Données confidentielles : 25 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/06610

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Données confidentielles : 25 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/06610
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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 4

ARRET DU 25 JANVIER 2023

(n° 10 , 14 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/06610 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFSGB

Décision déférée à la Cour : Arrêt du 16 Février 2022 – Cour de Cassation – Pourvoi N° W20-20.132 – Arrêt N°125 F-D

Jugement du 23 Mars 2017 – Tribunal de commerce d’Evry – RG N°2013F00251

Arrêt du 2 Juillet 2020 – Cour d’appel de chambre PARIS – RG N°17/18400

Arrêt du 16 Février 2022 – Cour de Cassation – Pourvoi N° W20-20.132 – Arrêt N°125 F-D

DEMANDERESSES A LA SAISINE

S.A.S. AIRESS agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de PONTOISE sous le numéro 432 414 779

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Jessica CHUQUET de la SELEURL CABINET CHUQUET, avocat au barreau de PARIS, toque E0595, avocat postulant

Assistée de Me Isabelle RAOUL-DUVAL de la SELARL RD MARCEAU, avocat au barreau de PARIS, toque J133, avocat plaidant

S.A.S. MINIMAX FRANCE agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de VIENNE sous le numéro 482 491 974

[Adresse 13]

[Adresse 13]

[Localité 1]

Représentée par Me Thomas LECHLER, du Cabinet LECHTER ET BERNARDY, avocat au barreau de PARIS, toque R107, avocat postulant et plaidant

DEFENDERESSES A LA SAISINE

S.A.S. AIRESS agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de PONTOISE sous le numéro 432 414 779

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Jessica CHUQUET de la SELEURL CABINET CHUQUET, avocat au barreau de PARIS, toque E0595, avocat postulant

Assistée de Me Isabelle RAOUL-DUVAL de la SELARL RD MARCEAU, avocat au barreau de PARIS, toque J133, avocat plaidant

S.A.S. MINIMAX FRANCE agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de VIENNE sous le numéro 482 491 974

[Adresse 13]

[Adresse 13]

[Localité 1]

Représentée par Me Thomas LECHLER, du Cabinet LECHTER ET BERNARDY, avocat au barreau de PARIS, toque R107, avocat postulant et plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 Novembre 2022, en audience publique, double rapporteur, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre, chargée du rapport et Madame Sophie DEPELLEY, Conseillère

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre

Madame Brigitte BRUN-LALLEMAND, Première Présidente de chambre

Madame Sophie DEPELLEY, Conseillère

Greffière, lors des débats : Madame Claudia CHRISTOPHE

ARRÊT :

– Contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre, et par Claudia CHRISTOPHE, Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

********

La société Airess et la société Minimax France (ci-après dénommée « Minimax ») ont toutes deux pour activité l’étude, la conception, l’installation et la maintenance d’installations de protection incendie et notamment les systèmes dits « Sprinklers ».

Les systèmes dits « Sprinklers » sont des extincteurs automatiques à eau fixés au plafond.

M. [V], salarié de la société Airess suivant contrat de travail du 31 août 2001, a été licencié par lettre du 24 janvier 2011 pour faute grave, son employeur lui reprochant notamment de travailler, à ses affaires commerciales personnelles réalisées sous la dénomination commerciale « Premis » ayant un objet concurrent.

A compter du 2 janvier 2012, M. [V] a été engagé par la société Minimax.

S’estimant victime d’actes de concurrence déloyale, la société Airess a assigné par acte du 12 avril 2013, la société Minimax et la société Premis devant le tribunal de commerce d’Evry en réparation de son préjudice.

Par arrêt définitif du 10 juin 2015, la cour d’appel de Poitiers a notamment rejeté les demandes formées par M [V] au titre du licenciement, validant le licenciement pour faute grave, confirmant sur ce point le jugement du conseil de prud’hommes de Poitiers du 10 février 2014.

Par jugement du 27 mars 2017, le tribunal de commerce d’Evry a :

-Débouté l’EURL Premis de sa demande de déclarer irrecevables les prétentions de la SAS Airess à son encontre ;

-Liquidé à néant les astreintes ordonnées dans les jugements avant dire droit précédents ;

-Condamné in solidum la SAS Minimax France et l’EURL Premis à payer à la SAS Airess la somme de 35 000€ à titre de dommages-intérêts pour concurrence déloyale ;

-Dit n’y avoir lieu à prononcer l’anatocisme des intérêts ;

-Débouté l’EURL Premis de sa demande de voir condamner la SAS Airess à une amende civile ;

-Condamné in solidum la SAS Minimax France et l’EURL Premis à payer à la SAS Airess la somme de 10 000€ à titre de dommages-intérêts pour préjudice d’image ;

-Ordonné la publication du présent dispositif de jugement, pour une seule parution dans un journal professionnel choisi par la SAS Airess, aux frais in solidum de la SAS Minimax France et de l’EURL Premis

-Débouté la SAS Minimax France de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

-Condamné in solidum la SAS Minimax France et l’EURL Premis à payer à la SAS Airess la somme de 20 000€, sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

-Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

-Dit n’y avoir lieu à ordonner l’exécution provisoire ;

-Condamné in solidum la SAS Minimax France et l’EURL Premis aux entiers dépens de l’instance en ce compris les frais de greffe liquidés à la somme de 418,04€ TTC.

