) monégasques, hommes politiques (sic) et hommes d’affaires (sic) influents à [Localité 9], nos découvertes ont montré qu’un petit club s’était construit depuis une dizaine d’années dans notre petit Etat de Monaco avec pour simple but de manipuler et influencer les institutions de Monaco dans leurs propres intérêts.
Les membres de ce club sont connus de tous, parmi (sic) eux, [H] [Z], Président du tribunal Suprême de Monaco, [F] [I], avocat à la réputation sulfureuse, [U] [P], expert-comptable et Administrateur des Biens de SAS le Prince [G] de Monaco, l’homme d’affaire [B] [N] ou le ministre [E] [R].
Vous trouverez ici des documents attestant des faits de malversation, corruption et de traffic (sic) d’influence qui ont lieu à [Localité 9]. Chaque semaine seront révélés au public, et diffusés sur cette platforme (sic) ainsi que sur nos comptes Facebook, Twitter et YouTube’.
Les appelants ont exercé diverses fonctions au sein de la principauté de Monaco.
[E] [R] était conseiller du gouvernement monégasque, ministre des Relations Extérieures et de la Coopération de la Principauté de Monaco depuis le 21’octobre 2019, puis il a été nommé depuis le 17 janvier 2022 chef de cabinet du Prince [G].
[F] [I] est avocat au barreau de Paris et a représenté les intérêts de personnalités monégasques.
[H] [Z] est président du Tribunal Suprême de la principauté de Monaco.
[U] [P] est expert-comptable et administre les biens du Prince [G].
Les six vidéos citées dans la citation et accessibles sur YouTube contiennent des propos diffamatoires selon les appelants [F] [I], [E] [R] et [H] [Z].
[U] [P] estime que les vidéos numérotées’3 et’6 le concernent également et qu’elles contiennent des propos diffamatoires à son égard.
Enfin, [U] [P] fait valoir que la vidéo n°’5 contient des propos injurieux à son encontre.
La société GOOGLE IRELAND LIMITED a estimé ne pas devoir faire droit aux demandes des appelants de retrait des contenus et de communication de données, dès lors que selon sa réponse, en sa qualité de prestataire technique neutre assurant le simple hébergement des vidéos mises en ligne sur la plate-forme YouTube, il ne lui appartenait pas de se substituer au juge pour apprécier l’illicéité des vidéos litigieuses si celles-ci ne présentaient pas le caractère manifeste nécessaire exigeant que leurs retraits soient effectués sur simple réclamation.
Sur le caractère illicite des contenus et la demande de retrait des propos litigieux
Aux termes de l’article 6.I.8 de la loi du 21’juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) modifiée par la loi du 24’juin 2020, le président du tribunal judiciaire, statuant selon la procédure accélérée au fond, peut prescrire à toute personne susceptible d’y contribuer toutes mesures propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d’un service de communication au public en ligne.
Sur la demande de retrait des propos litigieux
Le dommage tel que prévu à l’article 6.I.8. de la loi LCEN doit être de nature à justifier la mesure de retrait auprès de la personne morale offrant un accès à des services de communication au public en ligne.
Lorsque la cause de la demande présentée au président du tribunal judiciaire tient au caractère diffamatoire des propos publiés sur un site donné, l’existence du dommage ne peut résulter du seul caractère diffamatoire des propos en cause, le délit de diffamation n’étant pas constitué lorsque la preuve de la vérité est rapportée ou lorsque l’excuse de bonne foi, laquelle suppose notamment des éléments sérieux de nature à accréditer l’allégation litigieuse, est reconnue à son auteur.
En l’espèce, les premiers juges ont justement relevé que l’action engagée en application des dispositions de l’article 6.I.8 de la LCEN oppose, non pas la personne qui s’estime diffamée à la personne qui l’aurait diffamée mais la personne s’estimant diffamée aux hébergeurs du contenu critiqué. Ainsi aucun débat contradictoire n’est rendu possible pour évaluer la réalité de l’atteinte.
Dans ces conditions, les premiers juges ont valablement retenu que «’seul un abus caractérisé de la liberté d’expression peut justifier que le juge prenne des mesures telles qu’un retrait de contenu ou un blocage de sites, mesures devant être adaptées et proportionnées au dommage dont la réalisation ou l’imminence est reconnue dès lors qu’elles portent atteinte a la liberté fondamentale qu’est la liberté d’expression.’»
Malgré le caractère diffamatoire et injurieux des propos allégué par les appelants et justement repris par le tribunal judiciaire de Paris, en l’absence de contradiction possible de la part des auteurs des propos qui seraient susceptibles de les avoir mis en ligne, la cour fait sienne l’appréciation du tribunal selon laquelle la mesure de retrait n’est pas proportionnée à l’atteinte ainsi envisagée à la liberté d’expression.
Sur la demande de communication des données identification et de connexion
En application de l’article’6-II de la loi LCEN, les premiers juges ont valablement fait droit à la communication des données en faveur des appelants.
Or, les appelants demandent à la cour de constater que l’injonction faite à la société GOOGLE IRELAND LIMITED de communiquer les données complètes d’identification et de connexion de la chaîne YOUTUBE «’les dossiers du Rocher’» a été suivie d’effet mais n’a pas permis l’identification du ou des utilisateurs dudit compte.
Cependant, en l’absence de démarches des appelants en ce sens, il n’est pas démontré cette impossibilité d’identification des utilisateurs de la chaîne YOUTUBE.
Dès lors, sans cette identification, il ne peut être envisagé de procéder au retrait pur et simple des propos litigieux et il n’est pas établi que la suppression des propos litigieux soit véritablement la seule mesure nécessaire pour identifier les auteurs du compte litigieux.
Le caractère nécessaire d’une telle mesure de suppression n’est dès lors pas établi.
Dans ces conditions, les appelants seront déboutés de l’ensemble de leurs demandes.
En application de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 1 000 euros sera allouée à l’intimée.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Constate que l’injonction de communiquer les données complètes d’identification et de connexion de la chaîne YOUTUBE ‘LES DOSSIERS DU ROCHER’ a été exécutée par GOOGLE IRELAND LIMITED,
Condamne [F] [I], [E] [R], [H] [Z] et [U] [P] au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Rejette toute autre demande.
LE PRÉSIDENT LE GREFFIER