Harcèlement moral d’un agent public
Harcèlement moral d’un agent public
Ce point juridique est utile ?

Aux termes de l’article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : ” Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l’affectation et la mutation ne peut être prise à l’égard d’un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu’il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu’il ait exercé un recours auprès d’un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu’il ait témoigné de tels agissements ou qu’il les ait relatés. / Est passible d’une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. () “.

Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d’agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l’existence d’un tel harcèlement. Il incombe à l’administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d’apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu’il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d’instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu’ils sont constitutifs d’un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l’agent auquel il est reproché d’avoir exercé de tels agissements et de l’agent qui estime avoir été victime d’un harcèlement moral.

* * *
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E C a demandé au tribunal administratif D de condamner l’Etat à lui verser une A de 100 000 euros en réparation des préjudices qu’elle a subis, d’une part, du fait du harcèlement sexuel et moral dont elle a été victime et, d’autre part, du fait de la méconnaissance par l’administration de la procédure de reclassement et de reprise d’activité et de son obligation de garantir la sécurité des agents qui la servent, assortie des intérêts et de leur capitalisation à compter du 25 avril 2019 et de mettre à la charge de l’Etat une A de 2 000 euros sur le fondement de 1’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1902714 du 22 décembre 2021 le tribunal administratif D a condamné l’Etat à verser à Mme C une A de 2 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 avril 2019 et de la capitalisation de ces derniers à compter du 28 avril 2020 puis à chaque échéance annuelle ultérieure, mis à la charge de l’Etat le versement à Mme C de la A de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 17 février et 17 novembre 2022, Mme E C, représentée par Me Chartrelle, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement sauf en ce qu’il a reconnu le harcèlement sexuel dont elle avait été victime d’octobre 2013 à février 2014 de la part de son supérieur hiérarchique ;

2°) de condamner l’Etat à lui verser une A de 100 000 euros en réparation des préjudices qu’elle a subis, assortie des intérêts et de leur capitalisation à compter du 25 avril 2019 ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une A de 2 000 euros sur le fondement de 1’article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

– elle a été victime de harcèlement sexuel et moral de la part de son chef de service ;

– elle a été victime de harcèlement moral de la part des services du ministère du travail ;

– la ministre du travail a méconnu la procédure de reclassement qui s’imposait à elle à la suite de la reconnaissance de son inaptitude à occuper ses fonctions et la procédure obligatoire en cas de reprise de service ;

– la ministre du travail a méconnu son obligation de garantir la sécurité des agents servant au sein de ses services ;

– la ministre a méconnu son obligation d’évaluation des risques psycho-sociaux au sein de ses services prévue par l’article L. 4121-3 du code du travail ;

– les fautes de l’administration sont de nature à engager la responsabilité de l’Etat et ouvrent droit à la réparation de ses préjudices moraux et matériels à hauteur de 100 000 euros.

Par mémoire en défense, enregistré le 12 octobre 2022, la ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 18 novembre 2022 la date de clôture de l’instruction a été fixée au 5 décembre 2022 à 12 heures.

Les parties ont été informées, par courriers du 7 février 2023, que l’arrêt à intervenir était susceptible d’être fondé sur le moyen relevé d’office tiré de l’irrecevabilité des conclusions indemnitaires en tant qu’elles sont fondées sur les faits générateurs tirés du non-respect de la procédure de déclaration d’inaptitude et de reclassement, du non-respect de la procédure d’évaluation des risques psychosociaux et du non-respect de l’obligation de prévention de la sécurité/santé par l’employeur, ces faits générateurs n’ayant pas été mentionnés dans la réclamation préalable du 25 avril 2019 et le contentieux n’étant donc pas lié.