Par arrêt du 02 juillet 2020, la cour d’appel de Paris a :

-Infirmé le jugement sur le montant des dommages et intérêts alloués pour concurrence déloyale, le préjudice d’image, sur la publication de la décision, et le rejet de la demande de capitalisation des intérêts ;

-Confirmé pour le surplus des dispositions,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

-Dit que la société Minimax France a commis des faits de concurrence déloyale à l’égard de la société Airess ;

-Condamné la société Minimax France à verser à la société Airess la somme de 210 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des faits de concurrence déloyale ;

-Condamné la société Minimax France à verser à la société Airess la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice d’image ;

-Dit que les condamnations porteront intérêt au taux légal à compter du présent arrêt ;

-Ordonné la capitalisation des intérêts conformément à l’article 1343-2 du code civil ;

-Débouté la société Airess de sa demande de publication de la décision ;

-Débouté la société Minimax France de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

-Condamné la société Minimax France à verser à la société Airess la somme de 10 000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Rejeté toute autre demande ;

-Condamné la société Minimax France aux dépens d’appel

A la suite du pourvoi formé par la société Minimax France, la chambre commerciale, économique et financière de la Cour de cassation, par arrêt du 16 février 2022 (pourvoi n°W 20-20.132), a statué en ces termes :

« Casse et annule, sauf en ce qu’il déboute la société Premis de sa demande de déclarer irrecevable les prétentions de la société Airess à son encontre, liquide à néant les astreintes ordonnées dans les jugements avant dire droit précédents et statue sur les demandes formées contre la société Premis, l’arrêt rendu le 2 juillet 020, entre les parties, par la cour d’appel de Paris.

Remet, sauf sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Airess aux dépens ;

(…) »

La Cour de cassation énonce, sur le moyen pris en sa première branche, sur le fondement de l’article 1240 du code civil, que l’arrêt retient que la société Minimax a commis des faits de concurrence déloyale à l’égard de la société Airess, « sans établir que la société Minimax savait que M. [V] était salarié de la société Airess lorsqu’elle lui a confié la réalisation de prestations, ni que celui-ci l’avait effectivement informée des offres proposées par son employeur » de sorte que « la cour d’appel, qui n’a pas relevé l’existence d’une faute personnellement imputable à la société Minimax, a violé le texte susvisé. ».

La Cour énonce également, sur le moyen pris en sa troisième branche, sur le fondement de l’article 1240 du code civil, que l’arrêt retient que la société Minimax a commis des faits de concurrence déloyale à l’égard de la société Airess, « sans constater qu’à l’époque des faits litigieux, en 2009 et 2010, antérieurement à l’envoi de la lettre du 30 septembre 2011, la société Minimax savait que M. [V] était salarié de la société Airess », qu’en se déterminant ainsi, la cour d’appel a privé sa décision de base légale.

Par déclaration reçue au greffe le 28 mars 2022, la société Airess a saisi la cour de renvoi.

L’affaire a été enrôlée sous le RG n°22/06610

La société Minimax ayant à son tour, saisi la cour de renvoi, l’affaire a été enrôlée sous le RG n°22/06905.

Les affaires ont été jointes par ordonnance du 14 juin 2022 sous le RG n°22/06610.

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 03 août 2022, la société Airess prie la Cour de :

Vu l’article 2224 du Code civil, vu l’ancien article 1165 du Code civil et les articles 1240 et 1241 (anciennement art.1382 et 1383), ainsi que les articles 1231-2 et 1231-7 du Code civil,

Vu les pièces et la jurisprudence citée,

-Déclarer recevable la demande de la société AIRESS en son action pour concurrence déloyale à l’encontre de la société MINIMAX ;

-Confirmer le jugement du tribunal de commerce d’Evry du 22 mars 2017 en ce qu’il a considéré la société AIRESS recevable et bien fondée en ses demandes, et en ce qu’il a condamné la société MINIMAX France à lui payer des dédommagements pour ses divers préjudices découlant de faits de concurrence déloyale caractérisés;

-Confirmer le jugement du tribunal de commerce d’Evry du 22 mars 2017 en ce qu’il a condamné la société MINIMAX France à lui payer 20.000 euros au titre de l’article 700 du CPC ;

-Recevoir la société AIRESS en son appel, et en conséquence,

-Infirmer le jugement précité quant au quantum des dédommagements prononcés et les appréciant à nouveau,

-Condamner la société Minimax France à lui verser les sommes de :

*547 680€ à titre de dédommagements et remboursement de frais consécutifs à ses agissements fautifs pour concurrence déloyale

*50 000€ à titre de préjudice d’image

-Et, y ajoutant, condamner la société MINIMAX France à lui payer la somme supplémentaire de 20.000 euros au titre de frais de procédure d’appel en sus de la somme de 20.000 euros déjà fixée en première instance, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance, tant en première instance qu’en appel ;

