Redressement fiscal : la responsabilité du DAF
Redressement fiscal : la responsabilité du DAF
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L’importance du redressement fiscal envisagé par l’administration à raison de son montant supérieur à 100 000 euros, présentait manifestement un enjeu majeur pour la société KERIKO. En vertu de l’article 2 de son contrat de travail du 3 octobre 2016 M.[W] , en sa qualité de directeur général et directeur des affaires financières, assurait des missions de gestion administrative , financière et de bonne stratégie pour le compte de la société EKITO. Il ne peut être contesté que le suivi de la procédure de redressement fiscal et les échanges nécessaires qu’il impliquait avec l’administration, entraient bien dans la mission de M.[W] situé au plus haut niveau de responsabilité dans la société


 

10 mars 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/00976 10/03/2023 ARRÊT N° 2023/105 N° RG 21/00976 – N° Portalis DBVI-V-B7F-OAIF SB/CD Décision déférée du 25 Janvier 2021 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULOUSE ( F19/00521) G. MONTAUT Section Encadrement [X] [W] C/ Association AGS CGEA [Localité 4] S.E.L.A.R.L. [V] ET ASSOCIES INFIRMATION PARTIELLE Grosse délivrée le à REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS *** COUR D’APPEL DE TOULOUSE 4eme Chambre Section 1 *** ARRÊT DU DIX MARS DEUX MILLE VINGT TROIS *** APPELANT Monsieur [X] [W] [Adresse 3] [Localité 4] Représenté par Me France CHARRUYER de la SELAS ALTIJ, avocat au barreau de TOULOUSE INTIM”ES Association AGS CGEA [Localité 4] UNEDIC [Adresse 1] [Localité 4] Représentée par Me Pascal SAINT GENIEST de l’AARPI QUATORZE, avocat au barreau de TOULOUSE S.E.L.A.R.L. [V] ET ASSOCIES Prise en la personne de Me [H] [V], es-qualité de mandataire liquidateur de la société EKITO [Adresse 2] [Localité 4] Représentée par Me Laurent SEYTE de la SELARL GUYOMARCH-SEYTE AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE COMPOSITION DE LA COUR En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 10 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant , S. BLUME, présidente et M. DARIES, conseillère chargées du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : S. BLUM”, présidente M. DARIES, conseillère N. BERGOUNIOU, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles Greffier, lors des débats : C. DELVER ARRET : – CONTRADICTOIRE – prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties – signé par S. BLUM”, présidente, et par C. DELVER, greffière de chambre FAITS – PROCÉDURE – PRÉTENTIONS DES PARTIES M. [X] [W] a été embauché le 8 mars 2010 par la société Ekito en qualité de responsable du développement suivant contrat de travail à durée indéterminée régi par la convention collective nationale de la métallurgie. Il est devenu co-gérant en 2012. Suivant avenant du 3 octobre 2016, M. [W] a été promu directeur général et directeur administratif et financier. Après avoir été convoqué par courrier du 19 octobre 2018 à un entretien préalable au licenciement fixé au 30 octobre 2018, il a été licencié par courrier du 7 novembre 2018 pour faute grave. La société EKITO a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Toulouse du 13 novembre 2018 et la SELARL [V] et associés, représentée par Maître [V] a été désignée en qualité de mandataire liquidateur. M. [X] [W] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse le 5 avril 2019 pour contester son licenciement et demander le versement de diverses sommes. Le conseil de prud’hommes de Toulouse, section encadrement, par jugement du 25 janvier 2021, a : -jugé que M. [W] a été licencié pour faute grave avérée, -débouté M. [W] de l’intégralité de ses demandes, -débouté M. [W] de sa demande au titre de l’exécution provisoire, -débouté les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile, -condamné M. [W] aux entiers dépens. *** Par déclaration du 2 mars 2021, M. [X] [W] a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 2 février 2021, dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas contestées. *** Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 12 décembre 2022, M. [X] [W] demande à la cour de : *déclarer son appel recevable et fondé *réformer intégralement le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Toulouse, le 25 janvier 2021, à titre