Données confidentielles : 9 juin 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/19160

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Données confidentielles : 9 juin 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/19160
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-1

ARRÊT AU FOND

DU 09 JUIN 2023

N° 2023/192

Rôle N° RG 19/19160 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BFJY2

Association OGEC LPP [3]

C/

[Z] [U]

Copie exécutoire délivrée le :

09 JUIN 2023

à :

Me Karine GRAVIER de la SELAS GRAVIER FRIBURGER AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Evelyne SKILLAS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MARSEILLE en date du 18 Novembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° F 18/00155.

APPELANTE

Association OGEC LPP [3], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Karine GRAVIER de la SELAS GRAVIER FRIBURGER AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

Madame [Z] [U], demeurant [Adresse 1]

comparante en personne, assistée de Me Evelyne SKILLAS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Stéphanie BOUZIGE, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Stéphanie BOUZIGE, Conseiller

Madame Emmanuelle CASINI, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Juin 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Juin 2023

Signé par Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président, et Monsieur Kamel BENKHIRA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Madame [Z] [U] a été engagée par l’association Organisme de Gestion de l’Enseignement Catholique du Lycée professionnel Privé [3] (l’OGEC LPP [3]) suivant contrat à durée déterminée du 10 juillet 2002, en qualité de comptable. La relation contractuelle s’est poursuivie dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée signé le 30 septembre 2008.

Madame [U] a été convoquée à un entretien préalable avec mise à pied conservatoire, par courrier du 30 juin 2017. Elle a été licenciée pour une cause réelle et sérieuse, par courrier du 20 juillet 2017, pour les motifs suivants :

‘Lors de notre entretien du 11 juillet courant, pour lequel vous n’avez pas souhaité être assistée, nous vous avons exposé les motifs pour lesquels nous avions été contraints d’envisager de procéder à la rupture de votre contrat de travail et vous avons entendu en vos explications.

Suite à cet entretien, nous vous informons avoir pris la décision de vous licencier pour cause réelle et sérieuse pour les motifs suivants:

Nous avons été informés et alertés par plusieurs membres du personnel de vos agissements déloyaux à l’encontre de l’établissement qui vous emploie.

Au terme d’une vérification interne indispensable et après avoir recueilli les témoignages concordants des salariés ayant dénoncé vos actes, nous sommes au regret de devoir mettre un terme à notre collaboration pour les motifs suivants :

– Vous vous autorisez à pénétrer dans le bureau (fermé) de la directrice en son absence, notamment en dehors de vos heures de travail, afin de fouiller ses armoires et son bureau et d’y récupérer des documents et informations confidentiels auxquels vous n’avez pas accès de par vos fonctions, et d’en prendre copie; plus grave encore, vous vous permettez de montrer aux salariés de l’établissement certains documents confidentiels ou de porter à leur connaissance des informations confidentielles concernant d’autres collaborateurs en émettant des commentaires et critiques inadmissibles.

– Vous vous vantez auprès du personnel de mettre sciemment du temps à réaliser vos taches (clôture du bilan…) afin d’obtenir le paiement d’heures supplémentaires que vous réalisez indûment.

– Vous dénigrez ouvertement la Direction et colportez sur son compte et au sujet de l’établissement des propos et rumeurs inacceptables : mauvaise santé financière de l’OGEC et fermeture inévitable du fait du refus de soutien financier des s’urs ; avantage dont bénéficie la Directrice sur lesquels vous émettez commentaires et critique infondées dans le but de mettre la Direction en difficulté ; mise en péril de l’établissement par la directrice qui fait des choses «illégales » ….

Ces agissements très graves génèrent des tensions et sentiment de mal-être au sein de l’établissement, les salariés ne cautionnant nullement vos actes et paroles et votre attitude de dénigrement dans laquelle vous cherchez à les entraîner.

Après une précédente malheureuse affaire avec Mme [A], nous avions à nouveau été alertés en janvier 2017 par une enseignante du lycée qui s’était plainte de vos propos et attitudes déplacés qu’elle qualifiait de «harcèlement moral» et nous demandait d’intervenir.

