Données confidentielles : 14 février 2023 Cour d’appel d’Amiens RG n° 22/02829

·

·

Données confidentielles : 14 février 2023 Cour d’appel d’Amiens RG n° 22/02829
Je soutiens LegalPlanet avec 5 ⭐

ARRET

[K]

C/

Association IRFA-APISUP

copie exécutoire

le 14 février 2023

à

Me Decramer

Me Doré

CB/MR

COUR D’APPEL D’AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD’HOMALE

ARRET DU 14 FEVRIER 2023

*************************************************************

N° RG 22/02829 – N° Portalis DBV4-V-B7G-IO7N

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE D’AMIENS DU 16 MAI 2022 (référence dossier N° RG 20/00355)

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur [Y] [K]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté et concluant par Me Marc DECRAMER, avocat au barreau D’AMIENS

ET :

INTIMEE

Association IRFA-APISUP (Institut Régional de Formation par Alternance-Association pour le Développement de la Formation en Alternance dans l’Enseignement Supérieur en Picardie)

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée et concluant par Me Christophe DORE de la SELARL DORE-TANY-BENITAH, avocat au barreau d’AMIENS substitué par Me Isabelle LESPIAUC, avocat au barreau D’AMIENS

DEBATS :

A l’audience publique du 15 décembre 2022, devant Madame Corinne BOULOGNE, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, l’affaire a été appelée.

Madame [G] [B] indique que l’arrêt sera prononcé le 14 février 2023 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Malika RABHI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame [G] [B] en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Corinne BOULOGNE, présidente de chambre,

Mme Caroline PACHTER-WALD, présidente de chambre,

Mme Eva GIUDICELLI, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 14 février 2023, l’arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Corinne BOULOGNE, Présidente de Chambre et Mme Malika RABHI, Greffière.

*

* *

DECISION :

M. [K] a été embauché le 20 octobre 2014 par contrat à durée déterminée pour la période comprise entre le 10 octobre 2014 et le 19 octobre 2015 par l’association IRFA-APISUP, en qualité de chargé d’études pédagogiques. Un avenant de renouvellement du contrat a été signé pour la période comprise entre le 20 octobre 2015 et le 19 octobre 2016.

La relation contractuelle s’est ensuite poursuivie dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée par avenant du 20 octobre 2016.

L’association compte un effectif inférieur à 11 salariés.

Le salarié a été mis à pied à titre conservatoire le 12 mars 2020, puis il a été convoqué à un entretien préalable fixé au 26 mars 2020.

Par courrier du 1er avril 2020, il a été licencié pour faute grave dans les termes suivants :

Notification de licenciement pour faute grave

Monsieur,

Nous faisons suite à l’entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement pour faute grave en date du 26 mars 2020 au cours duquel vous vous êtes présenté assisté de Monsieur [P] [A], conseiller du salarié.

Les explications fournies au cours de cet entretien préalable ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits et ne nous permettent pas d’envisager la poursuite de nos relations contractuelles.

Ce faisant, nous avons pris la décision de vous licencier pour faute grave.

Les motifs de ce licenciement pour faute grave sont les suivants :

1. Propos injurieux tenus à l’égard de Mme [E] [C]. Directrice de l’Association IRFA-APISUP :

Selon mail en date du 4 mars 2020, vous avez écrit à Mme [E] [C] Directrice, en ces termes :

« Comme vu ensemble tout à l’heure avec [I], j’ai été surpris de la suppression inopinée de ma ligne téléphonique professionnelle cet après-midi et dont le numéro est personnel depuis 18 ans au moins.

J’ai été outré par cette façon de faire.

Pour te rafraichir la mémoire, je n’ai jamais fait de demande de téléphone professionnel.

Même quand tu as évoqué la question, je n ‘étais pas emballé. [X] en était témoin, puisque c’est lui qui a géré le dossier.

A l’époque, tu avais argumenté que c’était pour minimiser les coûts de communication quand tu m’appelais de l’étranger. D’où la solution du transfert de mon numéro privé sur la ligne professionnelle.

Aujourd’hui, te voir agir ainsi en supprimant la ligne sans information préalable est inqualifiable … Ainsi, je te prie de me dire quand est-ce que tu souhaites mettre fin à cette ligne pour refaire l’opération inverse de transfert de mon numéro .. , ».

Par mail du même jour, Mme [E] [C], Directrice, vous a répondu, l’intéressée précisant notamment que la ligne mobile n’avait pas été supprimée mais suspendue.

A réception de cette réponse de Mme [E] [C], Directrice, votre réaction s’est révélée pour le moins vive et brutale.

