Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Nîmes, 12 janvier 2016), que Mme X… a été engagée, selon contrat de travail à temps partiel du 2 avril 2009, en qualité d’employée de jardinerie par la société Betty fleurs ; qu’elle a saisi la juridiction prud’homale de demandes tendant notamment à obtenir la requalification de la relation de travail en contrat à temps plein et la résiliation judiciaire de son contrat de travail ; qu’elle a été licenciée pour motif économique le 25 mai 2012 ;
Sur les premier et deuxième moyens :
Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le troisième moyen, ci-après annexé :
Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail ;
Mais attendu que le rejet des premier et deuxième moyens prive de portée la première branche qui invoque une cassation par voie de conséquence ;
Et attendu que, sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi et de défaut de base légale, les deuxième, troisième, quatrième et cinquième branches ne tendent qu’à contester l’appréciation par la cour d’appel des éléments de fait qui lui étaient soumis dont elle a pu déduire l’existence de manquements suffisamment graves rendant impossible la poursuite du contrat de travail ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Betty fleurs aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Betty fleurs
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à la décision attaquée D’AVOIR dit que les parties étaient liées par un contrat de travail à temps complet, que Mme X… est donc fondée à solliciter un rappel de salaire à ce titre, réservé pour le surplus, ordonné la réouverture des débats à l’audience du 18 mai 2016 et invité Mme X… à présenter un décompte actualisé prenant en considération ce qui a été jugé dans la décision ;
AUX MOTIFS QUE Sur le non-respect de la durée du temps de travail d’un contrat à temps partiel : Madame X… a été embauchée pour un horaire hebdomadaire de 20 heures, elle produit un décompte des heures effectuées corroborées par des attestations confirmant la présence de la salariée durant toute la journée, le magasin étant ouvert de 8h à 20 heures. L’employeur rétorque que dans son courrier du 30 mai 2011 la salariée indiquait travailler 20 heures par semaine, or ce courrier précise bien que cet horaire n’est applicable que depuis le mois de juillet 2010 ce dont la salariée tient compte dans son décompte dans lequel elle indique qu’à compter du mois de juillet 2010 elle ne travaillerait plus que 20 heures par semaine. L’employeur ne fournit aucun élément concernant les heures réellement accomplies par la salariée. En outre Messieurs Joël et Jonathan Y…ainsi que Madame Christiane Z…, gérant et cogérants de la société ont été condamnés par le tribunal correctionnel de Tarascon le 5 novembre 2013 pour exécution d’un travail dissimulé concernant des salariés des établissements d’Avignon et de Montfavet. Il convient pour toutes ces raisons de requalifier en contrats de travail à temps complet le contrat de travail à temps partiel conclu par les parties ;
1°) ALORS QU’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié d’étayer sa demande par la production d’éléments quant aux horaires effectivement réalisés, suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu’à cet égard, des attestations de collègues de travail ne faisant pas état de faits directement constatés par les attestations, ne sauraient constituer des éléments suffisamment précis quant aux horaires revendiqués, pour permettre une réponse de l’employeur, et donc étayer la demande du salarié ; qu’en l’espèce, en considérant que les attestations produites par la salariée étaient de nature à étayer sa demande et donc à justifier de l’accomplissement d’heures complémentaires portant sa durée de travail à un temps complet, sans même constater qu’elles faisaient été de faits directement constatés par les auteurs desdites attestations, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 3171-4 du code du travail, ensemble l’article 202 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QU’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié d’étayer sa demande par la production d’éléments quant aux horaires effectivement réalisés, suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; que si un décompte même établi unilatéralement peut venir étayer la demande, encore faut-il que ce décompte soit suffisamment précis sur