Diffamation contre So Foot : entre rumeur et base factuelle

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Diffamation contre So Foot : entre rumeur et base factuelle
Ce point juridique est utile ?

Rédiger un article de presse polémique sur une personnalité sans base factuelle suffisante ou sans nuances, expose à une condamnation pour diffamation. L’éditeur de presse So Foot a été condamné au titre d’un article imputant à une personnalité « d’avoir menti sur ses qualifications de joueur et entraîneur professionnel de football et d’en avoir tiré profit ». 

L’article incriminé

L’article incriminé dresse un portrait de [O] [A] et porte le titre ‘La vérité si je mens !’, avec au-dessus un encart dont les termes sont les suivants : ‘Footballeur pro, entraîneur, militant, rappeur éphémère, organisateur de concours de beauté, candidat à Fort Boyard et à la présidence de la FFF… Il est difficile de définir l’insaisissable [O] [A], tant ce dernier a multiplié les casquettes ces dernières années. Une chose est sûre : la vie du candidat aux prochaines élections municipales de [Localité 15] (94) semble être plus belle que la vôtre. C’est du moins ce que l’intéressé s’efforce de faire croire à tout le monde. Portrait d’un type qui gagne à être connu à sa juste valeur’.

Les critères de la diffamation 

L’article 29 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881 définit la diffamation comme ‘toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé’ ;

Il doit s’agir d’un fait précis, susceptible de faire l’objet d’un débat contradictoire sur la preuve de sa vérité, ce qui distingue ainsi la diffamation, d’une part, de l’injure -caractérisée, selon le deuxième alinéa de l’article 29, par ‘toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait’ – et, d’autre part, de l’expression subjective d’une opinion ou d’un jugement de valeur, don’t la pertinence peut être librement discutée dans le cadre d’un débat d’idées mais dont la vérité ne saurait être prouvée ;

L’honneur et la considération de la personne ne doivent pas s’apprécier selon les conceptions personnelles et subjectives de celle-ci, mais en fonction de critères objectifs et de la réprobation générale provoquée par l’allégation litigieuse, que le fait imputé soit pénalement répréhensible ou manifestement contraire aux règles morales communément admises ;

La diffamation, qui peut se présenter sous forme d’allusion ou d’insinuation, doit être appréciée en tenant compte des éléments intrinsèques et extrinsèques au support en cause, à savoir tant du contenu même des propos que du contexte dans lequel ils s’inscrivent.

Par ailleurs, ni les parties, ni les juges ne sont tenus par l’interprétation de la signification diffamatoire des propos incriminés proposée par l’acte initial de poursuite et il appartient aux juges de rechercher si ceux-ci contiennent l’imputation formulée par le demandeur ou celle d’un autre fait contenu dans les propos en question.

Les limites de la liberté d’expression 

La liberté d’expression ne peut être soumise à des ingérences que dans les cas où celles-ci constituent des mesures nécessaires au regard du paragraphe 2 de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme.

La bonne foi peut paralyser la diffamation mais elle doit être appréciée en tenant compte du caractère général du sujet sur lequel portent les propos litigieux et du contexte dans lequel ils s’inscrivent.

La base factuelle et la recherche documentaire sérieuse 

En l’espèce, comme l’a relevé le tribunal, [R] [L], en rédigeant un article dans un magazine consacré au football sur la carrière d’une personne ayant eu ou prétendant avoir eu des liens avec le monde footballistique et candidat aux élections municipales en 2020, peut prétendre poursuivre un but légitime d’information.

S’agissant de la base factuelle, comme l’a également souligné le tribunal, malgré le caractère atypique du journal, dès lors que l’auteur de l’enquête s’est présenté à ses interlocuteurs en tant que ‘journaliste pour le magazine So Foot’, il ne pouvait se dispenser d’un minimum de base factuelle et respecter une démarche contradictoire.

La cour relève au préalable qu’il ne ressort d’aucune des pièces produites et ne peut se déduire du ton moqueur voire péjoratif de l’article l’existence d’une animosité personnelle au sens du droit de la presse. Par ailleurs, c’est à bon droit que le tribunal a relevé le manque de prudence, les propos ayant été tenus sans nuance.


 

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 2 – Chambre 7

ARRET DU 29 MARS 2023

(n° 9/2023, 18 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/03981 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFKNN

Décision déférée à la cour : Jugement du 9 Février 2022 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J.EXPRO, JCP de PARIS RG n° 20/07730

APPELANTS

Monsieur [R] [L] agissant en sa qualité de directeur de la publication du magazine SO FOOT

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par Maître Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P480, avocat postulant

Assisté de Maître Armelle FOURLON de la SELARL FOURLON AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C277, avocat plaidant

SAS SO PRESS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège éditrice du magazine SO FOOT

[Adresse 2]

[Localité 5]

N° SIRET : 445 391 196

Représentée par Maître Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P480, avocat postulant

Assistée de Maître Armelle FOURLON de la SELARL FOURLON AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C277, avocat plaidant

INTIMES

Monsieur [O] [A]

[Adresse 4]

[Localité 6]

né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 20]

Représenté et assisté par Maître Luc BROSSOLLET de la SCP D’ANTIN-BROSSOLLET, avocat au barreau de PARIS, toque : P336

Etablissement Public PROCUREURE GENERALE PRES LA COUR D’APPEL DE PARIS

[Adresse 3]

[Localité 5]

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 22 février 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

M. Jean-Michel AUBAC, Président

Mme Anne RIVIERE, Assesseur

Mme Anne CHAPLY, Assesseur

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Mme [W] dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Margaux MORA

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Jean-Michel AUBAC, Président, et par Margaux MORA, Greffier, présente lors de la mise à disposition.

Vu l’assignation délivrée le 22 juillet 2020 à l’encontre de [R] [L], en qualité de directeur de publication du magazine SO FOOT ainsi que de la société SO PRESS, éditrice de ce magazine, à la requête de [O] [A], pour répondre des propos suivants :

1. ‘[A] n’aime pas être présenté comme un imposteur. Il préfère l’étiquette d’ancien ‘joueur professionnel’, bien que ce statut échappe à tous les sites de référence du World Wide Web. Pourtant, le bonhomme l’assure, sa carrière débute en 1987 au centre de formation de [Localité 22], pour se conclure ‘en 2006-2007 à [9], [Adresse 17]’. Quand il parle de son pédigree footballistique, l’intéressé évoque également un complément de formation à [Localité 14], puis des passages au [Localité 5] FC, à [Localité 12], [Localité 16] ou [Localité 8]. [A] se targue même d’avoir eu des expérience en série C italiennes, en Suisse à [Localité 11] (1027 habitants en 2018) ou encore à [Localité 5] ou au Celta Vigo, selon les versions. En attendant, l’attaquant n’a laissé aucun souvenir nulle part. Bizarre ”

2. ‘A [Localité 22], [RB] [D] était comme à la maison lors de sa formation débutée elle aussi en 1987. ‘mon père était le directeur du centre. J’y ai dormi et bouffé pendant 365 jours par an pendant sept ans et, honnêtement, je ne me souviens pas de lui’, avoue celui qui gardait les cages des Verts ce jour de mars 1999. ‘Il a peut-être fait une semaine, mais je suis sûr qu’il n’a jamais eu de licence’. 30 km plus à l’ouest, l’AS [Localité 14]. La pépinière de [VH] et [SP] a perdu une partie de ses archives lors des inondations de 2015, mais pas sa mémoire incarnée par [S] [RV], 73 ans et ‘au club depuis (ses) 12 ans’. [A] ‘ ‘Je peux avoir oublié, hein, mais ce nom ne m’accroche pas du tout’, lâche-t-il. Pareil pour [S] [DJ], qui a pris en main la formation cannoise en 1989 : ‘si [S] [RV] vous le dit…’. par acquis de conscience, l’iconique moustachu du foot français plonge tout de même dans ses registres personnels. ‘Non, franchement, je n’ai pas, se désole-t-il, après quelques minutes de recherches. Peut-être qu’il était avec les amateurs ”. Peut-être était-ce aussi le cas dans l’Oise, car [X] [H], dans le staff de [T] [XZ] à [Localité 12], n’a lui non plus aucun souvenir d’avoir croisé [A]. ‘De 1988 à 1992, j’étais en charge de la formation, de l’équipe B, puis de l’équipe première avec [T]. J’ai souvenir de tous les gars de l’époque, mais là ça ne me dit rien.’ En fait, dans le monde (semi) professionnel hexagonal, il n ‘y a que [Localité 16] pour sortir une licence datant de la saison 1997-1998, soit un an avant l’épisode du Stade de [19]’.

