Permis de construire illégal sanctionné
Permis de construire illégal sanctionné

Il ressort des pièces du dossier que les constructions prévues dans la partie basse de la parcelle située en zone U constituent des dépendances des constructions principales situées dans la partie haute et n’ont pas de vocation fonctionnelle autonome et que les bâtiments situés dans la partie haute sont imbriqués et interdépendants les uns des autres. Enfin, au vu de ce qui a été dit au point 6, le vice retenu concerne l’ensemble du projet autorisé, remettant en cause son ampleur, et, par suite, n’est pas susceptible de faire l’objet d’un permis de régularisation dès lors qu’une mesure de régularisation impliquerait d’apporter à ce projet un bouleversement tel qu’il en changerait la nature même. Dans ces conditions, la collectivité de Saint-Barthélemy et la société RSB ne sont pas fondées à demander, à titre subsidiaire, l’application des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l’urbanisme.

Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement attaqué, que Mme Jouet et autres sont fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté leur demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 21 novembre 2019 par lequel le conseil exécutif de la collectivité de Saint-Barthélemy a délivré à la société RSB un permis de construire portant sur l’édification de 24 bâtiments sur le site appelé  » Autour du Rocher  » ainsi que par voie de conséquence l’arrêté du 10 décembre 2020 lui accordant un permis de construire modificatif.

*     *     *

Cour administrative d’appel de Bordeaux, 1ère chambre – formation à 3, 23 mars 2023, 22BX00940 Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première requête, Mme G Jouet, Mme K D, M. José D, Mme I D, Mme E F et M. C D ont demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy d’annuler les délibérations du 21 novembre 2019 et du 10 décembre 2020 par lesquels le conseil exécutif de la collectivité de Saint-Barthélemy a délivré à la société RSB un permis de construire et un permis de construire modificatif portant sur l’édification de 24 bâtiments sur le site appelé  » Autour du Rocher « .

Par une seconde requête, Mme G Jouet, M. José D, Mme I D, Mme E F et M. C D ont demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy d’annuler la délibération du 10 décembre 2020 par laquelle le conseil exécutif de la collectivité de Saint-Barthélemy a délivré à la SAS RSB un permis de construire modificatif portant sur l’édification de 24 bâtiments sur le site appelé  » Autour du Rocher « .

Par un jugement n° 2000001, 2100002 du 25 janvier 2022, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 mars 2022, le 4 octobre 2022 ainsi qu’un mémoire non communiqué enregistré le 12 décembre 2022, Mme G Jouet, M. José D, Mme I D, Mme E F et M. C D, représentés par Me Collet, demandent à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du 25 janvier 2022 du tribunal administratif de Saint-Barthélemy ;

2°) d’annuler les délibérations du conseil exécutif de la collectivité de Saint-Barthélemy en date du 21 novembre 2019 et du 10 décembre 2020 ;

3°) de mettre à la charge de la collectivité de Saint-Barthélemy une somme de 2 000 euros à verser à chacun des requérants au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

– le jugement n’a pas répondu à la branche du moyen concernant les procédures d’information prévues à l’article 121-1 du code de l’environnement de Saint-Barthélemy à destination des conseillers territoriaux et du public ;

– leur requête est recevable en application de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme du fait de l’impact du projet sur les conditions d’utilisation et de jouissance de leur propriété située sur la parcelle limitrophe du projet ;

– il existe une ambiguïté sur la destination du projet, qui a été instruit comme un projet d’habitation alors qu’il s’agit d’un dossier d’hébergement hôtelier, ce qui a une incidence sur l’appréciation portée par la collectivité en raison de la différence des règles applicables ;

– ce projet, qui constitue un équipement touristique, aurait dû comporter une étude d’impact en application des articles 121-1 et 121-2 du code de l’environnement de Saint-Barthélemy ; l’existence du document études des incidences ne pouvait permettre de régulariser ce vice dès lors qu’il n’a pas été soumis au conseil exécutif avant sa transmission au conseil économique social culturel et environnemental de Saint-Barthélemy (CESCE) ni fait l’objet d’une information préalable du public en méconnaissance de l’article 121-1 du code de l’environnement de Saint-Barthélemy, qu’il ne comporte pas l’ensemble des rubriques prévues à l’article 121-3 de ce code et n’a pas été actualisé au regard du nouveau projet ;