principal, * juger injustifié le licenciement pour fautes graves notifié le 7 novembre 2018, *fixer sa créance au passif de la société Ekito représentée par Maître [V], ès qualités de mandataire judiciaire, aux sommes de : -3 515,46 euros au titre du rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied, outre 351,55 euros au titre des congés-payés y afférents, -23 154 euros au titre de l’indemnité de préavis de 4 mois, outre 2 315,4 euros au titre des congés-payés y afférents, -6 632,66 euros au titre de l’indemnité de licenciement, -28 942,5 euros au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la cour ne conclurait à un licenciement pour cause réelle et sérieuse *fixer sa créance au passif de la société Ekito représentée par la SELARL [V], ès qualités de mandataire judiciaire, aux sommes de : -3 515,46 euros au titre du rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied, outre 351,55 euros au titre des congés-payés y afférents, -23 154 euros au titre de l’indemnité de préavis de 4 mois, outre 2 315,4 euros au titre des congés-payés y afférents, -6 632,66 euros au titre de l’indemnité de licenciement, en tout état de cause, *condamner la société Ekito, et fixer au passif de la société, la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance, et la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel, *condamner la société Ekito aux entiers dépens, *dire que les sommes allouées porteront intérêt au taux légal à compter de la date de saisine du conseil de prud’hommes, *ordonner la capitalisation des intérêts. *** A l’appui de ses demandes, M. [X] [W] développe les moyens suivants. Il soutient sur la base d’un compte rendu écrit d’entretien préalable que certains griefs énoncés dans la lettre de licenciement n’ont pas été évoqués par l’employeur, qu’il n’a donc pu fournir d’observations. Il considère que ce procédé procède d’une mauvaise foi de l’employeur. Il conteste en tout état de cause la réalité des fautes qui lui sont reprochées et invoque la prescription des faits poursuivis. -Sur la négligence qui lui est reprochée dans la gestion de la procédure fiscale, alors que la société affirme n’avoir pris conscience des défaillances que fin septembre début octobre 2018, M.[W] soutient que dès le 3 août 2018 elle a eu connaissance des faits, alors que la procédure de licenciement a été engagée en octobre 2018, soit après expiration du délai de prescription de deux mois. Il expose que le 5 juillet 2018, l’inspectrice des finances publiques a informé Monsieur [R] de l’inéligibilité des travaux au titre des crédits d’impôts et a proposé un rendez vous pour clôturer les dossiers. Ce même jour, Monsieur [R] a déclaré s’occuper du dossier. Fin août 2018 M.[W] a reçu un courrier l’informant du redressement fiscal pour les années 2014 à 2016 et en a informé immédiatement Monsieur [R] et 1’avocat en charge du dossier. Le 14 août, Monsieur [W] a fait parvenir un document à Monsieur [R] pour aider 1’avocat à finaliser une réponse. Le 26 août, terme du délai laissé par l’administration, Monsieur [W] indique avoir envoyé le dossier à l’administration fiscale. – sur la tardiveté reprochée dans le paiement de la provision sur honoraires du conciliateur , il fait valoir que le paiement est intervenu le 1er août 2018, et que le fait est prescrit. -Quant au grief tenant à un discours prétendument alarmiste auprès de partenaire, rapporté à la société EKITO le 27 juin 2018 , il est également prescrit et infondé. -M.[W] conteste par ailleurs tout désengagement des ressources humaines, tout comme il conteste un non -respect des arbitrages de paiement décidés par M.[R]. *** Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 11 janvier 2022, la selarl [V] et associés demande à la cour de : -juger que le licenciement pour grave est fondé, -confirmer le jugement déféré, -débouter M. [W] de l’intégralité de ses demandes principales et subsidiaires, -condamner M. [W] au paiement de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens. *** A l’appui de ses demandes, la selarl [V] et associés développe les moyens suivants : M.[W] qui percevait une rémunération de 70 000 euros annuels en qualité de directeur administratif et financier, a fait preuve de déloyauté envers l’employeur, en se montrant négligent lors d’une procédure de redressement fiscal. La SELARL [V] et associés expose que M.