Révocation abusive du Gérant : la notion de juste motif

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Révocation abusive du Gérant : la notion de juste motif
Ce point juridique est utile ?

L’article L 223-25 du code de commerce dispose que le gérant d’une SARL peut être révoqué par décision des associés dans les conditions de l’article L223-29, à moins que les statuts prévoient une majorité plus forte. Si la révocation est décidée sans juste motif, elle peut donner lieu à des dommages et intérêts.

Le cinquième motif pris de l’incapacité à travailler en équipe se rapporte selon les intimées au comportement erratique de Mme [H], celle-ci laissant les salariés livrés à eux-mêmes y compris les juniors, se révélant incapable d’organiser leur travail, d’exprimer ses directives de manière intelligible, court-circuitant certains employés et faisant preuve d’opacité à l’égard de ses co-gérantes, préférant ‘ la jouer solo’ (appel d’offre Dior). Ces reproches comme les précédents ne s’inscrivent pas dans le cadre de la gestion de la holding, aucun élément ne permettant de retenir que JNJ Holding employait des salariés.

Ainsi, à l’exception du désaccord sur le montant des rémunérations de la cogérance dont il a été dit qu’il ne constituait pas un juste motif de révocation, tous les autres manquements imputés à Mme [H] se rapportent aux fonctions techniques exercées au sein de Just’N’Joy et ne concernent pas directement l’exercice du mandat de co-gérante de JNJ Holding, les intimées manquant à établir que les divergences qui ont pu se manifester dans le fonctionnement de Just’N’Joy ont compromis le fonctionnement de la société JNJ Holding ou son intérêt.

Il s’ensuit que la société JNJ Holding ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, d’un juste motif de révocation.


 

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 8

ARRÊT DU 3 NOVEMBRE 2022

(n° / 2022, 12 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/01725 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CC742

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Décembre 2020 – Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2020034491

APPELANTE

Madame [M] [H]

Née le [Date naissance 5] 1982 à [Localité 6] ( 75)

De nationalité française

Demeurant [Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée et assistée de Me Nathalie METAIS de la SCP A & A, avocate au barreau de PARIS, toque : P0067,

INTIMÉES

Madame [S] [K] épouse [T]

De nationalité française

Demeurant [Adresse 2]

[Localité 7]

Madame [O] [A]

De nationalité française

Demeurant [Adresse 3]

[Localité 6]

S.A.R.L. JNJ HOLDING, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 844 329 771,

Ayant son siège social [Adresse 4]

[Localité 6]

Représentées par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477,

Assistées de Me Guillaume BUGE de l’AARPI SOLFERINO ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0201,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 Avril 2022, en audience publique, devant la Cour, composée de :

Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, Présidente de chambre,

Madame Anne-Sophie TEXIER, conseillère,

Madame Florence DUBOIS-STEVANT, conseillère,

qui en ont délibéré.

Un rappport a été présenté à l’audience par Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT dans le respect des conditions prévues à l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL

ARRÊT :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, Présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

:

La société Just’N’Joy a été fondée en mai 2010 par Mme [O] [A] et Mme [M] [H], sous forme d’une SARL, dont elles étaient co-gérantes. La société a pour activité la production audiovisuelle et l’organisation d’événements.

En 2011, Mme [S] [T] a rejoint Mmes [A] et [H], au capital de la société, divisé en trois parts égales ainsi qu’en qualité de co-gérante.

Dans la perspective d’une opération d’OBO (Owner Buy out), les trois associées, co-gérantes de la société Just’N’Joy, ont constitué 3 novembre 2018, à parts égales, la SARL JNJ Holding, dont l’objet est en substance toutes opérations, pour son propre compte d’achat, de vente et de gestion de valeurs mobilières et de toutes entreprises, la prise d’intérêts et la participation directe ou indirecte dans toutes sociétés, la fournitures de prestations de service et le contrôle de ces sociétés et entreprises dans tous les domaines, généralement toutes opérations financières, commerciales, industrielles, mobilières ou immobilières se rattachant directement à l’objet ci-dessus ou à tous objets similaires ou connexes.

Aux termes des statuts, Mmes [A], [H], [T] ont été désignées co-gérantes de la société JNJ Holding.

Le 20 décembre 2018, l’assemblée générale de JNJ Holding a approuvé les traités d’apport à la société de 9000 actions émises par Just’n’Joy et détenues par Mmes [A], [H] et [T], d’une valeur totale de 1.800.000 euros (600.000 x 3), décidé l’augmentation corrélative du capital social d’un montant nominal 1.800.000 euros, le portant ainsi de 30 euros à 1.800.030 euros, par création d’un million huit cent mille parts sociales nouvelles, attribuées de façon égalitaire aux trois associées, co-gérantes.