les horaires revendiqués ; qu’en l’espèce, la société Betty Fleurs soulignait, comme l’avait du reste retenu le conseil de prud’hommes, que le décompte fourni par la salariée ne pouvaient étayer sa demande, étant imprécis et n’étant corroboré par aucun autre élément ; que la cour d’appel, en se bornant à relever l’existence d’un décompte, sans aucunement caractériser sa précision suffisante pour étayer la demande, et en invitant Mme X… à présenter ultérieurement un nouveau décompte, a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 3171-4 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à la décision attaquée D’AVOIR fait droit à la demande de rappel de salaire au titre des jours fériés, réservé pour le surplus, ordonné la réouverture des débats à l’audience du 18 mai 2016 et invité Mme X… à présenter un décompte actualisé prenant en considération ce qui a été jugé dans la décision ;
AUX MOTIFS QUE Sur le non-paiement des jours fériés : Madame X… rappelle les dispositions de l’article 7-6 de la convention collective applicable laquelle prévoit : « Parmi les 11 jours fériés légaux : Les salariés auront droit à 7 jours fériés chômés payés par an lorsqu’ils tombent un jour habituellement travaillé par chaque intéressé. Ces 7 jours fériés chômés/ payés seront fixés par chaque employeur, en début d’année, au choix et par roulement. Les 7 jours fériés chômés/ payés choisis par l’employeur ainsi que le 1er Mai, lorsqu’ils seront travaillés par décision de l’employeur en raison des nécessités de l’entreprise, seront :- soit compensés par une journée de congé supplémentaire dans la quinzaine qui précède ou qui-suit ou par une majoration de salaire de 100 %- et pour le 1er Mai, payé clans les conditions prévues par la loi. Les salariés seront informés à l’avance par l’employeur des jours fériés qui seront chômés/ payés ou travaillés dans I’entreprise durant les 6 mois à venir. 2. Les 4 jours fériés restants sont normalement travaillés et rémunérés dans les conditions habituelles ». Madame X… produit des attestations démontrant qu’elle était présente lors des jours fériés et notamment le 1er mai alors que ses bulletins de paie ne mentionnent pas sa présence ce jour-là. Il sera fait droit à la demande de rappel de salaire à ce titre aux conditions qui précèdent.
ALORS QU’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié d’étayer sa demande par la production d’éléments quant aux horaires effectivement réalisés, suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu’à cet égard, des attestations ne faisant pas état de faits directement constatés par leurs auteurs, ne sauraient constituer des éléments probants suffisamment précis ; qu’en l’espèce, l’employeur soutenait que les éléments produits par Mme X…, notamment les attestations, n’étaient pas de nature à établir la preuve de ses horaires prétendus ; qu’en se bornant, pour faire droit à la demande de la salariée, à renvoyer à ces attestations, sans aucune analyse ni en particulier faire ressortir, à tout le moins, qu’elles mentionnaient des faits personnellement constatés par leurs auteurs, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 3171-4 du code du travail, ensemble l’article 202 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à la décision attaquée D’AVOIR prononcé la résiliation du contrat de travail de Mme X… aux torts de l’employeur à la date du 6 juin 2012, réservé pour le surplus, ordonné la réouverture des débats à l’audience du 18 mai 2016 et invité Mme X… à présenter un décompte actualisé prenant en considération ce qui a été jugé dans la décision ;
AUX MOTIFS QUE Sur la demande de résiliation judiciaire-Sur le manquement à l’obligation de sécurité : Sur la violation des règles de sécurité et la mise en danger ries salariés, Madame X… produit le rapport établi par le médecin du travail qui se concluait ainsi : « Entreprise présentant de nombreux dysfonctionnements mettant en danger : I. La sécurité physique des salariés par : La vétusté des locaux, en particulier la toiture et les plafonds La vétusté électrique dans un milieu humide-2 danger imminent La vétusté des locaux collectifs’L’absence de protection collective et individuelle digne de ce nom 2. La sécurité psychologique des salariés : En refusant l’accès à la convention collective et rappel à l’employeur sur les droits fondamentaux du travail, en particulier sur la gestion des jours fériés. Un