Droit à l’image et liberté de la presse

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Droit à l’image et liberté de la presse
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Synthèse du litige

La cour a jugé que la publication de la photographie de Monsieur [M] circulant en vélo électrique dans un article sur le remplacement des vélos en libre service à Marseille ne portait pas atteinte à son droit à l’image ni à sa dignité. Par conséquent, Monsieur [M] a été débouté de ses demandes et condamné aux dépens. Il devra également verser à la SA La Provence la somme de 2.000 euros pour les frais irrépétibles.

Analyse juridique de l’affaire jugée

Selon l’article 9 du Code civil, tout individu a droit au respect de sa vie privée, et les juges peuvent prendre des mesures pour empêcher une atteinte à cette vie privée. Cependant, ce droit doit être concilié avec le droit à la liberté d’expression, tel que prévu par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme.

La liberté de la presse et le droit à l’information du public permettent la diffusion d’images de personnes impliquées dans un événement d’actualité, tant que cela respecte la dignité de la personne humaine. En l’espèce, la photographie litigieuse illustrait un article sur le remplacement des vélos en libre service par une flotte électrique, un sujet d’intérêt général pour la population marseillaise.

La photographie en question ne portait pas atteinte à la dignité de Monsieur [M] et était pertinente par rapport au contenu de l’article. Par conséquent, l’autorisation préalable de Monsieur [M] n’était pas nécessaire pour sa publication.

En conclusion, les demandes de Monsieur [M] ont été rejetées et il a été condamné à payer les dépens et une somme de 2.000 euros à la SA La Provence. Le jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire.

Problématiques associées à ce litige

Les problématiques associées à cette affaire :

1. Le respect du droit à l’image de la personne concernée par la publication de la photographie.
2. La conciliation entre le droit à la vie privée et le droit à la liberté d’expression.
3. La question de l’autorisation préalable nécessaire pour la publication d’une image dans un contexte d’actualité et d’intérêt général.

– Vie privée
– Liberté d’expression
– Image
– Intérêt général

Les Définitions associées à ce litige

Analyse juridique de l’affaire jugée

Selon l’article 9 du Code civil, tout individu a droit au respect de sa vie privée, et les juges peuvent prendre des mesures pour empêcher une atteinte à cette vie privée. Cependant, ce droit doit être concilié avec le droit à la liberté d’expression, tel que prévu par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme.

La liberté de la presse et le droit à l’information du public permettent la diffusion d’images de personnes impliquées dans un événement d’actualité, tant que cela respecte la dignité de la personne humaine. En l’espèce, la photographie litigieuse illustrait un article sur le remplacement des vélos en libre service par une flotte électrique, un sujet d’intérêt général pour la population marseillaise.

La photographie en question ne portait pas atteinte à la dignité de Monsieur [M] et était pertinente par rapport au contenu de l’article. Par conséquent, l’autorisation préalable de Monsieur [M] n’était pas nécessaire pour sa publication.

En conclusion, les demandes de Monsieur [M] ont été rejetées et il a été condamné à payer les dépens et une somme de 2.000 euros à la SA La Provence. Le jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire.

Les Avocats de cette affaire

Bravo aux Avocats ayant plaidé cette affaire:
– Me Martine RUBIN, avocat postulant au barreau de MARSEILLE
– Me Eric NEGRE, avocat plaidant au barreau de MONTPELLIER
– Maître Béatrice DUPUY de l’AARPI LOMBARD-SEMELAIGNE-DUPUY-DELCROIX, avocats au barreau de MARSEILLE

Parties impliquées dans cette affaire

Les sociétés impliquées dans cette affaire sont S.A. LA PROVENCE et l’AARPI LOMBARD-SEMELAIGNE-DUPUY-DELCROIX.