[W] aurait été en relation avec certains salariés dans le but de reprendre la société et qu’il a retrouvé un emploi très rapidement au sein d’une société concurrente, moins d’un mois après son licenciement. Elle ajoute s’agissant de la prescription soulevée par le salarié, que le délai de prescription de deux mois ne commence à courir que lorsque l’employeur a une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits. Il est reproché à M.[W] une gestion fautive du contrôle fiscal, en refusant notamment de traiter la difficulté après le 8/08/2018, en partant en vacances 15 jours , et en refusant de traiter la question du contrôle fiscal le 19/09/2018 au motif qu’il n’en avait pas le temps. C’est à cette date que l’employeur a pris conscience de la mauvaise foi du salarié. La réitération des faits fautifs manifestés lors du contrôle fiscal, tels que le versement tardif le 3 août 2018 de la provision due au conciliateur depuis le 14/07/2018, autorise la prise en compte de faits antérieurs à plus de deux mois avant l’engagement de la procédure de licenciement. *** La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance en date du 6 janvier 2023. Il est fait renvoi aux écritures pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile. MOTIFS DE LA DECISION Tout licenciement doit être fondé sur une cause à la fois réelle et sérieuse. Aux termes de l’article L. 1232-6 du code du travail, l’employeur est tenu d’énoncer dans la lettre de licenciement, le ou les motifs du licenciement. La lettre de licenciement fixe les limites du litige. La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. La charge de la preuve de la faute grave incombe à l’employeur. En cas de doute, celui-ci profite au salarié. Le courrier de licenciement pour faute grave du 7 novembre 2018 est ainsi rédigé : ‘Nous avons eu à déplorer de votre part plusieurs agissements que nous considérons comme fautifs. En effet, vous savez que la société Ekito, au sein de laquelle vous cumulez les fonctions de directeur général et directeur administratif et financier, rencontre d’importantes difficultés économiques l’ayant amenée à présenter, en date du 2 juillet 2018, une requête aux fins d’ouverture d’une procédure de conciliation auprès du Tribunal de commerce de Toulouse. En effet, la comptabilité faisait apparaître un passif supérieur à l’actif de la société et une trésorerie en berne. De surcroît, l’administration fiscale a engagé une procédure de redressement fiscal suivant proposition de rectification de comptabilité en date du 26 juillet 2018. Le redressement fiscal envisagé portait potentiellement sur plusieurs centaines de milliers d’euros de crédit impôt recherche (CIR) et de crédit impôt innovation (CII). En votre double qualité de DG et DAF de la société, le traitement du volet redressement fiscal vous incombait. Vous étiez à ce titre l’un des acteurs indispensables de la gestion des relations entre la société et l’administration fiscale et le conciliateur qui avait été désigné par le tribunal de commerce de Toulouse suivant ordonnance en date du 6 juillet 2018 en la personne de Me [F] [E]. Au mois de juin 2017, après que l’administration fiscale se soit saisie de ce dossier, elle a contacté certains partenaires de notre société pour avoir des informations complémentaires relativement aux projets ayant été éligibles au CIR et CII. Alors que le Président de la société avait tenu un discours rassurant auprès de ces partenaires, vous avez au contraire dressé un tableau alarmant de la situation en évoquant une ‘mise sous tutelle’ de la société par l’administration fiscale en allant même jusqu’à parler de ‘liquidation’ de notre société auprès de notre partenaire Corsica Beauty. Vous avez ainsi entrepris une action de désinformation et avez manqué à votre devoir de discrétion ce qui a été extrêmement préjudiciable à l’entreprise. Le 14 juillet 2018, après désignation du conciliateur par la juridiction consulaire de [Localité 4], un appel à provision, sur honoraires nous a été adressé par ce dernier. Le paiement de cette provision était essentiel pour permettre au conciliateur de mener à bien la mission qui lui avait été confiée dès lors qu’à défaut de règlement de la provision, ce dernier n’aurait alors entrepris aucune démarche. Il y avait naturellement urgence à permettre