– ces délibérations sont insuffisamment motivées s’agissant des prescriptions qu’elles contiennent ;

– ce projet ne respecte pas la servitude particulière prévue par le règlement de la carte d’urbanisme pour la parcelle AP 137 en prévoyant des constructions au-delà de l’emprise des bâtiments initiaux en partie basse de la parcelle, en ne se limitant pas à une reconstruction de l’existant et en ne respectant pas l’obligation que le bâtiment reconstruit ne soit pas visible de la plage de Lorient ; sur ce dernier point le tribunal a renversé la charge de la preuve ; enfin, les aménagements de la partie centrale de la parcelle ne respectent pas les limites instaurées par cette servitude ;

– le projet ne respecte pas les densités prévues par les articles U6 et UR6 du règlement de la carte d’urbanisme ;

– ce projet ne respecte pas l’article 112-4 du code de l’urbanisme de Saint-Barthélemy et l’article 66 de l’ancien code en raison de la sous-estimation des consommations en eau et électricité et en l’absence de dispositifs propres au projet ;

– ce projet méconnaît les article 911-1 et 911-4 du code de l’environnement de Saint-Barthélemy en l’absence de l’obtention de la dérogation prévue par l’article L. 911-4 alors qu’il est susceptible d’entraîner l’altération ou la dégradation du milieu de l’espèce protégée des Phaétons et de réserve ou de prescription en ce sens ;

– ce projet méconnaît l’article R. 111-15 de l’ancien code de l’urbanisme de Saint-Barthélemy, qui permettait le refus d’un projet lorsque ses conséquences sur l’environnement ne pouvaient être évitées ou suffisamment réduites et les article 112-6 et 112-7 du nouveau code s’agissant du permis modificatif dès lors que les recommandations figurant dans l’avis de l’agence territoriale de l’environnement était insuffisantes et que les travaux et le fonctionnement du projet empêchera le retour du Phaéton à bec rouge ; les prescriptions sont insuffisantes pour protéger cette espèce durant la phase de travaux et les mesures d’évitement ne permettront pas la recolonisation du site en phase d’exploitation créant une atteinte irrémédiable à cette espèce protégée ; les prescriptions sur les travaux concernant les espèces végétales protégées en partie centrale sont insuffisantes ; il n’existe aucune prescription pour la partie basse en bordure du canal ; les prescriptions sont insuffisantes au regard de l’impact très fort que ce projet aura sur le site et le paysage remarquables dans lequel il s’implante ; ce projet qui perturbe également l’habitat du Bihoreau violacé et de la Crécerelle d’Amérique ne compte aucune mesures de protection à leur égard ;

– le dossier était incomplet au regard de l’article 71 de l’ancien code de l’urbanisme de Saint-Barthélemy et de l’article 134-10 du nouveau code en l’absence de la dérogation prévue par l’article 911-1 du code de l’environnement de Saint-Barthélemy et en l’absence de mention de cette nécessité, en l’absence d’élément permettant de visualiser le respect des dispositions de l’article UR7 relatif à la hauteur des constructions, en raison des incohérences sur le volet paysager s’agissant du respect de l’obligation d’absence de visibilité du projet depuis la plage de Lorient et s’agissant de l’évaluation de la consommation en eau, en énergie et des dispositifs de récupération des eaux de pluie ;

– le projet méconnaît l’article UR7 du règlement de la carte d’urbanisme qui limite les constructions à R+1 dès lors que la maison 1 et la tour comportent 3 niveaux et que la tour a une hauteur de plus de 9 mètres ;

– ces arrêtés méconnaissent l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme et l’article R. 112-2 du code de l’urbanisme de Saint-Barthélemy en l’absence de prescription pour prévenir le risque lié aux houles.