exemplaire de cette fiche d’entreprise sera adressé au contrôleur de l’inspection du Travail du secteur ». Le médecin du travail relevait également l’absence d’eau potable dans les locaux, l’absence d’équipements de sécurité pour les salariés qui utilisaient des produits phytosanitaires, des produits chimiques et des outils coupants, il constatait également l’absence de document unique d’évaluation des risques professionnels. L’employeur faisait l’objet de deux mises en demeure de la part du contrôleur du travail pour réaliser les travaux de mise en conformité. Le maire de la commune de Piolenc prononçait la fermeture de l’établissement le 28 juillet 2011 au visa de l’avis défavorable émis par la commission communale de sécurité. Le manquement par l’employeur à son obligation de sécurité est donc établi.- Sur le non-respect de la durée du temps de travail d’un contrat à temps partiel : Madame X… a été embauchée pour un horaire hebdomadaire de 20 heures, elle produit un décompte des heures effectuées corroborées par des attestations confirmant la présence de la salariée durant toute la journée, le magasin étant ouvert de 8h à 20 heures. L’employeur rétorque que dans son courrier du 30 mai 2011 la salariée indiquait travailler 20 heures par semaine, or ce courrier précise bien que cet horaire n’est applicable que depuis le mois de juillet 2010 ce dont la salariée tient compte dans son décompte dans lequel elle indique qu’à compter du mois de juillet 2010 elle ne travaillerait plus que 20 heures par semaine. L’employeur ne fournit aucun élément concernant les heures réellement accomplies par la salariée. En outre Messieurs Joël et Jonathan ainsi que Madame Christiane Z…, gérant et cogérants de la société ont été condamnés par le tribunal correctionnel de Tarascon le 5 novembre 2013 pour exécution d’un travail dissimulé concernant des salariés des établissements d’Avignon et de Montfavet. Il convient pour toutes ces raisons de requalifier en contrats de travail à temps complet le contrat de travail à temps partiel conclu par les parties. […]- Sur le non-paiement des jours fériés : Madame X… rappelle les dispositions de l’article 7-6 de la convention collective applicable laquelle prévoit : Parmi les 11 jours fériés légaux : Les salariés auront droit à 7 jours fériés chômés payés par an lorsqu’ils tombent un jour habituellement travaillé par chaque intéressé. Ces 7 jours fériés chômés/ payés seront fixés par chaque employeur, en début d’année, au choix et par roulement. Les 7 jours fériés chômés/ payés choisis par l’employeur ainsi que le 1er Mai, lorsqu’ils seront travaillés par décision de l’employeur en raison des nécessités de l’entreprise, seront :- soit compensés par une journée de congé supplémentaire dans la quinzaine qui précède ou qui-suit ou par une majoration de salaire de 100 %- et pour le 1er Mai, payé clans les conditions prévues par la loi : Les salariés seront informés à l’avance par l’employeur des jours fériés qui seront chômés/ payés ou travaillés dans I’entreprise durant les 6 mois à venir. 2. Les 4 jours fériés restants sont normalement travaillés et rémunérés dans les conditions habituelles ». Madame X… produit des attestations démontrant qu’elle était présente lors des jours fériés et notamment le 1er mai alors que ses bulletins de paie ne mentionnent pas sa présence ce jour-là. Il sera fait droit à la demande de rappel de salaire à ce titre aux conditions qui précèdent. […] Par contre, les attestations de clients viennent confirmer les propos de la salariée selon lesquels la volonté de l’employeur était à l’évidence de laisser péricliter l’établissement de Piolenc après sa réouverture en octobre 2011 en ne l’alimentant plus en fleurs pour la confection de bouquets et autres plantes, alors que les bouquets de fleurs lui étaient intégralement livrés des autres magasins, que la marchandise livrée était de très mauvaise qualité, les produits n’étaient pas frais et en grande partie fanés. En outre, les salariés étaient livrés à eux-mêmes sans aucune instruction en raison de l’absence pour cause de maladie du responsable du magasin, Monsieur Jean-Michel Y…lequel n’était pas remplacé. Cette situation ayant au demeurant précipité le magasin de Piolenc vers la situation économique qui devait ensuite justifier le licenciement de l’ensemble du personnel. Il est donc établi l’existence, lors de la saisine du conseil de prud’hommes le 31 mai 2011, de manquements suffisamment graves, notamment en matière de sécurité, à l’encontre de l’employeur de nature à empêcher la poursuite de la relation de travail, il convient donc que de prononcer la résiliation du contrat à la date de rupture à savoir le 6 juin 2012. Il sera réservé pour le surplus, concernant les demandes chiffrées de la salariée, et Madame X… sera invitée à présenter un nouveau décompte prenant en considération les dispositions qui précèdent ;