une intervention rapide du conciliateur compte tenu du contexte et des difficultés rencontrées par notre société. L’appel de provision vous a été adressé en votre double qualité de DG et DAF le jour même pour règlement immédiat, ce règlement vous incombant dans le cadre de vos fonctions. Vous répondiez alors le 16 juillet 2018 que le paiement serait réalisé. Le 1er août 2018, soit plus de 15 jours plus tard, le Président de la société était obligé de vous relancer aux fins que vous procédiez au paiement de ladite provision. Vous répondiez alors vous en occuper le jour même prétextant avoir dû prioriser la ventilation de la trésorerie alors que le paiement aurait pu intervenir dès l’appel des fonds. Ce retard a bien évidemment impacté la célérité de l’intervention du conciliateur et fait perdre un précieux temps à la société. Le 1er août 2018, le Président de la société vous demandait de focaliser votre intervention notamment sur le contrôle fiscal qui venait d’être engagé par l’administration fiscale au niveau des CIR et CII de l’année 2017 et des années précédentes et de laisser le Président arbitrer les paiements fournisseurs et la procédure de conciliation. Le 7 août 2018, vous expliquez finalement ne pas pouvoir avancer sur le volet du contrôle fiscal prétextant que les principaux concernés étaient partis en congés annuels, que vous ne pouviez monter un dossier technique et que vous n’en aviez en toute hypothèse pas le temps matériellement nécessaire pour adresser une réponse à l’administration fiscale dans le délai de 30 jours qui nous était imparti. Pourtant, vous étiez avisé de la difficulté depuis plusieurs mois auparavant et vous aviez naturellement pour mission de vous charger prioritairement de ce contrôle fiscal depuis l’origine. Le 13 août 2018, vous informez le Président de la société que vous avez procédé au règlement de dettes de la société vis-à-vis de sous traitants pour un total de plus de 23 000 euros alors que le Président vous avez, dès le 1er août 2018, demandé de le laisser arbitrer les paiements des partenaires de la société. Le 22 août 2018, vous précisiez ne pas avoir été en mesure de constituer un dossier technique à remettre à l’administration fiscale et demandiez au Président, alors qu’il s’agissait de votre mission et responsabilité, quelle réponse allait être adressée à cette administration. Pire, alors même qu’il restait à notre société un délai de plus d’une semaine, soit le quart du délai imparti, pour présenter des observations à l’administration fiscale, vous avez d’autorité, nonobstant votre rôle majeur en votre double qualité de DG et DAF, et au regard de l’urgence et de la situation périlleuse de l’entreprise vous conveniez au demeurant, décidé de partir en congés annuels le 24 août 2018 pour une durée de deux semaines, soit avant l’expiration du délai de réponse imparti par l’administration fiscale et alors même qu’aucune proposition de réponse n’avait été effectuée. A votre retour de congés, le 5 septembre 2018, vous deviez présenter au Président une synthèse de l’échange qui avait eu lieu entre une partie de l’équipe de la société et la presse et organiser une réunion avec les salariés de la société. Vous ne l’avez pourtant pas fait. L’administration fiscale n’était finalement pas destinataire d’un courrier de réponse dans le délai imparti. Le 19 septembre 2018, alors que l’administration fiscale nous octroyait un délai complémentaire pour apporter des précisions relativement à la proposition de rectification notifiée le 26 juillet 2018, vous répondiez ne pas comprendre et estimiez que le délai accordé d’environ 3 semaines ne serait pas suffisant pour apporter une réponse technique sérieuse. Enfin, en votre qualité de DG de la société, vous avez la responsabilité globale de la gestion des ressources humaines. Or, à la lecture des rapports d’activité 2017 et 2018, il apparaît que la société a souffert d’un fort désengagement des collaborateurs. Pourtant, vous n’en avez jamais avisé clairement le Président et n’avez pas davantage pris de mesures destinées à endiguer ce phénomène perturbant la bonne marche de l’entreprise. Vous avez ainsi été particulièrement négligent et avez par là même manqué à vos obligations en commettant des fautes professionnelles. Votre attitude et les faits précédemment mis en exergue sont constitutifs de fautes qui, prise isolément ou dans leur ensemble, sont d’une particulière gravité et mettent en cause la bonne marche de l’entreprise. Les explications recueillies auprès de vous au cours de l’entretien préalable du 30 octobre dernier dont il ressort que vous n’avez manifestement pas pris la mesure de la situation actuelle de la société, ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet. Nous vous informons que nous avons, en conséquence, décidé de vous licencier pour faute grave. Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien même temporairement dans l’entreprise s’avère impossible. Votre licenciement prend donc effet immédiatement à la date d’envoi de la présente, sans indemnité de préavis ni de licenciement. Nous vous rappelons que vous faites l’objet d’une mise à pieds à titre conservatoire et que, par conséquent, la période non travaillée du 18 octobre 2018 au jour d’envoi de la présente lettre, nécessaire pour effectuer la procédure de licenciement, ne vous sera pas rémunérée. Les sommes vous restant dues vous seront adressées par courrier ainsi que votre certificat de travail, reçu pour solde de tout compte et votre attestation Pôle Emploi. Vous avez la possibilité de faire une demande de précision des motifs du licenciement énoncés dans la présente lettre, dans les 15 jours suivant sa notification par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. Nous avons la faculté d’y donner suite dans un délai de 15 jours après réception de votre demande, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. Nous pouvons également, le cas échéant et dans les mêmes formes, prendre l’initiative d’apporter des précisions à ces motifs dans un délai de 15 jours suivant la notification du licenciement.’ Sur l’irrégularité alléguée de la procédure de licenciement Selon l’article L1232-3 du code du travail, l’employeur indique au cours de l’entretien préalable les motifs de la décision envisagée et recueille les explications du salarié. M.[W] se prévaut de l’irrégularité de la procédure de licenciement caractérisant une mauvaise foi de l’employeur, faisant valoir que certains griefs énoncés dans la lettre de licenciement n’ont pas été évoqués lors de l’entretien préalable du 18 octobre 218. Il fonde sa demande sur un compte rendu écrit établi par M.[H] [P], conseiller salarié qui l’a assisté lors de l’entretien. Ce document , dont le contenu est contesté par l’employeur, ne revêt pas un caractère contradictoire à défaut de signature apposée par l’employeur. Il ne peut donc lui être accordé de force probante. L’irrégularité n’est donc pas caractérisée et ne saurait en tout état de cause affecter le bien-fondé du licenciement. Sur le fond Les principaux griefs articulés contre le salarié sont les suivants: 1- la tardiveté dans le paiement de la provision des honoraires du conciliateur désigné par le tribunal de commerce 2-une négligence dans la gestion d’une procédure de redressement fiscal 3-la tenue d’un discours contre productif et anxiogène auprès de partenaires(gérante de la société Corsica Beauty – société dans laquelle M.[R] avait pris une participation de 30% -) la prise de contacts avec un journaliste 4-un désengagement de la gestion des ressources humaines 5-le non respect des arbitrages de paiement mis en place par Monsieur [R]. -Sur le paiement tardif de la provision sur honoraires du conciliateur Des éléments qui précédent l’ouverture de la procédure collective dont la société EKITO a fait l’objet, il ressort que par ordonnance du président du tribunal de commerce de Toulouse du 6 juillet 2018 une procédure de conciliation a été instaurée et que la SELARL [E] a été désignée en qualité de conciliateur. Il résulte des courriers produits aux débats que l’appel de provision est intervenu le 16 juillet 2018 et que le paiement en a été effectué le 1er août 2018, ainsi qu’en atteste le courriel adressé par M.[W] au dirigeant M.