Nous avions alors cherché à calmer la situation et n’avions pas donné suite, en vous protégeant. Force est de constater que notre bienveillance à votre égard n’est pas récompensée.

Les explications que vous nous avez fournies lors de notre entretien du 11 juillet ne sont pas de nature à modifier notre appréciation des faits. Pour l’essentiel vous avez nié les faits en prétextant qu’il s’agissait d’une « cabale » du personnel contre vous.

Après réflexion et analyse, et malgré la gravité de ces manquements et les préjudices causés, nous avons pris la décision de vous notifier par la présente votre licenciement pour cause réelle et sérieuse. De ce fait, votre période de mise à pied vous sera réglée ‘.

Contestant son licenciement, Madame [U] a saisi le conseil de prud’hommes de Marseille, lequel, par jugement du 18 novembre 2019, a :

– dit et jugé que le licenciement de Madame [U], notifié le 20 juillet 2017 par l’association OGEC LPP [3], s’analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

– fixé le salaire mensuel moyen de Madame [U] à la somme de 2.981,51€ bruts.

En conséquence :

– condamné l’association OGEC LPP [3], prise en la personne de son représentant légal en exercice, à payer à Madame [U] la somme nette de 20.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

– condamné l’association OGEC LPP [3] à verser à Madame [U] la somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire des dispositions du présent jugement qui ne sont pas de plein droit exécutoires par provision.

– débouté Madame [U] du surplus de ses demandes.

– débouté l’association OGEC LPP [3] de sa demande au titre des frais irrépétibles.

– rejeté toute autre demande.

– condamné l’association OGEC LPP [3] aux dépens de l’instance.

L’association OGEC LPP [3] a interjeté appel de ce jugement.

Suivant conclusions récapitulatives et en réplique n°3 notifiées par voie électronique le 23 mars 2022, elle demande à la cour de :

– infirmer le jugement rendu le 18 novembre 2019 par le conseil de prud’hommes de Marseille en ce qu’il a jugé le licenciement de Madame [U] dépourvu de cause réelle et sérieuse et lui a accordé à ce titre 20.000 € de dommages-intérêts outre 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Et, statuant à nouveau,

– dire et juger que le licenciement prononcé à l’endroit de Madame [U] est parfaitement fondé.

– dire et juger que l’association OGEC LPP [3] a parfaitement respecté ses obligations dans le cadre du contexte entourant la rupture du contrat de travail de Madame [U].

En conséquence,

– débouter Madame [U] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

– condamner Madame [U] à verser à l’association OGEC LPP [3] la somme 3.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Suivant conclusions en réplique n°3 notifiées par voie électronique le 2 août 2021, Madame [U] demande à la cour de :

– dire et juger que le licenciement notifié à Madame [U] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

– condamner l’association OGEC LPP [3] au paiement de la somme suivante : dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 40.000 € nets.

– ordonner les intérêts de droit à compter de la demande.

– ordonner la capitalisation des intérêts.

– fixer la moyenne des trois derniers mois de salaires : 2.981,51 € bruts.

– condamner l’association OGEC LPP [3] au paiement de la somme de 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

– la condamner aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Selon l’article L1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi, l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

Pour sa part, l’association OGEC LPP [3] produit les pièces suivantes :

– l’attestation de Madame [H], femme de ménage, qui indique : ‘Je certifie avoir vu ou entendu Mme [U] [Z] commettre ou énoncé les faits suivants :

J’ai surpris à plusieurs reprises dans le bureau de Mme [I] cette dame en dehors de ses heures de travail (environ 6h du matin) en train de fouiller les placards à la recherche de documents confidentiels alors que le chef d’établissement ne lui a jamais donné les clés de son bureau. J’ai vu prendre des dossiers confidentiels dans le bureau de Mme [I] après avoir fouillé dans les tiroirs du bureau pour trouver les clés ouvrant les placards contenant ces dossiers. Elle s’est rendue dans le bureau de la secrétaire avec ces dossiers afin de les photocopier, le dossier intégral des entretiens individuels du personnel.

