Données personnelles : 17 octobre 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 23/01000

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Données personnelles : 17 octobre 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 23/01000
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17 octobre 2023
Cour d’appel de Nîmes
RG n°
23/01000

Ordonnance n°

920

N° RG 23/01000 – N° Portalis DBVH-V-B7H-I67O

J.L.D. [Localité 3]

15 octobre 2023

[W]

C/

LE PREFET DE LA HAUTE CORSE

COUR D’APPEL DE [Localité 3]

Cabinet du Premier Président

Ordonnance du 17 OCTOBRE 2023

Nous, Madame Alexandra BERGER, Conseillère à la Cour d’Appel de [Localité 3], conseiller désigné par le Premier Président de la Cour d’Appel de [Localité 3] pour statuer sur les appels des ordonnances des Juges des Libertés et de la Détention du ressort, rendues en application des dispositions des articles L 742-1 et suivants du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit de l’Asile (CESEDA), assistée de Mme Ellen DRÔNE, Greffière,

Vu l’arrêté préfectoral portant obligation de quitter le territoire national en date du 12 octobre 2022 notifié le même jour, ayant donné lieu à une décision de placement en rétention en date du 02 octobre 2023, notifiée le même jour à 16h17 concernant :

M. [F] [W]

né le 03 Février 1987 à [Localité 4]

de nationalité Marocaine

Vu l’ordonnance en date du 05 octobre 2023 rendue par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de [Localité 3] portant prolongation du maintien en rétention administrative de la personne désignée ci-dessus ;

Vu la requête reçue au Greffe du Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de [Localité 3] le 13 octobre 2023 à 20h53, enregistrée sous le N°RG 23/4965 présentée par M. [F] [W] aux fins de mise en liberté ;

Vu l’ordonnance rendue le 15 Octobre 2023 à 18h30 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal de [Localité 3] qui a rejeté la requête ;

Vu l’appel de cette ordonnance interjeté par Monsieur [F] [W] le 16 ctobre 2023 à 10h21 ;

Vu l’absence du Ministère Public près la Cour d’appel de [Localité 3] régulièrement avisé ;

Vu la présence de Monsieur [U] [I], représentant le Préfet de Haute-Corse, agissant au nom de l’Etat, désigné pour le représenter devant la Cour d’Appel en matière de Rétention administrative des étrangers, entendu en ses observations ;

Vu la comparution de Monsieur [F] [W], régulièrement convoqué ;

Vu la présence de Me Lisa VESPERINI, avocate de Monsieur [F] [W] qui a été entendue en sa plaidoirie ;

MOTIFS

Monsieur [F] [W] a reçu notification le 12 octobre 2022 d’un arrêté Préfectoral du même jour lui faisant obligation de quitter le territoire national sans délai.

Monsieur [F] [W] a fait l’objet d’un contrôle d’identité le 02 octobre 2023, à 08h20, à [Localité 2].

Par arrêté de la même préfecture de la Haute Corse en date du 02 octobre 2023 et qui lui a été notifié le jour même à 16h17, il a été placé en rétention administrative aux fins d’exécution de la mesure d’éloignement.

Par requêtes du 04 octobre 2023, Monsieur [F] [W] et le Préfet de la Haute-Corse ont respectivement saisi le Juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de [Localité 3] d’une contestation de ce placement en rétention et d’une demande en prolongation de la mesure.

Par ordonnance prononcée le 05 octobre 2023, à 14h12, le Juge des libertés et de la détention de [Localité 3] a rejeté les exceptions de nullité soulevées ainsi que les moyens présentés par Monsieur [F] [W] et ordonné la prolongation de sa rétention administrative pour vingt-huit jours, décision confirmée en appel le 06 octobre 2023.

Par requêtes du 13 octobre 2023, Monsieur [F] [W] a saisi le Juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de [Localité 3] d’une demande en main levée de la mesure de rétention.

