Régularité d’un contrôle de l’URSSAF

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Régularité d’un contrôle de l’URSSAF

L’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale n’exige pas que l’avis préalable qu’il prévoit mentionne le caractère concerté du contrôle. Dès lors, c’est à bon droit que la cour d’appel, sans encourir les griefs du moyen, a dit que la circonstance que l’avis préalable ne fasse pas mention que le contrôle s’inscrivait dans le cadre d’un contrôle concerté, décidé par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, était sans incidence sur sa régularité.


 

16 février 2023
Cour de cassation
Pourvoi n°
21-17.207

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 février 2023

Cassation partielle

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 165 FS-B

Pourvoi n° N 21-17.207

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 FÉVRIER 2023

La société [9], société anonyme sportive professionnelle, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 21-17.207 contre l’arrêt n° RG : 19/04305 rendu le 26 mars 2021 par la cour d’appel de Toulouse (4e chambre sociale, section 3), dans le litige l’opposant :

1°/ à l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) de Midi-Pyrénées, dont le siège est [Adresse 3],

2°/ à M. [L] [W], domicilié [Adresse 4],

3°/ à M. [Z] [J], domicilié [Adresse 5],

4°/ à M. [T] [R], domicilié [Adresse 2],

5°/ à M. [Y] [V], domicilié [Adresse 6],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rovinski, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société [9], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l’URSSAF de Midi-Pyrénées, et l’avis de Mme Tuffreau, avocat général référendaire, après débats en l’audience publique du 10 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Rovinski, conseiller rapporteur, Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, Mmes Coutou, Renault-Malignac, Cassignard, M. Leblanc, conseillers, Mmes Vigneras, Dudit, M. Labaune, conseillers référendaires, Mme Tuffreau, avocat général référendaire, et Mme Catherine, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Toulouse, 26 mars 2021), à la suite d’un contrôle portant sur les années 2013 à 2015, l’URSSAF de Midi-Pyrénées (l’URSSAF) a notifié à la société anonyme sportive professionnelle [9] (la société) une lettre d’observations du 14 octobre 2016, puis une mise en demeure du 22 décembre 2016.

2. La société a saisi d’un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. La société fait grief à l’arrêt de rejeter son recours, alors :

« 1°/ qu’en vertu de l’article R. 243-59, premier alinéa, du code de la sécurité sociale, tout contrôle effectué en application de l’article L. 243-7 du même code est précédé de l’envoi par l’organisme chargé du recouvrement des cotisations d’un avis adressé à l’employeur ; que l’absence d’une mention non prévue par le code de la sécurité sociale au sein de l’avis de contrôle entraîne la nullité du redressement mis en oeuvre dès lors que cette situation constitue intrinsèquement une violation des droits de la défense du cotisant ; que selon les articles L. 225-1-1 quinquies et D. 213-1-2 du code de la sécurité sociale, l’ACOSS peut requérir des URSSAF qu’elles opèrent des actions concertées de contrôle et de recouvrement ; que par application combinée de ces textes, l’avis adressé à l’employeur préalablement au contrôle doit préciser qu’il est engagé dans le cadre d’un contrôle concerté décidé par l’ACOSS en vertu de l’article L. 225-1-1 du code de la sécurité sociale lorsque c’est le cas ; que la société a invoqué, dans ses conclusions d’appel, l’irrégularité de l’avis de contrôle et, subséquemment, la nullité des opérations de contrôle et de redressement, dès lors que cet avis ne mentionnait pas que le contrôle avait été diligenté dans le cadre d’un contrôle concerté et ne visait pas l’article L. 225-1-1 du code de la sécurité sociale ; que pour écarter ce moyen la cour d’appel a retenu que, bien qu’il ne fasse mention ni d’un contrôle concerté ni de l’article L. 225-1-1 du code de la sécurité sociale, l’avis de contrôle comprenait les mentions explicitement visées à l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, qu’il « précise la nature des documents et éléments chiffrés concernés par les opérations de vérification, rappelle la possibilité d’assistance par un conseil de son choix et fait état de la charte du cotisant en indiquant le site où elle peut être consultée » et que « la circonstance qu’il ne fasse pas mention que le contrôle s’inscrit dans le cadre d’un contrôle concerté, décidé par l’agence centrale des organismes de sécurité sociale, est sans incidence sur le respect des droits de la défense dès lors que la nature du contrôle et la procédure de contrôle en elle-même sont en tout état de cause identiques » ; qu’en statuant ainsi quand l’obligation de motivation conforme de l’avis de contrôle, qui est d’ordre public, est méconnue en présence, comme en l’espèce, d’un avis n’informant pas le cotisant que le contrôle dont il fait l’objet est mis en oeuvre dans le cadre d’un contrôle concerté décidé par l’ACOSS, ce peu important que la mention dans l’avis du caractère concerté du contrôle ne soit pas expressément visée par l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, la cour d’appel a violé les articles L. 225-1-1, R. 243-59 et D. 213-1-2 du code de la sécurité sociale pris en leur version applicable, ensemble l’article 6 § 1 de la CESDH ;