La société Just’N’Joy a pris la forme d’une société par actions simplifiée dont la société JNJ Holding est devenue l’associée unique et la présidente.

Le 12 juin 2020, Mme [H] a reçu une convocation à une assemblée générale de la société JNJ Holding qui devait se réunir le 30 juin 2020 et dont l’ordre du jour portait sur l’éventuelle révocation de son mandat de gérante, les motifs, indiqués dans la convocation, tenant pour l’essentiel à son implication insuffisante dans la société et à son atteinte à la bonne gouvernance de la société par suite de son opposition fréquente aux propositions des deux autres gérantes.

Mme [H] a répondu le 29 juin 2020 que la trop grande généralité et l’imprécision des motifs invoqués ne lui permettaient pas de répondre aux reproches formulés, surtout qu’elle comprenait que ces reproches ne concernaient aucunement ses fonctions de gérante au sein de JNJ Holding mais uniquement ses fonctions techniques au sein de Just’n’ Joy, ajoutant que la décision prise n’était que l’aboutissement d’une entreprise de déstabilisation profonde qui avait débuté il y a de nombreuses années dans le but de l’amener à démissionner et à abandonner cette société dont elle était cofondatrice et à laquelle elle avait consacré 10 ans de carrière, que cette révocation était arbitraire et abusive et qu’elle se réservait le droit d’ester en justice pour assurer la protection de ses droits.

Mme [H] ne s’est pas présentée à l’assemblée générale de la société JNJ Holding du 30 juin 2020 au cours de laquelle elle a été révoquée de son mandat de gérante, la résolution ayant été adoptée à la majorité des deux tiers, en présence d’un huissier de justice commis par le président du tribunal de commerce de Paris pour y assister.

Autorisée à assigner à bref délai, Mme [H] a, par acte du 25 août 2020, attrait les sociétés JNJ Holding, Just’n’Joy ainsi que Mmes [T] et [A] devant le tribunal de commerce de Paris aux fins pour l’essentiel de voir la société JNJ Holding condamnée à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts pour révocation sans justes motifs, Mmes [T] et [A] condamnées in solidum au paiement de la somme de 116.840,70 euros à titre de dommages-intérêts au titre de la réparation du préjudice par elle subi du fait de l’abus de majorité commis par celles-ci .

Les sociétés JNJ Holding, Just’n’Joy et Mmes [T] et [A] ont conclu devant le tribunal à la nullité de l’assignation, subsidiairement, à l’irrecevabilité de l’action à l’encontre de la société Just’N’Joy, au fond au rejet de toutes les demandes de Mme [H], et à titre reconventionnel à des dommages et intérêts pour procédure abusive.

Le 29 juin 2021, Mme [H] a par ailleurs saisi le conseil des prud’hommes de Paris en invoquant sa qualité de salariée de la société Just’N’Joy depuis juillet 2010, et son licenciement verbal le 30 juin 2020.

Par jugement du 18 décembre 2020, le tribunal de commerce de Paris a débouté Mmes [T] et [A] de leur demande en nullité de l’assignation, dit Mme [H] irrecevable en son action contre la société Just’n’Joy, débouté Mme [H] de toutes ses demandes, rejeté la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive présentée par les défenderesses, condamné Mme [H] à leur payer au total la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Mme [H] a relevé appel le 25 janvier 2021 du jugement en ses dispositions l’ayant déboutée de ses demandes et l’ayant condamnée aux dépens ainsi qu’au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Ont été intimées la société JNJ Holding ainsi que Mmes [A] et [T].

Par conclusions notifiées par voie électronique le 18 octobre 2021, Mme [H] demande à la cour:

– à titre principal, d’annuler le jugement pour défaut d’impartialité de la formation de jugement, en conséquence, condamner la société JNJ Holding à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour révocation sans juste motif, condamner in solidum Mmes [A] et [T] au paiement d’une somme de 116.840,70 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la réparation du préjudice subi du fait de l’abus de majorité,

– à titre subsidiaire, d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour révocation sans juste motif, statuant à nouveau, condamner la société JNJ Holding à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour révocation sans juste motif, en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour abus de majorité, statuant à nouveau, condamner in solidum Mmes [A] et [T] au paiement d’une somme de 116.840,70 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la réparation du préjudice subi du fait de l’abus de majorité commis par celles-ci, en ce qu’il l’a condamnée à payer à la société JNJ Holding et Mmes [A] et [T] la somme de 10.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– en tout état de cause, débouter la société JNJ Holding, Mmes [A] et [T] de l’ensemble de leurs demandes, condamner in solidum la société JNJ Holding , Mmes [A] et [T] à lui payer la somme de 10.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP A & A, dans les termes de l’article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 25 février 2022, la société JNJ Holding, Mmes [A] et [T] demandent à la cour de:

