Discrimination syndicale retenue contre Atos France
Discrimination syndicale retenue contre Atos France
Ce point juridique est utile ?

Dans cette affaire, l’employeur Atos France a été condamné pour discrimination syndicale. La discrimination à l’égard de l’activité syndicale d’un salarié porte aussi atteinte aux intérêts de la profession.

Preuve de la discrimination syndicale

La société Atos Infogérance n’a pas produit d’élément relatif à l’évolution de la fonction ou de la rémunération du salarié au regard des autres salariés de l’entreprise, alors qu’elle a connu une évolution très limitée. L’accord d’entreprise prévoyait un dispositif spécifique concernant la rémunération des représentants du personnel, dont il n’est pas démontré qu’il a été mis en oeuvre.

L’article L1132-1 du code du travail

Pour rappel, l’article L1132-1 du code du travail dispose que ‘ Aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié, ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L 3221-3 des mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou en raison de son état de santé ou de son handicap.’

Le jeu des présomptions

L’article L. 1134-1 du code du travail dispose que ‘Lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à l’emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en tant que de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.’


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D’APPEL DE PARIS



Pôle 6 – Chambre 6



ARRET DU 27 SEPTEMBRE 2023



(n° 2023/ , 2 pages)



Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/02266 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDJKO



Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Janvier 2021 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° 18/05782





APPELANTS



Monsieur [H] [B]

[Adresse 1]

[Localité 5]



Représenté par Me David METIN, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 159



Syndicat SOLIDAIRES INFORMATIQUE

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentée par Me David METIN, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 159





INTIMÉE



S.A.S. ATOS FRANCE venant aux droits d’ATOS INFOGERANCE

[Adresse 4]

[Localité 6]



Représentée par Me Laurent LECANET, avocat au barreau de PARIS





COMPOSITION DE LA COUR :



L’affaire a été débattue le 20 juin 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :



Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller



qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Monsieur Stéphane THERME, Conseiller, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.



Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats





ARRÊT :



– contradictoire,

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– signé par Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige






RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :



La société AXED a employé M. [H] [B], né en 1959, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 17 août 1992 en qualité technicien réseaux et télécommunications. Le contrat de travail de M. [B] a été transféré à la société Kinzo le 1er mars 1994, puis à la société Atos intégration euronext en 1997, puis à la société Atos origin infogérance à compter du 1er janvier 2002.



La société Atos Infogérance a employé M. [B] en qualité de d’ingénieur réseaux et sécurité, classification 3.1, coefficient 170. Elle est devenue la société Atos France.



Les relations contractuelles entre les parties sont soumises à la convention collective nationale des bureaux d’études techniques et cabinets d’ingénieurs conseils (SYNTEC).



La société Atos infogérance occupait à titre habituel au moins onze salariés.



Sa rémunération mensuelle brute moyenne s’élevait en dernier lieu à la somme de 4 156,13 euros.



M. [B] a été en arrêt maladie au début de l’année 2015. Le 30 mars 2015, il a été reconnu apte à son poste de travail.



M. [B] est en situation d’inter-contrat depuis le mois de janvier 2016.



M. [B] bénéficie du statut de travailleur handicapé depuis le 14 novembre 2017.



Le 8 décembre 2017, M. [B] a été déclaré apte à son poste, avec un aménagement du poste du travail.



M. [B] est investi de mandats représentatifs depuis 2011.



M. [B] a saisi le 26 juillet 2018 le conseil de prud’hommes de Paris estimant que la société manquait à ses obligations à son égard et faisant état de harcèlement et de discrimination subis.



Le syndicat Solidaires informatique, s’est joint à la procédure.



M. [B] a été convoqué le 12 octobre 2020 pour un entretien préalable à une éventuelle sanction. La société Atos infogérance lui a notifié un avertissement le 3 novembre 2020.



Par jugement du 21 janvier 2021, auquel la cour se réfère pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud’hommes a rendu la décision suivante :

« Déboute M. [B] [H] de l’ensemble de ses demandes et déboute le syndicat Solidaires informatique de sa demande.



Déboute la SAS Atos Infogérance de sa demande reconventionnelle.

Condamne M. [B] [H] et le Syndicat Solidaires informatique aux dépens. »



M. [B] a formé appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique les 12 et 26 février 2021.



Le syndicat Solidaires Informatique s’est porté partie appelante.



La constitution d’intimée de la société Atos infogérance a été transmise par voie électronique le 25 mars 2021.