Par des mémoires en défense enregistrés le 18 août 2022 et le 10 novembre 2022, la société RSB conclut, à titre principal, au rejet de la requête, et à titre subsidiaire, à ce qu’il soit sursis à statuer dans l’attente de la régularisation du permis en application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme ou à ce qu’il soit prononcé une annulation partielle du permis en application de l’article L. 600-5 du même code, et à ce qu’il soit mis à la charge de Mme Jouet et autres la somme de 7 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

– la requête est irrecevable au regard de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme ;

– les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistrée le 6 octobre 2022 la collectivité de Saint-Barthélemy conclut au rejet de la requête et demande qu’une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme Jouet et autres.

Elle soutient que :

– la requête est irrecevable au regard de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme ;

– les moyens soulevés ne sont pas fondés ;

– les moyens soulevés sont susceptibles de faire l’objet d’une mesure de régularisation, il y aurait donc lieu de faire application des dispositions des articles L.600-5 et L.600-5-1 du code de l’urbanisme.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

– le code de l’urbanisme ;

– l’ancien code de l’urbanisme de Saint-Barthélemy ;

– le code de l’urbanisme Saint-Barthélemy ;

– le code de l’environnement de Saint-Barthélemy ;

– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

– le rapport de Mme Christelle Brouard-Lucas,

– les conclusions de M. Romain Roussel Cera, rapporteur public,

– et les observations de Me Collet, représentant Mme Jouet et autres et de Me Ferrand, représentant la société RSB.

Une note en délibéré présentée par Me Collet pour Mme Jouet et autres a été enregistrée le 3 mars 2023.

Une note en délibéré présentée par Me Ferrand, pour la société RSB a été enregistrée le 6 mars 2023.

Considérant ce qui suit

:

1. Par une délibération du 21 novembre 2019, le conseil exécutif de la collectivité de Saint-Barthélemy a accordé à la SAS RSB un permis de construire assorti de plusieurs prescriptions pour l’édification de 24 bâtiments sur le site appelé  » Autour du Rocher  » sur la parcelle AP 137, consécutivement à la demande de permis de construire formée par cette société le 7 mai 2019, complétée le 27 juin suivant. Un permis de construire modificatif assorti de prescriptions a été délivré à cette société le 10 décembre 2020. Par deux requêtes, Mme Jouet et autres ont demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy d’annuler ces deux décisions. Ils relèvent appel du jugement du 25 janvier 2022 par lequel le tribunal a rejeté leurs demandes.

Sur la fin de non-recevoir opposée en défense :

2. Aux termes de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme :  » Une personne autre que l’Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n’est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l’occupation ou à l’utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l’aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien qu’elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d’une promesse de vente, de bail, ou d’un contrat préliminaire mentionné à l’article L. 261-15 du code de la construction et de l’habitation () « .

3. Il résulte de ces dispositions qu’il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d’un recours pour excès de pouvoir tendant à l’annulation d’un permis de construire, de démolir ou d’aménager, de préciser l’atteinte qu’il invoque pour justifier d’un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d’affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s’il entend contester l’intérêt à agir du requérant, d’apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l’excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu’il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l’auteur du recours qu’il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu’il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d’un intérêt à agir lorsqu’il fait état devant le juge, qui statue au vu de l’ensemble des pièces du dossier, d’éléments relatifs à la nature, à l’importance ou à la localisation du projet de construction.

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme Jouet et autres sont propriétaires de la parcelle cadastrée AP 138 sur laquelle se situe une construction à usage d’habitation, qui est contigüe sur toute sa longueur nord à la parcelle AP 137, terrain d’assiette du projet lequel comporte 2 villas comprenant 7 et 4 chambres et des piscines en partie haute et, en partie basse, des locaux de service, un logement pour le gardien, des espaces de détente et de sport, un séjour-salle à manger pour les occupants des villas et une piscine. A l’exception des locaux de service, l’ensemble des constructions de la partie basse sont implantées le long de la limite séparative, dont ils ne sont séparés que par un canal couvert d’un mètre cinquante de large ainsi que par une bande végétalisée d’un mètre de large sur la partie accueillant les occupants de la villa. La façade sud de ces bâtiments comporte des baies ouvertes vers la propriété des appelants dans sa partie proche de la plage où est implantée leur maison. En outre, au regard de leur nature, l’utilisation de ces espaces est susceptible de générer des nuisances sonores. Ainsi, dès lors que les appelants sont voisins immédiats du terrain d’assiette du projet de construction contesté et que celui-ci est de nature, eu égard à sa proximité et à son implantation sur un terrain naturel actuellement non bâti en partie basse, à affecter directement les conditions d’utilisation ou de jouissance de leur bien, ils justifient d’un intérêt à agir contre les arrêtés contestés.