– déclarer recevable mais mal fondé l’appel formé par Mme [H], déclarer recevable et bien fondé leur appel incident ,

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mme [H] de sa demande de condamnation de JNJ Holding à lui verser la somme de 50.000 euros de dommages et intérêts, de sa demande de condamnation in solidum de Mmes [A] et [T] à lui payer une somme de 102.560,70 euros, en ce qu’il a dit sans objet la demande de dommages et intérêts de 14.280 euros réclamée par Mme [H] à Mmes [A] et [T], en ce qu’il a débouté Mme [H] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile, a condamné Mme [H] à leur payer la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens,

– l’infirmer en ce qu’il a rejeté leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, statuant à nouveau de ce chef , condamner Mme [H] à leur verser 5.000 euros au titre de son abus de procédure,

– en tout état de cause, débouter Mme [H] de sa demande de condamnation de JNJ Holding au titre de sa révocation, de sa demande de condamnation in solidum de Mmes [T] et [A] au titre d’un abus de majorité, et de condamner Mme [M] [H] à leur verser la somme de 25.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens y compris la totalité des frais et honoraires d’huissier en cas d’exécution forcée de la décision à intervenir, y compris tout droit proportionnel lui revenant, en application des dispositions des articles A. 444-31 et A-444.32 du code de commerce et L. 111-8 du code des procédures civiles d’exécution.

SUR CE

– Sur la nullité du jugement au visa de l’article 6§1 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme

Au soutien de sa demande d’annulation du jugement Mme [H] expose qu’elle a découvert, à la lecture du jugement, que la décision a été rendue par M.[F] [C] et M.[I] [E], ce dernier apparaissant en outre en qualité de président du délibéré et signataire du jugement, alors que M.[E] a été le directeur financier du groupe Danone pendant 18 ans avant de devenir le directeur financier d’Idemia en avril 2018, que Mme [O] [A] est la fille de M.[R] [A] qui a dirigé le groupe Danone jusqu’en 2014, Danone étant en outre le client-clé de l’agence, que la société Just’n’Joy a répondu à plusieurs appels d’offres émis par Idemia, dont M.[I] [E] a été le nouveau directeur financier, du mois d’août 2018 au mois de juin 2019.

Elle soutient que M.[I] [E] aurait dû se déporter compte tenu de sa proximité avec la famille [A] et des liens commerciaux entre les sociétés Danone et Idemia avec la société Just’n’Joy et que son maintien dans la formation de jugement ne peut que jeter un doute quant à l’impartialité de la juridiction notamment au regard du montant exorbitant alloué par le tribunal aux défenderesses au titre de l’article 700 du code de procédure civile, qui s’apparente à une véritable sanction, alors qu’elle n’est qu’un simple particulier et que les défenderesses n’ont déposé qu’un seul jeu de conclusions, de sorte que le jugement doit être annulé .

Les intimées répliquent que Mme [H] n’apporte aucune preuve de la partialité qu’elle allègue, qu’il existe de nombreux « [I] [E] » et que celui qui est juge au tribunal de commerce de Paris n’a jamais travaillé au sein du groupe Danone, qu’il s’agit d’homonymes, qu’en outre ce n’est pas M.[E] qui a entendu les parties, procédé au rapport et rédigé le projet de jugement qui a été soumis à deux autres magistrats dans le cadre de la collégialité de la décision. Elles précisent que leur agence n’a répondu qu’à un seul appel d’offres pour l’entreprise Idemia, qu’elle n’a pas remporté.

Les intimées établissent qu’il existe deux personnes différentes nommées [B] [E], qui ont des profils professionnels et des biographies différentes. Il n’est pas démontré que le juge du tribunal de commerce qui a présidé la formation et signé le jugement déféré soit la personne qui a longtemps travaillé dans l’entreprise Danone, avant d’être directeur financier de la société Idemia.

Mme [H] manquant à établir le défaut d’impartialité de l’un des premiers juges doit être déboutée de sa demande d’annulation du jugement.

– Sur la demande de dommages et intérêts au titre de la révocation

Mme [H] soutient qu’elle a été révoquée sans juste motif de son mandat social au sein de JNJ Holding. Elle rappelle que jusqu’au 20 décembre 2018, elle cumulait des fonctions de gérante et des fonctions techniques de directrice de projet au sein de Just’n’Joy, qu’à cette date son mandat de gérance au sein de Just’n’Joy, devenue filiale à 100% de JNJ Holding, a pris fin, qu’elle a continué à exercer ses fonctions techniques au sein de Just’N’Joy dans le cadre d’un travail salarié et qu’à compter de cette date, elle a exercé un mandat de co-gérante au sein de JNJ Holding avec ses deux associées.