-Dire que ces condamnations porteront intérêt au taux légal et ce à compter du 12 avril 2013, date de signification à la société MINIMAX France de l’exploit introductif d’instance, et ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l’article 1343-2 (anciennement 1154) du Code civil,

-Confirmer la publication du jugement en précisant qu’il pourra être recouru à une publication dans cinq journaux différents, dans leurs versions papier et internet, au choix d’AIRESS et ce, aux frais de la société MINIMAX France,

-Débouter la société MINIMAX France de toutes ses demandes

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 14 octobre 2022, la société Minimax demande à la Cour de :

Vu les articles 1240 et suivants du Code Civil,

Vu l’arrêt de la Cour de Cassation en date du 16 février 2022,

Vu les pièces versées aux débats :

-Infirmer le Jugement du Tribunal de Commerce d’Evry en date du 22 mars 2017 (R.G. 2013F00251) en toutes ses dispositions ;

Et statuant à nouveau :

-Dire et Juger irrecevables en raison de la prescription dont elles sont atteintes, les demandes de la société Airess relatives à l’attribution des chantiers dits « Promod Wattrelos », « Leclerc [Localité 10] », « Auchan ([Localité 9] ‘ [Localité 7]) », « Printemps Haussmann ([Localité 14]) » et « Leclerc ([Localité 11]) » ;

-Dire et Juger en tout état de cause, que la société Minimax n’a commis aucun acte de concurrence déloyale au préjudice de la société Airess ;

-Dire et Juger que la société Airess ne démontre l’existence d’aucun préjudice réparable en lien avec les faits qu’elle reproche à la société Minimax, à savoir le fait d’avoir eu recours au service de la société Premis et/ou de Monsieur [V] ;

-Débouter en conséquence la société Airess de son appel incident et de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l’encontre de la société Minimax ;

-Condamner la société Airess à verser à la société Minimax la somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts, pour procédure abusive.

-Condamner la société Airess à verser à la société Minimax la somme de 40.000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel en application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

-Condamner la société Airess aux entiers dépens de première instance et d’appel.

MOTIVATION

Sur la prescription

La société Minimax fait valoir que les demandes de la société Airess ont varié en cours de procédure : ainsi, initialement elles ne concernaient que deux chantiers (« Procter & Gamble » et « Leroy Merlin ([Localité 6]) »), puis cinq autres chantiers ont été critiqués au mois d’octobre 2016.

Elle soutient que pour ces derniers chantiers, les demandes de la société Airess ont été formulées pour la première fois plus de 8 ans après leur attribution et qu’ainsi ces demandes sont irrecevables car prescrites.

La société Airess fait valoir que le délai d’action de 5 ans de l’article 2224 du Code civil ne court que lorsque le titulaire du droit d’agir a connu les faits permettant de l’exercer et que la société Airess n’a connu l’activité déloyale de la société Minimax et de M. [V] concernant ces chantiers qu’à la suite d’une saisie d’éléments comptables et sociaux chez Minimax suivant procès-verbal de constat d’huissier du 17 décembre 2012, en vertu de l’ordonnance sur requête du 26 novembre 2012 (facture Prémis pour le marché Auchan ) ainsi que d’éléments postérieurs (sommation interpellative de Me [B] 22 décembre 2014 ayant donné lieu à la remise d’une clé USB contenant des documents relatifs aux marchés Promod (Wattrelos), Leclerc ([Localité 10] et [Localité 12]) , Printemps Haussman. La société Airess affirme qu’elle a initié sa procédure en avril 2013, soit 4 mois après avoir disposé des premières preuves de concurrence déloyale de la société Minimax, de sorte que son action est pleinement recevable.

Réponse de la Cour

Aux termes de l’article 2224 du code civil issu de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

En l’espèce, la société Airess a introduit le 12 avril 2013 une action judiciaire à l’encontre notamment de la société Minimax tendant à la réparation de préjudices qu’elle estime avoir subis, sur le fondement de l’article 1382 ancien du code civil désormais 1240 dudit code, pour des faits de concurrence déloyale.

Or, la société Airess justifie qu’elle a connu les faits allégués de concurrence déloyale de la société Minimax à la suite du procès-verbal de constat d’huissier du 17 décembre 2012 (pièce 10) portant remise par la société Minimax de la copie de 5 factures au nom de Prémis réglées entre 2009 et 2012 pour le chantier Auchan [Localité 9] ainsi que pour le chantierProcter & Gamble , factures portant en bas de page l’adresse électronique de M [V] , éléments complétés par la sommation interpellative du 22 décembre 2014 (pièce 77) portant remise d’une clé USB et les pièces alors communiquées (59-1 à 59-15).

En conséquence, les demandes reposant sur les faits concernant les cinq chantiers

« Promod Wattrelos », « Leclerc [Localité 10] », « Auchan [Localité 9]- [Localité 8] » et « Printemps Haussmann » n’étaient pas prescrits lorsque la société Airess les a formulées au mois d’octobre 2016.