Mme E C, représentée par Me Chartrelle, a répondu le 10 février 2023 au moyen susceptible d’être relevé d’office.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

– la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

– la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

– le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 ;

– le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

– le décret n° 2003-770 du 20 août 2003 ;

– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

– le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président assesseur,

– les conclusions de M. Nil Carpentier-Daubresse, rapporteur public,

– et les observations de Me Chartrelle, représentant Mme C.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E C, directrice adjointe du travail, a été affectée au sein de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) des Hauts-de-France. Elle a été placée en congé pour invalidité temporaire imputable au service à la suite d’un accident survenu le 17 octobre 2017, reconnu comme imputable au service par un arrêté du 2 octobre 2018. Après que Mme C s’est plainte du comportement inapproprié de son supérieur hiérarchique les 30 décembre 2017 et 6 mars 2018, une mission d’enquête a été diligentée par la direction des ressources humaines des ministères sociaux. Elle a rendu un rapport le 28 juin 2018. Mme C a alors demandé, par un courrier du 25 avril 2019, à la ministre du travail, l’indemnisation des préjudices qu’elle a subis du fait du harcèlement sexuel et moral dont elle avait été victime. La ministre du travail a implicitement rejeté cette demande le 28 juin 2019. Par un jugement du 22 décembre 2021 le tribunal administratif D a condamné l’Etat à verser à Mme C une A de 2 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 avril 2019 et de la capitalisation de ces derniers à compter du 28 avril 2020 puis à chaque échéance annuelle ultérieure, mis à la charge de l’Etat le versement à Mme C de la A de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la requête. Mme C relève appel de ce jugement sauf en ce qu’il a reconnu le harcèlement sexuel dont elle avait été victime d’octobre 2013 à février 2014 de la part de son supérieur hiérarchique.

Sur la recevabilité de certaines conclusions indemnitaires :

2. La décision par laquelle l’administration rejette une réclamation tendant à la réparation des conséquences dommageables d’un fait qui lui est imputé lie le contentieux indemnitaire à l’égard du demandeur pour l’ensemble des dommages causés par ce fait générateur. Il en va ainsi quels que soient les chefs de préjudice auxquels se rattachent les dommages invoqués par la victime et que sa réclamation ait ou non spécifié les chefs de préjudice en question. La victime est recevable à demander au juge administratif, dans les deux mois suivant la notification de la décision ayant rejeté sa réclamation, la condamnation de l’administration à l’indemniser de tout dommage ayant résulté de ce fait générateur, y compris en invoquant des chefs de préjudice qui n’étaient pas mentionnés dans sa réclamation.

3. Mme C n’a invoqué, dans sa réclamation indemnitaire préalable du 25 avril 2019, que les faits générateurs liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel dont elle estime avoir été victime, en illustrant sa demande par différents exemples comme son absence de reclassement, sans pour autant présenter de conclusions indemnitaires expressément fondées sur d’autres faits générateurs. Aussi ses conclusions indemnitaires fondées sur le non-respect de la procédure de déclaration d’inaptitude et de reclassement, sur le non-respect de la procédure d’évaluation des risques psychosociaux et sur le non-respect de l’obligation de prévention de la sécurité/santé par l’employeur sont irrecevables, le contentieux n’ayant pas été lié en ce qui concerne ces faits générateurs.

Sur la régularité du jugement :

4. Mme C soutient que le tribunal a omis de répondre au moyen tiré du non-respect par l’administration de son obligation d’évaluation des risques psychosociaux. Toutefois, comme cela a été précédemment exposé, les conclusions indemnitaires fondées sur ce fait générateur de responsabilité étaient irrecevables. Aussi le jugement ne pouvait conduire à une indemnisation du préjudice plus importante que celle résultant des moyens sur lesquels il a été statué par le tribunal. Par suite, le moyen tiré de l’irrégularité du jugement doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

5. D’octobre 2013 à février 2014, lors de l’affectation de Mme C comme référente juridique au sein des services d’B de la DIRECCTE, son supérieur hiérarchique direct a usé de propos quasi quotidiens ” graveleux, grivois et déplacé ” et cherché à isoler Mme C lorsque celle-ci lui a fait part de sa réprobation. La ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion ne conteste pas le jugement en ce qu’il a estimé que Mme C était fondée à soutenir qu’elle avait subi d’octobre 2013 à février 2014, des faits de harcèlement sexuel de nature à mettre en cause la responsabilité de l’Etat dès lors que la faute personnelle commise par son supérieur hiérarchique n’est pas dépourvue de tout lien avec le service.

En ce qui concerne la situation de harcèlement moral :

6. Aux termes de l’article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : ” Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l’affectation et la mutation ne peut être prise à l’égard d’un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu’il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu’il ait exercé un recours auprès d’un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu’il ait témoigné de tels agissements ou qu’il les ait relatés. / Est passible d’une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. () “.

7. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d’agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l’existence d’un tel harcèlement. Il incombe à l’administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d’apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu’il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d’instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu’ils sont constitutifs d’un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l’agent auquel il est reproché d’avoir exercé de tels agissements et de l’agent qui estime avoir été victime d’un harcèlement moral.

8. En premier lieu, Mme C soutient que de juin 2017 à octobre 2017 elle a été affectée sur un poste de responsable d’unité de contrôle à l’unité de contrôle C1 de la A où elle se trouvait sous l’autorité du supérieur hiérarchique mentionné au point 5. Alors qu’aucun entretien ni analyse de charge de travail n’a eu lieu au moment de sa prise de poste, elle s’est rapidement trouvée en situation de sous-activité. Elle a alors proposé de prendre des intérims pour décharger les agents de contrôle, mais sa proposition s’est heurtée au refus et à l’agacement de son encadrant hiérarchique. Ce manque d’écoute et d’attention qu’elle a ressenti comme de la maltraitance a engendré des problèmes de santé nécessitant son placement en arrêt de travail à compter du 17 octobre 2017. Ces éléments de fait sont susceptibles de faire présumer l’existence d’un harcèlement moral à son encontre.

9. La ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion fait valoir que la dégradation de l’état de santé de Mme C résulte de changements d’organisation du travail à la suite de modifications des structures et du fonctionnement de l’inspection du travail. Mais, il ressort du rapport d’enquête établi à la demande de l’administration elle-même le 28 juin 2018, que les changements structurels et organisationnels de l’inspection du travail sont intervenus antérieurement, soit au cours de la période 2015 et 2016. De plus, en réponse aux déclarations de Mme C concernant sa sous-activité professionnelle, son supérieur hiérarchique a tenu des propos inadaptés conduisant à la stigmatiser et à la culpabiliser vis-à-vis de son équipe. En outre, ce rapport, qui souligne que ses compétences sont reconnues comme en attestent ses entretiens d’évaluation, confirme l’absence d’analyse de la charge de travail de Mme C, et relève que sa ” souffrance au travail est attestée par six visites auprès du médecin du travail “. Dans ces conditions, l’administration n’établit pas que les agissements dénoncés par Mme C sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement, quand bien même leur auteur n’aurait pas intentionnellement souhaité lui nuire. Aussi l’Etat a commis une faute engageant sa responsabilité sur ce fondement au titre des mois de juin à octobre 2017.

10. En second lieu, à compter du mois de novembre 2017, après son congé faisant suite à son accident de service du 17 octobre 2017, Mme C a été affectée sur différents postes qui ne correspondaient pas, selon elle, à ceux auxquels elle pouvait prétendre en raison de son grade et de ses compétences professionnelles. Elle soutient avoir été en sous-charge de travail et n’avoir réalisé que vingt heures de travail effectives au cours de toute l’année 2019 et qu’au cours de son entretien, le 18 avril 2019 avec son chef de service, celui-ci n’a pas souhaité aborder sa situation administrative particulière. Mme C indique que, dès le 10 septembre 2019, le médecin du travail lui a fait part de la nécessité de mettre en place du télétravail pour des raisons médicales et qu’au 30 janvier 2020, le matériel nécessaire ne lui avait pas été encore fourni, qu’elle a fait l’objet d’un nouvel accident de service, le 31 janvier 2020, qu’elle qualifie de ” rechute ” du précédent accident de service survenu le 17 octobre 2017. Ces éléments de fait sont, dans les circonstances de l’espèce, susceptibles de faire présumer l’existence d’un harcèlement moral à son encontre.