Je lui ai posé la question pour savoir à quoi lui servirai ces photocopies, elle m’a répondu que ça lui permettrait de connaître les demandes de chaque employé afin d’anticiper leur demande et les devancer dans leurs évolutions professionnelle et financière.

Mme [U] m’a dit que Mme [I] utilisait le véhicule de l’établissement pendant les vacances scolaires et en profitait pour faire l’essence sur le compte du lycée. Et qu’en plus elle achetait les pneus les plus chers. Et l’établissement paie l’assurance, les réparations du véhicule (accrochage causé par sa fille). Elle m’a dit qu’avec cet argent l’établissement pourrait embaucher un surveillant et une femme de ménage supplémentaire et qu’elle avait le calcul et chiffres.

Mme [U] m’a dit que les s’urs refusent d’aider financièrement l’établissement et qu’il ne tarderait pas à fermer. Elle m’a dit que Mme [I] faisait travailler pour le compte de l’établissement des entreprises dirigées par ses amis intimes’.

– une attestation complémentaire de Madame [H] qui indique : ‘c’était le matin vers 6h00 au printemps 2016. Mme [U] cherchait des dossiers confidentiels, donc elle a pris les clés du placard qui se trouvaient dans ses tiroirs et a bien fouillé de partout, c’était après les derniers entretiens individuels’, concernant les photocopies de ces documents effectuées dans le bureau de la secrétaire, qu’il s’agissait du « 7 juillet 2015 » et précise que ‘ mes heures de travail sont le matin tôt et le soir tard, donc il n’y a aucune connivence avec les autres employés du lycée. Mes dires sont tels que j’ai vu et entendu’.

– l’attestation de Monsieur [H], concierge, qui indique : ‘Je certifie avoir vu Mme [U] fouiller dans les tiroirs et armoires de Mme [I] et Mme [A], je l’ai vu deux fois. J’ai vu à deux reprises Mme [U] fouiller dans les placards de Mme [I] et tous les matins dans le tiroir du bureau de Mme [A] fermé à clé et très souvent je voyais le bureau de Mme [I] et de Mme [D] allumé le matin avant l’arrivée de ces personnes. Le matin pendant que je faisais l’ouverture du bureau, Mme [U] me racontait l’état financier du lycée, et en parlait à certains profs à leur arrivée, ainsi que les disputes qu’elle avait avec certains profs, ce qui me mettait mal à l’aise. Elle me parlait souvent de gaspillage financier que Mme [I] faisait sur le véhicule de fonction, s’il n’y avait pas ces dépenses elle aurait pu embaucher du personnel’.

– une attestation complémentaire de Monsieur [H] qui indique avoir constaté ces fouilles « en date du 26 et 27 juin 2014 », et ajoute « n’avoir jamais ouvert le bureau de Mme [I] à Mme [U] avec ma clé. Je voyais aussi le matin les bureaux de Mme [D] et Mme [I] allumés avant l’arrivée des professeurs ».

– une attestation de Monsieur [B], menuisier, qui indique : ‘avoir reçu un mail de Mme [U] me demandant de réaliser un double des clés du bureau de Mme [D] ainsi que le changement des clés de ses placards. N’ayant reçu aucun ordre de mission de Mme [I], directrice de l’établissement, je n’ai pas donné suite et je n’ai pas accédé à sa demande ‘.

– l’attestation de Madame [H] qui indique : ‘en septembre, après les grandes vacances Mme [U] m’a dit que Mme [I] devait à Mme [A] 6000 euros et à Mme [M] 4000 euros. Mme [U] m’a précisé le salaire de Mme [I] dans les 4000 euros et m’a montré le salaire de Mme [D] qui bénéficie de primes pour ses enfants ainsi que pour son logement. Elle m’a également parlé du refus fait à Mme [A] concernant une demande de frais de transport pour deux véhicules qui a été refusée par Mme [I] car Mr et Mme [A] utilisent une seule voiture. Madame [U] m’a dit que les s’urs refusent d’aider financièrement l’établissement et qu’il ne tarderait pas à fermer.