La fin de non-recevoir prise de la prescription est rejetée.

Sur les agissements fautifs de Minimax

Airess invoque l’existence d’un faisceau d’indices démontrant que Minimax avait nécessairement conscience du fait que M . [V] était un dirigeant cadre salarié d’Airess, lorsqu’elle a eu recours à ses services et qu’elle a obtenu de sa part des informations confidentielles.

Elle fait valoir :

-que la direction de la société Minimax connaissait le parcours professionnel de M [V] et son statut chez Airess puisque M. [T], directeur commercial de Minimax, connaissait M. [V] depuis les années 1990 et que les relations se sont prolongées jusqu’à son embauche officielle chez Minimax,

-que la société Minimax a mis à disposition des moyens logistiques (en particulier une voiture) au profit de M. [V], lorsque ce dernier était encore salarié d’Airess et dont il a disposé aussi lorsqu’il est devenu salarié de Minimax,

-que M. [V] a exercé la fonction de représentant de Minimax peu après son licenciement, pendant 7 mois pour superviser un chantier duquel Airess a été évincée alors qu’il n’était pas lié officiellement à son mandant, ce en raison de la clause de non- concurrence insérée dans le contrat de travail conclu avec Airess , clause dont M [V] sollicitait la rémunération forcée de cet engagement devant le conseil de prud’hommes, expliquant ainsi que son embauche n’ait été officialisée qu’en janvier 2012 et que ses prestations de 2011 aient été payées par une société de portage de manière différée et opaque,

-que la connaissance par la société Minimax de la situation de M [V] et l’existence de la clause de non concurrence est encore confortée par les promesses d’embauche émanant de Minimax en septembre et novembre 2011 mentionnant à M [V] que son embauche se ferait une fois qu’il serait libre de tout engagement à l’égard d’Airess ainsi que par son embauche sans période d’essai,

-que la relation de sous-traitance entre M. [V] et la société Minimax amenait nécessairement cette dernière à connaître la qualité de salarié d’Airess de M [V] au regard de la certification APSAD délivrée par le CNPP, prévoyant des normes spécifiques en matière de sous-traitance que le titulaire de la certification sécurité incendie doit respecter et qui l’oblige à contrôler ses sous-traitants, de sorte que la société Minimax ne pouvait pas ignorer les fonctions de M. [V] au sein de la société Airess, ce qu’une simple recherche sur internet permettait d’établir et alors que l’adresse professionnelle des factures émises par Prémis à l’intention de Minimax mentionnait l’adresse personnelle de [C] [V] , de sorte qu’il ne disposait pas d’un atelier nécessaire à la préfabrication, comme l’exige la réglementation APSAD,

-que c’est à l’insu de Airess et alors qu’il dirigeait l’atelier d'[Localité 4] que M [V], avec la complaisance de son chef d’atelier, M [X], y menait une activité parallèle pour son propre compte, Minimax bénéficiant des informations confidentielles que lui transmettaient M [V] sur les marchés d’Airess en cours, en échange de quoi elle lui sous-traitait une partie de ses marchés,

-que la société Minimax a remporté à la suite plusieurs gros marchés contre Airess dans le cadre d’appels d’offres sous-traité ensuite à M [V] sous l’enseigne Premis ou d’autres sociétés appartenant à son réseau de prestataires, la société Minimax faisant appel à M. [V] qui agissait comme chargé d’affaires et lui fournissait des informations confidentielles auxquelles sa position au sein de la société Airess lui permettait d’accéder,

-qu’elle a ainsi perdu le marché Auchan [Localité 9] ([Localité 8]) contre Minimax, que cette dernière a remporté tous les marchés Procter & Gamble du site de [Localité 5], le marché Leroy Merlin [Localité 6] et que 4 autres marchés traités par Minimax ont été sous-traités à M [V] directement ou par son réseau de prestataires ( Promod Watrelos, Printemps Haussmann, Leclerc [Localité 11] et [Localité 10],

-que la société Minimax s’est rendue complice de la violation par M. [V] des clauses d’exclusivité et de confidentialité auxquelles celui-ci était soumis et que l’employeur victime peut porter son action contre le nouvel employeur sur le fondement de la concurrence

déloyale, ajoutant que les agissements de Minimax relèvent de la complaisance et à tout le moins de la négligence ou de l’imprudence fautive pour ne pas s’être renseignée sur le statut et les conditions de travail de M [V] et de Prémis.