Par ordonnance prononcée le 15 octobre 2023, à 18h30, le Juge des libertés et de la détention de [Localité 3] a rejeté la demande présentée par Monsieur [F] [W].

Monsieur [F] [W] a interjeté appel de cette ordonnance le 16 octobre 2023, à 10h21.

Sur l’audience, Monsieur [F] [W] déclare que :

les conditions au centre sont très difficiles, les gens ne lui ressemblent pas, il n’y a pas sa place,

il a vu le médecin du centre, il a demandé à voir le psychiatre mais on lui a répondu que ce n’était pas possible ; il voulait un traitement pour dormir, il s’alimente très peu, il a perdu quatre kilos, il ne dort pas, pour lui c’est invivable comme situation,

il a vu le médecin hier, c’est la seconde fois, et cette fois-ci, hier il n’y a pas eu de prescription, et il lui a prolongé le premier traitement, mais sans qu’une ordonnance lui ait été dispensée.

Son avocat soutient que :

il y a la certitude que le local avocat au CRA est sous vidéosurveillanec, or les droits de la défense ne sont pas respectés, et ce local, par le CESEDA, a une utilité, avec une mission spécifique d’être la base, dans tout état de droit, d’une relation de confiance qui doit régner entre un client et son avocat, avec une garantie absolue des échanges, de la confidentialité et du secret professionnel ; le lendemain de l’audience à la Cour, le 07 octobre, elle s’est rendue au CRA et aucun panneau à l’entrée n’indiquait que le local est sous vidéosurveillance, elle a du se délester de ses affaires pour travailler, notamment de son téléphone, de tout laisser dans le hall d’entrée, les portes sont fermées, avec des vitres en haut des portes et l’entretien commence, et elle dès qu’elle s’est rendue compte de la présence de la vidéo, elle a considéré que la confidentialité de cet échange n’était pas garantie, elle a eu des doutes sur le secret de l’échange avec le retenu,

il y a un grief nécessairement dans cette situation pour le retenu, car par précaution, elle a arrêté son entretien ce qui pose grief car elle n’était plus en capacité d’assurer la défense du retenu, article 6 CEDH, le procès équitable n’est pas respecté, et le CRA a été honnête, car un courriel indique que suite à un appel téléphonique pendant le délibéré du JLD, il est confirmé la présence d’une caméra qui ne fait que filmer, or le droit à l’image n’est pas plus respecté, il y a peut-être captation du son, sans preuve du contraire, et on ne lui prouve pas que l’entretien est confidentiel, (article 9 code civil, article 6 CEDH), ni par qui sont détenues ces images, pendant combien de temps, et ce en dehors de toute légalité (recommandation de la CNIL) ; même en prison, il n’y a pas de caméra,

sur le second moyen, il y a une vulnérabilité du retenu car par expérience, le traitement qui a été prescrit n’est pas approprié, le Théralène ; on ne sait même pas si c’est un médecin qui lui a donné, or malgré ses courriels d’alertes, aucune suite n’a été donnée par le CRA alors que le retenu va mal, qu’il faut le soigner, il n’y pas eu de réponse,

la caducité de l’OQTF : au moment où le retenu est en placé en rétention, l’OQTF est valide, de même que le 06 octobre, or aujourd’hui, cette mesure ne l’est plus au moment où elle saisit le JLD, ce depuis la veille, car c’est une mesure prise depuis plus d’un an ; il n’y pas eu de suspension, et il n’y a plus de titre exécutoire ; cette vérification devait entraîner la main levée de la décision (jurisprudence de la Cour d’appel de Montpellier qui accueille ce moyen).