3. ‘[A] bégaie mais cela ne fait pas sourire [ZD] [F] [U] pour autant. Administrateur du groupe Facebook Les arnaques du spectacle, il a enquêté sur ‘le niveau d’honnêteté du bonhomme quand celui-ci s’est lancé dans les concours de beauté via Miss Beauté Internationale’. Et ses conclusions sont cinglantes : ‘il le fait pour exister, pour draguer, accuse [U]. Il force, à la hussarde. Et quand ça ne va plus, il établit un rapport de terreur. Je peux citer des grands sympathiques au niveau des escrocs, mais lui, c’est un compulsif, un agressif…’ Le fondateur de Casting Info Service, association de défense des victimes d’arnaque au casting, poursuit : ‘J’essaie d’avertir les gens mais c’est le miroir aux alouettes parce que des personnalités viennent à ses soirées. Un [N], c’est un peu cheap, mais il est dans le système. [HF], pareil. Tout ça est assez pyramidal. Un contact connu en amène deux autres, qui en amènent quatre. C’est un peu l’arnaque de [CP]’. D’ailleurs, [U] s’interroge : ‘Comment la Fédération Française de foot a pu ne pas enquêter sur [A] ‘ Comment ont-il pu accepter sa candidature avec son pédigree ‘ C’est aberrant.”

4. ‘Peut-être même un peu trop, car il finira sa campagne avec un rappel à l’ordre de la FFF et une plainte de [ON] pour dénonciation calomnieuse’

5. ‘A la Mairie de [Localité 5], [A] n’est pas non plus le bienvenu. ‘On a assez de casse-couilles à gérer dans la vie, et lui c’est niveau champion’s league ! balance [GL] [FH], l’adjoint au sport d'[I] [KH]. C’est quand même à cause de lui qu’on a mis un sas à code à la mairie du 20 ème. Il défonçait les portes pour rentrer dans le bureau de la Maire’.’

6. ‘Un an avant de prôner un mode de vie épicurien, son binôme a en effet eu le droit aux honneurs des 40 arnaques les plus spectaculaires, une émission de [CK] [V], diffusée sur TF1 le 24 mai 2006. Celui-ci relate que, lors des funérailles d'[E] [Y], [A] s’est fait passer pour le fils du producteur au costume blanc et s’est retrouvé à porter le cercueil aux côtés de [NJ] [Z], [G] [XF] ou [EN] [K]…’.

7. ‘[A] sait apparemment de quoi il parle, puisqu’il avance deux lignes de CV en tant qu’entraîneur principal. ‘Huit mois au [Adresse 26], à [25] (en fait deux mois et 5 matchs, en septembre octobre 2015), et un an et demi en [Adresse 29] à [Localité 24]’. A [Localité 21], une histoire de salaire non versé aura eu raison de l’aventure africaine de l’entraîneur, malgré l’intervention et l’insistance du Président [OD] [LL] [RL]. ‘il m’a dit : coach ne partez pas, ce à quoi j’ai répondu : vous êtes bien payé pour faire votre travail, non ‘ Bah voilà, je suis venu de France pour faire mon travail, je mérite d’être payé. Il a passé un coup de fil, deux heures après, le trésorier est arrivé avec l’argent, un billet d’avion et j’ai quitté le pays’. Du côté du [Localité 10] FC, en troisième division [Adresse 28], aucune trace, en revanche du passage de l’ouragan [O]. Un détail sans importance pour celui qui projette désormais de rebondir en [Adresse 23], au [Adresse 13] ou encore en [Adresse 18], à ‘[Localité 7]”, publiés à l’occasion du portrait qui lui a été consacré dans le numéro 174 édité en mars 2020 sous le titre ‘La vérité si je mens’ qu’il estime constituer une diffamation publique à son endroit, demandant au tribunal de :

– condamner l’auteur de la diffamation et la société SO PRESS en qualité de civilement responsable à lui payer la somme de 12 000 euros en réparation du préjudice moral subi,

– ordonner une publication judiciaire à titre de réparation complémentaire selon des modalités précisées dans l’acte introductif d’instance,

– condamner in solidum les défendeurs à lui payer une somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens,

– ordonner l’exécution provisoire de la décision.

Vu le jugement rendu contradictoirement le 9 février 2022 par la 17ème chambre civile du tribunal judiciaire de Paris, qui a :

– jugé diffamatoires à l’encontre de [O] [A] les passages suivants, publiés à l’occasion de la parution du numéro 174 du magazine SO FOOT édité en mars 2020 d’un article sous le titre ‘La vérité si je mens ” :

1. ‘[A] n’aime pas être présenté comme un imposteur. Il préfère l’étiquette d’ancien ‘joueur professionnel’, bien que ce statut échappe à tous les sites de référence du World Wide Web. Pourtant, le bonhomme l’assure, sa carrière débute en 1987 au centre de formation de [Localité 22], pour se conclure ‘en 2006-2007 à [9], [Adresse 17]’. Quand il parle de son pédigree footballistique, l’intéressé évoque également un complément de formation à [Localité 14], puis des passages au [Localité 5] FC, à [Localité 12], [Localité 16] ou [Localité 8]. [A] se targue même d’avoir eu des expérience en série C italiennes, en Suisse à [Localité 11] (1027 habitants en 2018) ou encore à [Localité 5] ou au Celta Vigo, selon les versions. En attendant, l’attaquant n’a laissé aucun souvenir nulle part. Bizarre ”

2. ‘A [Localité 22], [RB] [D] était comme à la maison lors de sa formation débutée elle aussi en 1987. ‘mon père était le directeur du centre. J’y ai dormi et bouffé pendant 365 jours par an pendant sept ans et, honnêtement, je ne me souviens pas de lui’, avoue celui qui gardait les cages des Verts ce jour de mars 1999. ‘Il a peut-être fait une semaine, mais je suis sûr qu’il n’a jamais eu de licence’. 30 km plus à l’ouest, l’AS [Localité 14]. La pépinière de [VH] et [SP] a perdu une partie de ses archives lors des inondations de 2015, mais pas sa mémoire incarnée par [S] [RV], 73 ans et ‘au club depuis (ses) 12 ans’. [A] ‘ ‘Je peux avoir oublié, hein, mais ce nom ne m’accroche pas du tout’, lâche-t-il. Pareil pour [S] [DJ], qui a pris en main la formation cannoise en 1989 : ‘si [S] [RV] vous le dit…’. par acquis de conscience, l’iconique moustachu du foot français plonge tout de même dans ses registres personnels. ‘Non, franchement, je n’ai pas, se désole-t-il, après quelques minutes de recherches. Peut-être qu’il était avec les amateurs ”. Peut-être était-ce aussi le cas dans l’Oise, car [X] [H], dans le staff de [T] [XZ] à [Localité 12], n’a lui non plus aucun souvenir d’avoir croisé [A]. ‘De 1988 à 1992, j’étais en charge de la formation, de l’équipe B, puis de l’équipe première avec [T]. J’ai souvenir de tous les gars de l’époque, mais là ça ne me dit rien.’ En fait, dans le monde (semi) professionnel hexagonal, il n ‘y a que [Localité 16] pour sortir une licence datant de la saison 1997-1998, soit un an avant l’épisode du Stade de [19]’.

4. ‘Peut-être même un peu trop, car il finira sa campagne avec un rappel à l’ordre de la FFF et une plainte de [ON] pour dénonciation calomnieuse’

6. ‘Un an avant de prôner un mode de vie épicurien, son binôme a en effet eu le droit aux honneurs des 40 arnaques les plus spectaculaires, une émission de [CK] [V], diffusée sur TF1 le 24 mai 2006. Celui-ci relate que, lors des funérailles d'[E] [Y], [A] s’est fait passer pour le fils du producteur au costume blanc et s’est retrouvé à porter le cercueil aux côtés de [NJ] [Z], [G] [XF] ou [EN] [K]…’.

7. ‘[A] sait apparemment de quoi il parle, puisqu’il avance deux lignes de CV en tant qu’entraîneur principal. ‘Huit mois au [Adresse 26], à [25] (en fait deux mois et 5 matchs, en septembre octobre 2015), et un an et demi en [Adresse 29] à [Localité 24]’. A [Localité 21], une histoire de salaire non versé aura eu raison de l’aventure africaine de l’entraîneur, malgré l’intervention et l’insistance du Président [OD] [LL] [RL]. ‘il m’a dit : coach ne partez pas, ce à quoi j’ai répondu : vous êtes bien payé pour faire votre travail, non ‘ Bah voilà, je suis venu de France pour faire mon travail, je mérite d’être payé. Il a passé un coup de fil, deux heures après, le trésorier est arrivé avec l’argent, un billet d’avion et j’ai quitté le pays’. Du côté du [Localité 10] FC, en troisième division [Adresse 28], aucune trace, en revanche du passage de l’ouragan David. Un détail sans importance pour celui qui projette désormais de rebondir en [Adresse 23], au [Adresse 13] ou encore en [Adresse 18], à ‘[Localité 7]”

– Condamne [R] [L] en qualité d’auteur de la diffamation et la société SO PRESS en qualité de civilement responsable de [R] [L] à payer à [O] [A] la somme de SIX MILLE EUROS (6 000 €) en réparation du préjudice moral subi.