La société Minimax réplique :

-qu’à compter du 25 janvier 2011, M. [V] n’était plus lié à la société Airess et pouvait donc aller travailler pour n’importe quelle entreprise, y compris concurrente, que la clause de non-concurrence litigieuse a été jugée nulle et qu’ainsi la société Minimax ne peut être condamnée pour violation de ladite clause,

-que le fait d’avoir travaillé avec M. [V] à compter du mois d’octobre 2011 via un dispositif de portage salarial n’est pas un acte de concurrence déloyale,

qu’elle n’a commandé à la société Premis que des travaux de préfabrication et de montage de sprinkler, identiques à ceux que toutes les entreprises intervenant dans le secteur ont pour habitude de confier à des sous-traitants et qu’au surplus, ces prestations ne constituaient que des travaux d’appoint parmi de la totalité des travaux sous-traités,

-qu’elle ignorait tout des relations contractuelles entre la société Airess et M. [V] et aucune faute ne peut lui être reprochée puisqu’elle a simplement confié dans les règles à la société Premis des travaux de préfabrication en 2009 et 2010 dont les prestations étaient réelles et qu’il n’est pas établi que M [V] aurait réalisé à l’insu de la société Airess et en contravention avec ses instructions des travaux de préfabrication qu’elle lui aurait commandés dans l’atelier d'[Localité 4],

-que la société Airess n’établit pas que des informations confidentielles lui ont été transmises par l’intermédiaire de M. [V],

-que la société Airess n’a soutenu des offres que pour 3 des 7 chantiers qu’elle évoque, à savoir Auchan [Localité 9], Procter & Gamble [Localité 5] et Leroy Merlin [Localité 6], qu’ainsi les 4 autres marchés n’ont pu lui échapper à cause des prétendues informations confidentielles qui lui auraient été confiées par M. [V],

-que la société Airess ne démontre aucunement un quelconque acte de concurrence déloyale de sa part qui lui aurait permis d’obtenir ces marchés.

Réponse de la Cour

L’action en concurrence déloyale constitue une action en responsabilité civile soumise aux dispositions de l’article 1382 devenu 1240 du code civil.

Il appartient ainsi à celui qui s’en prévaut d’apporter la preuve d’une faute, d’un préjudice, et d’un lien de causalité.

Les actes constitutifs de concuerrence déloyale ont en commun de constituer un manquement aux usages du commerce et à l’honnêteté professionnelle, n’impliquant pas nécessairement la mauvaise foi.

En l’espèce, il est établi que M [V], par l’entremise notamment de la société Prémis qu’il avait créée et qu’il dirigeait (pièce 15), a effectué en 2009 et 2010 des actes de sous-traitance au profit de la société Minimax alors qu’il était salarié de la société Airess, exerçant dans le même domaine d’activité et qu’il était soumis par son contrat de travail à une clause d’exclusivité et de confidentialité. Il est également établi que M [V] qui a été licencié de la société Airess pour faute grave le 24 janvier 2011, est devenu salarié de la société Minimax à compter du 2 janvier 2012.

Il appartient à la société Airess de démontrer que la société Minimax s’est rendue complice de la violation par M. [V] des clauses d’exclusivité et de confidentialité auxquelles celui-ci était soumis au soutien de son action en concurrence déloyale et que la société Minimax a bénéficié d’informations confidentielles transmises par M [V] pour remporter des appels d’offres à son détriment.

Par conséquent, il lui incombe d’établir une faute personnellement imputable à la société Minimax, et ainsi de démontrer que la société Minimax savait qu’à l’époque des faits litigieux, en 2009 et 2010, antérieurement à l’envoi de la lettre du 30 septembre 2011 par laquelle la société Minimax écrivait à M. [V] qu’elle lui confirmait pouvoir l’engager à partir du 2 janvier 2012 « lorsqu’il serait libre de tout engagement au regard de [sa] société », que M. [V] était salarié de la société Airess lorsqu’elle lui a confié la réalisation de prestations et que celui-ci l’avait effectivement informée des offres proposées par son employeur.

La Cour retient l’existence d’un faisceau d’indices permettant d’établir en premier lieu que la société Minimax connaissait nécessairement la situation de salarié au sein de la société Airess de M [V] lorsqu’elle lui a confié la réalisation de prestations en 2009 et 2010, en ce que :

-les dirigeants et le personnel de la société Minimax connaissaient M [V] pour avoir « collaboré » ensemble dans les années 1990 dans le même secteur professionnel restreint de la protection incendie, ce qui résulte des écritures mêmes de la société Minimax (page 4 point 16 de ses conclusions),

-M [V] et M [T], directeur commercial de Minimax, se connaissaient bien ainsi qu’il résulte notamment de l’attestation de M [S] du 21 novembre 2013 (pièce 57) indiquant que M [T] était commercial chargé du chiffrage des affaires de protection contre l’incendie dont Procter et Gamble à [Localité 5], dans la société dans laquelle il était directeur d’agence de 1989 à 2001, et que M [V] était son sous-traitant pour exécuter le montage des installations SPK particulièrement chez Procter et Gamble à [Localité 5], ou encore du fait que M [V] s’adressait à lui en l’appelant par son prénom et en le tutoyant (courriel du 15 février 2009 pièce 59-3), et que les deux intéressés étaient en relation pour les prestations confiées en 2009 et 2010 par Minimax à la société Prémis que M [V] dirigeait, alors que ce dernier était toujours salarié d’Airess ainsi qu’il résulte notamment du courriel précité du 15 février 2009 ( pièce 59-3) et de la signature par M [T] du devis Procter et Gamble [Localité 5] du 8 novembre 2010 (pièce 3 adverse) remporté par Minimax sur Airess et de la lettre de mécontentement du maître d”uvre adressée à la société Minimax le 21 octobre 2021 à l’attention de M [T] et de M [V] concernant le chantier Procter et Gamble (pièce 58),