2°/ que l’avis adressé à l’employeur préalablement au contrôle doit préciser qu’il est engagé dans le cadre d’un contrôle concerté décidé par l’ACOSS en vertu de l’article L. 225-1-1 du code de la sécurité sociale lorsque c’est le cas ; que l’irrégularité des documents exigés lors de la procédure de redressement entache la procédure de redressement de nullité, sans que le cotisant n’ait à démontrer l’existence d’un grief ; que la société a invoqué, dans ses conclusions d’appel, l’irrégularité de l’avis de contrôle et, subséquemment, la nullité des opérations de contrôle et de redressement, dès lors que l’avis qui lui a été adressé ne mentionnait pas que le contrôle avait été diligenté dans le cadre d’un contrôle concerté et ne visait pas l’article L. 225-1-1 du code de la sécurité sociale ; que pour écarter ce moyen la cour d’appel a encore retenu que l’avis de contrôle a été adressé « dans un délai suffisant pour lui permettre d’organiser sa défense y compris en prenant attache, si elle le juge utile, avec [8], avisée un mois au préalable de l’existence d’un contrôle concerté, de la période concernée par le contrôle », que « [8] ayant été informée un mois auparavant, par l’agence centrale des organismes de sécurité sociale, de l’inscription au plan national des URSSAF pour 2016 de contrôles concertés pour les clubs de rugby du Top 14 et de la désignation de l’URSSAF Midi-Pyrénées pour « piloter » ce contrôle, ce dernier s’inscrit dans le cadre d’un respect loyal des droits de la défense » et que « la société… a bien eu la possibilité, si elle l’estimait utile, de se concerter avec les autres clubs de rugby professionnel, pour organiser sa défense préalablement à la première visite de l’inspecteur du recouvrement » ; qu’en statuant ainsi cependant que l’obligation de motivation conforme de l’avis de contrôle est d’ordre public en ce qu’elle conditionne le respect des droits de la défense du cotisant de sorte que sa mise en oeuvre est impérative à peine de nullité du redressement subséquent sans que ne soit exigée la preuve d’un préjudice en découlant pour le cotisant, ce dont il résulte que l’URSSAF avait l’obligation de préciser dans l’avis que le contrôle était mis en oeuvre dans le cadre d’un contrôle concerté quelle que soit l’information donnée parallèlement par l’URSSAF à [8], la cour d’appel a violé les articles L. 225-1-1, R. 243-59 et D. 213-1-2 du code de la sécurité sociale, ensemble l’article 6 § 1 de la CESDH. »

Réponse de la Cour

4. L’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale n’exige pas que l’avis préalable qu’il prévoit mentionne le caractère concerté du contrôle.

5. Dès lors, c’est à bon droit que la cour d’appel, sans encourir les griefs du moyen, a dit que la circonstance que l’avis préalable ne fasse pas mention que le contrôle s’inscrivait dans le cadre d’un contrôle concerté, décidé par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, était sans incidence sur sa régularité.

6. Le moyen n’est, dès lors, pas fondé.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

7. La société fait le même grief à l’arrêt, alors :

« 1°/ qu’il résulte des articles 480 du code de procédure civile et 1351, devenu 1355, du code civil, que l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement et a été tranché dans son dispositif ; que l’autorité de la chose jugée ne peut être invoquée qu’en cas de triple identité de parties, de cause et d’objet entre l’action définitivement jugée et la nouvelle demande ; que le jugement statuant sur un redressement distinct, ayant donné lieu à une lettre d’observations et une mise en demeure distinctes, ne statue pas sur le même objet et n’est donc revêtu d’aucune autorité de la chose jugée relativement aux redressements ultérieurs intervenus par lettre d’observations et lettre de mise en demeure distinctes et portant sur une autre période ; qu’en conséquence les observations pour l’avenir effectuées au titre d’une pratique lors d’un précédent redressement ne rendent pas le cotisant irrecevable à contester le redressement infligé au titre de cette même pratique lors d’un contrôle ultérieur ; qu’en décidant au contraire que dès lors que la société avait fait l’objet d’une observation sur l’avenir dans une lettre d’observations du 25 septembre 2009 au titre de la requalification en contrat de travail de l’intervention du personnel médical et paramédical, elle était irrecevable à contester le chef de redressement n° 18 afférent à l’assujettissement et à l’affiliation au régime général du staff médical et paramédical au titre des années 2013, 2014 et 2015, la cour d’appel a violé les articles 480 du code de procédure civile et 1355 du code civil ;

