Droit à l’image : la complaisance limite le préjudice

Droit à l’image : la complaisance limite le préjudice

Cristina Córdula, l’ancienne mannequin brésilienne devenue animatrice de télévision et styliste, a obtenu la condamnation d’un titre de presse people pour atteinte à son droit à l’image.

Atteinte au droit à l’image

Le magazine incriminé lui a consacré un article de deux pages, illustré de cinq photographies la représentant. L’article était annoncé sur la page de couverture du magazine par le titre « Cristina So magnifaïk !», accompagné de deux photographies d’elle en maillot de bain accolées l’une à l’autre.  Bien que le séjour de la présentatrice ait été annoncé sur son compte Instagram par ses soins il n’en demeure pas moins que ces moments de détente relevaient de sa vie privée et ce même s’ils ont été pris sur le domaine public.

Toutefois, la juridiction a considéré que le commentaire, relevant de la liberté éditoriale du magazine, selon lequel son mari « la voit plonger dans les vagues avec son bikini sexy » ne constitue pas en soi une atteinte à la vie privée pas plus que l’information selon laquelle elle se trouvait à Rio à cette date puisqu’elle l’avait elle-même révélé sur son compte Instagram ou celle de son âge et des éléments de son état civil dont il est constant qu’elle les a elle-même fourni au public au travers de ses interviews ou de son compte Instagram accessible à tous.

Complaisance et préjudice

Si la seule constatation de l’atteinte au droit à l’image par voie de presse ouvre droit à réparation, il appartient à la victime de justifier l’étendue du dommage allégué, son évaluation devant se faire de manière concrète au jour où le juge statue compte tenu de la nature des atteintes et de l’attitude du demandeur s’agissant de sa vie privée vis à vis du public.

Eu égard au fait que Cristina Córdula communique régulièrement sur sa vie privée, que les  propos tenus dans la publication étaient bienveillants et qu’elle a déjà autorisé la diffusion de clichés d’elle en maillot de bain dans les médias et a déclaré ne pas avoir « de complexes, il faut s’accepter comme on est, avec le corps de que l’on a », l’indemnisation a été fixée à 2.500 euros.

Action en référé

Il résulte de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme que toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui.  L’article 9 du code civil dispose que ‘Chacun a droit au respect de sa vie privée.

Les juges peuvent ainsi, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes les mesures, telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l’intimité de la vie privée : ces mesures peuvent, s’il y a urgence, être ordonnées en référé.

Aux termes de l’article 809 du code de procédure civile, le président peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

En application de ces textes toute personne, quelle que soit sa notoriété, a droit au respect de sa vie privée et est fondée à en obtenir la protection en fixant elle-même ce qui peut être divulgué par voie de presse. En outre, elle dispose sur son image, attribut de sa personnalité et sur l’utilisation qui en est faite d’un droit exclusif, qui lui permet de s’opposer à sa diffusion sauf son autorisation. L’article 10 de la Convention précitée garantit quant à lui l’exercice du droit à l’information et à la liberté d’expression.

La nécessité de concilier ces deux principes conduit nécessairement à limiter le droit à l’information du public d’une part aux éléments relevant pour les personnes publiques de la vie officielle et d’autre part aux informations et images volontairement livrées par les intéressés ou que justifient un événement d’actualité ou un débat d’intérêt général.

Chacun peut ainsi s’opposer à la divulgation d’informations et à la fixation, la reproduction et l’utilisation d’images captées sans autorisation expresse, préalable et spéciale ne relevant pas de sa vie professionnelle ou de ses activités officielles et fixer les limites de ce qui peut ou non être publié sur sa vie privée, ainsi que les circonstances et les conditions dans lesquelles ces publications peuvent intervenir.

Enfin le caractère public ou la notoriété d’une personne influe sur la protection dont sa vie privée peut ou doit bénéficier et la diffusion d’informations déjà notoirement connues du public ne peut être considérée comme portant atteinte à la vie privée. Télécharger la décision


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