– Ordonne la publication, aux frais de [R] [L] et la société SO PRESS, dans le prochain magazine SO FOOT à paraître après la signification de la présente décision devenue définitive, sous astreinte de 500 euros par numéro de retard, du texte suivant :

‘Par jugement du 9 février 2022, le tribunal judiciaire de Paris a condamné [R] [L] et la société SO PRESS à verser à [O] [A] des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la publication de propos jugés diffamatoires, dans le numéro 174 du magazine SO FOOT d’un article sous le titre ‘La vérité si je mens ”’

– Dit que ce communiqué, placé sous le titre ‘PUBLICATION JUDICIAIRE’, devra figurer en dehors de toute publicité, être rédigé en caractères gras de taille 12, en police ‘Times New Roman’, dans la rubrique SPECIMEN ou, à défaut d’une telle rubrique, à une place équivalente,

– Condamne [R] [L] en qualité d’auteur de la diffamation et la société SO PRESS en qualité de civilement responsable de [R] [L], in solidum, à payer à [O] [A] la somme de DEUX MILLE EUROS (2 000 €) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– Déboute [O] [A] du surplus de ses demandes,

– Condamne [R] [L] en qualité d’auteur de la diffamation et la société SO PRESS en qualité de civilement responsable de [R] [L] aux dépens.

Le tribunal a considéré que les propos poursuivis au titre des passages numérotés 3 et 5 ne sont pas diffamatoires tandis que ceux poursuivis au titre des passages numérotés 1, 2 et 7 , d’une part, 4, d’autre part, et 6, enfin, contiennent des allégations de faits distincts les uns des autres, revêtant chacun un caractère diffamatoire, pour lesquels l’excuse de bonne foi ne peut être retenue.

Vu l’appel interjeté par [R] [L] et la société SO PRESS le 18 février 2022,

Vu les dernières conclusions signifiées par voie électronique le 7 février 2023 par les appelants qui demandent à la cour d’infirmer le jugement et, statuant à nouveau, de :

– CONFIRMER le jugement rendu le 9 février 2022 en ce qu’il a jugé non diffamatoires les passages 3 et 5 tels que poursuivis dans l’acte introductif suivants à savoir :

(3) ‘[A] bégaie mais cela ne fait pas sourire [ZD] [F] [U] pour autant. Administrateur du groupe Facebook Les arnaques du spectacle, il a enquêté sur ‘le niveau d’honnêteté du bonhomme quand celui-ci s’est lancé dans les concours de beauté via Miss Beauté Internationale’. Et ses conclusions sont cinglantes : ‘il le fait pour exister, pour draguer, accuse [U]. Il force, à la hussarde. Et quand ça ne va plus, il établit un rapport de terreur. Je peux citer des grands sympathiques au niveau des escrocs, mais lui, c’est un compulsif, un agressif…’ Le fondateur de Casting Info Service, association de défense des victimes d’arnaque au casting, poursuit : ‘J’essaie d’avertir les gens mais c’est le miroir aux alouettes parce que des personnalités viennent à ses soirées. Un [N], c’est un peu cheap, mais il est dans le système. [HF], pareil. Tout ça est assez pyramidal. Un contact connu en amène deux autres, qui en amènent quatre. C’est un peu l’arnaque de [CP]’. D’ailleurs, [U] s’interroge : ‘Comment la Fédération Française de foot a pu ne pas enquêter sur [A] ‘ Comment ont-il pu accepter sa candidature avec son pédigree ‘ C’est aberrant.”

(5) ‘A la Mairie de [Localité 5], [A] n’est pas non plus le bienvenu. ‘On a assez de casse-couilles à gérer dans la vie, et lui c’est niveau Champions league !, balance [GL] [FH], l’adjoint au sport d'[I] [KH]. C’est quand même à cause de lui qu’on a mis un sas à code à la mairie du [Adresse 30]. Il défonçait les portes pour rentrer dans le bureau de la maire !’.’

– REFORMER le jugement rendu le 9 février 2022 par le Tribunal Judiciaire de Paris- 17ème chambre Presse-Civile, dans l’ensemble de ses motifs et dispositif et plus amples dispositions en ce qu’il a jugé diffamatoires les passages (1), (2), (7) d’une part, (4) d’autre part et (6) enfin, tels que poursuivis dans l’acte introductif suivants à savoir :

(1) ‘[A] n’aime pas être présenté comme un imposteur. Il préfère l’étiquette d’ancien ‘joueur professionnel’, bien que ce statut échappe à tous les sites de référence du World Wide Web. Pourtant, le bonhomme l’assure, sa carrière débute en 1987 au centre de formation de [Localité 22], pour se conclure ‘en 2006-2007 à [9], [Adresse 17]’. Quand il parle de son pédigree footballistique, l’intéressé évoque également un complément de formation à [Localité 14], puis des passages au [Localité 5] FC, à [Localité 12], [Localité 16] ou [Localité 8]. [A] se targue même d’avoir eu des expérience en série C italiennes, en Suisse à [Localité 11] (1027 habitants en 2018) ou encore à [Localité 5] ou au Celta Vigo, selon les versions. En attendant, l’attaquant n’a laissé aucun souvenir nulle part. Bizarre ”

(2) ‘A [Localité 22], [RB] [D] était comme à la maison lors de sa formation débutée elle aussi en 1987. ‘Mon père était le directeur du centre. J’y ai dormi et bouffé pendant 365 jours par an pendant sept ans et, honnêtement, je ne me souviens pas de lui’, avoue celui qui gardait les cages des Verts ce jour de mars 1999. ‘Il a peut-être fait une semaine, mais je suis sûr qu’il n’a jamais eu de licence’. 30 km plus à l’ouest, l’AS [Localité 14]. La pépinière de [VH] et [SP] a perdu une partie de ses archives lors des inondations de 2015, mais pas sa mémoire incarnée par [S] [RV], 73 ans et ‘au club depuis (ses) 12 ans’. [A] ‘ ‘Je peux avoir oublié, hein, mais ce nom ne m’accroche pas du tout’, lâche-t-il. Pareil pour [S] [DJ], qui a pris en main la formation cannoise en 1989 : ‘si [S] [RV] vous le dit…’. par acquis de conscience, l’iconique moustachu du foot français plonge tout de même dans ses registres personnels. ‘Non, franchement, je n’ai pas, se désole-t-il, après quelques minutes de recherches. Peut-être qu’il était avec les amateurs ”. Peut-être était-ce aussi le cas dans l’Oise, car [X] [H], dans le staff de [T] [XZ] à [Localité 12], n’a lui non plus aucun souvenir d’avoir croisé [A]. ‘De 1988 à 1992, j’étais en charge de la formation, de l’équipe B, puis de l’équipe première avec [T]. J’ai souvenir de tous les gars de l’époque, mais là ça ne me dit rien.’ En fait, dans le monde (semi) professionnel hexagonal, il n ‘y a que [Localité 16] pour sortir une licence datant de la saison 1997-1998, soit un an avant l’épisode du Stade de [19]’.

(7) ‘[A] sait apparemment de quoi il parle, puisqu’il avance deux lignes de CV en tant qu’entraîneur principal. ‘Huit mois au [Adresse 26], à [25] (en fait deux mois et 5 matchs, en septembre octobre 2015, ndlr), et un an et demi en [Adresse 29] à [Localité 24]’. A [Localité 21], une histoire de salaire impayé suivie, selon ses dires, d’un début d’émeutes, d’une réception par [LL] [RL], le président rwandais, et finalement, d’une valise de billets avec un ticket retour, aura eu raison de l’aventure africaine de l’entraîneur. Du côté du [Localité 10] FC, en troisième division [Adresse 28], aucune trace, en revanche, du passage de l’ouragan [O]. Un détail sans importance pour celui qui projette désormais de rebondir en [Adresse 23], au [Adresse 13] ou encore en [Adresse 18], à ‘[Localité 7]’.’

(4) ‘Peut-être même un peu trop, car il finira sa campagne avec un rappel à l’ordre de la FFF et une plainte de [ON] pour dénonciation calomnieuse’.

(6) ‘Un an avant de prôner le mode de vie épicurien, son binôme a en effet eu le droit aux honneurs des 40 arnaques les plus spectaculaires, une émission de [CK] [V] diffusée sur TF1 le 24 mai 2006. Celle-ci relate que, lors des funérailles d'[E] [Y], [A] s’est fait passer pour le fils du producteur au costume blanc et s’est retrouvé à porter le cercueil aux côtés de [NJ] [Z], [G] [XF] ou [EN] [K]…’.

– REFORMER le jugement rendu le 9 février 2022 par le Tribunal Judicaire de Paris- 17eme chambre Presse-Civile, dans l’ensemble de ses motifs et dispositif et plus amples dispositions.

