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Il résulte de ce qui précède que la gestion de l’association Le Pont de Saussay ne peut être regardée comme désintéressée et que cette association était dès lors soumise à l’impôt sur les sociétés en application de l’article 206 1 BIS du code général des impôts. Par suite, Mme C pouvait être imposée dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers à raison des sommes que lui a versées cette association.
Aux termes de l’article 92 du code général des impôts : ” 1. Sont considérés comme provenant de l’exercice d’une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n’ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus () “. Les profits réalisés par des personnes qui sous-louent à des tiers des immeubles nus dont elles sont locataires relèvent de la catégorie des bénéfices non commerciaux et non de celle des revenus fonciers.
6. Il est constant que Mme C sous-louait une partie de son habitation à l’association Le Pont de Saussay moyennant des indemnités d’occupation que celle-ci lui versait. L’administration fiscale a considéré que cette sous-location concernait des locaux nus, dès lors que la vérification de comptabilité de cette association avait fait apparaître que cette dernière avait exposé, au titre de l’année 2013, des dépenses d’ameublement consistant en l’achat d’une machine à laver, d’un frigo, de mobilier, d’une cabine hydro et d’un chauffe-eau. Si Mme C soutient que les locaux étaient forcément meublés lors de la visite de l’association ou du représentant du Conseil général en 2010, il ne résulte pas de l’instruction que l’accord de ces organismes était conditionné par le caractère meublé des locaux. Elle ne produit aucun contrat signé entre elle et l’association
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Cour administrative d’appel de Versailles, 1ère Chambre, 28 mars 2023, 21VE01667 Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l’impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l’année 2013 et de prononcer le sursis de paiement de ces impositions.
Par un jugement n° 1807078 du 9 avril 2021, le tribunal administratif de Versailles a jugé qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de Mme C tendant au sursis de paiement et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 7 juin 2021 et le 24 février 2022, Mme C, représentée par Me Dumont, avocat, demande à la cour :
1°) d’annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions en litige ;
3°) de mettre à la charge de l’État la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
– le jugement attaqué est irrégulier car entaché d’erreur de droit et d’erreur manifeste d’appréciation ;
– les indemnités d’occupation qui lui ont été versées par l’association Le Pont de Saussay doivent être qualifiées de revenus fonciers et non de bénéfices non commerciaux, dès lors que les locaux étaient loués meublés ; elle peut opposer sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales une position formelle concernant ces indemnités d’occupation, prise par deux fois par l’administration ;
– l’administration a considéré à tort qu’elle était la gérante de fait de l’association Le Pont de Saussay et que la gestion de cette association n’était pas désintéressée ;
– l’administration l’a imposée à tort sur le fondement de l’article 111 c du code général des impôts alors qu’elle ne peut être considérée comme le maître de l’affaire de l’association Le Pont de Saussay ; les virements d’argent qu’elle a perçus correspondent à des remboursements de travaux d’aménagement qu’elle a effectués sur ses deniers propres ;
– les pénalités ne sont pas motivées, ni justifiées ; le manquement relatif aux indemnités d’occupation est seulement qualifié matériellement, mais pas intentionnellement ;
– elle a été empêchée de contrôler et de comprendre les montants réclamés dès lors que l’administration a procédé à une présentation différente des sommes à payer dans l’avis d’imposition et dans la proposition de rectification du 29 février 2016.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 janvier 2022, le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
– les conclusions de Mme C ne peuvent tendre à la décharge de l’ensemble des suppléments d’impôt mis à sa charge, alors qu’elle n’a pas contesté la remise en cause de son quotient familial ;
– les moyens soulevés par Mme C ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 26 janvier 2022, la clôture d’instruction a été fixée au 16 mars 2022 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de Mme A,
– et les conclusions de Mme Bobko, rapporteure publique.
:
1. L’association Le Pont de Saussay, dont Mme E C était directrice salariée, a fait l’objet d’une vérification de comptabilité, à l’issue de laquelle lui ont été proposées des rectifications par lettre du 19 février 2016. L’administration a par ailleurs consulté des pièces des procédures judiciaires ouvertes à l’encontre de cette association et de Mme C. La situation fiscale de cette dernière a fait l’objet d’un contrôle sur pièces, à l’issue duquel des rectifications lui ont été proposées, par proposition de rectification du 29 février 2016, en matière d’impôt sur le revenu au titre des années 2013 et 2014. L’administration a rejeté la réclamation préalable de Mme C puis, par décision du 18 décembre 2016 prise suite à recours hiérarchique, a abandonné la rectification relative aux travaux financés par l’association Le Pont de Saussay au titre de l’année 2014. Mme C a contesté les suppléments d’impôt mis à sa charge et relatifs aux indemnités d’occupation et aux revenus distribués devant le tribunal administratif de Versailles et en a demandé également le sursis de paiement. Par un jugement n° 1807078 du 9 avril 2021, dont Mme C relève appel, le tribunal administratif de Versailles a jugé qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur ses conclusions tendant au sursis de paiement de ces suppléments d’impôt et a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Les moyens tirés de ce que les premiers juges auraient entaché le jugement attaqué d’erreur de droit et d’erreur manifeste d’appréciation concernent le bien-fondé du jugement attaqué, et non sa régularité.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d’imposition :
3. En premier lieu, si Mme C soutient que la procédure d’imposition est irrégulière, dès lors que l’administration a pris à deux reprises une position formelle concernant la qualification des indemnités d’occupation qui lui étaient versées par l’association Le Pont de Saussay, un tel moyen concerne le bien-fondé des impositions litigieuses, et non la régularité de la procédure d’imposition.