[R] . Il s’en déduit que l’employeur a eu connaissance du manquement reproché au salarié plus de deux mois avant l’engagement de la procédure de licenciement par la convocation du salarié à l’entretien préalable le 19 octobre 2018.Ce fait, qui n’a pas été réitéré depuis, est donc prescrit en application de l’article L1332-4 du code du travail. Ce grief sera écarté. – Sur une négligence fautive dans la gestion d’une procédure de redressement fiscal Il est constant que l’administration fiscale a procédé à une vérification de comptabilité sur la période du 19 décembre 2017 au 24 juillet 2018 et que par courrier du 26 juillet 2018 l’inspectrice des finances a adressé au dirigeant de la société EKITO une proposition de rectification sur 77 pages en lui accordant un délai de 30 jours pour adresser des observations, avec possibilité de solliciter une prorogation de 30 jours en cas d’application de la procédure de rectification contradictoire. Cette rectification relative notamment aux crédits d’impôts recherche et crédits d’impôt innovation portait sur une somme de 106 454 euros. Ce courrier de l’administration fiscale rappelle qu’il appartient à l’entreprise qui entend obtenir le bénéfice du crédit impôt recherche de fournir l’ensemble des documents scientifiques et techniques justifiant l’éligibilité des opérations de recherches réalisées ; et relève que les documents fournis après une demande du 6 avril 2018 sont généraux et superficiels et ne justifient pas d’une éligibilité des travaux aux crédits d’impôts. Par courrier du 3 août 2028 l’administration fiscale rappelle au dirigeant de la société KERIKO le délai de 30 jours imparti pour adresser ses observations. Elle rappelle également en page 8 de ce courrier qu’à la demande de justification présentée par l’administration, M.[W] directeur général de la société, a répondu par courriel du 25 mai 2018 ‘être en déplacement mais travailler sur les éléments demandés à partir de la semaine prochaine’; qu’au 3 août 2018 il n’avait pas été répondu la demande de justification concernant la nature des travaux et le montant des dépenses. L’importance du redressement fiscal envisagé par l’administration à raison de son montant supérieur à 100 000 euros, présentait manifestement un enjeu majeur pour la société KERIKO. En vertu de l’article 2 de son contrat de travail du 3 octobre 2016 M.[W] , en sa qualité de directeur général et directeur des affaires financières, assurait des missions de gestion administrative , financière et de bonne stratégie pour le compte de la société EKITO. Il ne peut être contesté que le suivi de la procédure de redressement fiscal et les échanges nécessaires qu’il impliquait avec l’administration, entraient bien dans la mission de M.[W] situé au plus haut niveau de responsabilité dans la société . Le salarié se prévaut de son désengagement du dossier fiscal imposé par l’employeur qui aurait repris la charge de ce contrôle à compter de juillet 2018 et excipe sur ce point d’échanges de courriels entre les 5 et 9 juillet 2018. Parmi ces messages celui qu’adressait le dirigeant à M.[W] le 5 juillet 2018 pouvait laisser penser à une reprise du suivi des relations avec l’administration fiscale par le dirigeant ( pièce 22 salarié: ‘Je m’occupe de ce dossier avec l’avocat, le conciliateur et le TC(…) merci de rester concerné sur l’opérationnel, et de ne pas stresser ou stresser d’autres personnes outre mesure, sur un dossier qui n’est pas terminé.’ Cependant le courriel adressé au salarié le 1er août 2018 (pièce 4 employeur) invite à nouveau le salarié à ‘ se concentrer sur l’opérationnel commercial, administratif et RH’, et précise dans les termes suivants: ‘ L’urgence est que tu traites de manière opérationnelle: le CIR/CII 2017 en priorité, et CIR/CII précédents, je te demande de répondre aux impôts et à leurs demandes légitimes car, car nous te l’avons déjà dit, ce n’est pas eux qui bloquent le CIR mais bien l’absence de réponse dangereuse qui bloque le CIR. Tu dois donc leur fournir les dossiers et informations demandées. Si tu as besoin d’âtre aidé , sur leur formulation technique, informe moi, tu peux solliciter une partie de l’équipe comme je te l’ai dit (…) Je souhaite il va de soi, voir les documents de ce dossier de contrôle fiscal CII.CIR avant leur envoi (…).’ Ce message clair et dépourvu de toute ambiguité , non seulement ne décharge pas le salarié de sa mission financière de directeur des affaires financières sur le sujet du contrôle fiscal, mais encore lui demande instamment de répondre aux demandes de l’administration fiscale. Le motif tiré d’un désengagement du salarié par le dirigeant l’exonérant de toute responsabilité à compter du 1er août 2018 dans la gestion du suivi de la procédure de redressement fiscal est donc assurément inopérant. Alors que des observations peuvent être formulées par la société EKITO auprès de l’administration fiscale jusqu’au 8 septembre 2018 en réponse au projet de redressement, M.