11. La ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion n’établit pas l’intérêt du service à maintenir Mme C dans une situation ” temporaire “, à compter de l’édiction du rapport du 28 juin 2018. La ministre indique que la fiche du poste du poste occupé par Mme C à compter du 1er janvier 2019 mentionne qu’il s’agit d’un poste de catégorie A et que Mme C a estimé dans des courriels du 31 janvier 2019 et du 17 janvier 2020 n’avoir pas le temps de finir certaines tâches. Mais ces courriels mentionnaient également que les tâches en cause ne correspondaient pas à son grade et qu’elle était en souffrance. La ministre n’apporte pas d’éléments qui permettraient de remettre en cause le fait que les tâches réalisées par Mme C étaient de nature essentiellement administratives au cours de l’année 2019, telles que la simple vérification de la complétude de dossiers, ne relevaient pas d’une expertise juridique, et que l’intéressée se trouvait réellement en sous-charge d’activité. La souffrance au travail de l’intéressée est établie au travers de consultations du médecin du travail à plusieurs reprises au cours de l’année 2019 jusqu’au nouvel accident de service survenu le 31 janvier 2020. Enfin la circonstance que, le 5 décembre 2018, la ministre du travail a accordé à l’appelante la protection fonctionnelle à raison des faits de harcèlement moral et sexuel qu’elle avait subis ne fait pas obstacle à la reconnaissance d’une faute de l’Etat concernant l’existence d’un harcèlement moral, y compris postérieurement à cette date.

12. Dans ces conditions, l’administration n’établit pas que les agissements dénoncés par Mme C, à compter de la production du rapport d’enquête du 28 juin 2018, sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. L’Etat a donc commis une faute engageant sa responsabilité sur ce fondement à compter du 28 juin 2018.

Sur les conclusions indemnitaires :

13. Mme C demande la réparation des préjudices liés au non-respect de la procédure de reclassement, au non-respect de l’obligation d’évaluation des risques psycho-sociaux et au non-respect des préconisations du médecin du travail toutefois ces chefs de préjudice sont sans lien de causalité avec les fautes portant sur le harcèlement sexuel et le harcèlement moral.

14. Si Mme C conteste le montant de 2 000 euros alloué en première instance au titre du préjudice relatif au harcèlement sexuel subi entre les mois d’octobre 2013 et février 2014, elle n’apporte pas d’élément permettant d’établir une évaluation insuffisante de cette indemnisation pour ce préjudice.

15. S’agissant du harcèlement moral pour la période des mois de juin à octobre 2017, le certificat médical d’un psychologue du 22 novembre 2017 indique qu’il reçoit Mme C en consultation depuis juillet 2017 en raison d’une situation de souffrance au travail. Le préjudice moral peut être justement apprécié en fixant son indemnisation à la A de 1 000 euros.

16. S’agissant du harcèlement moral pour la période postérieure au 18 juin 2018, le certificat du 5 mai 2021 du psychologue précité indique toujours suivre Mme C en consultation. Le certificat du 26 avril 2021 du praticien psychiatre indique qu’il suit régulièrement Mme C depuis janvier 2020 et il mentionne un symptôme dépressif se composant d’une ” perte sévère de goût et d’élan vital, de ruminations incessantes des circonstances professionnelles ” et ” d’une phobie du lieu d’exercice et de tout contact avec le travail “. Le préjudice moral invoqué est ainsi établi. Il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi par l’appelante en en fixant l’indemnisation à la A de 5 000 euros.

17. Si Mme C soutient avoir subi des préjudices d’atteinte à son image et à sa réputation, des troubles dans les conditions d’existence et une perte de chance quant à ses perspectives professionnelles, la réalité de ces préjudices n’est pas établie.

18. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C est seulement fondée à demander que la A de 2 000 euros que l’Etat a été condamné à lui verser par le tribunal administratif soit portée à la A de 8 000 euros. Mme C a droit aux intérêts au taux légal de cette A à compter du 28 avril 2019, date de réception de sa demande indemnitaire préalable par l’administration, et à la capitalisation de ces derniers, à compter du 28 avril 2020, puis à chaque échéance annuelle ultérieure.

Sur les frais de procédure :

19. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la A de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme C et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La A de 2 000 euros que l’Etat a été condamné à payer à Mme C est portée à la A de 8 000 euros. Elle sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 avril 2019 et de la capitalisation de ces derniers à compter du 28 avril 2020 puis à chaque échéance annuelle ultérieure.

Article 2 : L’Etat versera à Mme C une A de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif D du 22 décembre 2021 est réformé en ce qu’il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E C et au ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.

Délibéré après l’audience publique du 14 février 2023 à laquelle siégeaient :

– Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,

– M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

– M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 mars 2023.

Le président-rapporteur,

Signé : M. FLa présidente de chambre,

Signé : G. Borot

La greffière,

Signé : C. Huls-Carlier

La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière

C. Huls-Carlier


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