En effet, suivant mail en date du 5 mars 2020, vous avez notamment indiqué à Mme [E] [C], Directrice :

« C’est bien de te poser des questions avec ton petit groupe sur l’utilisation de cette fameuse ligne comme tu dis … »

Pour te rafraichir de nouveau la mémoire … »,

« Tu comprendras ma déception de te voir agir ainsi. C’est puéril et perfide … »,

« On ne va pas se voiler la face. Tu cherches à te venger contre moi pour avoir refusé d’adhérer à tes projets que je considérais négatifs en matière de management, notamment au sein de I’IRFA. .. ».

Par ailleurs, non sans audace, aux termes de ce même mail en date du 5 mars 2020, vous avez cru devoir interférer dans une procédure disciplinaire mise en ‘uvre à l’encontre de Mme [U], salariée de l’Association.

En effet, vous avez indiqué :

« Au sortir de cette réunion, j’étais venu te voir dans ton bureau pour te dire droit dans les yeux qu’il fallait tout faire pour arrêter avec cette situation et ramener la paix.

Ce n’était ni bon pour l’image du Président [N] [F], de I’RFA, comme pour toi si par malheur cette histoire dépassait les murs du CFA. .. ».

Vous avez également ajouté:

« … Je ne peux cautionner tes agissements qui cherchent à ôter à l’homme toute dignité.

Mardi, 25 février dernier, j’étais peiné de te voir t’acharner sur [W] en voulant à tout prix humilier.

Ou peut-être que ce sont les acclamations des officionados qui occultent ta vue et brouillent ton ouïe, mais, je peux te le dire, il mon avis, tu t’enfonces dans l’irrationnel, oubliant sans doute l’essentiel… ».

En tout état de cause, vous avez usé d’un ton inutilement agressif et injurieux à l’égard de Me [C], Directrice, ce que nous ne pouvons bien évidemment tolérer.

2 Menaces de mort à l’égard d’un collègue

Non content de tenir des propos injurieux à l’égard de la Directrice de notre Association, vous vous êtes cru autorisé à proférer des menaces de mort à l’encontre de M. [V], Directeur adjoint en charge des activités administratives et financières, et ce en présence de témoins tétanisés et médusés.

En effet, le 10 mars 2020, après avoir déjà tenu des propos virulents à l’encontre de l’intéressé le 5 mars précèdent, vous avez violemment interpelé M. [V], Directeur adjoint en charge des activités administratives et financières, dans nos locaux en vous écriant « si tu fais ça, tu es mort» !!!

Vous avez même réitéré vos menaces de la manière suivante : si tu ne comprends pas, tu es mort » !!!

Particulièrement choqué par votre attitude extrêmement violente et menaçante, M. [V], Directeur adjoint en charge des activités administratives et financières, a été contraint de déposer une plainte pénale à votre encontre le 11 mars 2020.

M. [V] n’a pas été l’unique salarié de notre Association à être perturbé par votre comportement intolérable.

En effet, les salariés, témoins de l’incident survenu le 10 mars 2020, nous ont fait part de leur effroi mais aussi de leurs indignations face à votre attitude.

Bien plus, après “avoir également pris à parti, ce même 10 mars 2020, M. [T], Responsable développement d’activités au sein de notre Association, a décidé d’user de son droit de retrait conformément aux dispositions de l’article L 4131 du code du travail, considérant légitimement que sa sécurité et son intégrité (physique et morale) n’étaient plus assurées.

Bien évidemment, nous ne pouvons accepter vos menaces portées à l’encontre de l’un de nos salariés et une telle situation laquelle a de facto perturbé considérablement le fonctionnement de notre structure.

En effet, comme vous le savez, nous sommes tenus, en notre qualité d’employeur à une obligation de sécurité de résultat (article L 4121-1 du Code du Travail) et ainsi contraints rassurer la sécurité et la santé (physique et mentale) de, nos salariés.

3 Refus de vous soumettre à la mise à pied conservatoire notifiée le 11 mars 2020 :

Après avoir pris connaissance des faits d’une extrême gravité vous concernant évoqués ci-dessus, nous avons décidé de vous convoquer le 12 mars 2020 à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement.

Parallèlement nous vous avons notifié une mise à pied à titre conservatoire dans l’attente de la procédure à intervenir.

Or, vous avez refusé de vous avez refusé de sous soumettre à cette mise à pied conservatoire.

En effet, le 12 mars 2020, vous avez refusé de quitter le poste de travail, nonobstant la notification de la mise à pied conservatoire.

II en a été de même le lundi 16 mars 2020,

En effet, contre toute attente, vous vous êtes présenté à votre poste de travail pour reprendre l’exercice de votre activité professionnelle, faisant ainsi preuve d’une insubordination sans égale .

Là encore, votre attitude ne peut être admise.

En tout état de cause, les faits décrits ci-dessus sont assurément constitutifs d’une faute grave et ne permettent pas de vous maintenir au sein de l’Association, même pour la durée limitée de votre préavis.