[W] indique au dirigeant dès le 7 août 2018 ne pouvoir ‘produire un dossier de qualité sur le mois d’août’. Le 22 août 2018 il ajoute ne pas avoir eu le temps matériel de constituer un dossier technique extrêmement chronophage. Il indique 4 jours plus tard partir 15 jours en congé à compter du 24 août. Par ailleurs, alors que l’administration fiscale a accordé un délai de réponse supplémentaire jusqu’au 8 octobre 2018 , M.[W] , considérant que le délai accordé ‘rend illusoire (…)le fait de reconstituer un dossier technique de présentation de l’ensemble des projets 2014-2017″, avec le risque ‘de produire un travail considérable sans pour autant faire bouger la position’ de l’administration, interroge le dirigeant sur la conduite à tenir. Ainsi au-delà de la simple transmission d’un rapport administratif (relevé d’heures, listes des projets, contrats associés) que M.[W] indiquait préparer le 2 août 2018 (pièce47 salarié), celui-ci revenant sur une prétendue reprise du dossier par le dirigeant constatait dans un courriel adressé à ce dernier le 6 septembre 2018 qu’il n’avait ‘pas été fait de réponse au service des impôts pour contester leur position.’ Les défaillances de M.[W] dans sa mission de directeur des affaires financières ont commencé à se manifester à compter du 1er août 2018 par un immobilisme face aux demandes d’observations de l’administration fiscale et aux attentes précises du dirigeant concernant un traitement prioritaire le dossier fiscal . Nonosbstant la période de ses congés, M.[W] s’est abstenu à son retour le 10 septembre 2018 d’effectuer des diligences lui incombant dans le délai complémentaire qu’avait accordé l’administration jusqu’au 8 octobre 2018. C’est donc à compter du départ en vacances du salarié et surtout de son retour de congés le 10 septembre 2018 que l’employeur a pris la mesure des défaillances du salarié dans toute leur ampleur. La négligence passive et délibérée dont a fait preuve le salarié dans l’exercice de sa mission, laissant le dirigeant répondre seul pour apporter des réponses à l’administration fiscale alors même qu’il entrait dans sa mission de directeur des affaires financières d’effectuer ce travail essentiel pour la vie de l’entreprise, caractérise une faute grave rendant impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. Le jugement entrepris est confirmé en ses dispositions ayant débouté le salarié de ses demandes financières pour licenciement injustifié. Il est également débouté de ses demandes subsidiaires pour un licenciement requalifié en licenciement pour cause réelle et sérieuse. Sur les demandes annexes M.[W], partie perdante, supportera les entiers dépens d’appel. Aucune circonstance d’équité ne justifie de faire application de l’article 700 du code de procédure civile. M.[W] est débouté de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La SELARL [V] et associés, ès qualités de liquidateur de la société EKITO, est en droit de réclamer l’indemnisation des frais non compris dans les dépens qu’elle a dû exposer à l’occasion de cette procédure. M.[W] sera donc tenu de lui payer la somme de 800 euros en application des dispositions de l’article 700 al.1er 1° du code de procédure civile. Le jugement entrepris est confirmé en ses dispositions concernant les frais et dépens de première instance. La SELARL [V] et associés est déboutée de sa demande formée au titre des frais et dépens. Le jugement déféré est confirmé en ses dispositions relatives aux frais et dépens de première instance. PAR CES MOTIFS La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort, Confirme le jugement déféré, Y ajoutant Déboute M.[X] [W] de ses demandes indemnitaires pour licenciement pour cause réelle et sérieuse, Condamne M.[X] [W] aux entiers dépens d’appel, Le condamne à payer à la SELARL [V] et associés , ès qualités de mandataire liquidateur de la société EKITO, la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Le présent arrêt a été signé par S. BLUM”, présidente et C. DELVER, greffière de chambre. LA GREFFI’RE LA PR”SIDENTE S. BLUM” C. DELVER .  


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