-M [V] a émis des factures les 7 février 2009, 4 janvier 2010, 8 mars 2010, 14 mai 2010 et 12 juillet 2010 pour les prestations réalisées en faveur de la société Minimax en 2009 et 2010 alors qu’il était toujours salarié de la société Airess, sous l’enseigne Prémis pour des prestations de montage et de préfabrication de sprinklers (pièces 10-1 à 10-5) relatives aux chantiers Auchan [Localité 9] ainsi que Procter et Gamble [Localité 5], factures qui mentionnent son adresse personnelle et son adresse mél (pbouchet3@…)

-M [V] a supervisé le chantier Procter & Gamble Blois pour la société Minimax pendant 7 mois peu après son licenciement de la société Airess, sans être lié officiellement à son mandant (pièces 44-1 et suivantes),

-les prestations effectuées en 2011 par M [V] pour la société Minimax ont été payées par un intermédiaire, en l’espèce une société de portage (pièces 67, 69-1 et 69-2 notamment), en outre la société Minimax a mis à la disposition de l’intéressé une voiture de fonction avant même que celui-ci ne soit salarié de la société en janvier 2012 (notamment pièces 10 et 11),

-la société Minimax se devait en sa qualité de titulaire de la certification APSAD délivrée par le CNPP (association regroupant les compagnies d’assurance), de vérifier que son sous-traitant, sous l’enseigne Prémis, respectait les normes spécifiques en la matière et ainsi se livrer à un minimum de contrôle sur cette société ainsi que son dirigeant, ce qui ne pouvait que lui confirmer la qualité de salarié de la société Airess de M [V], et relever que les factures émises par Prémis mentionnaient, outre l’adresse électronique de M [V], l’adresse personnelle de ce dernier alors que la société devait disposer d’un atelier nécessaire à la préfabrication , comme l’exige la réglementation APSAD (pièce 41),

-en l’absence d’atelier de Prémis, Minimax ne pouvait ignorer que M. [V] utilisait pour ses commandes personnelles, en particulier celles de Minimax en 2009, l’atelier d'[Localité 4] qu’il dirigeait appartenant à la société concurrente Airess, faits établis notamment par les attestations de M [E] [W] et de M [H] [K] (pièces 82 et 83).

La Cour retient également, alors qu’il est établi que la société Minimax ne pouvait ignorer la situation de M [V] au sein de la société Airess, l’existence d’un faisceau d’indices

permettant d’établir en second lieu que la société Minimax a bénéficié en toute connaissance de cause d’informations confidentielles communiquées par M [V] aux dépens de la société Airess.

A cet égard, il sera observé que la société Airess a perdu des appels d’offres face à la société Minimax à une époque où M [V] était toujours présent dans la société Airess.

S’agissant du chantier « Auchan [Localité 9] », la société Minimax a soumissionné pour ce marché en juillet 2008 obtenant en septembre 2008 la première tranche du marché ( lot 13), tandis que la société Airess n’a pas été retenue pour la seconde tranche du marché (son devis du 20 février 2009- pièce 26 pour les lots 5.18 et 5.19). Même si M [V] a participé au chiffrage du projet de la société Airess (attestation de M [I]-pièce 84) alors qu’il travaillait à titre personnel sur le chantier Auchan [Localité 9] (facture du 7 février 2009 de Prémis à Minimax) et a transmis à la société Minimax un devis de la société OPPI (devenue Tek Industries) pour le chantier Auchan [Localité 9] le 5 mars 2009 (pièces 59-9 et 59-10), ces éléments ne permettent pas de retenir l’existence d’un faisceau d’indices de nature à établir que Minimax a bénéficié d’informations confidentielles communiquées par M [V] pour emporter ce marché aux dépens de la société Airess, au regard de la chronologie des faits invoqués et alors qu’il n’est pas établi que Minimax a candidaté pour les lots 5.18 et 5.19, le devis produit concernant le lot 13.

En revanche, s’agissant du marché « Procter & Gamble [Localité 5] », la société Airess a adressé notamment un devis du 13 octobre 2010 pour un montant de 114 680€HT (pièce 28) et la société Minimax un devis du 8 novembre 2010 pour un montant de 157 785€HT ( pièces 3 et 4 de Minimax). Or, il sera observé en premier lieu que le devis établi par Minimax est postérieur à celui établi par Airess pour l’établissement duquel M [V] a été consulté (pièce 84), que le devis Minimax propose une installation comportant davantage de sprinklers et que, bien que moins disante la société Airess a perdu ce marché, ce à une époque où M [V], bien que toujours salarié de la société Airess, travaillait pour Minimax et en second lieu que M [V] a surveillé pour Minimax l’exécution de ce marché ainsi qu’il est établi, (compte rendu de chantier- pièces 44-1 à 44-19). En conséquence, la Cour retient pour ce marché, l’existence d’un faisceau d’indices de nature à établir que Minimax a bénéficié d’informations confidentielles communiquées par M [V] pour remporter ce marché aux dépens de la société Airess.