Votre licenciement pour faute grave prend donc effet immédiatement, sans indemnité de préavis, ni de licenciement.

Nous vous confirmons également fa mise à pied conservatoire qui vous a été notifiée et qui ne sera pas rémunérée.

Contestant la légitimité de son licenciement et ne s’estimant pas rempli de ses droits au titre de l’exécution du contrat de travail, M. [K] a, par requête en date du 9 septembre 2020, saisi le conseil de prud’hommes d’Amiens qui, par jugement du 16 mai 2022, a :

– dit et jugé que M. [K] était mal fondé en sa demande de nullité du licenciement ;

Par conséquent,

– débouter M. [K] de ses demandes subséquentes ;

– dit le licenciement de M. [K] fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

Par conséquent,

– débouté M. [K] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– condamné l’association IRFA-APISUP à payer à M. [K] les sommes suivantes :

– 1 751,80 euros au titre de la mise à pied à titre conservatoire ;

– 175,18 euros au titre des congés payés afférents ;

– 8 298 euros au titre de l’indemnité de préavis ;

– 829,80 euros au titre des congés payés afférents ;

– 3 319,20 euros au titre de l’indemnité de licenciement ;

– rappelé qu’en vertu de l’article R.1454-28 du code du travail, le jugement était exécutoire de droit dans la limite maximum de 9 mois de salaires calculée sur la moyenne des 3 derniers mois de salaires (soit 22 500 euros calculées sur le salaire de base de 2 500 euros) ainsi qu’au titre de la remise de toute pièce que l’employeur est tenu de délivrer ;

– débouté M. [K] du surplus de ses autres demandes :

– réintégration au sein de l’association IRFA-APISUP ;

– rappels de salaires pour les années 2014 à 2019 ;

– rappels de salaires pour les 12 et 13 mars 2020 ;

– dommages et intérêts pour les irrégularités dans la procédure de licenciement ;

– dommages et intérêts pour la réduction discriminatoire de sa prime exceptionnelle ;

– débouté l’association IRFA-APISUP de ses demandes ;

– condamné l’association IRFA-APISUP à payer à M. [K] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– dit que chaque partie supportait la charge de ses propres dépens.

Ce jugement a été notifié le 18 mai 2022 à M. [K] qui en a relevé appel le 7 juin 2022.

L’association IRFA-APISUP a constitué avocat le 9 juin 2022.

Par dernières conclusions communiquées par voie électronique le 3 novembre 2022, M. [K] prie la cour de :

– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Amiens le 16 mai 2022 en ce qu’il a condamné l’association IRFA-APISUP ;

– infirmer le jugement en ce qu’il a dit que son licenciement était motivé par une cause réelle et sérieuse, l’a débouté de ses demandes de rappels de salaire et de dommages et intérêts en raison de l’attribution discriminatoire de la prime de fin d’année 2019 ;

Statuant à nouveau,

– prononcer la nullité de son licenciement en raison de l’absence de signature de la lettre de licenciement par le représentant légal ou subsidiairement de la signature de cette lettre d’une part, et de l’organisation d’un entretien préalable en fraude des droits du salarié ;

En tout état de cause,

– juger que son licenciement n’est justifié ni par une faute grave ni par une cause réelle et sérieuse ;

– ordonner sa réintégration au sein de l’association IRFA-APISUP ;

Subsidiairement,

– condamner l’association IRFA-APISUP à lui payer la somme de 49 788 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif sans cause réelle et sérieuse ;

– condamner l’association IRFA-APISUP à lui payer la somme de :

– 52 829 euros pour le rappel de salaires ;

– 5 283 euros pour indemnités de congés payés ;

– 16 596 euros pour indemnité forfaitaire (art. L 8223-1 du Code du Travail) ;

– 2 766 euros pour non-respect de la procédure de licenciement ;

– 6 500 euros à titre de dommages et intérêts pour attribution discriminatoire de la prime de fin d’année 2019 ;

– 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

– dire et juger l’association IRFA-APISUP irrecevable, en tout cas mal fondée en toutes ses demandes ;

– la débouter ;

– condamner l’association IRFA-APISUP aux dépens.

Par dernières conclusions communiquées par voie électronique le 14 septembre 2022, l’association IRFA-APISUP prie la cour de :

– dire et juger M. [K] mal fondé en l’ensemble de ses demandes ;

En conséquence,

– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes d’Amiens en date du 16 mai 2022 en ce qu’il a dit et jugé M. [K] mal fondé en sa demande de nullité du licenciement ;

En conséquence,

– dire et juger que le licenciement pour faute grave de M. [K] est régulier en la forme ;

En conséquence,

– débouter M. [K] de sa demande d’indemnité pour irrégularité (prétendue) de la procédure de licenciement ;

En conséquence,

– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes d’Amiens en date du 16 mai 2022 en ce qu’il a débouté M. [K] de sa demande de dommages et intérêts pour les irrégularités prétendues dans la procédure de licenciement ;