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N°24/ DU 01 Février 2024

Enrôlement : N° RG 23/05086 – N° Portalis DBW3-W-B7H-3KUY

AFFAIRE : M. [H], [D], [X] [M]( Me Martine RUBIN)
C/ S.A. LA PROVENCE (l’AARPI LOMBARD-SEMELAIGNE-DUPUY-DELCROIX)

DÉBATS : A l’audience Publique du 16 Novembre 2023

COMPOSITION DU TRIBUNAL:

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président
Assesseur : JOUBERT Stéfanie, Vice-présidente (juge rapporteur)
Assesseur : BERGER-GENTIL Blandine, Vice présidente

Greffier lors des débats : BESANÇON Bénédicte

Vu le rapport fait à l’audience

A l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 01 Février 2024

Jugement signé par SPATERI Thomas, Vice-Président et par BERARD Béatrice, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDEUR

Monsieur [H], [D], [X] [M]
né le 22 Octobre 1966 à [Localité 3] (BURUNDI)
de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Martine RUBIN, avocat postulant au barreau de MARSEILLE et par Me Eric NEGRE, avocat plaidant au barreau de MONTPELLIER

C O N T R E

DEFENDERESSE

S.A. LA PROVENCE, immatriculée au RCS Marseille sous le n° 056 806 813, prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualité audit siège, dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Maître Béatrice DUPUY de l’AARPI LOMBARD-SEMELAIGNE-DUPUY-DELCROIX, avocats au barreau de MARSEILLE,

EXPOSE DU LITIGE

Indiquant avoir découvert sa photographie en page 5 de l’édition [Localité 4] du journalLa Provence du 12 janvier 2023 et sur le site internet de ce journal, le représentant circulant à vélo sur une piste cyclable du bord de mer à [Localité 4], sans avoir donné son autorisation ni avoir été avisé, [H] [M] a, par acte en date du 11 mai 2023, fait assigner la SA La Provence aux fins d’obtenir sa condamnation au visa de l’article 9 du Code civil à lui verser une somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts, et la suppression de la photographie sous astreinte.

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 28 août 2023 auxquelles il y a lieu de se référer pour un plus ample exposé des moyens, il demande au Tribunal de :
– condamner la SA La Provence à lui payer la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts,
– condamner la SA La Provence à supprimer et à procéder au déréférencement de la photographie litigieuse du site internet de LA PROVENCE sous astreinte de 100€ par jour de retard huit jours après signification de la décision à intervenir, pendant trois mois,
– condamner la SA La Provence à lui payer la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens qui comprendront les frais du procès-verbal de constat du 27 février 2023 par commissaire de justice d’un montant de 380,00 € T.T.C., avec droit de recouvrement direct pour l’avocat soussigné,
– ordonner l’exécution provisoire.

Il soutient que la reconnaissance d’un droit à l’image nécessite d’obtenir l’autorisation préalable, expresse et spéciale de la personne avant toute exploitation de cette image; que, pour que l’image soit protégée, il n’est pas nécessaire que le visage soit reconnaissable et il suffit que la personne concernée soit identifiable, ce qui est le cas et n’est pas contesté en l’espèce; que le droit à l’information et un article sur le passage du vélo en libre-service à l’électrique n’autorisent pas pour autant la SA La Provence à divulguer sa photo sur un vélo électrique sans son autorisation.
Il indique avoir adressé une plainte à la CNIL par lettre recommandée avec avis de réception le 3 avril 2023 et que la CNIL a répondu par courrier du 5 juin 2023 : « Dans la mesure toutefois où votre client dispose désormais du refus motivé du quotidien concerné, nous l’invitons à saisir le juge judiciaire, compétent aux termes de l’article 9 du code civil, pour se prononcer sur la demande de réparation de votre client et prescrire toutes mesures telles que séquestres, saisies et autres, propres à empêcher ou à faire cesser une atteinte à la vie privée, y compris en urgence. Si une recherche en ligne permet d’accéder à la photographie concernée à l’issue d’une requête faite à partir de l’identité complète de votre client, ce dernier peut en réduire la publicité en exerçant son droit au déréférencement. »