Sur la légalité des arrêtés attaqués :

5. Le règlement de la carte de d’urbanisme de Saint-Barthélemy comprend une partie intitulée  » terrains soumis à des dispositions particulières  » qui décrit ainsi ces terrains :  » Ces terrains sont matérialisés sur le document graphique par des ronds avec chacun un numéro et une lettre minuscule pour certain allant de 1 à 12. Pour certains d’entre eux, ils sont matérialisés en hachuré noir et indiqué dans la légende du document graphique en  » Ua « . / Toutes les parties hachurées représentent des zones de non implantation des bâtiments. « . Le point 7 de cette partie concerne la parcelle AP 137 et indique :  » Bâtiment à reconstruire avec une végétation afin que le bâtiment ne soit pas visible de la plage de Lorient. La partie hachurée ne peut pas recevoir de bâtiment et doit être aménagée de façon à assurer l’insertion paysagère de l’ensemble du projet « .

6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le règlement de la carte d’urbanisme de Saint-Barthélemy a classé la parcelle d’assiette du projet pour sa partie basse au sud en zone U, correspondant aux centres urbains, et en partie haute au nord en zone UR correspondant aux secteurs résidentiels de faible densité, dans laquelle les constructions sont soumises à des règles de densité plus strictes et l’a soumise aux dispositions particulières rappelées au point précédent. Dans ce contexte, alors que ces dispositions particulières ont pour objectif d’imposer des servitudes spécifiques sur cette parcelle, la référence par les auteurs du document d’urbanisme à un  » bâtiment à reconstruire  » a nécessairement pour objet de limiter les possibilités d’urbanisation de cette parcelle sur la partie haute classée en zone UR au regard des constructions qui y étaient précédemment édifiées, tout en autorisant l’urbanisation de la partie basse. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle comportait au centre de cette partie haute constructible un ancien hôtel restaurant construit autour d’un promontoire rocheux, à l’est un petit bungalow et à l’ouest un petit bâtiment de deux chambres, dont l’emprise totale était au plus de l’ordre de 600 m2 alors que le projet litigieux comporte sur cette partie une SHON de 1 262 m2 et une SHOB de 2 403 m2, et ne peut donc être regardé au regard de la forte augmentation des surfaces construites comme la reconstruction du bâtiment existant. Dans ce contexte, quand bien même la limitation prévue au point 7 n’impliquerait pas une reconstruction à l’identique, le projet ne respecte pas les dispositions particulières imposées par le règlement de la carte d’urbanisme de Saint-Barthélemy sur cette parcelle. Par suite, les appelants sont fondés à soutenir, que, contrairement à ce qu’a estimé le tribunal, le permis de construire initial a été délivré en méconnaissance de la disposition particulière figurant au point 7 du règlement de la carte d’urbanisme sans que les intimés ne puissent utilement se prévaloir de la circonstance que ce moyen a été écarté par le tribunal administratif de Saint-Barthélemy lors de l’examen d’un permis de construire précédent sur cette même parcelle, annulé pour un autre motif, dès lors que ce jugement n’est pas revêtu sur ce point de l’autorité de la chose jugée.

7. Pour l’application de l’article L. 600-4-1 du code de l’urbanisme aucun autre moyen n’apparaît susceptible, en l’état de l’instruction, de fonder l’annulation de l’arrêté attaqué.

Sur les conclusions de la collectivité de Saint-Barthélemy et de la société RSB tendant à l’application des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l’urbanisme :

8. Aux termes de l’article L. 600-5 du code de l’urbanisme :  » Sans préjudice de la mise en œuvre de l’article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu’un vice n’affectant qu’une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l’annulation qu’il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l’autorisation pourra en demander la régularisation, même après l’achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande d’annulation partielle est motivé. « . Aux termes de l’article L. 600-5-1 du même code :  » Sans préjudice de la mise en œuvre de l’article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu’un vice entraînant l’illégalité de cet acte est susceptible d’être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu’à l’expiration du délai qu’il fixe pour cette régularisation, même après l’achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. « .

9. Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires ayant conduit à l’adoption de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, que lorsque le ou les vices affectant la légalité de l’autorisation d’urbanisme dont l’annulation est demandée sont susceptibles d’être régularisés, le juge doit, en application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, surseoir à statuer sur les conclusions dont il est saisi contre cette autorisation, sauf à ce qu’il fasse le choix de recourir à l’article L. 600-5 du code de l’urbanisme, si les conditions posées par cet article sont réunies, ou que le bénéficiaire de l’autorisation lui ait indiqué qu’il ne souhaitait pas bénéficier d’une mesure de régularisation. Un vice entachant le bien-fondé de l’autorisation d’urbanisme est susceptible d’être régularisé, même si cette régularisation implique de revoir l’économie générale du projet en cause, dès lors que les règles d’urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n’implique pas d’apporter à ce projet un bouleversement tel qu’il en changerait la nature même.

10. D’une part les dispositions particulières applicable à la parcelle AP 137 sont reprises de manière identique par le règlement de la carte d’urbanisme de Saint-Barthélemy issu de la délibération n° 2021-071 du 9 décembre 2021 actuellement applicable. D’autre part, il ressort des pièces du dossier que les constructions prévues dans la partie basse de la parcelle située en zone U constituent des dépendances des constructions principales situées dans la partie haute et n’ont pas de vocation fonctionnelle autonome et que les bâtiments situés dans la partie haute sont imbriqués et interdépendants les uns des autres. Enfin, au vu de ce qui a été dit au point 6, le vice retenu concerne l’ensemble du projet autorisé, remettant en cause son ampleur, et, par suite, n’est pas susceptible de faire l’objet d’un permis de régularisation dès lors qu’une mesure de régularisation impliquerait d’apporter à ce projet un bouleversement tel qu’il en changerait la nature même. Dans ces conditions, la collectivité de Saint-Barthélemy et la société RSB ne sont pas fondées à demander, à titre subsidiaire, l’application des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l’urbanisme.

11. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement attaqué, que Mme Jouet et autres sont fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté leur demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 21 novembre 2019 par lequel le conseil exécutif de la collectivité de Saint-Barthélemy a délivré à la société RSB un permis de construire portant sur l’édification de 24 bâtiments sur le site appelé  » Autour du Rocher  » ainsi que par voie de conséquence l’arrêté du 10 décembre 2020 lui accordant un permis de construire modificatif.

Sur les frais liés à l’instance :

12. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge des appelants, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que demandent la collectivité de Saint-Barthélemy et la société RSB au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. Il y a lieu dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la collectivité de Saint-Barthélemy une somme de 300 euros chacun à verser à Mme G Jouet, M. José D, Mme I D, Mme E F et M. C D au titre des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Les délibérations du 21 novembre 2019 et du 10 décembre 2020 par lesquels le conseil exécutif de la collectivité de Saint-Barthélemy a délivré à la société RSB un permis de construire et un permis de construire modificatif portant sur l’édification de 24 bâtiments sur le site appelé  » Autour du Rocher  » sont annulées.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Saint-Barthélemy du 25 janvier 2022 est réformé en ce qu’il a de contraire à l’article 1er.

Article 3 : La collectivité de Saint-Barthélemy versera à Mme G Jouet, M. José D, Mme I D, Mme E F et M. C D respectivement une somme de 300 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G Jouet, désignée comme représentant unique qui en informera les autres requérants, à la collectivité de Saint-Barthélemy et à la société RSB.

Délibéré après l’audience du 2 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Claude Pauziès, président,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 mars 2023.

La rapporteure,

Christelle Brouard-LucasLe président,

Jean-Claude PauzièsLa greffière,

Stéphanie LarrueLa République mande et ordonne au représentant de l’Etat dans la collectivité de Saint-Barthélemy en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.N°  


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