Elle fait valoir que les reproches qui lui sont adressés concernent en réalité l’exécution de ses fonctions de ‘salariée’ au sein de Just’N’Joy et ne peuvent justifier sa révocation en tant que gérante de JNJ Holding et qu’en tout état de cause, les motifs invoqués sont totalement injustifiés.

La société JNJ Holding et Mmes [A] et [T] répliquent que la révocation de Mme [H] est fondée sur les motifs indiqués dans le courrier de convocation à l’assemblée du 30 juin 2020, chacun de ces griefs constituant à lui seul un juste motif de révocation, portant en lui-même atteinte au fonctionnement de l’agence, leur accumulation légitimant donc de plus fort la décision prise.

Elles précisent que JNJ Holding, structure mise en place lors de la restructuration financière de 2018, n’a pas d’activité autre que la détention du capital de Just’n’Joy. Elles contestent que Mme [H] ait exercé des fonctions salariées au sein de Just’n’Joy à compter du 20 décembre 2018.

L’article L 223-25 du code de commerce dispose que le gérant d’une SARL peut être révoqué par décision des associés dans les conditions de l’article L223-29, à moins que les statuts prévoient une majorité plus forte. Si la révocation est décidée sans juste motif, elle peut donner lieu à des dommages et intérêts.

Les statuts constitutifs de la société JNJ Holding, inchangés sur ce point après la mise à jour du 20 décembre 2018, prévoient à l’article 16 que : ‘ Le ou les gérant(s) sont révocables par décision de l’associé unique ou en cas de pluralité d’associés, par une décision des associés représentant plus de la moitié des parts sociales. En cas de pluralité d’associés, leur révocation judiciaire peut intervenir à la demande de tout associé pour cause légitime’ .

Un juste motif de révocation au sens de l’article 223-25 du code de commerce ou une cause légitime de révocation selon les statuts s’entend d’une faute du gérant dans l’exercice de son mandat ou, en l’absence de faute démontrée, d’une situation pouvant lui être imputée de nature à compromettre l’intérêt social.

Il importe de rappeler que la révocation litigieuse concerne le mandat social de Mme [H] au sein de la holding JNJ Holding et non pas un mandat social au sein de Just’N’Joy. En effet depuis la restructuration financière intervenue le 20 décembre 2018, Mmes [A], [T] et [H] n’étaient plus co-gérantes de la SAS Just’N’Joy, laquelle n’avait juridiquement qu’un président, la holding JNJ Holding.

S’il résulte de l’article L227-7 du code de commerce que lorsqu’une personne morale est nommée président d’une SAS, les dirigeants de ladite personne morale sont soumis aux mêmes conditions et obligations et encourent les mêmes responsabilités civile et pénale que s’ils étaient président ou dirigeant en leur nom propre sans préjudice de la responsabilité solidaire de la personne morale qu’ils dirigent, ces dispositions visant à éviter les fraudes par interposition d’une personne morale, il ne s’agit pas en l’espèce d’une action en responsabilité dirigée contre Mme [H] en sa qualité de co-gérante de la personne morale dirigeante, mais d’apprécier si la révocation de son mandat de co-gérante de la SARL JNJ Holding est, comme elle le soutient, dépourvue de juste motif.

La SARL JNJ Holding constitue une personne morale distincte de la SAS Just’N’Joy qu’elle dirige, et ces deux entités ne sauraient être confondues, quand bien même la SARL n’a pour activité, selon les intimées que la détention du capital de celle qui exerce l’activité opérationnelle. Les intimées ne peuvent donc soutenir que la restructuration financière opérée en 2018 n’a rien changé au rôle de chacune des co-gérantes en faisant abstraction de la holding, la modification tenant à un point essentiel, à savoir la cessation des mandats de gérance de Mmes [A], [T] et [H] dans Just’N’Joy.

La circonstance que Mme [H] aurait manqué à ses fonctions dans le cadre de l’organisation interne inchangée au sein de Just’N’Joy n’est susceptible de constituer un juste motif de révocation du mandat de gérance de JNJ Holding que pour autant qu’il soit démontré l’impact en résultant quant au fonctionnement de JNJ Holding au regard de son activité de holding.

La révocation a été votée le 30 juin 2020 sur convocation du 12 juin 2020, après que Mme [H] a dans un mail du 5 juin 2020, exprimé son désaccord avec les termes du procès-verbal de l’assemblée générale de JNJ Holding du 26 mai 2020 comportant ratification des rémunérations versées aux trois co-gérantes, au titre de l’exercice clos le 31 décembre 2019, soit pour Mme [H] 27.720 euros et pour Mmes [A] et [T] respectivement 45.360 euros et 52.920 euros.