4. En deuxième lieu, Mme C soutient qu’elle a été empêchée de contrôler et de comprendre les montants réclamés dès lors que l’administration a procédé à une présentation différente des sommes à payer dans l’avis d’imposition et dans la proposition de rectification du 29 février 2016. Toutefois, la proposition de rectification du 29 février 2016 comprend un récapitulatif concernant la détermination du revenu imposable dont les éléments sont identiques à ceux figurant dans l’avis d’imposition. Le moyen avancé doit ainsi être écarté comme manquant en fait.
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
S’agissant des bénéfices non commerciaux :
5. Aux termes de l’article 92 du code général des impôts : ” 1. Sont considérés comme provenant de l’exercice d’une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n’ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus () “. Les profits réalisés par des personnes qui sous-louent à des tiers des immeubles nus dont elles sont locataires relèvent de la catégorie des bénéfices non commerciaux et non de celle des revenus fonciers.
6. Il est constant que Mme C sous-louait une partie de son habitation à l’association Le Pont de Saussay moyennant des indemnités d’occupation que celle-ci lui versait. L’administration fiscale a considéré que cette sous-location concernait des locaux nus, dès lors que la vérification de comptabilité de cette association avait fait apparaître que cette dernière avait exposé, au titre de l’année 2013, des dépenses d’ameublement consistant en l’achat d’une machine à laver, d’un frigo, de mobilier, d’une cabine hydro et d’un chauffe-eau. Si Mme C soutient que les locaux étaient forcément meublés lors de la visite de l’association ou du représentant du Conseil général en 2010, il ne résulte pas de l’instruction que l’accord de ces organismes était conditionné par le caractère meublé des locaux. Elle ne produit aucun contrat signé entre elle et l’association Le Pont de Saussay permettant de déterminer la consistance des locaux loués, ni aucune facture relative à l’achat de mobilier, alors que les locaux étaient destinés à accueillir dix personnes mineures. L’attestation produite en première instance de Mme B, assistante embauchée par l’association Le Pont de Saussay, indiquant qu’elle a aidé la requérante pour l’achat de meubles et l’aménagement des chambres, ne permet pas d’établir si Mme C a alors agi en son nom propre ou en sa qualité de directrice salariée de l’association. Par suite, c’est à bon droit que l’administration, se fondant sur les seuls éléments en sa possession en l’absence de tout document fourni par la requérante, a considéré que les locaux sous-loués étaient nus et a imposé les indemnités d’occupation dans la catégorie des bénéfices non commerciaux.
S’agissant des revenus distribués :
7. Aux termes de l’article 108 du code général des impôts : ” Les dispositions des articles 109 à 117 fixent les règles suivant lesquelles sont déterminés les revenus distribués par : / 1° Les personnes morales passibles de l’impôt prévu au chapitre II du présent titre (). “. Aux termes de l’article 206 1 BIS du même code : ” () ne sont pas passibles de l’impôt sur les sociétés prévu au 1 les associations régies par la loi du 1er juillet 1901 () dont la gestion est désintéressée, lorsque leurs activités non lucratives restent significativement prépondérantes (). / Les organismes mentionnés au premier alinéa deviennent passibles de l’impôt sur les sociétés prévu au 1 à compter du 1er janvier de l’année au cours de laquelle l’une des trois conditions prévues à l’alinéa précité n’est plus remplie. “. L’article 261-7 du même code dispose : ” Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : () 7. (Organismes d’utilité générale) :1° a. les services de caractère social, éducatif, culturel ou sportif rendus à leurs membres par les organismes légalement constitués agissant sans but lucratif, et dont la gestion est désintéressée. () d. le caractère désintéressé de la gestion résulte de la réunion des conditions ci-après : / L’organisme doit, en principe, être géré et administré à titre bénévole par des personnes n’ayant elles-mêmes, ou par personne interposée, aucun intérêt direct ou indirect dans les résultats de l’exploitation. / Toutefois, lorsqu’une association régie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association () décide que l’exercice des fonctions dévolues à ses dirigeants justifie le versement d’une rémunération, le caractère désintéressé de sa gestion n’est pas remis en cause si ses statuts et ses modalités de fonctionnement assurent sa transparence financière, l’élection régulière et périodique de ses dirigeants, le contrôle effectif de sa gestion par ses membres et l’adéquation de la rémunération aux sujétions effectivement imposées aux dirigeants concernés () “.