Statuant à nouveau sur le reste :

A TITRE PRINCIPAL :

– JUGER qu’il ne résulte aucune imputation diffamatoire du chef de la publication d’un article intitulé ‘La vérité si je mens’ dans le Magazine SO FOOT n°174 paru en mars 2020, diffamation invoquée sans fondement et à tort par Monsieur [O] [A] comme étant constituée par les sept passages poursuivis dans son assignation,

– JUGER que l’article litigieux ne constitue pas le délit de diffamation au sens de l’article 29, alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881, faute pour les passages visés dans l’assignation de viser un fait précis et/ou une atteinte à la considération de Monsieur [O] [A],

En conséquence :

– DEBOUTER Monsieur [O] [A] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions telles que formées au terme de son assignation du 22 juillet 2020 et de ses conclusions d’appel incident du 19 juillet 2022.

A TITRE SUBSIDIAIRE ET EN TOUT ETAT DE CAUSE :

– JUGER que la bonne foi trouve à s’appliquer au bénéfice des appelants qui justifient des critères requis pour qu’elle leur soit allouée, l’article relevant d’un sujet d’intérêt général, reposant sur une base factuelle suffisante et une enquête sérieuse, faisant montre de prudence dans son expression et étant dénuée de toute animosité personnelle à l’égard de Monsieur [A] ;

En conséquence,

– ALLOUER le bénéfice de la bonne foi à Monsieur [R] [L] et à la société SO PRESS ;

– DEBOUTER Monsieur [O] [A] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

EN TOUTES HYPOTHESES :

– CONDAMNER Monsieur [O] [A] à verser à la société SO PRESS et à Monsieur [R] [L] et donc à chacun une somme de 15.000 euros (quinze mille) euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– CONDAMNER Monsieur [O] [A] aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Vu les dernières conclusions signifiées par RPVA le 24 janvier 2022 par l’intimé qui demande à la cour de :

– Dire et juger diffamatoires à l’encontre de [O] [A] les passages suivants :

1. ‘[A] n’aime pas être présenté comme un imposteur. Il préfère l’étiquette d’ancien ‘joueur professionnel’, bien que ce statut échappe à tous les sites de référence du World Wide Web. Pourtant, le bonhomme l’assure, sa carrière débute en 1987 au centre de formation de [Localité 22], pour se conclure ‘en 2006-2007 à [9], [Adresse 17]’. Quand il parle de son pédigree footballistique, l’intéressé évoque également un complément de formation à [Localité 14], puis des passages au [Localité 5] FC, à [Localité 12], [Localité 16] ou [Localité 8]. [A] se targue même d’avoir eu des expériences en série C italiennes, en Suisse à [Localité 11] (1027 habitants en 2018) ou encore à [Localité 5] ou au Celta Vigo, selon les versions. En attendant, l’attaquant n’a laissé aucun souvenir nulle part. Bizarre ”

2. ‘A [Localité 22], [RB] [D] était comme à la maison lors de sa formation débutée elle aussi en 1987. ‘mon père était le directeur du centre. J’y ai dormi et bouffé pendant 365 jours par an pendant sept ans et, honnêtement, je ne me souviens pas de lui’, avoue celui qui gardait les cages des Verts ce jour de mars 1999. ‘Il a peut-être fait une semaine, mais je suis sûr qu’il n’a jamais eu de licence’. 30 km plus à l’ouest, l’AS [Localité 14]. La pépinière de [VH] et [SP] a perdu une partie de ses archives lors des inondations de 2015, mais pas sa mémoire incarnée par [S] [RV], 73 ans et ‘au club depuis (ses) 12 ans’. [A] ‘ ‘Je peux avoir oublié, hein, mais ce nom ne m’accroche pas du tout’, lâche-t-il. Pareil pour [S] [DJ], qui a pris en main la formation cannoise en 1989 : ‘si [S] [RV] vous le dit…’. par acquis de conscience, l’iconique moustachu du foot français plonge tout de même dans ses registres personnels. ‘Non, franchement, je n’ai pas, se désole-t-il, après quelques minutes de recherches. Peut-être qu’il était avec les amateurs ”. Peut-être était-ce aussi le cas dans l’Oise, car [X] [H], dans le staff de [T] [XZ] à [Localité 12], n’a lui non plus aucun souvenir d’avoir croisé [A]. ‘De 1988 à 1992, j’étais en charge de la formation, de l’équipe B, puis de l’équipe première avec [T]. J’ai souvenir de tous les gars de l’époque, mais là ça ne me dit rien.’ En fait, dans le monde (semi) professionnel hexagonal, il n ‘y a que [Localité 16] pour sortir une licence datant de la saison 1997-1998, soit un an avant l’épisode du Stade de [19]’.

4. ‘Peut-être même un peu trop, car il finira sa campagne avec un rappel à l’ordre de la FFF et une plainte de [ON] pour dénonciation calomnieuse’

5. ‘A la Mairie de [Localité 5], [A] n’est pas non plus le bienvenu. ‘On a assez de casse-couilles à gérer dans la vie, et lui c’est niveau champion’s league !, balance [GL] [FH], l’adjoint au sport d'[I] [KH]. C’est quand même à cause de lui qu’on a mis un sas à code à la mairie du 20ème. Il défonçait les portes pour rentrer dans le bureau de la Maire.”

6. ‘Un an avant de prôner un mode de vie épicurien, son binôme a en effet eu le droit aux honneurs des 40 arnaques les plus spectaculaires, une émission de [CK] [V], diffusée sur TF1 le 24 mai 2006. Celui-ci relate que, lors des funérailles d'[G] [Y], [A] s’est fait passer pour le fils du producteur au costume blanc et s’est retrouvé à porter le cercueil aux côtés de [NJ] [Z], [G] [XF] ou [EN] [K]…’

7. ‘[A] sait apparemment de quoi il parle, puisqu’il avance deux lignes de CV en tant qu’entraîneur principal. ‘Huit mois au [Adresse 26], à [25] (en fait deux mois et 5 matchs, en septembre octobre 2015), et un an et demi en [Adresse 29] à [Localité 24]’. A [Localité 21], une histoire de salaire non versé aura eu raison de l’aventure africaine de l’entraîneur, malgré l’intervention et l’insistance du Président [OD] [LL] [RL]. ‘il m’a dit : coach ne partez pas, ce à quoi j’ai répondu : vous êtes bien payé pour faire votre travail, non ‘ Bah voilà, je suis venu de France pour faire mon travail, je mérite d’être payé. Il a passé un coup de fil, deux heures après, le trésorier est arrivé avec l’argent, un billet d’avion et j’ai quitté le pays’. Du côté du [Localité 10] FC, en troisième division [Adresse 28], aucune trace, en revanche du passage de l’ouragan [O]. Un détail sans importance pour celui qui projette désormais de rebondir en [Adresse 23], au [Adresse 13] ou encore en [Adresse 18], à ‘Addis Ababa’.’

– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a jugé diffamatoire les passages 1, 2, 4, 6 et 7.

– L’infirmer en ce qu’il a jugé non diffamatoire le passage 5 non diffamatoire et statuant à nouveau,

– Dire et juger que ce passage emporte une diffamation publique à l’encontre de [O] [A],

– Infirmant sur la réparation,

– Condamner Monsieur [R] [L] en qualité d’auteur de la diffamation et la société SO PRESS en qualité de civilement responsable de Monsieur [R] [L] à payer [O] [A] la somme de 12 000 euros en réparation du préjudice moral qu’il a subi.

– A titre de réparation complémentaire, ordonner, dans le prochain numéro à paraître après la signification de l’arrêt à intervenir, le communiqué judiciaire suivant :

‘Par arrêt du , la Cour d’Appel de Paris a condamné Monsieur [R] [L], Directeur de la publication du magazine SO FOOT et la société SO PRESS qui en est l’éditrice, à payer des dommages et intérêts à [O] [A] en réparation du préjudice qui lui a été causé par la publication de l’article qui lui était consacré dans le numéro 174 du magazine SO FOOT du mois de mars 2022.’

– Condamner in solidum les défendeurs à payer à [O] [A] une somme de 10 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– Les condamner en tous les dépens de première instance et d’appel,

– Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Vu l’ordonnance de clôture en date du 25 janvier 2023,

Vu le rabat de la clôture et la clôture prononcée le 22 février 2023,

Vu l’article 455 du code de procédure civile,

Rappel des faits et des motifs du jugement

LES FAITS

Sur l’article poursuivi

Les passages poursuivis sont contenus dans un article diffusé par voie de presse dans le numéro 174 du mensuel SO FOOT de mars 2020, dont le caractère public n’est pas contesté.

Il n’est également pas contesté qu’il est édité par la société SO PRESS et que son directeur de publication est [R] [L].