Elle m’a montré la fiche de poste de Mme [M] pour souligner l’attribution des points de communication qui ont une incidence sur le salaire de cette dame. Points de communication qui m’ont été refusés. Mme [U] m’a précisé qu’elle était au-dessus des grilles’.

– l’attestation de Madame [D], cadre d’éducation, qui témoigne : ‘En présence de Mme [A] [K] et Mme [M] [F], au sein du bureau du secrétariat Mme [U] [Z] a dit que Mr [V] de l’UPOGEC s’est plaint à maintes reprises d’avoir des factures ou tickets de caisse d’essence pendant les vacances scolaires et qu’il ne souhaitait plus voir ce type de ticket. Elle a également dit que Mr et Mme [H] ne paient pas d’électricité, de loyer et de taxe d’habitation car tout est pris en charge par l’établissement.

Le personnel OGEC était réuni dans la salle des profs. En attendant l’arrivée de Mme [I], Mme [U] [Z] a dit qu’elle était au-dessus des grilles et qu’elle était payée en heures supplémentaires les vendredis où elle travaillait.

De plus, nous avons dû assister à une réunion du personnel enseignant et non enseignant tenue par Mme [I] en salle des profs, suite aux propos rapportés par certains professeurs qui précisaient que Mme [U] [Z] leur avait dit qu’étant donné que les s’urs refusaient désormais d’aider financièrement l’établissement celui-ci ne tarderait pas à fermer’.

– une attestation complémentaire de Madame [D] qui indique que la réunion du personnel « a eu lieu le 15 décembre 2015 », que les propos concernant Monsieur [V], Monsieur et Madame [H] ont été tenus par Madame [U] « le 21 janvier 2014 », que « ces dates correspondent à la visite de notre tutelle des s’urs de St Vincent de Paul. » et que « ces dires ont été répétés à plusieurs reprises et sur plusieurs années. Le faisant sans aucune retenue, devant l’ensemble du personnel et voyant que ces paroles devenaient diffamatoires, nous nous sommes réunies avec Mme [A] [K] pour en discuter le 24 avril 2017. A la suite de notre conversation, d’un commun accord, nous en avons parlé avec Mme [M] [F] et avons pris la décision de prévenir notre employeur, ceci courant du mois de mai 2017′.

– l’attestation de Madame [M], assistante éducative qui atteste : ‘Mme [U] [Z] m’a dit dans les bureaux administratifs pendant une réunion du personnel OGEC que les s’urs de [Localité 4] ne sont pas au courant de choses qui sont faites par Mme [I] et qui mettent en péril l’Etablissement, elle m’a dit aussi qu ‘elle avait des dossiers qui prouvent que Mme [I] fait des choses illégales financièrement et dont les s’urs de [Localité 4] ne sont pas au courant, sinon elles la licencieraient.

Mme [U] [Z] m ‘a dit dans le bureau du secrétariat en présence de Mme [D] et de Mme [A] que Mme [I] utilise le véhicule de l’Etablissement pendant les vacances scolaires pour se rendre à la montagne chez elle et en profite pour faire l’essence sur le compte du lycée. De plus Mme [U] [Z] m’a dit que Mme [I] achetait les pneus les plus chers pour son confort personnel. Mme [U] m ‘a dit aussi que Mme [I] prête son véhicule du lycée à sa fille, celle-ci l ‘abîme, ce qui justifie les différentes marques d ‘accrochage sur le véhicule.

Mme [U] m ‘a également dit en présence de Mme [D] et Mme [A] que M. [V] de l’UPOGEC s ‘est plaint à plusieurs reprises d ‘avoir des factures ou tickets de caisse d’essence pendant les vacances scolaires et qu’il ne souhaitait plus voir ce type de ticket dans le bureau secrétariat, elle m’a également dit que M et Mme [H] ne paient pas d’électricité, de loyer et de taxe d ‘habitation car tout est pris en charge par l ‘Etablissement.

Mme [U] m’a dit avant le début d’une réunion du personnel OGEC dans la salle des professeurs avant l’arrivée de Mme [I] qu’elle était au-dessus des grilles et qu ‘elle était payée en heures supplémentaires les vendredis où elle travaille, m ‘a dit aussi qu ‘elle faisait exprès de mettre du temps pour clôturer le bilan afin de faire croire qu ‘elle était débordée de travail et ainsi obtenir le plus grand nombre d ‘heures supplémentaires.