En défense, dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 28 juillet 2023 auxquelles il y a lieu de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la SA La Provence demande au Tribunal de :
– débouter Monsieur [M] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
Subsidiairement,
– fixer la somme pouvant être allouée à Monsieur [M] à titre de dommages et intérêts à l’euro symbolique,
– débouter en tout état de cause Monsieur [M] des demandes formulées au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, la procédure initiée étant totalement injustifiée,
– le condamner reconventionnellement à lui verser une somme de 3.000€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Elle reconnaît que Monsieur [M] est identifiable sur la photographie publiée, mais soutient qu’elle n’a commis aucune faute puisque cette photographie a été prise sur la voie publique et pour illustrer un sujet d’actualité, le remplacement des vélos mécaniques en libre-service présents dans la ville et la métropole par des vélos électriques au mois de janvier 2023; qu’en outre, la photographie ne porte pas atteinte à la dignité de Monsieur [M] et ne dévoile rien de son intimité et de sa vie personnelle.
A titre subsidiaire, elle demande que le montant des dommages-intérêts alloués au requérant soit limité à la somme symbolique d’un euro puisqu’à l’évidence, il n’a subi aucun préjudice et que sa procédure ne s’explique que par des raisons d’opportunité financière.

La procédure a été clôturée à la date du 24 octobre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Aux termes des dispositions de l’article 9 du Code civil, chacun a droit au respect de sa vie privée, et les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l’intimité de la vie privée.

Toute personne dispose sur son image d’un droit exclusif qui doit se concilier avec le droit à la liberté d’expression consacré par l’article 10 de la CESDH ; il peut céder devant la liberté d’informer, par les propos et les images, sur tout ce qui entre dans le champ de l’intérêt légitime du public à l’information et du principe de la liberté d’expression.

La liberté de la presse et le droit à l’information du public autorisent la diffusion de l’image de personnes impliquées dans un événement d’actualité ou illustrant avec pertinence un débat d’intérêt général, dans une forme librement choisie, sous la seule réserve du respect de la dignité de la personne humaine.

En l’espèce, la photographie litigieuse illustre un article intitulé “le vélo en libre service passe à l’électrique. L’ancienne flotte a été remplacée : 800 vélos ont été déployés sur 85 stations” publié dans les pages “[Localité 4]” du numéro n°9343 de l’édition du journal La Provence [Localité 4] du jeudi 12 janvier 2023 et sur le site Internet du jounal.
Il correspond à un sujet d’intérêt général pour la population marseillaise et d’actualité puisque c’est au mois de janvier 2023 que la flotte mécanique a été remplacée par une flotte électrique.

La photographie en cause fait apparaître Monsieur [M] circulant en vélo électrique de la ville siglé “levélo”, sur la piste cyclable où on peut voir un panneau “parc balnéaire du [Adresse 5]”.
Dans le procès-verbal dressé par commissaire de justice le 27 février 2023 qu’il verse aux débats, il est indiqué que Monsieur [M] “produit l’application LEVELO installée sur son téléphone portable, sur laquelle je constate qu’il a fait 714 km avec ce mode de transport.
Le détail des trajets quotidiens montre des parcours qui passent tous par le parc balnéaire du [Adresse 5] à [Localité 4]. (…)
Monsieur [M] me confirme qu’il utilise quotidiennement LEVELO sur le trajet du bord de mer à [Localité 4] aux alentours de la statue du David et du parc balnéaire du [Adresse 5] où a été prise la photographie incriminée.”

Cette photographie ne comporte aucun élément qui serait attentatoire à sa dignité. Elle ne sert en réalité qu’à illustrer le sujet de l’article de presse.
La publication de ce cliché ne porte pas atteinte au droit à l’image de Monsieur [M] puisqu’elle est en relation pertinente avec les propos contenus dans l’article, qui concerne un sujet d’actualité, et ne porte pas atteinte a sa dignité.

L’autorisation préalable de Monsieur [M] à la publication de ce cliché n’était donc pas requise.

En conséquence, [H] [M] sera débouté de l’intégralité de ses demandes.

[H] [M] , qui succombe, sera condamné aux dépens, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la SA La Provence l’intégralité des frais irrépétibles qu’elle a été contrainte d’exposer ; [H] [M] sera donc condamné à lui payer la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

Le présent jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire rendu en premier ressort,

Déboute [H] [M] de l’intégralité de ses demandes,

Condamne [H] [M] aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile,

Condamne [H] [M] à payer à la SA La Provence la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

Rappelle que le présent jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire.

AINSI JUGE ET PRONONCE ET MIS A DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIÈRE CHAMBRE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE 1er FEVRIER 2024.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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