L’article incriminé dresse un portrait de [O] [A] et porte le titre ‘La vérité si je mens !’, avec au-dessus un encart dont les termes sont les suivants : ‘Footballeur pro, entraîneur, militant, rappeur éphémère, organisateur de concours de beauté, candidat à Fort Boyard et à la présidence de la FFF… Il est difficile de définir l’insaisissable [O] [A], tant ce dernier a multiplié les casquettes ces dernières années. Une chose est sûre : la vie du candidat aux prochaines élections municipales de [Localité 15] (94) semble être plus belle que la vôtre. C’est du moins ce que l’intéressé s’efforce de faire croire à tout le monde. Portrait d’un type qui gagne à être connu à sa juste valeur’.

Le tribunal a considéré que :

– les passages numérotés 1, 2 et 7, qui peuvent utilement être lus et analysés ensemble, allèguent, par insinuation, à [O] [A] d’avoir menti sur ses qualifications de joueur et entraîneur professionnel de football et d’en avoir tiré profit. Au-delà des faits relatés et des témoignages recueillis pour remettre en cause l’expérience avancée par [O] [A], les termes employés et la tonalité ironique usitée (‘N’a laissé de souvenirs nulle part. Bizarre ” ; ‘…[A] sait apparemment de quoi il parle…’ ; ‘l’ouragan [O]’) font ainsi basculer le sens du propos vers l’imputation non seulement de mentir mais de se comporter en véritable imposteur, ce qui est de nature à porter atteinte à l’honneur et la considération du demandeur.

– du passage numéroté 3 ne ressort l’allégation d’aucun fait précis concernant une éventuelle ‘arnaque’ dans le cadre de l’organisation des concours de Miss mais plutôt un jugement de valeur insusceptible de faire l’objet de la preuve de sa vérité, l’article citant un témoin qui remet en cause le niveau d’honnêteté de l’intéressé sans préciser le fait à l’origine de cette mise en cause et le qualifie d”escroc’, au comportement ‘compulsif’, ‘agressif”.

– le passage numéroté 4 impute à [O] [A] d’avoir adopté, lors de l’élection à la présidence de la FFF en 2017, un comportement ayant justifié un rappel à l’ordre de la FFF et une plainte pour dénonciation calomnieuse de M. [ON], candidat à l’élection de la présidence de la FFF au même titre que [O] [A] et dont l’article indique plus avant qu’il a été l’une de ses ‘victimes collatérales’. Ces faits sont suffisamment précis au regard des exigences en matière de diffamation et portent atteinte à l’honneur et la considération du demandeur en ce qu’ils correspondent à une attitude communément réprouvée et potentiellement fautive.

– le passage numéroté 5 décrit le demandeur comme cherchant à s’imposer auprès du maire du [Adresse 30] arrondissement de [Localité 5] (‘casse- couilles’) de telle façon qu’il n’y est plus le bienvenu, n’ayant en l’espèce pas hésité à ‘défoncer les portes’ de la mairie pour y parvenir au point qu’un ‘sas à code’ aurait dû être installé. Ces propos sont employés au sens figuré et ne portent pas atteinte à l’honneur et la considération, le fait de se montrer particulièrement insistant pour parvenir à ses fins n’étant pas réprouvé par la morale commune.

– le passage numéroté 6 impute au demandeur de s’être comporté en imposteur lors des obsèques d'[E] [Y] en faisant croire qu’il en était le fils, renvoyant ainsi à un fait précis portant atteinte à son honneur et sa considération comme étant communément réprouvé.

Il a donc retenu, en conclusion, que les propos poursuivis au titre des passages numérotés (3) et (5) ne sont pas diffamatoires tandis que ceux poursuivis au titre des passages numérotés (1), (2) et (7) d’une part, (4) d’autre part et (6) enfin contiennent des allégations de faits distincts les uns des autres, revêtant chacun un caractère diffamatoire.

Sur la bonne foi, il a considéré que l’article peut prétendre poursuivre un but légitime d’information et qu’aucune animosité personnelle, au sens du droit de la presse, n’est démontrée.

S’agissant de la base factuelle, le tribunal a relevé que : l’auteur de l’enquête ayant abouti à la rédaction de l’article au sein duquel figurent les propos publiés s’est présenté à ses interlocuteurs en tant que ‘journaliste pour le magazine So Foot’. En cette qualité, il se devait de disposer d’éléments concrets et tangibles sur les faits qu’il entendait dénoncer et de respecter une démarche contradictoire, ce indépendamment de l’absence de spécialisation dans le domaine sportif considéré.

Il a considéré que s’agissant de l’imputation à [O] [A] de se comporter en imposteur quant à ses qualifications de joueur et d’entraîneur professionnel, il ne ressort pas des éléments communiqués qu’au cours de cette enquête, qui témoigne d’une recherche de contradictoire, le journaliste ait eu accès à des informations suffisantes rendant crédibles l’affirmation selon laquelle [O] [A] est un imposteur à ce titre et que les propos, affirmatifs malgré leur caractère allusif, manquent dans ces conditions de la prudence nécessaire.

Sur l’imputation faite à [O] [A] d’avoir adopté, lors de l’élection à la présidence de la FFF en 2017, un comportement ayant justifié un rappel à l’ordre de la Fédération et une plainte pour dénonciation calomnieuse de M. [ON], le tribunal a considéré que : le détail de la liste des pièces versées par les défendeurs et leur teneur pour apporter la preuve de leur bonne foi à cet égard suffit à constater qu’elles sont insuffisantes et sans lien pour certaines avec l’imputation diffamatoire, qu’au surplus, il a noté que le demandeur produit, quant à lui, un document émanant du bureau d’ordre du présent tribunal mentionnant qu’une plainte du chef d’injures publiques et diffamation non publique portée contre [O] [A] et dont la victime était [TJ] [ON] a été classée sans suite le 9 avril 2017.

Il en a conclu que dans ces conditions, les propos sans nuance contenus dans l’article incriminé ne présentent pas le caractère de prudence requis en pareil cas.

Il a également retenu que les pièces produites au titre de la preuve de l’existence d’une base factuelle permettant d’imputer à [O] [A] de s’être comporté en imposteur lors des obsèques d'[E] [Y] en faisant croire qu’il en était le fils ne constituent pas une base factuelle suffisante, alors que le demandeur produit, quant à lui, un arrêt de la cour d’appel de Paris, 11ème chambre, section civile A, datant du 23 janvier 2008, condamnant la directrice de publication LE NOUVEAU DETECTIVE et en qualité de civilement responsable, la société EDITIONS JOUR ET NUIT à réparer le préjudice subi par [O] [A] à raison de l’article paru le 25 mai 2005 intitulé ‘Obsèques d'[E] [Y] L’INCONNU SUR LA PHOTO’ reconnus comme diffamatoires.

Il a conclu que dans ces circonstances, il ne saurait être admis qu’il pouvait être imputé de tels agissements au demandeur de manière aussi péremptoire et sans nuance aucune dans le propos.

En conclusion, le tribunal a considéré que le bénéfice de la bonne foi ne saurait être accordé aux défendeurs pour l’une ou l’autre des imputations qualifiées de diffamatoires à l’encontre de [O] [A].

SUR CE,

Sur le caractère diffamatoire des propos

Il sera rappelé à cet égard que :

– l’article 29 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881 définit la diffamation comme ‘toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé’ ;

– il doit s’agir d’un fait précis, susceptible de faire l’objet d’un débat contradictoire sur la preuve de sa vérité, ce qui distingue ainsi la diffamation, d’une part, de l’injure -caractérisée, selon le deuxième alinéa de l’article 29, par ‘toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait’ – et, d’autre part, de l’expression subjective d’une opinion ou d’un jugement de valeur, don’t la pertinence peut être librement discutée dans le cadre d’un débat d’idées mais dont la vérité ne saurait être prouvée ;

– l’honneur et la considération de la personne ne doivent pas s’apprécier selon les conceptions personnelles et subjectives de celle-ci, mais en fonction de critères objectifs et de la réprobation générale provoquée par l’allégation litigieuse, que le fait imputé soit pénalement répréhensible ou manifestement contraire aux règles morales communément admises ;

– la diffamation, qui peut se présenter sous forme d’allusion ou d’insinuation, doit être appréciée en tenant compte des éléments intrinsèques et extrinsèques au support en cause, à savoir tant du contenu même des propos que du contexte dans lequel ils s’inscrivent.

Par ailleurs, ni les parties, ni les juges ne sont tenus par l’interprétation de la signification diffamatoire des propos incriminés proposée par l’acte initial de poursuite et il appartient aux juges de rechercher si ceux-ci contiennent l’imputation formulée par le demandeur ou celle d’un autre fait contenu dans les propos en question.

Sur le passage numéroté 3 :

En l’espèce, les appelants demandent la confirmation du jugement en ce qu’il a considéré le passage numéroté 3 comme n’étant pas diffamatoire à l’égard de l’intimé, ce que ne remet pas en cause ce dernier. En conséquence, la décision relative à ce passage sera confirmée.