Certains professeurs m ‘ont rapportée que Mme [U] avait dit qu ‘étant donné que les s’urs refusaient désormais d’aider financièrement l ‘Etablissement, celui-ci ne tarderait pas à fermer, c ‘est pour cela que Mme [I] s’était « placée » à FORMIRIS afin de ne pas se retrouver sans emploi et qu ‘elle ne se souciait pas de l’avenir du personnel OGEC’.

– l’attestation de Madame [A], assistante de direction qui rapporte des faits identiques à ceux rapportés par Madame [M].

– des attestations complémentaires de Madame [A] et de Madame [M] dans lesquelles elles indiquent qu’elles ont ‘pris spontanément l’initiative commune de rédiger une attestation à l’attention de leur employeur afin de rapporter un certain nombre de propos tenus par Madame [U]’ dont elles ont été témoins ; elles précisent que la réunion du personnel du OGEC évoquée est celle du 15 décembre 2015; ce qui a été rapporté concernant le véhicule a été entendu le 20 janvier 2014 et ce qui concerne Monsieur et Madame [H] a été entendu le 21 janvier 2014. Elles soulignent que depuis 2014 ‘Madame [U] n’a eu de cesse de répéter les dires cités’ dans les attestations initiales, n’y avoir pas prêté attention au départ ‘mais au fur et à mesure du temps, cette dame était tellement insistante (qu’elles ont) fini par en discuter avec Mme [D] le 24 avril 2017. A la suite de (cet) échange, (elles ont) décidé ensemble d’en parler avec Mme [M]. (Elles ont) décidé toutes les trois, en voyant que les propos de Mme [U] devenaient répétitifs et trop graves, d’avertir notre employeur en mai 2017’ .

– un procès-verbal de constat du 6 avril 2018 duquel il ressort que l’huissier de justice a ouvert 26 documents qui avaient été enregistrés sur le disque dur d’un ordinateur qui lui avait été désigné comme étant celui de Madame [U] et pour lesquels il lui est encore indiqué que les documents ouverts n’ont aucun lien avec l’ancienne activité de comptable de Madame [U].

– l’attestation de Monsieur [L] [G], président de l’association OGEC LPP [3] qui indique : ‘Madame [I] a toujours été autorisée à utiliser le véhicule mis à sa disposition pour les déplacements professionnels, pour son usage personnel également : déplacement domicile travail. Madame [I] peut également utiliser ce véhicule le week-end ou pendant ses congés, ce qu’elle fait très rarement son mari ayant un véhicule plus grand et plus confortable. Si elle l’utilise pour ses déplacements personnels les frais d’essence sont à sa charge. L’OGEC n’a pas d’observation sur le choix des pneus achetés par Madame [I]’.

– les attestations de Madame [Y] [X] et de Madame [J] [I], filles de Madame [I], qui attestent n’avoir jamais utilisé le véhicule 308 Peugeot appartenant à l’association OGEC LPP [3].

– une lettre de Madame [R], enseignante, du 30 janvier 2017 ayant pour objet le ‘signalement de propos et d’attitudes déplacés d’un personnel de direction’ et l’attestation de Madame [R] qui déclare: ‘j’authentifie ma lettre initiale du 30 janvier 2017 et confirme que je l’ai bien rédigée et envoyée à l’association pour dénoncer le comportement de Madame [U] ‘.

Madame [U] conteste les faits qui lui sont reprochés en ce que :

– elle conteste avoir pénétré dans le bureau de la direction et avoir dérobé des documents confidentiels et elle peut difficilement apporter la preuve négative de quelque chose qu’elle n’a pas fait. Néanmoins, elle verse aux débats un courriel du 18 décembre 2015 qui démontre que chaque membre de l’établissement avait un placard fermé à clés et elle alertait sur le fait que le placard d’une de ses collègues de travail était ouvert à tout le monde, preuve qu’elle était soucieuse du respect de la confidentialité des éléments détenus par chacun. Elle conteste la valeur probante des attestations produites par l’employeur émanant de salariés toujours en poste qui ont tout intérêt à attester en faveur de leur employeur. La Cour constatera que toutes les attestations produites sont rédigées en des termes identiques ou similaires, ont été produites pour les besoins de la cause et font état de faits mensongers.