– dire et juger également que le licenciement pour faute grave de M. [K] n’est pas nul ;

– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes d’Amiens en date du 16 mai 2022 en ce qu’il a débouté M. [K] de ses demandes afférentes à la nullité (prétendue) du licenciement ;

En conséquence,

– débouter M. [K] de sa demande de réintégration ;

En conséquence,

– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes d’Amiens en date du 16 mai 2022 en ce qu’il a débouté M. [K] de sa demande de réintégration ;

– débouter M. [K] de sa demande de dommages et intérêts pour nullité (prétendue) du licenciement ;

– réformer le jugement du conseil de prud’hommes d’Amiens en date du 16 mai 2022 en ce qu’il a dit et jugé que le licenciement de M. [K] était fondé sur une cause réelle et sérieuse;

En conséquence,

– dire et juger que le licenciement de M. [K] repose sur une faute grave ;

En conséquence,

– débouter M. [K] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– réformer le jugement du conseil de prud’hommes d’Amiens en date du 16 mai 2022 en ce qu’il l’a condamnée à payer à M. [K] les sommes de 1 751,80 euros au titre de la mise à pied conservatoire, de 175,18 euros au titre des congés payés afférents, de 8 298 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, de 829,80 euros au titre des congés payés afférents, de 3 319,20 euros au titre de l’indemnité de licenciement ;

En conséquence,

– débouter M. [K] de ses demandes d’indemnité compensatrice de préavis, d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, d’indemnité de licenciement, de rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied conservatoire et d’indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire ;

A titre infiniment subsidiaire,

Si par extraordinaire, la cour devait considérer que la faute grave n’était pas présente en l’espèce,

– dire et juger que le licenciement de M. [K] repose sur une cause réelle et sérieuse ;

Encore plus subsidiairement,

Si par impossible, la cour devait estimer que le licenciement de M. [K] était dépourvu de cause réelle et sérieuse,

– réduire alors très substantiellement le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse correspondant à 18 mois de salaire dont l’intéressé sollicite le paiement en violation des dispositions de l’article L 1235-3 du code du Travail (l’intéressé bénéficiant d’une ancienneté de 5,5 années et l’Association IRFA-APISUP employant moins de 11 salariés) ;

Vu les dispositions de l’article L 3245-1 du code du travail ;

– dire et juger M. [K] irrecevable en ses demandes de rappel de salaire pour les années 2014, 2015, 2016 et la période du 1er janvier 2017 au 14 septembre 2017 ;

En conséquence,

– l’en débouter ;

– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes d’Amiens en date du 16 mai 2022 en ce qu’il a débouté M. [K] de ses demandes de rappel de salaire pour les années 2016 à 2019 ;

En conséquence,

– débouter M. [K] de ses demandes de rappel de salaire pour les années 2014 à 2019 ;

– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes d’Amiens en date du 16 mai 2022 en ce qu’il a débouté M. [K] de sa demande de rappel de salaire pour les 12 et 13 mars 2020 ;

En conséquence,

– débouter M. [K] de sa demande de congés payés pour l’après-midi du 12 mars 2020 et la journée du 13 mars 2020 ;

– confirmer encore le jugement du conseil de prud’hommes d’Amiens en date du 16 mai 2022 en ce qu’il a débouté M. [K] de sa demande de dommages et intérêts pour attribution (prétendument) discriminatoire de la prime de fin d’année 2019 ;

En conséquence,

– débouter M. [K] de sa demande de dommages et intérêts pour attribution prétendument discriminatoire de la prime de fin d’année 2019 ;

– réformer enfin le jugement du conseil de prud’hommes d’Amiens en date du 16 mai 2022 en ce qu’il l’a condamnée à payer à M. [K] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

En conséquence,

– débouter M. [K] de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau en cause d’appel ;

– condamner M. [K] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner M. [K] aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 30 novembre 2022 et l’affaire a été fixée à l’audience de plaidoirie du 15 décembre 2023.

MOTIFS

Sur l’exécution du contrat de travail

Sur le rappel de salaires

M. [K] sollicite le paiement d’un rappel de salaires sur les années 2014 à 2020 soutenant qu’il a produit aux débats des tableaux détaillés récapitulatifs des heures qu’il a effectué qui ne sont pas contestés par l’employeur.

L’IRFA-APISUP soutient que le salarié ayant saisi le conseil de prud’hommes le 14 septembre 2020, en application de l’article L 3245-1 du code du travail ses demandes antérieures au 14 septembre 2017 sont prescrites, que pour le surplus qu’aucune réclamation n’avait été émise avant la procédure, que des salariés confirment le temps partiel de M. [K] qui travaillait ailleurs pour l’autre temps partiel, qu’il avait aussi une activité à l’étranger.