Monsieur le Préfet pris en la personne de son représentant demande la confirmation de l’ordonnance dont appel. Il fait valoir que :

sur le local d’entretien avec la présence vidéo, il précise que ce local est là depuis l’origine du centre de rétention, et jamais cela n’a posé problème car elle n’est pas cachée et n’enregistre rien, c’est une caméra pour assurer la sécurité de l’avocat, il n’y a pas de dispositif d’enregistrement,

sur l’affichage de cette caméra, il y a des préconisation, des recommandations de la CNIl mais aucune obligation, et d’ailleurs le conseil du retenu l’a bien vu car ce n’est pas à son insu,

sur l’OQTF périmée, elle l’est à l’audience car elle a plus d’un an, mais selon une décision de la C.CASS du 13 janvier 2013, c’est à la date du placement en rétention que cette validité doit être appréciée et au moment où il est placé en rétention, l’OQTF a moins d’un an, ce qui est le cas en l’espèce,

sur l’état de vulnérabilité supposé, il y a lieu de dire que le retenu a vu le médecin, deux fois, il y a un service médical sur place, et donc le service médical, en ce moment n’est pas saturé en raison du nombre de retenus actuellement présents au centre de rétention ; il y a une prescription qui a été renouvelée, pour que le retenu puisse dormir : son état est donc pris en charge et aucune incompatibilité n’a été relevée,

sur l’assignation à résidence, trois OQTF ont été prises déjà, sans exécution spontanée de sa part ; il n’y a aucune volonté sincère de partir au vu de ses précédentes déclarations, et il a un passé pénal qui font que ses garanties sont insuffisantes, malgré un passeport en cours de validité,

les documents présentés, de domiciliation, sont anciens et sujets à caution.

SUR LA RECEVABILITE DE L’APPEL :

L’appel interjeté par Monsieur [F] [W] à l’encontre d’une ordonnance du Juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de [Localité 3] a été relevé dans les délais légaux et conformément aux dispositions des articles L.743-21, R.743-10 et R.743-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Il est donc recevable.

SUR LES MOYENS NOUVEAUX ET ÉLÉMENTS NOUVEAUX INVOQUÉS EN CAUSE D’APPEL:

L’article 563 du code de procédure civile dispose : « Pour justifier en appel les prétentions qu’elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves. »

L’article 565 du même code précise : « Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent ».

Sauf s’ils constituent des exceptions de procédure, au sens de l’article 74 du code de procédure civile, les moyens nouveaux sont donc recevables en cause d’appel.

A l’inverse, pour être recevables en appel, les exceptions de nullité relatives aux contrôle d’identité, conditions de la garde à vue ou de la retenue et d’une manière générale celles tenant à la procédure précédant immédiatement le placement en rétention doivent avoir été soulevées « in limine litis » en première instance.

En l’espèce, Monsieur [F] [W] soulève une irrégularité tenant à l’entretien avec son conseil, des moyens de fond tenant à son état de vulnérabilité et il formule la demande d’une assignation à résidence chez sa compagne.

SUR LES EXCEPTIONS DE NULLITÉ AU TITRE D’IRRÉGULARITÉS DE LA PROCÉDURE ANTÉRIEURE A L’ARRÊTÉ :

L’article L.743-12 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dispose: « En cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d’inobservation des formalités substantielles, le juge des libertés et de la détention saisi d’une demande sur ce motif ou qui relève d’office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée de la mesure de placement en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l’étranger. »

Ainsi une irrégularité tirée de la violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d’inobservation de formalités substantielles ne peut conduire à une mainlevée de la rétention que si elle a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l’étranger.

En l’espèce, le retenu relève que la présence d’une caméra dans le local d’entretien avec son conseil a empêché les droits de la défense de s’exercer. Toutefois, cette caméra a pour vocation d’assurer la sécurité des personnes en permettant d’alerter les personnels sur un passage à l’acte agressif sur des personnes qui s’y trouveraient, tout en n’étant en rien dissimulée à leur vue. La preuve n’est pas rapportée que cette caméra soit pourvue d’une dispositif d’enregistrement sonore et visuel, et il y a lieu de retenir que les droits de la défense ont pu s’exercer, en vue de la préparation de l’audience, pleinement avant celle-ci, devant le juge des libertés et de la détention, dans des conditions, comme le rappelle le juge des libertés et de la détention, de strictes confidentialité.