La révocation a été votée sur la base des motifs mentionnés dans la lettre de convocation du 12 juin 2020, qui sont les suivants:

– ‘Contribution très limitée au développement de la Société depuis des années, tant s’agissant de la recherche et de l’apport de nouveaux dossiers/clients que du développement des clients existants.

– Atteinte à la bonne gouvernance de la Société : opposition fréquente aux propositions des deux autres gérantes mais sans contreproposition constructive, absence générale de communication avec les autres gérantes.

– Incapacité à prendre des décisions et à travailler de manière indépendante sur les dossiers dont tu as la charge.

– Absence d’implication : présence irrégulière au sein de la Société depuis de nombreux mois, désinvestissement total au cours de la crise sanitaire laissant toute la charge de la Société aux deux autres gérantes.

– Incapacité à travailler en équipe’ .

Tous ces griefs sont contestés par Mme [H].

S’agissant du premier motif, les intimées expliquent qu’alors que l’activité de la société dans l’évènementiel exigeait que Mme [H] participe à la recherche de nouveaux clients et à l’entretien des meilleures relations possibles avec les clients existants, elle n’a au cours des ‘dix années’ de son mandat été en mesure d’apporter à l’agence qu’un seul et unique client significatif, de sorte qu’elle n’a généré que très peu de chiffre d’affaires, et qu’elle n’a pas compensé sa carence par le développement de relations privilégiées avec les clients existants, lesquels avaient été apportés par les deux autres gérantes. Elles ajoutent que l’implication de la gérance était essentielle dans le milieu particulier de la communication d’entreprise où l’entretien d’un réseau relationnel constitue la meilleure manière d’accroitre l’activité.

Il est manifeste, ainsi que le soutient Mme [H] que ce grief, qui se rapporte au développement de la clientèle ne vise que son activité au sein de Just’N’Joy, la holding n’ayant pas elle-même de clients. La société JNJ Holding n’allègue, ni a fortiori ne démontre en quoi ce comportement à le supposer avéré, ce qui n’est pas le cas les parties produisant de part et d’autre des attestations en sens contraire, caractérise une défaillance dans la gérance de la holding ou une atteinte au bon fonctionnement de celle-ci.

S’agissant de l’atteinte à la gouvernance de ‘l’agence’, les intimées font valoir que ce grief se rapporte à l’attentisme et à l’opposition aux propositions des autres gérantes, dont faisait preuve Mme [H], que fin 2018, il a été fait appel à une conseillère en stratégie pour repenser la gouvernance et mieux redéfinir les responsabilités de chacune des trois dirigeantes, que celle-ci a constaté l’absence de proposition de Mme [H] puis, après plusieurs mois de discussions, son exigence pour que ses fonctions dans le nouvel organigramme portent sur la direction du pôle projet, ce que ses deux associées n’ont eu d’autre choix que d’accepter, qu’en dépit de ce compromis, elle n’a jamais respecté le processus d’organisation mis en place, tout particulièrement lors de la prospection d’un client très important pour l’agence (Dior).

Le manquement aux régles de gouvernance de ‘l’agence’ se rapporte principalement au fonctionnement de Just’N’Joy (définition des attributions/ exercice en solo auprès des clients) et il n’est pas fait état de l’incidence qui en serait résultée quant au fonctionnement de la holding.

S’agissant de ‘l’opposition fréquente’ qui lui est reprochée, Mme [H] fait valoir qu’elle ne s’est opposée à ses co-gérantes et associées qu’à une seule occasion, à propos de la détermination des rémunérations dues à chacune d’elles.

La rémunération des co-gérantes est, depuis la restructuration financière en 2018, fixée au niveau de la holding. L’opposition manifestée par Mme [H] en mai 2020 quant aux montants respectifs, dont rien ne démontre qu’elle a été récurrente puisqu’elle a voté par le passé les rémunérations, ne bloquait pas le fonctionnement de la holding, ni même les rémunérations puisque selon les articles 15 et 24 des statuts de JNJ Holding la rémunération de la gérance est fixée par décision collective ordinaire des associés, laquelle pour être adoptée doit être votée par un ou plusieurs associés représentant plus de la moitié des parts sociales et Mmes [A] et [T], qui ont toujours voté de concert, détiennent à elles deux les 2/3 du capital social de JNJ Holding. Ce désaccord sur le montant des rémunérations, exprimé dans le contexte qui vient d’être décrit, ne constituait pas un juste motif de révocation. Il sera d’ailleurs observé que Mmes [A] et [T] ont estimé utile lors de l’assemblée générale tenue en septembre 2020 de finalement ratifier, au titre de l’exercice 2019, une rémunération équivalente pour les trois co-gérantes.