Sur les passages numérotés 1, 2 et 7 :

Concernant les autres passages poursuivis, le tribunal a apprécié ensemble les passages numérotés 1, 2 et 7 et a considéré qu’ils allèguent, par insinuation, à [O] [A] d’avoir menti sur ses qualifications de joueur et entraîneur professionnel de football et d’en avoir tiré profit, se comportant en véritable imposteur.

On relèvera cependant que sous le titre ‘La vérité si je mens’, est indiqué ceci :

‘Footballeur pro, entraîneur, militant, rappeur éhémère, organisateur de concours de beauté, candidat à Fort Boyard et à la présidence de la FFF… Il est difficile de définir l’insaisissable [O] [A], tant ce dernier a multiplié les casquettes ces dernières années. Une chose est sûre : la vie du candidat aux prochaines élections municipales de [Localité 15] (94) semble été plus belle que la vôtre. C’est du moins ce que l’intéressé s’efforce de faire croire à tout le monde. Portrait d’un type qui gagne à être connu à sa juste valeur’.

Par ailleurs, l’article commence par aborder la carrière footbalistique de [O] [A] en ces termes : L’ambiance est à la fête au Stade de France. Les paillettes et les confettis du premier titre mondial des Bleus sont à peine retombés que, pour la première fois, un match de championnat se joue dans l’enceinte dionysienne. Ce 10 mars 1999, pour le compte de la 29ème journée de ce qu’on appelle encore la division 2, le Red Star s’incline contre [Localité 27] (1-2). Au coup de sifflet final, [SF] [IJ] court après des joueurs à interviewer. Le journaliste d’Eurosport tombe sur un jeune homme de 29 ans, maillot du Red Star sur les épaules : dans quelques instants, la France va faire connaissance avec [O] [A]. Problème, ce dernier ne joue pas pour le club de Saint-Ouen, mais dans le 94, où il est censé évoluer en National avec FUS [Localité 16] d'[C] [B]. Vingt ans plus tard, l’anecdote colle toujours à la peau de l’Audonien d’un soir : ‘C’est pathétique de me ressortir ça, s’insurge l’intéressé. J’ai joué le jeu, tout le monde était mort de rire ! Si [M] fait la même chose on crie au génie. Moi, je le fais, on dit que je suis un voleur, un escroc. J’avais un pass VIP, je jouais à [Localité 16], tout le monde le savait’.

Ces propos sont immédiatement suivis par le passage numéroté 1 des propos poursuivis :

‘[A] n’aime pas être présenté comme un imposteur. Il préfère l’étiquette d’ancien ‘joueur professionnel’, bien que ce statut échappe à tous les sites de référence du World Wide Web. Pourtant, le bonhomme l’assure, sa carrière débute en 1987 au centre de formation de [Localité 22], pour se conclure ‘en 2006-2007 à [9], [Adresse 17]’. Quand il parle de son pédigree footballistique, l’intéressé évoque également un complément de formation à [Localité 14], puis des passages au [Localité 5] FC, à [Localité 12], [Localité 16] ou [Localité 8]. [A] se targue même d’avoir eu des expériences en Série C italiennes, en Suisse à [Localité 11] (1 027 habitants en 2018) ou encore à [Localité 5] ou au Celta Vigo, selon les versions. En attendant, l’attaquant n’a laissé aucun souvenir nulle part. Bizarre ” (1.).

Il convient donc d’apprécier ces propos au regard des termes qui les ont précédés. Il apparaît ainsi que la phrase ‘[A] n’aime pas être présenté comme un imposteur’ est la suite directe des propos précédents où il est fait mention du jour où un journaliste, [SF] [IJ], a intervieuwé [A], alors âgé de 29 ans, maillot du Red Star sur les épaules, alors qu’il ne jouait pas pour le club de Saint-Ouen et relie donc le qualificatif d’imposteur à cet épisode de la vie de [A] et non à la suite des propos.

En effet, la suite des propos : ‘Il préfère 1’étiquette d’ancien ‘joueur professionnel’, bien que ce statut échappe à tous les sites de référence du World Wide Web. Pourtant, le bonhomme l’assure, sa carrière débute en 1987 au centre de formation de [Localité 22], pour se conclure ‘en 2006-2007 à [9], [Adresse 17]’. Quand il parle de son pédigree footballistique, l’intéressé évoque également un complément de formation à [Localité 14], puis des passages au [Localité 5] FC, à [Localité 12], [Localité 16] ou [Localité 8]. [A] se targue même d’avoir eu des expériences en série C italiennes, en Suisse à [Localité 11] (1 027 habitants en 2018) ou encore à [Localité 5] ou au Celta Vigo, selon les versions. En attendant, 1’attaquant n’a laissé aucun souvenir nulle part. Bizarre ”

impute à [O] [A] non d’être un imposteur, mais d’avoir menti sur sa carrière de footballeur.

En effet, il ne lui est nullement imputé d’avoir tiré profit de ces mensonges, contrairement à ce qu’a retenu le jugement, et les termes : ‘N’a laissé de souvenirs nulle part. Bizarre ” ; ‘…[A] sait apparemment de quoi il parle…’ ; ‘l’ouragan [O]’, s’ils sont ironiques voire péjoratifs, ne suffisent pas à faire basculer l’imputation de mentir vers celle de se comporter en véritable imposteur.

Les passages numérotés 2 et 7 sont les suivants :

‘2. ‘A [Localité 22], [RB] [D] était comme à la maison lors de sa formation débutée elle aussi en 1987. ‘mon père était le directeur du centre. J’y ai dormi et bouffé pendant 365 jours par an pendant sept ans et, honnêtement, je ne me souviens pas de lui’, avoue celui qui gardait les cages des Verts ce jour de mars 1999. ‘Il a peut-être fait une semaine, mais je suis sûr qu’il n’a jamais eu de licence’. 30 km plus à l’ouest, l’AS [Localité 14]. La pépinière de [VH] et [SP] a perdu une partie de ses archives lors des inondations de 2015, mais pas sa mémoire incarnée par [S] [RV], 73 ans et ‘au club depuis (ses) 12 ans’. [A] ‘ ‘Je peux avoir oublié, hein, mais ce nom ne m’accroche pas du tout’, lâche-t-il. Pareil pour [S] [DJ], qui a pris en main la formation cannoise en 1989 : ‘si [S] [RV] vous le dit…’. Par acquis de conscience, l’iconique moustachu du foot français plonge tout de même dans ses registres personnels. ‘Non, franchement, je n’ai pas, se désole-t-il, après quelques minutes de recherches. Peut-être qu’il était avec les amateurs ”. Peut-être était-ce aussi le cas dans l’Oise, car [X] [H], dans le staff de [T] [XZ] à [Localité 12], n’a lui non plus aucun souvenir d’avoir croisé [A]. ‘De 1988 à 1992, j’étais en charge de la formation, de l’équipe B, puis de l’équipe première avec [T]. J’ai souvenir de tous les gars de l’époque, mais là ça ne me dit rien.’ En fait, dans le monde (semi) professionnel hexagonal, il n’y a que [Localité 16] pour sortir une licence datant de la saison 1997-1998, soit un an avant l’épisode du Stade de [19].’

7. [A] sait apparemment de quoi il parle, puisqu’il avance deux lignes de CV en tant qu’entraîneur principal. ‘Huit mois au [Adresse 26], à [25] (en fait deux mois et 5 matchs, en septembre octobre 2015), et un an et demi en [Adresse 29] à [Localité 24]’. A [Localité 21], une histoire de salaire non versé aura eu raison de l’aventure africaine de l’entraîneur, malgré l’intervention et l’insistance du Président [OD] [LL] [RL]. ‘il m’a dit : coach ne partez pas, ce à quoi j’ai répondu : vous êtes bien payé pour faire votre travail, non ‘ Bah voilà, je suis venu de France pour faire mon travail, je mérite d’être payé. Il a passé un coup de fil, deux heures après, le trésorier est arrivé avec l’argent, un billet d’avion et j’ai quitté le pays’. Du côté du [Localité 10] FC, en troisième division [Adresse 28], aucune trace, en revanche, du passage de l’ouragan [O]. Un détail sans importance pour celui qui projette désormais de rebondir en [Adresse 23], au [Adresse 13] ou encore en [Adresse 18], à ‘[Localité 7]” (7).

Même en considérant que le passage 1 doit être lu et analysé avec ces deux passages, les propos ne font qu’imputer à la partie civile de mentir sur sa carrière professionnelle, ce qui, même s’il s’agit d’un fait précis, dans la mesure où il s’agit de simples mensonges, ne porte pas atteinte en soi à l’honneur ou à la considération de la partie civile.