Elle conteste pouvoir entrer dans le bureau de la directrice le matin avant l’arrivée de la femme de ménage car elle n’a jamais eu en possession les clés du bureau. En aucun cas elle n’était présente au lycée à six heures du matin, et encore moins dans le bureau de la directrice.

Les seules fois où elle est entrée dans le bureau de Madame [I], c’est justement Monsieur [H] qui lui ouvrait la porte avec ses propres clés, et c’était uniquement pour y déposer des fruits qu’elle lui avait commandés.

Elle se rendait dans le bureau de Madame [A] pour accéder aux carnets d’enregistrement des chèques et des espèces qui se trouvaient dans le premier tiroir du placard sous le bureau, alors qu’à l’inverse Madame [A] avait toutes les clés des placards du bureau de Madame [U].

Monsieur [H] a manifestement interprété à tort, une simple recherche de dossiers en fouille mal intentionnée et il a rédigé attestation complémentaire dont le seul but est de la desservir.

Ses placards, ainsi que ceux de Madame [I], sont restés ouverts durant plusieurs mois suite à un problème de serrures et Madame [H], qui est femme de service, pouvait à tout moment voir ce qui se trouvait dans les placards et divulguer elle-même des informations confidentielles, et ce même en dehors de ses horaires de travail puisqu’elle loge avec son époux dans un logement de fonction dans l’établissement, elle avait accès à tous les bâtiments du lycée, à tout moment.

Les faits relatés par Monsieur [B], menuisier et ami de Madame [I] sont inexacts et déformés.

Elle ne se serait pas permis de montrer un bulletin de salaire à un autre salarié mais il est certain que Madame [H] a fouillé dans les placards pour se procurer le bulletin de paie de Madame [M] qui à l’époque occupait le même poste qu’elle, à savoir femme de ménage, et elle avait toutes les raisons de chercher des informations concernant l’évolution de Madame [M].

Elle a bien indiqué qu’elle était rémunérée au-dessus du minimum conventionnel, ce qui ne constitue nullement une faute étant donné qu’il s’agit de sa propre rémunération sur laquelle elle peut parfaitement communiquer si elle le souhaite.

Le personnel savait qu’elle effectuait des heures supplémentaires le vendredi et ce n’était un secret pour personne et conteste l’accusation d’avoir simuler des heures supplémentaires, fait dont elle se serait bien gardée de dire à qui que ce soit si tel avait été le cas .

Plusieurs salariés attestent de sa charge de travail et du fait qu’elle prenait très peu de pauses pour réaliser son travail en temps et en heure.

Si elle a effectivement procédé à des impressions depuis son poste de travail, elle n’a jamais exercé une autre activité que son activité de comptable et, au vu du procès-verbal de constat de l’huissier, elle a imprimé 59 pages, pour son compte personnel, entre 2009 et 2017, soit sur 8 années, une moyenne 8 feuilles par an, ce qui est bien loin d’une activité parallèle comme soutenu par l’employeur.

Elle produit des attestations qui démontrent qu’elle avait de bonnes relations avec le personnel du lycée, tous métiers confondus, qu’elle était extrêmement serviable et investie pour la vie du lycée alors qu’elle n’a eu qu’une seule altercation avec un professeur en 16 ans d’ancienneté et n’a jamais été sanctionnée pour les incidents visés dans le courrier de rupture dont elle conteste le contenu alors c’est que Madame [R] qui l’a insultée.

Alors qu’elle entretenait d’excellentes relations amicales avec Madame [A], cette dernière a coupé toutes relations du jour au lendemain jusqu’à ce qu’elle demande au chef d’établissement de bien vouloir les réunir pour mettre fin à cette situation pesante sur les relations de travail. Il s’est avérée que Madame [A] lui reprochait d’avoir été intrusive dans sa vie privée , révélation qui l’a affectée.