S’agissant du motif tiré de l’incapacité de Mme [H] à prendre des décisions et à travailler de manière indépendante sur les dossiers dont elle avait la charge, les conclusions des intimées renvoient sur ce point à une absence de gestion des dossiers clients, alors que l’intéressée avait exigé de faire partie du pôle projet, au constat qu’elle n’était pas au fait des attentes des clients et de l’évolution des dossiers, et qu’elle était absente lors de jours-clé pour les clients.

Est ici à nouveau mis en cause son comportement au sein de l’agence, sans que le lien soit fait avec une atteinte au fonctionnement de la holding.

Il en est de même du quatrième grief tenant à son absence d’implication caractérisée par une présence irrégulière au sein de la société depuis de nombreux mois et par son désinvestissement total au cours de la crise sanitaire, alors que la situation était très difficile pour la société, laissant toute la charge de la Société aux deux autres gérantes.

Le cinquième motif pris de l’incapacité à travailler en équipe se rapporte selon les intimées au comportement erratique de Mme [H], celle-ci laissant les salariés livrés à eux-mêmes y compris les juniors, se révélant incapable d’organiser leur travail, d’exprimer ses directives de manière intelligible, court-circuitant certains employés et faisant preuve d’opacité à l’égard de ses co-gérantes, préférant ‘ la jouer solo’ (appel d’offre Dior). Ces reproches comme les précédents ne s’inscrivent pas dans le cadre de la gestion de la holding, aucun élément ne permettant de retenir que JNJ Holding employait des salariés.

Ainsi, à l’exception du désaccord sur le montant des rémunérations de la cogérance dont il a été dit qu’il ne constituait pas un juste motif de révocation, tous les autres manquements imputés à Mme [H] se rapportent aux fonctions techniques exercées au sein de Just’N’Joy et ne concernent pas directement l’exercice du mandat de co-gérante de JNJ Holding, les intimées manquant à établir que les divergences qui ont pu se manifester dans le fonctionnement de Just’N’Joy ont compromis le fonctionnement de la société JNJ Holding ou son intérêt.

Il s’ensuit que la société JNJ Holding ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, d’un juste motif de révocation.

En application de l’article L 223-25 du code de commerce, cette révocation sans juste motif ouvre droit à dommages et intérêts. En conséquence le jugement sera infirmé en ce qu’il a débouté Mme [H] de sa demande de dommages et intérêts de ce chef.

Mme [H] évalue à 50.000 euros le préjudice consécutif à sa révocation sans juste motif, cette somme correspondant selon elle à un peu plus de 12 mois de rémunération sur la base de la rémunération fixée en dernier lieu par l’assemblée générale. Elle argue, qu’alors qu’elle a co-fondé la société Just’N’Joy, s’est impliquée dans son développement durant 10 ans, elle s’est trouvée révoquée brutalement, se retrouvant du jour au lendemain sans rémunération, ni allocations de chômage alors qu’elle avait perçu 240.769 en 2017, qu’en outre les circonstances de sa révocation ont été vexatoires, ses co-associées s’étant bornées à un message lacunaire auprès des salariés et des clients. Cette situation lui a occasionné des problèmes de santé.

La société JNJ Holding réplique qu’il n’est justifié d’aucun préjudice, que Mme [H] n’est aucunement dans le besoin au regard des sommes qu’elle a perçues de l’agence au cours des exercices précédents et qu’il n’est prévu aucune indemnité en cas de révocation du gérant.

S’il n’est pas établi que la révocation est intervenue dans des conditions vexatoires, le message sommaire informant les salariés et les clients qu’elle ne faisait plus partie de la société n’étant pas en lui-même de nature à porter atteinte à la réputation de Mme [H], il est en revanche certain que cette révocation sans juste motif et brutale a occasionné à l’intéressée un préjudice matériel et moral, en la privant d’une source de revenus et en la mettant à l’écart de la direction de la holding qu’elle avait constituée avec Mmes [A] et [T]. En réparation de ce préjudice, la société JNJ Holding sera condamnée à verser à Mme [H] 30.000 euros de dommages et intérêts.

– Sur la demande de dommages et intérêts au titre de l’abus de majorité

Mme [H] fait valoir que Mmes [A] et [T] ont commis un abus de majorité en diminuant arbitrairement sa rémunération, favorisant ainsi de fait leurs propres intérêts à son détriment, et en violant les régles de fixation de leurs propres rémunérations qui n’auraient pas dû excéder de plus de 15% la sienne, cette décision favorisant leurs intérêts au détriment de celui de la société. Elle ajoute que le fait qu’elle ait signé les procès-verbaux des assemblées générales ayant voté les rémunérations fixées pour 2017 et 2018 ne la prive pas du droit de réclamer l’indemnisation de son préjudice découlant des sommes qu’elle aurait dû percevoir en application des principes votés lors des assemblées des 19 janvier 2017 et 21 janvier 2020.