Sur ce

Sur la prescription

En application de l’article L3245-1 du code du travail « l’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat. »

Le salarié ayant déposé sa requête devant le conseil de prud’hommes le 9 septembre 2020, la réclamation de salaires pour la période antérieure au 9 septembre 2017 est irrecevable car prescrite.

Sur le fond

Il est réclamé par le salarié non pas des heures supplémentaires comme le prétend l’employeur mais un rappel de salaires et le régime de la preuve des heures supplémentaires n’est pas applicable.

Il est versé aux débats le contrat de travail à durée indéterminée conclu le 20 octobre 2016 qui ne mentionne pas d’horaires de travail ni de durée du travail. Il est toutefois stipulé qu’outre le passage d’un contrat à durée déterminée à un contrat à durée indéterminée et un entretien professionnel tous les deux ans, les autres dispositions applicables au contrat restent inchangées.

Le contrat à durée déterminée initial stipulait que « vos horaires de travail sont répartis sur deux semaines, selon le planning défini, mais pourront être modifiés en fonction des nécessités de service, à raison de 35 heures semaines. »

Ainsi le contrat originel stipulait un temps partiel à raison de 70 heures par semaine réparties sur deux semaines mais sans précision sur les semaines concernées.

Le contrat de travail doit prévoir la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine (en cas de durée hebdomadaire du travail) ou les semaines du mois (en cas de durée mensuelle du travail), ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

En l’absence d’indication dans le contrat à temps partiel de la durée exacte de travail convenue et/ou de sa répartition sur la semaine (en cas de durée hebdomadaire du travail) ou le mois (en cas de durée mensuelle du travail) le contrat est présumé avoir été conclu à temps complet ; s’agissant d’une présomption simple, il appartient à l’employeur de rapporter la preuve contraire.

Cette requalification en temps plein s’applique également aux avenants du contrat initial qui ne comportent pas les mentions relatives à la durée du travail et sa répartition.

L’employeur qui conteste la présomption de temps plein doit, comme en l’absence de contrat écrit, rapporter la preuve, d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d’autre part, de ce que le salarié n’était pas dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’était pas dans l’obligation de se tenir à la disposition de son employeur.

La cour rappelle que la seule production des bulletins de salaires ou le fait que les horaires de travail qui figurent sur les bulletins de salaires n’aient jamais été contestés par le salarié avant l’instance sont insuffisants à établir l’existence d’un contrat de travail à temps partiel.

L’employeur verse aux débats de nombreuses attestations de collègues de travail de M. [K] qui indiquent qu’il travaillait à mi-temps, à raison de 70 heures par mois.

Par ailleurs, l’employeur affirme, sans être démenti que le salarié avait une autre activité professionnelle ce qui avait pour conséquence qu’il n’était pas dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’était pas dans l’obligation de se tenir à la disposition de son employeur. La cour relève en sus que dans ses conclusions le salarié reconnaît qu’il était employé à mi-temps et avait d’autres activités professionnelles ( p 13 des conclusions).

C’est à bon droit que les premiers juges ont débouté M. [K] de sa demande en paiement de rappel de salaires ; le jugement étant confirmé sur ce point.

Sur l’attribution de la prime de fin d’année

M. [K] sollicite des dommages et intérêts pour le paiement d’un complément de prime de fin d’année pour l’année 2019 qui constitue le 14eme mois soutenant qu’elle lui a été versée de façon discriminatoire à un quantum peu important car la directrice en a perçu une d’un montant divisé par deux par rapport à l’année précédente mais que la sienne est passée de 6300 euros à 700 euros.

L’employeur réplique que la demande n’est pas fondée car les cadres ont perçu une somme moindre en 2019 qu’en 2018, que le salarié n’a pas fourni les éléments demandés sur les propositions de projets d’action pour 2020, qu’il n’y a pas eu de discrimination.

Sur ce

Les dispositions de l’article L.1132-1 du code du travail rappellent qu’aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle ou de mutation, en raison de ses activités syndicales.

Aux termes de l’article L.1134-1 du même code, il appartient en cas de litige au salarié concerné de présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l’article 1er de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008, et il incombe alors à l’employeur, au vu des éléments ainsi produits, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

M. [K] verse aux débats deux courriers de novembre 2018 qui lui indiquent que le montant de sa prime exceptionnelle sera de 6300 euros et de décembre 2019 qui précise que le montant versé sera de 700 euros.

Il y a lieu de considérer que le salarié produit un élément laissant supposer une discrimination à laquelle l’employeur doit répondre.

L’employeur produit un tableau des primes versées en 2018 qui fait apparaître que Mme [C] a perçu une prime de 12 000 euros et le même type de courrier adressé à celle-ci qui indique que la prime de décembre 2019 sera de 6000 euros.