Elle soutient que le vrai motif de son licenciement est d’ordre économique.

Madame [U] produit les éléments suivants :

– un mail du 16 décembre 2015 dans lequel elle indique : ‘Bonjour [N], Nous fermons pour congés vendredi à midi, merci de me répondre rapidement pour me dire si tu comptes venir d’ici la fin de la semaine, car le placard de véro est encore ouvert à tout le monde et le mien j’aurais besoin d’ une deuxième clé. Quand au placard de [P], elle n’ est pas là le mercredi après-midi et nous n’ avons pas ses clés’.

– l’attestation de Madame [W] qui indique ‘ Elle n’hésite pas à venir plus tôt et rester plus tard pour finir son travail et ne pas assister aux événements comme la fête du lycée, repas de Noël, repas de fin d’année ; de plus elle prenait très peu, voire pas du tout de pause déjeuner’.

– l’attestation de Madame [E], professeur, qui témoigne : ‘Elle mangeait le midi dans son bureau et ne prenait que peu de temps pour manger toujours débordée par son travail ! Elle ne prenait jamais ses repas avec les profs dans la salle commune’.

– les attestations de Madame [S], professeur, Madame [T], infirmière et de Madame [C] qui attestent de ses qualités humaines et de ses compétences professionnelles ainsi que de leurs bonnes relations.

*

Le premier grief reproché à Madame [U], à savoir avoir pénétré dans le bureau fermé de la directrice en son absence, en dehors de ses heures de travail afin de fouiller et y récupérer des documents confidentiels auxquels elle n’aurait pas accès du fait de ses fonctions et d’en prendre copie, repose sur les attestations de Monsieur et Madame [H]. Outre le fait que l’attestation de Monsieur [H] comporte des informations contradictoires qui la décrédibilise (Je certifie avoir vu Mme [U] fouiller dans les tiroirs et armoires de Mme [I] et Mme [A], je l’ai vu deux fois. J’ai vu à deux reprises Mme [U] fouiller dans les placards de Mme [I] et tous les matins dans le tiroir du bureau de Mme [A] fermé à clé), l’attestation de Madame [H] n’est pas davantage vraisemblable en ce qu’elle n’indique pas comment, du fait de ses fonctions au sein de l’établissement, elle a été en mesure de déterminer et donc d’affirmer que Madame [U] était en train de consulter des ‘dossiers confidentiels’ et précisément le ‘dossier intégral des entretiens individuels du personnel’ ou ‘les derniers entretiens individuels’. Par ailleurs, alors que Madame [U] était comptable et, de ce fait, pouvait avoir accès à certaines informations et dossiers de l’établissement, l’association OGEC LPP [3] affirme que les dossiers qui auraient été consultés par Madame [U] étaient ‘confidentiels’, sans en rapporter la preuve. Alors que Monsieur [H] décrit des ‘fouilles’ répétées, l’association OGEC LPP [3] ne conteste pas le fait revendiqué par Madame [U] qu’elle pouvait se rendre dans le bureau de Madame [A] pour accéder aux carnets d’enregistrement des chèques et des espèces qui se trouvaient dans le premier tiroir du placard sous le bureau et que Monsieur [H] a pu mal interpréter ce qu’il avait vu.

De plus, par la production de l’attestation de Monsieur [B], menuisier, l’association OGEC LPP [3] tente d’insinuer des intentions malhonnêtes de la part de Madame [U] alors qu’il ressort de la lecture du mail que Madame [U] avait envoyé à Monsieur [B] qu’il concerne les clés de son propre placard et de celui de la secrétaire et comporte un signalement que ‘le placard de véro est encore ouvert à tout le monde’.

Ainsi, ce grief n’est assurément pas suffisamment et sérieusement caractérisé.