Elle sollicite en conséquence la condamnation in solidum de Mmes [A] et [T] à lui verser, à titre de dommages et intérêts, les sommes qu’elle aurait dû percevoir en application des principes fixés par les assemblées des 19 janvier 2017 et 21 janvier 2020, à savoir:

– 8.030,70 euros pour l’année 2017

– 94.530 euros pour l’année 2018

– 14.280 euros pour l’année 2019

Mmes [A] et [T] expliquent qu’aucune des assemblées convoquées chaque année pour voter la rémunération des gérantes n’a appliqué ce qui avait été envisagé début 2017, les associées ayant décidé de fixer les rémunérations au plus près des contributions respectives des gérantes aux résultats de l’agence. Elles soulignent que Mme [H] a systématiquement approuvé les rémunérations et voté en faveur des délibérations, et que si en 2018 les rémunérations ont été différenciées, elles ont été identiques pour l’exercice 2019 et qu’en toute hypothèse, aucune atteinte à l’intérêt social n’est caractérisée, étant précisé que dans un tel cas la réparation ne pourrait intervenir que par un reversement à la société de leur trop-perçu de rémunération et non un paiement à Mme [H].

Liminairement, il sera relevé que le premier poste de dommages et intérêts se rapporte aux résolutions votées par les associées de la société Just’N’Joy, antérieurement à l’opération de restructuration financière, alors que Mmes [A], [T] et [H] étaient encore associées et co-gérantes de Just’N’Joy, tandis que les deux autres postes concernent les résolutions votées par les associées de JNJ Holding.

L’abus de majorité suppose de caractériser cumulativement que la décision litigieuse a été prise contrairement à l’intérêt social et qu’elle constitue une rupture d’égalité entre les associés, c’est à dire qu’elle doit avoir été prise dans l’unique dessein de favoriser les majoritaires au détriment des minoritaires.

– sur l’abus de majorité dans Just’N’Joy

S’agissant des résolutions concernant la rémunération de Mme [H], en sa qualité de co-gérante de Just’N’Joy au titre de l’exercice 2017, les résolutions suivantes ont été votées:

– le 19 janvier 2017, l’assemblée générale a arrêté le principe de rémunération entre les co-gérantes, selon lequel les rémunérations nettes de Mmes [T] et [A] seront supérieures de 15% par rapport à celle de Mme [H], ce principe de rémunération étant applicable à compter de l’exercice ouvert le 1er janvier 2017 jusqu’à l’exercice clos le 31 décembre 2019.

– le 28 juin 2018, l’assemblée générale (résolution n°4) a ratifié la rémunération annuelle allouée à la cogérance au titre de son mandat social qui s’est élevée pour Mme [H] à 240.769 euros, pour Mme [A] à 289.525 euros, et pour Mme [T] à 292.705 euros au titre de l’exercice clos le 31 décembre 2017.

La circonstance que ces chiffres traduisent un écart de rémunération des autres co-gérantes supérieur à 15%, ne suffit pas à démontrer l’existence d’un abus de majorité, dès lors que ces deux résolutions ont été adoptées à l’unanimité, donc avec l’approbation de Mme [H], qui n’établit pas pourquoi elle aurait accepté de voter une résolution contraire à l’intérêt social et la désavantageant sans motif.

Mme [H] manque à établir un abus de majorité de Mmes [A] et [T] à l’occasion de ces votes.

– sur l’abus de majorité dans JNJ Holding

Le 4 décembre 2018, l’assemblée générale de JNJ Holding a décidé, eu égard aux principes de rémunération adoptés le 19 janvier 2017, de fixer les rémunérations annuelles nettes de la cogérance, au titre de l’exercice clos le 31 décembre 2018, à 289.800 euros pour Mme [T], 248.400 euros pour Mme [A], et à 151.800 euros pour Mme [H]. Cette résolution a été adoptée à l’unanimité et le procès-verbal a été signé par les trois associées.

Comme pour l’exercice précédent, Mme [H], qui a voté cette résolution, ne démontre pas en quoi les montants de rémunération adoptés pour l’exercice 2018 sont contraires à l’intérêt social et ne visaient qu’à favoriser les intérêts du bloc majoritaire à son détriment.

S’agissant des rémunérations pour l’exercice 2019, il résulte du procès-verbal de l’assemblée générale du 21 janvier 2019, qu’il a été décidé de fixer la rémunération fixe de chaque co-gérante, en contrepartie de la charge et de la responsabilité attachées aux fonctions de dirigeante, à 3.500 euros nets par mois à compter du 1er janvier 2019 jusqu’à décision ultérieure, outre l’attribution de primes variables assises sur le résultat de la société, dont les modalités seront déterminées en fin d’année. L’assemblée générale rappelle par ailleurs le principe selon lequel les rémunérations nettes de Mmes [A] et [T] seront supérieures de 15% par rapport à celle de Mme [H], ce principe étant applicable à compter de l’exercice ouvert le 1er janvier 2019 jusqu’à l’exercice clos au 31 décembre 2020 inclus. Le procès-verbal mentionne que cette résolution a été adoptée à l’unanimité, mais n’est signé que de Mmes [A] et [T] (selon pouvoir pour cette dernière).