Egalement, s’agissant du marché « Leroy Merlin [Localité 6] » , la société Airess a adressé un devis le 22 novembre 2010 pour un montant de 366 000€HT (pièce 30) et la société Minimax un devis le 10 février 2011 pour un montant de 362 525 €HT (pièces Minimax 5 à 7). L’établissement d’un devis par la société Minimax postérieurement à celui remis par la société Airess à des conditions de quantité de sprinklers plus importante , pour un prix légèrement inférieur alors que M [V] était toujours salarié de la société Airess et que les éléments du chiffrage lui ont été transmis (pièces 30 ter) et que sous couvert notamment de la société Prémis il bénéficiait de travaux de sous-traitance confiés par la société Minimax, travaux de surcroît réalisés dans l’atelier d'[Localité 4] de la société Airess ce que l’intéressée ne pouvait ignorer ainsi qu’il a été dit et que Minimax lui a confié au moins pour partie la sous-traitance de ce chantier ainsi qu’il résulte des attestations de MM [U] et [M] (pièces 31 et 32), sont des éléments constitutifs d’un faisceau d’indices permettant de retenir que cet appel d’offres a été faussé au bénéfice de la société Minimax en raison d’informations confidentielles transmises par M [V].

La société Minimax s’est donc rendue complice de la violation par M [V] des clauses d’exclusivité et de confidentialité, manquant ainsi aux usages du commerce et à l’honnêteté professionnelle.

La responsabilité délictuelle de la société Minimax se trouve ainsi engagée à l’égard de la société Airess pour des actes de concurrence déloyale.

Sur le préjudice

S’il s’infère nécessairement un préjudice d’un acte de concurrence déloyale, fût-il seulement moral, il appartient à celui qui s’en prévaut d’en démontrer l’importance.

Sur le gain manqué

La société Airess invoque en premier lieu un préjudice de gain manqué d’un montant de 314 848€ HT, lié à la marge perdue sur les marchés des clients pour lesquels elle avait soumissionné avec Minimax, marchés remportés déloyalement par cette dernière.

La société Minimax conteste les chiffres présentés et estime que le préjudice de gain manqué ne peut se situer qu’entre 5 147,17€ et 25 074€.

Réponse de la Cour

Le préjudice de gain manqué peut être calculé en soustrayant du chiffre d’affaires perdu, les charges variables qui auraient été engagées pour réaliser le chiffre d’affaires. On obtient alors la marge sur coûts variables perdue.

La cour ne retient que les marchés Procter et Gamble [Localité 5] et Leroy Merlin [Localité 6], pour lesquels l’existence d’une concurrence déloyale de Minimax a été retenue.

Au vu des critiques du rapport de M [Z] versé aux débats par Airess émises par le rapport de MM. [L] du 5 octobre 2022 produit par Minimax ainsi que de ses annexes, notamment les comptes annuels de la société Airess pour les exercices 2009 à 2011, la Cour retient un taux de marge sur coûts variables de 10%, soit :

-pour le chantier Procter et Gamble, d’un montant de 157 785€HT (devis de Minimax), la somme de 15 778,50 €,

-pour le chantier Leroy Merlin [Localité 6] , d’un montant de 362 525€HT (devis de Minimax), la somme de 36 252,50 €, soit un gain manqué total de 52 031€.

Sur le préjudice de pertes subies

La société Airess invoque en second lieu un préjudice de pertes subies à la suite des prestations dont Minimax aurait indûment bénéficié d’un montant de 200 705€ HT.

La société Minimax rétorque que les demandes formulées au titre de factures qu’elle a réglées aux sociétés OPPI incendie, SPIB et Prémis ne constituent pas un préjudice réparable.

Réponse de la Cour

La Cour a retenu que M [V] avait utilisé avec la complicité de la société Minimax l’atelier d'[Localité 4] appartenant à la société Airess qu’il dirigeait pour réaliser les commandes passées par la société Minimax à la société Prémis dont il était gérant.

Ainsi, la société Airess a subi une perte du fait de l’utilisation de ses installations en matériel et personnel dont la société Minimax a nécessairement tiré un avantage, constitutif d’une concurrence déloyale.

Ces factures se sont élevées à la somme de 40 344 € réglées à Prémis par la société Minimax.

Au vu des factures produites et du tableau dressé par M [Z] (page 9 du rapport), la Cour fixe à 15 000 € l’avantage dont a ainsi bénéficié la société Minimax aux dépens de sa concurrente la société Airess.

En revanche, les facturations OPPI Incendie et SPIB à l’intention de Minimax ne peuvent être prises en compte, s’agissant de la société TEK Industrie dans laquelle M [V] détenait une participation minoritaire sans exercer de mandat social et alors que cette société qui est intervenue comme sous-traitante de la société Minimax mais aussi d’Airess, avait une activité propre, sans qu’il soit établi qu’elle utilisait les moyens de la société Airess (annexes 4 à 7 du rapport de MM [L]).