1°) ALORS QUE la cassation de l’arrêt sur le fondement d’un des précédents moyens entraînera automatiquement, en application des articles 624 et 625 du code de procédure civile, la cassation de l’arrêt en ce qu’il a prononcé la résiliation du contrat de travail de Mme X… aux torts de l’employeur à la date du 6 juin 2012, compte tenu du lien de dépendance nécessaire existant entre les chefs de l’arrêt concernés ;
2°) ALORS en tout état de cause QUE le juge doit statuer à la date de sa décision sur les manquements de l’employeur invoqués par le salarié au soutien de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail ; que si les manquements imputés à l’employeur ont disparu à la date du jugement parce que l’employeur les a entièrement régularisés avant la décision de justice, cela peut priver de justification la résiliation judiciaire ; qu’en l’espèce, en jugeant qu’il était établi, lors de la saisine du conseil de prud’hommes le 31 mai 2011, l’existence de manquements suffisamment graves à l’encontre de l’employeur de nature à empêcher la poursuite de la relation de travail, la cour d’appel s’est placée à tort pour apprécier les manquements de l’employeur, non pas à la date où elle statuait, mais à la date de la saisine de la juridiction prud’homale ; qu’elle a, ce faisant, violé l’article 1184 du code civil ;
3°) ALORS QUE le juge doit statuer à la date de sa décision sur les manquements de l’employeur invoqués par le salarié au soutien de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail ; que si les manquements imputés à l’employeur ont disparu à la date du jugement parce que l’employeur les a entièrement régularisés avant la décision de justice, cela peut priver de justification la résiliation judiciaire ; qu’en l’espèce, en justifiant la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme X… notamment – et même essentiellement-par le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité résultant du fait que le maire de la commune de Piolenc avait prononcé la fermeture de l’établissement le 28 juillet 2011 au visa de l’avis défavorable émis par la commission communale de sécurité, tandis que la réouverture de l’établissement avait été autorisée le 8 octobre 2011, à la suite de la réalisation par l’employeur des travaux de mise en conformité préconisés des locaux, la cour d’appel a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard de l’article 1184 du code civil ;
4°) ALORS QUE le juge doit indiquer l’origine et la nature des renseignements qui ont servi à motiver sa décision et préciser les éléments qui lui ont permis de constater les faits considérés ; qu’en l’espèce, en estimant établie la volonté de l’employeur de laisser péricliter l’établissement de Piolenc après sa réouverture en octobre 2011 aux motifs qu’il ne l’alimentait plus tandis que les bouquets de fleurs de l’établissement de Piolenc étaient intégralement livrés des autres magasins, que la marchandise livrée était de très mauvaise qualité, les produits n’étant pas frais et en grande partie fanées, et que les salariés étaient livrés à eux-mêmes sans aucune instruction en raison de l’absence pour cause de maladie de M. Jean-Michel Y…lequel n’était pas remplacé, sans indiquer l’origine et la nature des renseignements qui ont servi à motiver sa décision et préciser les éléments qui lui ont permis de constater ces faits, la cour d’appel a entaché sa décision d’un défaut de base légale au regard de l’article 1184 du code civil ;
5°) ALORS QU’en tout état de cause, en se fondant, pour prononcer la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l’employeur, sur la circonstance que ce dernier n’aurait pas alimenté le magasin de Piolenc en marchandise, ou aurait laissé péricliter l’établissement, sans identifier un manquement précis de l’employeur à l’une de ses obligations résultant du contrat de travail, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1184 du code civil.