8. Il est constant que Mme C a pris l’initiative de créer l’association du Pont de Saussay à qui elle sous-louait une partie de son habitation et dans laquelle elle exerçait les fonctions de directrice salariée. Il ressort des procès-verbaux d’audition recueillis par l’autorité judiciaire que la présidente de l’association, Mme D, ne rencontrait Mme C qu’une fois par an, ne lui parlait que rarement au téléphone et se contentait de vérifier que l’association n’était pas endettée. Mme C a reconnu au cours de son audition que Mme D n’exerçait aucune prérogative dans le domaine éducatif, ni en ce qui concerne la gestion du site. Mme D avait donné pouvoir à Mme C pour prendre toute décision qu’elle jugera utile pour le fonctionnement de l’association, administratif, financier et humain, ainsi que délégation de signature sur tous les documents concernant l’association, y compris les comptes bancaires. Mme C établissait les factures de l’association au nom du conseil général de l’Essonne, communiquait chaque mois au cabinet comptable les éléments permettant l’établissement des bulletins de salaires et effectuait le règlement des paies. Au vu de l’ensemble de ces éléments, elle doit être considérée comme la gérante de fait de l’association Le Pont de Saussay.
9. Il résulte de l’instruction que Mme C a bénéficié, en 2013, non seulement de son salaire de directrice, d’un montant brut annuel de 47 654 euros, mais également de quatre virements provenant de l’association Le Pont de Saussay, pour un montant total de 31 680 euros. Si Mme C soutient que ces versements correspondaient au remboursement de travaux d’aménagement qu’elle aurait effectués sur ses deniers propres pour le compte de l’association, elle n’établit pas la réalité de cette allégation en se bornant à affirmer qu’elle recherchait les pièces justificatives afférentes. Par ailleurs, l’association a payé en 2013 des dépenses privatives de Mme C à hauteur de 5 009,35 euros, comportant, outre l’entretien et l’assurance de son véhicule personnel, la nourriture pour ses chevaux, ainsi que l’achat et l’installation, dans la salle de bain privative de l’intéressée, d’un sauna, pour un coût de 890 euros.
10. Il résulte de ce qui précède que la gestion de l’association Le Pont de Saussay ne peut être regardée comme désintéressée et que cette association était dès lors soumise à l’impôt sur les sociétés en application de l’article 206 1 BIS du code général des impôts. Par suite, Mme C pouvait être imposée dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers à raison des sommes que lui a versées cette association.
11. D’autre part, aux termes de l’article 111 du code général des impôts : ” Sont notamment considérés comme revenus distribués : () / c. Les rémunérations et avantages occultes “. Pour l’application de ces dispositions, il appartient à l’administration d’individualiser les sommes ou opérations qu’elle entend qualifier de revenus distribués.
12. Il résulte de ce qui a été dit au point 10 que Mme C a bénéficié de virements d’argent de l’association Le Pont de Saussay qu’elle n’a pas été en mesure de justifier, et que cette association a pris à sa charge certaines des dépenses personnelles de la requérante, ce qu’elle ne conteste pas. Celle-ci ne peut utilement soutenir qu’elle n’est pas le maître de l’affaire de cette association, dès lors que l’administration a démontré qu’elle avait appréhendé directement les avantages occultes litigieux. Au vu de l’ensemble de ces circonstances, c’est à bon droit que l’administration a qualifié ces avantages ” de rémunérations ou avantages occultes ” au sens du c de l’article 111 du code général des impôts.
En ce qui concerne les pénalités :
13. Aux termes de l’article 1729 du code général des impôts : ” Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt ainsi que la restitution d’une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l’Etat entraînent l’application d’une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré “. Pour établir le manquement délibéré, l’administration fiscale a relevé la qualité de gérante de fait de l’association Le Pont de Saussay de Mme C, la réitération de l’omission de déclaration des indemnités d’occupation perçues, l’absence de déclaration des désinvestissements constatés et l’importance des montants encaissés par rapport aux montants déclarés. Elle a ainsi suffisamment motivé les pénalités infligées. Contrairement à ce que soutient la requérante, le manquement concernant les indemnités d’occupation est caractérisé intentionnellement par la répétition des omissions déclaratives. Enfin, Mme C ne peut utilement soutenir que la plupart des manquements se situent au niveau de l’association et non au niveau de sa personne, dès lors que l’administration fiscale a fait ressortir, dans sa motivation, sa qualité de gérante de fait de cette association.
14. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que Mme C n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 1er : La requête de Mme C est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E C et au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l’audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient :
M. Beaujard, président de chambre,
Mme Dorion, présidente assesseure,
Mme Pham, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023.
La rapporteure,
C. A Le président,
P. BEAUJARDLa greffière,
A. GAUTHIER
La République mande et ordonne au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,