Les stipulations contractuelles ne font pas mention de la prime exceptionnelle ne visant qu’un 13ememe mois si bien qu’il est impossible de définir les critères sur lesquels l’employeur fixe son montant. Cependant il explique sans être démenti avoir sollicité vainement M. [K] le 10 mars 2020 pour qu’il lui fasse des propositions pour favoriser le développement de l’activité de l’IRFA APISUP alors qu’en sa qualité d’enseignant chercheur il devait être force de proposition.

Dans ces conditions la cour juge que l’employeur qui n’était pas tenu par un usage, les trois critères de généralité, constance et fixité n’étant pas réunis, et qu’il démontre que les faits matériellement établis par le salarié sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Les demandes relatives à la discrimination doivent par conséquent être rejetées.

Par suite, le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a débouté M. [K] de ses demandes formées au titre du rappel de salaire suite à discrimination.

Sur la rupture du contrat de travail

Sur le licenciement

M. [K] sollicite de la cour qu’il juge le licenciement nul ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la nullité du licenciement

Au soutien de sa demande en nullité du licenciement il argue que la lettre de licenciement n’est pas signée par le représentant légal de l’association mais par un paraphe mécanique, que le président de l’association ne pouvait attester l’avoir signé lui-même, qu’il s’agit d’un faux car il produit une analyse d’écriture et que le licenciement est donc nul.

Il fait valoir que l’entretien préalable a été mené par Mme [C] partie prenante au litige du fait des griefs invoqués à l’appui de la faute grave, qu’il s’agit d’un procédé déloyal car elle n’était pas objective, le salarié qui l’accompagnait en témoignant.

L’IRFA APISUP réplique que Mme [C] agissait sous couvert du président en tant que directrice et donc supérieure hiérarchique du salarié, qu’elle disposait des prérogatives pour le faire ainsi que le prouve sa fiche de poste, que les menaces de mort ne la visaient pas et que le refus de se soumettre à la mise à pied conservatoire était le troisième grief invoqué, que la directrice a recueilli normalement des observations du salarié qui était assisté et que le compte-rendu d’entretien établi le prouve.

Elle rétorque que la lettre de licenciement a bien été signée par le président comme il en atteste et que l’expertise produite n’est pas probante.

Sur ce

L’entretien préalable peut être mené par le président de l’association ou la personne habilitée pour le faire en raison de sa fiche de poste.

En l’espèce, l’entretien préalable a été mené par Mme [C], directrice de la structure, qui assure, selon son contrat de travail, la gestion, l’organisation, l’animation et la direction de l’association dans le respect de la règlementation générale définie en concertation avec le Président à qui elle doit rendre compte régulièrement, elle avait donc compétence pour tenir l’entretien préalable.

Par ailleurs si Mme [C] est directement concernée par le premier grief invoqué par l’employeur à l’appui de la faute grave elle ne l’est pas pour les deux autres. La cour observe que le salarié a reconnu le premier grief invoqué et a pu s’en expliquer puisqu’il l’a contextualisé, qu’il était en outre assisté par M. [A] pendant tout l’entretien.

Il ne peut donc être reproché à l’employeur d’avoir agi de façon déloyale à l’endroit de M. [K] en faisant tenir l’entretien préalable par Mme [C].

La lettre de licenciement a été signée par M. [F] président de l’IRFA APISUP. Le salarié produit aux débats un avis d’expert qui conclut que la signature de la lettre ne contient pas de mention manuscrite mais une signature réalisée par un autre procédé.

Or M. [F] a attesté qu’il était bien l’auteur de la signature si bien qu’en tout état de cause l’identité et la qualité de l’employeur sont parfaitement identifiées, le salarié ne peut se prévaloir de cette signature pour réclamer à la cour de juger que le licenciement serait nul pour défaut de signature de la lettre de licenciement.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu’il a jugé que la procédure de licenciement est régulière et que le licenciement n’est pas nul.

Sur la faute grave fondant le licenciement

M. [K] soutient que son licenciement résulte de son soutien à Mme [U] qui a été licenciée avant lui et à ses mauvais rapports avec Mme [C], qu’il en a été de même pour M. [H] qui a été licencié peu après lui.

Il fait valoir qu’il ne s’est pas plié à la mise à pied conservatoire car elle était vexatoire et ne se justifiait pas, que de 2014 à 2018 il utilisait son téléphone personnel pour ses appels à l’association mais qu’en 2018 pour optimiser le coût, car il était souvent à l’étranger, il avait été convenu avec l’employeur que l’abonnement serait transféré à l’association et qu’il conserverait l’usage de la ligne pour ses autres activités, que l’employeur a pris connaissance de ses palles y compris privés, ce qui a porté atteinte à sa vie privée car elle a obtenu la liste de tous ses correspondants, qu’il ne peut lui être reproché d’avoir avec l’aide de M. [H] souscrit un abonnement téléphonique sans l’accord de l’association puisque Mme [C] est responsable des finances avec M. [Z] responsable administratif et financier.