Sur le préjudice au titre des frais d’établissement de devis.

La société Airess invoque en troisième lieu un préjudice lié au remboursement des frais d’établissement de devis d’un montant de 32 127€ (3% du prix du marché).

La société Minimax s’y oppose faute notamment pour Airess de démontrer en quoi ses prétendus actes de concurrence déloyale lui auraient causé un tel « préjudice ».

Réponse de la Cour

Les frais vainement et inutilement engagés par la société Airess au titre de l’établissement de devis sont en lien de causalité directe avec les actes de concurrence déloyale dont la société Minimax s’est rendue coupable.

La somme de 14 420€, soit 3% du prix des marchés Procter et Gamble et Leroy Merlin Gonesse d’un montant total de 480 680 €, sera allouée à la société Airess à titre de dommage-intérêts à la charge de la société Minimax.

Sur le préjudice d’image

Enfin la société Airess invoque un préjudice moral, dit préjudice d’image pour atteinte à sa réputation commerciale et au sérieux de son activité d’un montant de 50 000€.

La société Minimax réplique que ce chef de préjudice n’est pas justifié.

Réponse de la Cour

La société Airess en ce qu’elle a été victime d’actes de concurrence déloyale de la société Minimax , a nécessairement subi un préjudice d’image (moral) qui sera justement réparé par l’allocation d’une somme de 40 000 € au regard de leur gravité.

Sur les intérêts

La société Airess demande à ce que les intérêts soient fixés à la date de l’assignation initiale signifiée à Minimax le 12 avril 2013 et que soit ordonnée leur capitalisation.

Réponse de la Cour

Eu égard à leur caractère indemnitaire, les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter du 25 septembre 2017, date de signification du jugement du 22 mars 2017 à la société Minimax, sur la somme de 45 000 € et à compter du présent arrêt pour le surplus.

La capitalisation des intérêts est ordonnée conformément à l’article 1343-2 (anciennement 1154) du Code civil.

Sur la publication de la décision

La société Airess demande à ce que la société Minimax soit condamnée à faire publier la condamnation dans cinq journaux et/ou sites d’information sur internet, au choix d’Airess et aux frais de Minimax.

La société Minimax estime que la publication par voie de presse ne sert aucunement à la réparation d’un préjudice d’image et ne doit donc pas être ordonnée puisqu’il ne lui a jamais été reproché d’avoir véhiculé à destination du public,une information dénigrante, diffamante, injurieuse ou fausse concernant la société Airess.

Réponse de la Cour

Il convient de faire droit à cette demande de publication du dispositif de l’arrêt, particulièrement adapté à des faits de concurrence déloyale, dans deux journaux professionnels et/ou sites d’information sur internet, au choix de la société Airess pendant une durée de quinze jours, en noir sur fond blanc et suivant une police d’écriture de type Times New Roman et de taille 12, dans la limite de 5 000 euros par publication, aux frais de la société Minimax.

Sur la demande reconventionnelle de Minimax en procédure abusive.

Le sens de l’arrêt commande de débouter la société Minimax de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, les faits de concurrence déloyale étant établis à son égard.

Sur les dépens et l’article 700 Code de procédure civile

La société Minimax qui succombe, est condamnée aux dépens d’appel, déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et condamnée sur ce fondement à verser à la société Airess la somme supplémentaire de 30 000 € sur le fondement de ce dernier article.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Vu l’arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique du 16 février 2022,

Statuant dans les limites de sa saisine,

Déclare recevables les demandes de la société Airess relatives à l’attribution des chantiers dits « Promod Wattrelos », « Leclerc [Localité 10] », « Auchan ([Localité 9] – [Localité 7]) », « Printemps Haussmann ([Localité 14]) » et « Leclerc ([Localité 11]) » ;

Dit que la société Minimax a commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Airess ;

Confirme le jugement sauf sur le montant des dommages-intérêts alloués au titre de la concurrence déloyale et du préjudice d’image, sur le rejet de la demande de capitalisation des intérêts, ainsi que sur les modalités de publication de la décision ;

Statuant à nouveau de ces chefs,

Condamne la société Minimax à payer la somme de 81 451 euros au titre du préjudice de concurrence déloyale, outre la somme de 40 000 euros au titre du préjudice d’image ;

Dit que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter du 25 septembre 2017 sur la somme de 45 000 euros et à compter du présent arrêt pour le surplus ;

Ordonne la capitalisation des intérêts conformément à l’article 1343-2 du Code civil.

Ordonne la publication du dispositif de l’arrêt dans deux journaux professionnels et/ou sites d’information sur internet, au choix de la société Airess pendant une durée de quinze jours, en noir sur fond blanc et suivant une police d’écriture de type Times New Roman et de taille 12, dans la limite de 5 000 euros par publication, aux frais de la société Minimax.

Y ajoutant,

Condamne la société Minimax aux dépens d’appel et à payer à la société Airess la somme de 30 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Déboute la société Minimax de sa demande sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Rejette les demandes plus amples ou contraires.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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