Sur les passages numérotés 4, 5 et 6 :

En revanche, c’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le tribunal a considéré que :

– le passage (4) impute à [O] [A] d’avoir adopté, lors de l’élection à la présidence de la FFF en 2017, un comportement ayant justifié un rappel à l’ordre de la FFF et une plainte pour dénonciation calomnieuse de M. [ON], candidat à l’élection de la présidence de la FFF au même titre que [O] [A] et dont l’article indique plus avant qu’il a été l’une de ses ‘victimes collatérales’. Ces faits sont suffisamment précis au regard des exigences en matière de diffamation et portent atteinte à l’honneur et la considération du demandeur en ce qu’ils correspondent à une attitude communément réprouvée et potentiellement fautive.

– le passage (5) décrit le demandeur comme cherchant à s’imposer auprès du maire du [Adresse 30] arrondissement de [Localité 5] (‘casse- couilles’) de telle façon qu’il n’y est plus le bienvenu, n’ayant en l’espèce pas hésité à ‘défoncer les portes’ de la mairie pour y parvenir au point qu’un ‘sas à code’ aurait dû être installé. Ces propos sont employés au sens figuré et ne portent pas atteinte à l’honneur et la considération, le fait de se montrer particulièrement insistant pour parvenir à ses fins n’étant pas réprouvé par la morale commune.

Il en est de même pour le passage (6) qui impute au demandeur de s’être comporté en imposteur lors des obsèques d'[E] [Y] en faisant croire qu’il en était le fils, renvoyant ainsi à un fait précis portant atteinte à son honneur et sa considération comme étant communément réprouvé.

Contrairement à ce que soutient [R] [L], ce passage ne se contente pas de rappeler la présence de [O] [A] aux obsèques d'[E] [Y] et son évocation dans l’émission de [CK] [V] intitulée ‘Les 40 arnaques les plus spectaculaires’, mais reprend à son compte l’imputation d’imposture sans prendre de distance avec cette allégation.

Certes, le terme ‘imposteur’ n’est pas employé par l’article dans ce passage mais il est bien imputé à [O] [A] de s’être fait passer, lors des funérailles d'[E] [Y], pour le fils du producteur au costume blanc et s’est retrouvé à porter le cercueil aux côtés de [NJ] [Z], [G] [XF] ou [EN] [K]…, ce qui est bien l’imputation de se faire passer pour quelqu’un d’autre afin d’en tirer un profit, en l’espèce celui d’être au premier plan aux côtés de personnages publics lors des obsèques et d’en tirer une certaine gloire et ce, aux dépens des proches du défunt.

Sont donc retenus comme diffamatoires les seuls passages 4 et 6, pour lesquels aucune offre de preuve n’a été faite. Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté [O] [A] de ses demandes relatives aux propos du passage numéroté 5.

Sur la bonne foi

La liberté d’expression ne peut être soumise à des ingérences que dans les cas où celles-ci constituent des mesures nécessaires au regard du paragraphe 2 de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme.

La bonne foi doit être appréciée en tenant compte du caractère général du sujet sur lequel portent les propos litigieux et du contexte dans lequel ils s’inscrivent.

En l’espèce, comme l’a relevé le tribunal, [R] [L], en rédigeant un article dans un magazine consacré au football sur la carrière d’une personne ayant eu ou prétendant avoir eu des liens avec le monde footballistique et candidat aux élections municipales en 2020, peut prétendre poursuivre un but légitime d’information.

S’agissant de la base factuelle, comme l’a également souligné le tribunal, malgré le caractère atypique du journal, dès lors que l’auteur de l’enquête s’est présenté à ses interlocuteurs en tant que ‘journaliste pour le magazine So Foot’, il ne pouvait se dispenser d’un minimum de base factuelle et respecter une démarche contradictoire.

La cour relève au préalable qu’il ne ressort d’aucune des pièces produites et ne peut se déduire du ton moqueur voire péjoratif de l’article l’existence d’une animosité personnelle au sens du droit de la presse.

S’agissant de l’imputation selon laquelle [O] [A] a adopté, lors de l’élection à la présidence de la FFF en 2017, un comportement ayant justifié un rappel à l’ordre de la Fédération et une plainte pour dénonciation calomnieuse de M. [ON], il résulte de l’analyse pertinente faite par le tribunal, que la cour reprend à son compte des pièces produites tant par le prévenu que par la partie civile, que la base factuelle produite par le prévenu est insuffisante.

Même si l’on retient la retranscription de l’interview d'[J] [ZX] comme élément probant et les propos tenus par [O] [A] lors de la conférence de presse du 27 février 2017, le contenu de ces pièces ne rend pas l’enquête sérieuse et la base factuelle suffisante.

Enfin, comme l’a relevé le tribunal, la seule procédure produite est un classement sans suite dans une affaire contre [O] [A] et dont la victime est [TJ] [ON] du chef d’injures publiques et diffamation non publique classée sans suite et non du chef de dénonciation calomnieuse.

Par ailleurs, c’est à bon droit que le tribunal a relevé le manque de prudence, les propos ayant été tenus sans nuance.

Enfin, concernant l’imputation faite à [O] [A] de s’être comporté en imposteur lors des obsèques d'[E] [Y] en faisant croire qu’il en était le fils, le tribunal a considéré que ces pièces ne constituent pas une base factuelle suffisante et que le journaliste, qui affirme ces allégations de manière péremptoire et sans nuances, n’avait pas procédé à la moindre enquête, d’autant plus que le demandeur produit, quant à lui, un arrêt de la cour d’appel de Paris du 23 janvier 2008, condamnant la directrice de publication LE NOUVEAU DETECTIVE et en qualité de civilement responsable, la société EDITIONS JOUR ET NUIT, à réparer le préjudice subi par [O] [A] à raison des propos jugés diffamatoires contenus dans l’article paru le 25 mai 2005 intitulé ‘Obsèques d'[E] [Y] L’INCONNU SUR LA PHOTO’ qui lui imputaient de s’être imposé ou introduit sans droit, sans titre ou même sans être invité ni désiré aux obsèques d'[E] [Y], d’avoir usurpé la place d’un tiers pour porter le cercueil de celui-ci et, pour parvenir à ses fins, de s’être fait passer pour son fils.

Les appelants contestent la motivation du tribunal, considérant qu’il n’a pas apprécié la teneur des pièces qui lui étaient soumises pour apprécier l’existence d’une base factuelle suffisante et a au surplus assimilé à tort le passage poursuivi à celui de l’article paru dans l’hebdomadaire Le nouveau Détective du 25 mai 2006.

Les appelants produisent au titre de la base factuelle :

– deux photographies de [O] [A] en costume blanc autour d’un cercueil dont la provenance n’est pas mentionnée (pièce n°6.1),

– la légende d’un article du Parisien non daté montrant une photographie des obsèques d'[E] [Y] et mentionnant que les deux fils de celui-ci portaient son cercueil,

– des passages de deux articles du Parisien, l’un du 15 mai 2007 affirmant que [O] [A] est un ‘usurpateur talentueux’ qui avait réussi à passer pour le fils d'[E] [Y] lors de son enterrement et l’autre du 8 juin 2007 beaucoup plus relatif et prudent mentionnant que [O] [A] se serait fait passer pour le fils du producteur et préciserait qu’un procès en diffamation a été engagé contre TF1,

– les propos de [P] [MF] retranscrits et contestés par la partie civile, se référant à ces articles du Parisien,

– enfin, un article de France Football du 14 mars 2017, mentionnant que [O] [A] a été présenté le 24 mai 2006 comme un imposteur lors de l’émission les 40 arnaques les plus spectaculaires, présentée par [CK] [V] sur TF1, ‘il avait réussi à se faire passer pour un parent d'[E] [Y] et à porter le cercueil du producteur lors de ses funérailles en mai 2005’ et précisant qu’il a attaqué la chaîne en diffamation.

S’il est en effet établi que [O] [A] a reconnu être présent aux obsèques d'[E] [Y], cela ne peut constituer une base factuelle suffisante à l’imputation d’imposture qui lui est faite, même associée aux propos de [P] [MF], laquelle ne fait que se référer aux articles du Parisien (pièces 6.3 à 6.5, 0.3 et 2) qui affirme que son suppléant, [O] [A], est un ‘usurpateur talentueux, qui avait réussi à passer pour le fils d'[E] [Y] lors de son enterrement’.

Ces pièces, loin de constituer une base factuelle suffisante, témoignent au contraire de l’absence d’enquête sérieuse de la part d’un journaliste.

Ce n’est qu’à titre superfétatoire qu’on relèvera que le demandeur a produit un arrêt de la cour d’appel de Paris, 11ème chambre, section civile A, datant du 23 janvier 2008, condamnant la directrice de publication LE NOUVEAU DETECTIVE et en qualité de civilement responsable, la société EDITIONS JOUR ET NUIT, à réparer le préjudice subi par [O] [A] à raison de l’article paru le 25 mai 2005 intitulé ‘Obsèques d'[E] [Y] L’INCONNU SUR LA PHOTO’ reconnus comme diffamatoires dès lors qu’il a été porté atteinte à son honneur et à sa considération en ce qu’il lui est imputé de s’être imposé ou introduit sans droit, sans titre ou même sans être invité ni désiré aux obsèques d'[E] [Y], d’avoir usurpé la place d’un tiers pour porter le cercueil de celui-ci et, pour parvenir à ses fins, de s’être fait passer pour son fils [..]; que la bonne foi ne saurait être retenue alors que l’article traite [O] [A] d’usurpateur sans que le journaliste ait procédé à la moindre enquête.