Il ajoute que compte tenu de la position des personnes concernées, ni le tutoiement ni la liberté de tenir certains propos ne sont fautifs, que les propos envers Mme [C] ne sont pas grossiers et ne portent pas atteinte à son autorité.

Il rapporte que les « menaces de mort » qui lui sont imputées ont été proférées sur le coup de la colère sans aucune intention de porter atteinte à l’intégrité physique de M. [V], qu’il s’agit d’un fait isolé, qu’il ne l’a pas menacé s’il demandait les listings puisqu’ils avaient déjà été communiqués.

Le salarié argue qu’aucun salarié n’a exercé un droit de retrait car M. [T] et M. [Z] ont quitté l’association dès qu’ils ont su que Mme [U], M. [H] et lui-même avaient engagé une procédure devant le conseil de prud’hommes.

L’IRFA APISUP rétorque que M. [K] a reconnu lors de l’entretien préalable l’intégralité des trois griefs invoqués, qu’il a été volontairement offensant à l’égard de Mme [C] et que le comportement caractérise l’insubordination envers la supérieure hiérarchique, que si la jurisprudence reconnaît au salarié une liberté d’expression, il en va différemment des propos injurieux ou excessifs de nature à dégénérer en abus cette liberté d’expression, qu’elle n’avait pas donné son consentement pour le transfert d’abonnement téléphonique, car M. [H], administrateur informatique et le salarié avaient décidé de ce transfert sans l’en informer, qu’il n’y a pas eu atteinte à la vie privée de celui-ci.

Sur le second grief l’association fait valoir que le salarié a menacé de mort le directeur adjoint qui a déposé plainte, que ces propos ont été proférés devant plusieurs salariés qui en attestent et qui ont été choqués, l’un d’eux décidant d’exercer son droit de retrait.

Enfin l’employeur rapporte que le troisième grief est caractérisé puisqu’établi par procès-verbal d’huissier qui a constaté que M. [K] avait refusé de quitter les lieux alors qu’il avait reçu notification d’une mise à pied conservatoire, qu’il a persisté 4 jours plus tard le contraignant à faire déplacer à nouveau l’huissier, ce qui établit l’insubordination ; qu’il est donc ainsi prouvé que le licenciement n’avait pas pour origine l’appui qu’avait donné le salarié lors du licenciement de Mme [U], que M. [H] a aussi été licencié pour faute grave, par la suite, pour avoir donné des informations confidentielles à Mme [U].

Sur ce

Il ressort de l’article L. 1235-1 du Code du travail qu’en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties ; si un doute subsiste il profite au salarié.

Quand le licenciement est prononcé pour faute grave, il incombe à l’employeur de prouver la réalité de la faute grave, c’est à dire de prouver non seulement la réalité de la violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail mais aussi que cette faute est telle qu’elle impose le départ immédiat du salarié, le contrat ne pouvant se poursuivre même pour la durée limitée du préavis.

Pour apprécier la gravité de la faute, les juges doivent tenir compte des circonstances qui l’ont entourée et qui peuvent atténuer la faute et la transformer en faute légère.

Si un doute subsiste sur la gravité de la faute reprochée, il doit profiter au salarié.

Il ressort de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige que M. [K] a été licencié pour les faits suivants :

– des propos injurieux à l’égard de Mme [C] directrice de l’IRFA APISUP

– des menaces de mort à l’égard d’un collègue de travail

– le refus de se soumettre à la mise à pied conservatoire notifiée le 11 mars 2020.

Sur le premier grief

Il est constant que M. [K] a disposé, à compter de l’année 2018, d’un téléphone dont l’abonnement a été payé par l’association qui ne peut sérieusement prétendre qu’elle l’ignorait puisqu’elle a payé cet abonnement pendant deux ans ; il est aussi constant que cet abonnement a été supprimé ou suspendu le 4 mars 2020 sans que le salarié en ait été informé au préalable ce qui lui a causé des difficultés, cette ligne étant aussi utilisée à des fins personnelles.

Par courriel du 5 mars 2020 M. [K] a écrit à Mme [C] en contestant cette coupure brutale et en exprimant sa déception, affirmant qu’il s’agissait d’une mesure de rétorsion à son endroit en raison de son opposition à des changements en matière de management et du soutien apporté à Mme [U] qui allait être licenciée.

La cour observe que les termes employés à savoir « puéril et perfide » et qu’il ne cautionne pas les agissements de Mme [C], qu’il est peiné de la voir s’acharner sur [W] voulant l’humilier à tout prix et qu’elle ne se rende pas compte « ou peut-être est-ce les acclamations des afficionados qui occultent ta vue et brouillent ton ouïe mais je peux te dire qu’à mon avis tu t’enfonces dans l’irrationnel oubliant sans doute l’essentiel »ne sont ni grossiers ni injurieux mais expriment les sentiments du salarié et restent dans le cadre de la liberté d’expression.

