Changer de carrière pour devenir présentatrice d’une émission n’est pas un fait d’actualité justifiant de passer outre l’autorisation de reproduire l’image d’une personne.
Affaire Entrevue
Dans ses pages intérieures, le mensuel Entrevue a consacré un dossier spécial avec photographies, à la carrière d’une ancienne femme d’affaires, désormais présentatrice d’une émission sur Amazon Prime Video.
Si la personnalité connaissait en effet, au moment de la parution en cause, une actualité médiatique, liée à ses nouvelles fonctions d’animatrice de l’émission Love Island sur Amazon Prime Video, une telle actualité n’était pas de nature à permettre la publication des informations et clichés en cause, autant d’éléments ne venant en aucun cas et à un quelconque titre illustrer l’information communiquée au public.
Atteinte au droit à l’image
Les atteintes au droit au respect de la vie privée et au droit à l’image étant caractérisées, la juridiction a accordé, en application des dispositions de l’article 835 du code de procédure civile, une provision à la victime.
Conformément à l’article 9 du code civil et à l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, toute personne, quelle que soit sa notoriété, a droit au respect de sa vie privée et est fondée à en obtenir la protection en fixant elle-même ce qui peut être divulgué par voie de presse.
De même, elle dispose sur son image, attribut de sa personnalité, et sur l’utilisation qui en est faite, d’un droit exclusif, qui lui permet de s’opposer à sa diffusion sans son autorisation.
Cependant, ces droits doivent se concilier avec le droit à la liberté d’expression, consacré par l’article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme ; ils peuvent céder devant la liberté d’informer, par le texte et par la représentation iconographique, sur tout ce qui entre dans le champ de l’intérêt légitime du public, certains événements d’actualité ou sujets d’intérêt général pouvant justifier une publication en raison du droit du public à l’information et du principe de la liberté d’expression .
La liberté de communication des informations autorise notamment la publication d’images de personnes impliquées dans un événement, sous réserve du respect de la dignité de la personne humaine.
Par ailleurs, la diffusion d’informations anodines ou déjà notoirement connues du public n’est pas constitutive d’atteinte au respect de la vie privée.
En outre, selon l’article 835 alinéa 1er du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Le trouble manifestement illicite visé s’entend de toute perturbation résultant d’un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit.
L’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le président du tribunal statuant en référé peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.
Sauf contestation sérieuse des atteintes allégués, il appartient donc au juge des référés de fixer à quelle hauteur l’obligation de réparer n’est pas sérieusement contestable.
La seule constatation de l’atteinte au respect à la vie privée et au droit à l’image par voie de presse ouvre droit à réparation, le préjudice étant inhérent à ces atteintes. Le demandeur doit toutefois justifier de l’étendue du dommage allégué, le préjudice étant apprécié concrètement, au jour où le juge statue, compte tenu de la nature des atteintes et des éléments versés aux débats.
Par ailleurs, dans le cas où le demandeur s’est largement exprimé sur sa vie privée, cette attitude, de nature à attiser la curiosité du public, ne le prive pas de toute protection de sa vie privée mais justifie une diminution de l’appréciation du préjudice.