Il n’est pas avéré que le courriel adressé par le centre de rétention au juge des libertés et de la détention fait suite à une demande relative à l’audience en cours, et en tout état de cause, cette question a été débattue contradictoirement désormais devant la Cour d’appel.

Sur la validité de l’OQTF :

C’est à la date de placement en rétention prise par l’autorité administrative que doit s’apprécier le point de savoir si l’obligation de quitter le territoire national a été prise moins d’un an auparavant.

En l’espèce, Monsieur [F] [W] a été placé en rétention administrative le 2 octobre 2023, s’appuyant ne cela sur l’arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris à son encontre le 12 octobre 2022, soit moins d’un an auparavant. Il n’y a donc pas lieu de réexaminer la validité de cette mesure par le simple passage du temps depuis le placement en rétention de Monsieur [F] [W]. Les motifs adoptés par le juge des libertés et de la détention sont donc pertinents et le moyen soulevé sera rejeté.

SUR LA SITUATION PERSONNELLE DE MONSIEUR [F] [W] :

Sur la vulnérabilité du retenu et l’incompatibilité de la mesure de rétention:

Monsieur [F] [W] a été vu par deux médecins différents depuis son placement au centre de rétention. Aucun n’a fait de préconisations écrites de consultation en psychiatrie. La veille de l’audience, un traitement lui a été prescrit comme étant le renouvellement d’une précédente prescription. Il appartient au retenu de demander tout justificatif que ce soit auprès du médecin afin de les produire s’il le souhaite en justice. Par ailleurs, le retenu ne produit aucun élément concernant son état de santé, lequel fait l’objet d’une prise en charge qu’il n’appartient pas à l’autorité judiciaire d’apprécier ou de critiquer, ni dans ses modalités de consultation, ni dans ses prescriptions de traitement.

Le moyen étant soutenu par aucune preuve, il y a lieu de le rejeter.

Sur la demande d’une assignation à résidence :

Comme indiqué précédemment, le retenu n’a pas exécuté de précédentes mesures d’éloignement. Il produit comme preuve de ses garanties de représentation une attestation d’hébergement laconique de sa compagne, laquelle ne développe pas ses liens avec ce dernier dans son courrier. Cette attestation d’hébergement n’est pas accompagnée de justificatifs de domicile récents, seuls un avis d’impositions de 2022 et des fiches de paie de 2015 étant versées au dossier. La demande d’assignation à résidence sera donc rejetée.

Il convient par voie de conséquence de confirmer l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort,

Vu l’article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,

Vu les articles L.741-1, L.742-1 à L.743-9, R.741-3 et R.743-1 à R.743-19, L.743.21 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

DÉCLARONS recevable l’appel interjeté par Monsieur [F] [W] ;

CONFIRMONS l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;

RAPPELONS que, conformément à l’article R.743-20 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile, les intéressés peuvent former un pourvoi en cassation par lettre recommandée avec accusé de réception dans les deux mois de la notification de la présente décision à la Cour de cassation [Adresse 1].

Fait à la Cour d’Appel de [Localité 3],

le 17 Octobre 2023 à

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

‘ Notification de la présente ordonnance a été donnée ce jour au Centre de rétention administrative de [Localité 3] à [F] [W].

Le à H

Signature du retenu

Copie de cette ordonnance remise, ce jour, par courriel, à :

Monsieur [F] [W], par le CRA

Me Lisa VESPERINI, avocate choisie

M. Le Préfet de Haute-Corse

M. Le Directeur du CRA de [Localité 3]

Le Ministère Public près la Cour d’Appel de NIMES

M. / Mme Le Juge des libertés et de la détention

 


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