Un procès-verbal de l’assemblée générale du 26 mai 2020 mentionne, qu’après approbation des comptes de l’exercice 2019, la rémunération annuelle de la cogérance au titre de l’exercice clos au 31 décembre 2019 a été ratifiée à l’unanimité comme suit: Mme [H] 27.720 euros nets, Mme [A] 45.360 euros, Mme [T] 52.920 euros. Mme [H], qui n’a pas signé ce procès-verbal, a exprimé son désaccord sur ces dispositions notamment dans une lettre du 5 juin 2020.

Cependant, il ressort de la pièce 8 des intimées, qu’une nouvelle assemblée générale a été convoquée le 17 septembre 2020 pour procéder à l’approbation des comptes de l’exercice 2019 et fixer la rémunération annuelle des co-gérantes au titre de cet exercice, le procès-verbal qui a été été établi précise que l’assemblée générale qui avait été convoquée pour le 26 mai 2020 ne s’est en définitive pas tenue, ce que conteste Mme [H]. Quoiqu’il en soit, aux termes du procès-verbal de l’assemblée générale du 17 septembre 2020, à laquelle Mme [H] n’a pas voulu assister, mais qui s’est tenue en présence des deux autres associées, la rémunération annuelle globale de l’exercice clos le 31 décembre 2019 allouée à la co-gérance a été fixée à la somme de 126.000 euros nets, à répartir entre les trois co-gérantes à parts égales, soit 42.000 euros nets chacune.

Cette résolution, quand bien même elle serait intervenue ‘opportunément’ comme le soutient Mme [H], retient pour l’exercice 2019, le principe d’une rémunération égale entre les trois co-gérantes, de sorte que la condition de l’abus de majorité tenant à ce que le bloc majoritaire composé de Mmes [A] et [T] a pris une décision favorisant ses intérêts au détriment de Mme [H] fait défaut.

Si Mme [H] n’a pas perçu l’intégralité de la rémunération ainsi votée, il ne s’agit plus d’un problème d’abus de majorité, mais de l’exécution par la gérance des décisions de l’assemblée générale.

A ces motifs, le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté Mme [H] de sa demande de dommages et intérêts au titre d’un abus de majorité.

– Sur la demande de dommages et intérêts pour abus de procédure

La cour a partiellement fait droit aux demandes de Mme [H] et l’exercice de l’action en justice ne peut dégénérer en abus du seul fait que ses autres demandes ont été rejetées.

Les intimées seront déboutées de leur demande indemnitaire et le jugement déféré sera sur ce point confirmé .

– Sur les frais irrépétibles et les dépens

La société JNJ Holding, qui succombe et sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel, ne peut prétendre à l’octroi de sommes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Elle doit au contraire être condamnée à verser à ce titre la somme de 5.000 euros à Mme [H] .

Aucune considération ne justifie, ni que Mmes [A] et [T] soient condamnées au titre des frais irrépétibles au bénéfice de Mme [H], ni que cette dernière soit condamnée au même titre à leur profit. Chacune sera donc déboutée de la demande formée à ce titre .

La décision déférée sera donc infirmée en ce qui concerne les frais irrépétibles et les dépens .

PAR CES MOTIFS

Déboute Mme [H] de sa demande d’annulation du jugement déféré,

Infirme le jugement déféré en ce qu’il a débouté Mme [H] de sa demande de dommages et intérêts au titre de sa révocation, en ce qu’il a condamné Mme [H] à payer au total la somme de 10.000 euros à la société JNJ Holding et Mmes [A] et [T] au titre de l’article 700 du code de procédure civile et en ce qu’il a condamné Mme [H] aux dépens,

Le confirme pour le surplus,

Statuant des chefs infirmés et y ajoutant,

Dit que Mme [H] a été révoquée sans juste motif de son mandat de co-gérante de la société JNJ Holding et condamne la société JNJ Holding à verser à Mme [H] la somme de 30.000 euros à titre de dommages-intérêts de ce chef,

Condamne la société JNJ Holding à payer à Mme [H] une indemnité de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société JNJ Holding aux dépens de première instance et d’appel et admet pour ceux d’appel l’avocat concerné au bénfice de l’article 699 du code de procédure civile .

La greffière,

Liselotte FENOUIL

La Présidente,

Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT


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