L’association OGEC LPP [3] reproche également à Madame [U] d’avoir montré ou porté à la connaissance de salariés des documents ou informations confidentiels. Il convient de relever que ces faits ressortent des attestations de Madame [D], Madame [M] et de Madame [A]. Or, celles-ci sont rédigées dans des termes quasiment identiques et il ressort de leur lecture que leurs auteures se sont assurément concertées quant à la présentation des faits et à l’articulation des griefs. Outre le fait qu’il ressort également des éléments du dossier que Madame [A] et Madame [U] ont un contentieux personnel entre elles, ces attestations émanant de salariées toujours dans un lien de subordination avec l’employeur. En conséquence, ces attestations ne peuvent être considérées comme présentant des garanties de sincérité et d’objectivité suffisantes.

De plus, alors que les faits sont contestés par Madame [U], il s’agirait, au vu de l’attestation de Madame [H], de la fiche de poste de Mme [M] que Madame [U] aurait montrée à Madame [H]. Cependant, Madame [H] est particulière imprécise quant aux circonstances dans lesquelles se serait déroulée cette révélation dont il convient de noter qu’elle la concernait et l’intéressait également directement. Enfin, les informations qui auraient été rapportées concernant la prise en charge par l’établissement de certains des frais des concierges ou le fait que Madame [U] était rémunérée au-dessus des grilles conventionnelles, ne sont pas des informations strictement confidentielles dont la divulgation peut constituer un motif de licenciement.

Concernant le second grief relatif aux heures supplémentaires, l’association OGEC LPP [3] reproche à Madame [U] le fait de mettre ‘sciemment du temps à réaliser ses tâches afin d’obtenir le paiement d’heures supplémentaires’ indues. La cour constate que ces faits reposent sur des allégations de vantardise et ne sont pas justifiés dans leur matérialité, alors même que les attestations produites par Madame [U] démontrent l’effectivité et le nombre d’heures de travail qu’elle réalisait et le procès-verbal d’huissier de justice, qui constate la présence de divers documents personnels dans l’ordinateur de la salariée, ne permet pas de démontrer le contraire.

Ainsi, ce grief n’est pas davantage suffisamment et sérieusement caractérisé.

Concernant le dernier grief (dénigrement de la direction et colportage de rumeurs, propos inacceptables etc…), outre le fait que Madame [U] conteste avoir tenu les propos qui lui sont prêtés et qui sont relatés essentiellement par Madame [D], Madame [M] et de Madame [A], dont la valeur probante des attestations a été jugée insuffisante, il ressort des écritures de l’association OGEC LPP [3] qu’il s’agit effectivement, in fine, de simples ragots infondés.

Ce grief n’est donc pas davantage caractérisé et ne peut sérieusement justifier le licenciement de Madame [U].

Enfin, l’association OGEC LPP [3] évoque des précédents, à savoir une mésentente d’ordre privé entre Madame [U] et Madame [A] et un signalement de Madame [R], enseignante, totalement imprécis et qui n’a donné lieu à aucune suite ni sanction de Madame [U].

Il en résulte que le licenciement de Madame [U] est sans cause réelle et sérieuse.

En application des dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail, et compte tenu de son âge au moment de la rupture du contrat de travail (58 ans), de son ancienneté (15 ans), de sa qualification, de sa rémunération (2.981,51€ ), des circonstances de la rupture, de la période de chômage qui s’en est suivie, des preuves des nombreuses recherches d’emplois et d’un contrat de travail signé le 12 janvier 2018, il convient d’accorder à Madame [U] une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d’un montant de 20.000 € laquelle portera intérêts au taux légal à compter du jugement du conseil de prud’hommes.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et sur les dépens

Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées et il est équitable de condamner l’association OGEC LPP [3] à payer à Madame [U] la somme de 1.500 € au titre des frais non compris dans les dépens qu’elle a engagés en cause d’appel.

Les dépens d’appel seront à la charge de l’association OGEC LPP [3], partie succombante par application de l’article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et en matière prud’homale,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions et y ajoutant,

Rappelle que l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse portera intérêts au taux légal à compter du jugement du conseil de prud’hommes,

Condamne l’association OGEC LPP [3] à payer à Madame [Z] [U] la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

Condamne l’association OGEC LPP [3] aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Ghislaine POIRINE faisant fonction

 


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