Dans ces circonstances, les appelants ne peuvent prétendre bénéficier de la bonne foi.

Comme l’a souligné le tribunal, en l’espèce, le prononcé d’une condamnation civile ne porte pas une atteinte disproportionnée à la liberté d’expression et n’est pas de nature à emporter un effet dissuasif pour l’exercice de cette liberté.

En conséquence, la décision du tribunal écartant la bonne foi des appelants sera confirmée.

Dans la mesure où seule une partie des propos porte préjudice à [O] [A], la somme allouée au titre des dommages et intérêts par le tribunal devra être infirmée. Au vu des pièces produites et des éléments du dossier, le préjudice de [O] [A] sera réparé par l’allocation de dommages et intérêts d’un montant de 4 000 euros.

La décision ordonnant la publication sera confirmée.

Sur les demandes accessoires

Le jugement sera confirmé sur les demandes accessoires.

Il sera alloué à [O] [A] au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel la somme de 1 000 euros.

Les appelants auront également la charge des dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Prend acte de l’accord des parties sur l’absence de caractère diffamatoire du passage numéroté 3,

Infirme le jugement du tribunal judiciaire de Paris en ce qu’il a jugé diffamatoires à l’encontre de [O] [A] les passages suivants, publiés à l’occasion de la parution du numéro 174 du magazine SO FOOT édité en mars 2020 d’un article sous le titre ‘La vérité si je mens ” :

– numéroté 1 : ‘[A] n’aime pas être présenté comme un imposteur. Il préfère l’étiquette d’ancien ‘joueur professionnel’, bien que ce statut échappe à tous les sites de référence du World Wide Web. Pourtant, le bonhomme l’assure, sa carrière débute en 1987 au centre de formation de [Localité 22], pour se conclure ‘en 2006-2007 à [9], [Adresse 17]’. Quand il parle de son pédigree footballistique, l’intéressé évoque également un complément de formation à [Localité 14], puis des passages au [Localité 5] FC, à [Localité 12], [Localité 16] ou [Localité 8]. [A] se targue même d’avoir eu des expériences en série C italiennes, en Suisse à [Localité 11] (1 027 habitants en 2018) ou encore à [Localité 5] ou au Celta Vigo, selon les versions. En attendant, l’attaquant n’a laissé aucun souvenir nulle part. Bizarre ”

– numéroté 2 : ‘A [Localité 22], [RB] [D] était comme à la maison lors de sa formation, elle aussi en 1987. ‘mon père était le directeur du centre. J’y ai dormi et bouffé pendant 365 jours par an pendant sept ans et, honnêtement, je ne me souviens pas de lui’, avoue celui qui gardait les cages des verts ce jour de mars 1999. ‘Il a peut-être fait une semaine, mais je suis sûr qu’il n’a jamais eu de licence.’ 30 km plus à l’ouest, l’AS [Localité 14]. La pépinière de [VH] et [SP] a perdu une partie de ses archives lors des inondations de 2015, mais pas sa mémoire incarnée par [S] [RV], 73 ans et ‘au club depuis (ses) 12 ans’. [A] ‘ ‘Je peux avoir oublié, hein, mais ce nom ne m’accroche pas du tout’, lâche-t-il. Pareil pour [S] [DJ], qui a pris en main la formation cannoise en 1989 : ‘si [S] [RV] vous le dit…’. Par acquis de conscience, l’iconique moustachu du foot français plonge tout de même dans ses registres personnels. ‘Non, franchement, je n’ai pas, se désole-t-il, après quelques minutes de recherches. Peut-être qu’il était avec les amateurs ”. Peut-être était-ce aussi le cas dans l’Oise, car [X] [H], dans le staff de [T] [XZ] à [Localité 12], n’a lui non plus aucun souvenir d’avoir croisé [A]. ‘De 1988 à 1992, j’étais en charge de la formation, de l’équipe B, puis de l’équipe première avec [T]. J’ai souvenir de tous les gars de l’époque, mais là ça ne me dit rien.’ En fait, dans le monde (semi) pro fessionnel hexagonal, il n’y a que [Localité 16] pour sortir une licence datant de la saison 1997-1998, soit un an avant l’épisode du Stade de [19]’.

– numéroté 7 : ‘[A] sait apparemment de quoi il parle, puisqu’il avance deux lignes de CV en tant qu’entraîneur principal. ‘Huit mois au [Adresse 26], à [25] (en fait deux mois et 5 matchs, en septembre octobre 2015), et un an et demi en [Adresse 29] à [Localité 24]’. A [Localité 21], une histoire de salaire non versé aura eu raison de l’aventure africaine de l’entraîneur, malgré l’intervention et l’insistance du Président [OD] [LL] [RL], ‘il m’a dit : coach ne partez pas, ce à quoi j’ai répondu : vous êtes bien payé pour faire votre travail, non ‘ Bah voilà, je suis venu de France pour faire mon travail, je mérite d’être payé. Il a passé un coup de fil, deux heures après, le trésorier est arrivé avec l’argent, un billet d’avion et j’ai quitté le pays’. Du côté du [Localité 10] FC, en troisième division [Adresse 28], aucune trace, en revanche, du passage de l’ouragan [O]. Un détail sans importance pour celui qui projette désormais de rebondir en [Adresse 23], au [Adresse 13] ou encore en [Adresse 18], à ‘[Localité 7]’.’

Statuant à nouveau,

Dit que les passages numérotés 1, 2 et 7 précités ne sont pas diffamatoires à l’encontre de [O] [A] et le déboute de ses demandes à ce titre ;

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Paris en ce qu’il a jugé diffamatoires à l’encontre de [O] [A] les passages suivants, publiés à l’occasion de la parution du numéro 174 du magazine SO FOOT édité en mars 2020 d’un article sous le titre ‘La vérité si je mens ” :

– numéroté 4 : ‘Peut-être même un peu trop, car il finira sa campagne avec un rappel à l’ordre de la FFF et une plainte de [ON] pour dénonciation calomnieuse’

– numéro 6 : ‘Un an avant de prôner un mode de vie épicurien, son binôme a en effet eu le droit aux honneurs des 40 arnaques les plus spectaculaires, une émission de [CK] [V], sur TF1 le 24 mai 2006. Celui-ci relate que, lors des funérailles d'[E] [Y], [A] s’est fait passer pour le fils du producteur au costume blanc et s’est retrouvé à porter le cercueil aux côtés de [NJ] [Z], [G] [XF] ou [EN] [K]…’

Confirme le jugement en ce qu’il a débouté [O] [A] de ses autres demandes ;

Infirme le jugement sur le montant des dommages et intérêts alloués ;

Statuant à nouveau,

Condamne [R] [L] en qualité d’auteur de la diffamation et la société SO PRESS en qualité de civilement responsable de [R] [L] à payer à [O] [A] la somme de QUATRE MILLE EUROS (4 000 €) en réparation du préjudice moral subi ;

Ordonne la publication, aux frais de [R] [L] et la société SO PRESS, dans le prochain magazine SO FOOT à paraître après la signification de la présente décision devenue définitive, sous astreinte de 500 euros par numéro de retard, du texte suivant :

‘Par arrêt du 29 mars 2023, la cour d’appel de Paris a condamné [R] [L] et la société SO PRESS à verser à [O] [A] des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la publication de propos jugés diffamatoires, dans le numéro 174 du magazine SO FOOT d’un article sous le titre ‘La vérité si je mens ”’

Dit que ce communiqué, placé sous le titre ‘PUBLICATION JUDICIAIRE’, devra figurer en dehors de toute publicité, être rédigé en caractères gras de taille 12, en police ‘Times New Roman’, dans la rubrique SPECIMEN ou, à défaut d’une telle rubrique, à une place équivalente ;

Confirme la condamnation de [R] [L] en qualité d’auteur de la diffamation et la société SO PRESS en qualité de civilement responsable de [R] [L], in solidum, à payer à [O] [A] la somme de DEUX MILLE EUROS (2 000 €) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais de première instance ;

Condamne [R] [L] en qualité d’auteur de la diffamation et la société SO PRESS en qualité de civilement responsable de [R] [L], in solidum, à payer à [O] [A] la somme de MILLE EUROS (1 000 €) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais d’appel ;

Condamne [R] [L] en qualité d’auteur de la diffamation et la société SO PRESS en qualité de civilement responsable de [R] [L] aux dépens d’appel.

LE PRÉSIDENT LE GREFFIER


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