La cour relève par ailleurs que ce courriel a été adressé suite à la suppression ou à tout le moins à la suspension de l’abonnement téléphonique du salarié, sans l’en avoir informé au préalable ce qui constitue indubitablement une sanction.

Ce grief n’est pas établi.

Sur second grief

L’employeur a produit plusieurs attestations de salariés ayant assisté à la dispute survenue le 10 mars entre M. [K] et M. [V] au cours de laquelle le salarié a dit « t’es mort ou si tu fais ça t’es mort ».

Les menaces de mort sont indubitablement constitutives d’une faute du salarié. Il explique avoir tenu ces propos sous le coup de la colère alors qu’il avait découvert que l’employeur s’était procuré les listings de ses appels téléphoniques ce qui portait atteinte à sa vie privée.

Il est versé à la procédure le témoignage de M. [H] qui indique que M. [K] a dit à M. [V] tu es allé fouiller dans mon listing d’appels téléphoniques, t’es foutu, t’es mort car je vais porter plainte ».

Ainsi les propos doivent être contextualisés en ce que M. [K] n’a pas porté de menaces contre l’intégrité physique, la suite de la phrase prouvant qu’il s’agit d’une image signifiant que le directeur adjoint subirait des suites judiciaires. Toutefois ces propos sont excessifs dans un contexte de travail.

Le grief est établi.

Sur le troisième grief

Le 12 mars 2020 un procès-verbal de constat a été dressé par Maître [R] huissier de justice qui a constaté que M. [K] lui a confié avoir bien été informé à 9h20 de sa mise à pied conservatoire mais qu’il n’entendait pas quitter son poste de travail car il considérait cette mesure comme injustifiée et qu’il lui restait 40 minutes de travail.

Le 16 mars 2020, le même huissier a dressé un autre procès-verbal par lequel il a constaté que M. [K] était toujours à son poste de travail et lui avait indiqué qu’il n’entendait pas quitter son poste malgré la procédure engagée par son employeur.

Ces faits constituent une insubordination caractérisée. Si le salarié considérait la mesure provisoire comme infondée il n’en demeure pas moins qu’il était illégitime à refuser de s’y soumettre sur le moment, pouvant faire valoir ses arguments ultérieurement.

Le grief est justifié.

Si la cour ne retient que deux griefs sur les trois invoqués par l’employeur, il n’en demeure pas moins qu’ils sont constitutifs de faute grave, ce d’autant que M. [K] a persisté pendant plusieurs jours à refuser de se soumettre à la mesure de mise à pied conservatoire.

Le jugement sera infirmé en ce qu’il a requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse et la cour jugera désormais que le licenciement pour faute grave est fondé.

Sur les demandes indemnitaires

Le licenciement pour faute grave étant jugé bien-fondé, le salarié doit par conséquent être débouté de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement illégitime ainsi que de ses prétentions relatives aux indemnités de rupture, indemnité compensatrice de préavis et indemnité de licenciement et de sa demande en paiement au titre de la mise à pied conservatoire.

Le jugement sera infirmé et la cour déboutera M. [K] de ses demandes en paiement

d’une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, d’une indemnité de licenciement et de la demande en paiement au titre de la mise à pied conservatoire et de congés payés afférents.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Les dispositions de première instance seront infirmées tant sur l’article 700 du code de procédure civile que sur les dépens.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de l’IRFA APISUP les frais qu’il a exposé pour la présente procédure. M. [K] sera condamné à lui verser en application de l’article 700 du code de procédure civile une somme de 500 euros pour l’ensemble de la procédure.

Succombant M. [K] est débouté de sa demande au même titre.

Il sera en outre sera condamné aux entiers dépens de la procédure d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement du conseil de prud’hommes d’Amiens du 16 mai 2022 sauf en ce qu’il a débouté M. [K] de ses demandes relatives à :

– la réintégration au sein de l’association IRFA-APISUP ;

– le rappels de salaires pour les années 2014 à 2019 ;

– le rappels de salaires pour les 12 et 13 mars 2020 ;

– les dommages et intérêts pour les irrégularités dans la procédure de licenciement ;

– les dommages et intérêts pour la réduction discriminatoire de sa prime exceptionnelle ;

Statuant de nouveau et y ajoutant,

Dit que le licenciement est fondé sur une faute grave ;

Déboute M. [K] de ses demandes pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne M. [K] à verser à l’association IRFA-APISUP la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour l’ensemble de la procédure ;

Déboute M. [K] de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette les demandes plus amples ou contraires ;

Condamne M. [K] aux dépens de la procédure d’appel.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x