2°/ que la notification à un cotisant d’une observation pour l’avenir, confirmée en justice, ne le rend pas irrecevable à contester en justice le redressement intervenu ultérieurement dans le cadre d’un contrôle URSSAF sur un même fondement ; qu’en décidant au contraire que dès lors que la société avait fait l’objet d’une observation sur l’avenir dans une lettre d’observations du 25 septembre 2009 au titre de la requalification en contrat de travail de l’interventions du personnel médical, elle était irrecevable à contester le chef de redressement n° 18 afférent à l’assujettissement et à l’affiliation au régime général du staff médical et paramédical au titre des années 2013, 2014 et 2015, la cour d’appel a violé les articles L. 244-2, L. 243-7 et L. 243-12-4 du code de la sécurité sociale dans leur version applicable au jour de l’exigibilité des cotisations ;

3°/ que les juges ne peuvent statuer sur le fond après avoir déclaré une action irrecevable ; qu’en l’espèce ayant déclaré la société irrecevable à contester le chef de redressement n° 18 afférent à l’assujettissement et à l’affiliation au régime général du staff médical et paramédical au titre des années 2013, 2014 et 2015, la cour d’appel ne pouvait, dans le même temps, statuer au fond et décider que le chef de redressement est justifié pour son entier montant compte tenu du lien de subordination existant entre le club et les intervenant médicaux et paramédicaux ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a en conséquence violé l’article 122 du code de procédure civile ;

4°/ que le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur, qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que pour déduire l’existence d’un tel lien de subordination entre le club de rugby et les intervenants médicaux et paramédicaux, la cour d’appel s’est bornée à relever « l’existence d’un service organisé par la société… au sein duquel interviennent des médecins, des masseurs-kinésithérapeutes et un ostéopathe », service coordonné par deux médecins salariés, que les intervenants médicaux et paramédicaux ont l’obligation d’être présents lors des matchs, que l’activité médicale est exercée dans les locaux du club avec les moyens et matériels du club, que les intervenants reçoivent des honoraires mensuels, l’existence d’une « hiérarchisation des intervenants », ainsi que « la cosignature des conventions d’honoraires » ; qu’en statuant ainsi par des motifs insusceptibles d’établir un pouvoir de direction, de contrôle et sanction du club de rugby à l’égard des intervenants médicaux et paramédicaux, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 242-1, L. 311-2 et L. 311-11 du code de la sécurité sociale et de l’article L. 1221-1 du code du travail pris en leur version applicable à la date d’exigibilité des cotisations sociales ;

5°/ que sont présumés ne pas être liés avec le donneur d’ordre par un contrat de travail dans l’exécution de l’activité donnant lieu à immatriculation ou inscription les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des URSSAF pour le recouvrement des cotisations d’allocations familiales ; que la société exposante faisait valoir, en l’espèce, que les intervenants médicaux et paramédicaux devaient se voir appliquer la présomption de non-salariat au regard de leur activité libérale en qualité d’indépendant inscrit auprès de l’URSSAF ; qu’en énonçant au contraire que « la circonstance que les autres médecins et intervenants paramédicaux disposent d’un cabinet médical ou paramédical avec une patientèle propre n’est pas exclusive de l’existence d’un lien de subordination lors de leurs participations au service de soins organisé au sein de la société alors que la présomption de non-salariat ne peut concerner que leur activité libérale dans leurs propres cabinets », cependant que dès lors que ces intervenant médicaux et paramédicaux avaient le statut d’indépendant inscrit auprès de l’URSSAF la présomption de non salariat devait s’appliquer peu important que leur activité se déroule ou non dans leur cabinet médicaux, la cour d’appel a violé, par refus d’application, les articles L. 8221-6 I 3° et L. 8221-6-1 du code du travail. »

 


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