Moyens




Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 27 mars 2023, M. [B] et le syndicat demandent à la cour de :

« RECEVOIR Monsieur [B] en ses demandes et l’y déclarer bien fondé ;

INFIRMER le jugement entrepris dans toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

A TITRE PRINCIPAL,

CONDAMNER la SAS ATOS FRANCE à verser à Monsieur [B] la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts en raison des préjudices résultant des actes de harcèlement moral ;

CONDAMNER la SAS ATOS FRANCE à verser à Monsieur [B] la somme de 70.000 € à titre de dommages et intérêts en raison des préjudices résultant des actes de discrimination ;

A TITRE SUBSIDIAIRE, si la Cour ne retient pas l’existence d’un harcèlement moral et/ou l’existence d’une discrimination,

CONDAMNER la SAS ATOS FRANCE à verser à Monsieur [B] la somme de 100.000 € à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice résultant de l’exécution déloyale de son contrat de travail ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE,

ORDONNER à la SAS ATOS FRANCE d’annuler la sanction notifiée le 3 novembre 2020 ;

CONDAMNER la SAS ATOS FRANCE à verser à Monsieur [B] la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice résultant du manquement à l’obligation de formation ;

CONDAMNER la SAS ATOS FRANCE à verser à Monsieur [B] la somme de 10.000 € en réparation du préjudice né de la totale inertie de la société ;

CONDAMNER la SAS ATOS FRANCE à verser à Monsieur [B] la somme de 5.300 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONDAMNER la SAS ATOS FRANCE à verser au Syndicat SOLIDAIRES INFORMATIQUE la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts ;

DIRE que ces sommes porteront intérêt à compter de la saisine du Conseil de Prud’hommes conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du Code Civil ;

ORDONNER la capitalisation judiciaire des intérêts sur le fondement de l’article 1343-2 du Code Civil ;

CONDAMNER la SAS ATOS FRANCE aux entiers dépens y compris les éventuels frais d’exécution de l’arrêt à intervenir. »



Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 30 juillet 2021, la société Atos infogérance demande à la cour de :

« Recevoir la Société ATOS INFOGERANCE en ses écritures et l’y déclarer bien fondée ;

En conséquence,

Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Débouter Monsieur [B] de l’intégralité de ses demandes ;

Débouter le Syndicat SOLIDAIRES INFORMATIQUE de l’intégralité de ses demandes ;

A TITRE SUBSIDIAIRE,

Ramener les demandes de Monsieur [B] à de plus justes proportions ;

Ramener les demandes du Syndicat SOLIDAIRES INFORMATIQUE à de plus justes proportions ;

A TITRE RECONVENTIONNEL,

Condamner Monsieur [B] et le Syndicat SOLIDAIRES INFORMATIQUE à verser chacun à la société ATOS INFOGERANCE, la somme de 5.300 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens qui sont recouvrés par Maître Laurent LECANET, Avocat aux offres de droit. »



La jonction des deux affaires a été ordonnée par le magistrat en charge de la mise en état par ordonnance du 6 avril 2023.



L’ordonnance de clôture a été rendue à la date du 18 avril 2023.



L’affaire a été appelée à l’audience du 20 juin 2023.



Lors de l’audience présidée selon la méthode dite de la présidence interactive, le conseiller rapporteur a fait un rapport et les conseils des parties ont ensuite plaidé par observations et s’en sont rapportés pour le surplus à leurs écritures ; l’affaire a alors été mise en délibéré à la date du 27 septembre 2023.

Motivation






MOTIFS



Vu le jugement du conseil de prud’hommes, les pièces régulièrement communiquées et les conclusions des parties auxquelles il convient de se référer pour plus ample information sur les faits, les positions et prétentions des parties.



Sur la nullité de l’avertissement prononcé le 3 novembre 2020



L’article L1331-1 du code du travail dispose que constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par lui comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.



L’article L. 1333-1 du code du travail dispose qu’en cas de litige, le conseil de prud’hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L’employeur fournit au conseil de prud’hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l’appui de ses allégations, le conseil de prud’hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.



L’article L.1333-2 du code du travail dispose quant à lui que le conseil de prud’hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.



Le 3 novembre 2020 un avertissement a été notifié à M. [B] au motif qu’il avait refusé une mission pour un client CRIF, en Ile de France, les 9 septembre et 25 septembre 2020.



La société Atos Infogérance produit le mail du 8 septembre 2020 de proposition à M. [B] d’une mission en qualité d’ingénieur réseau avec une proposition de rencontre pour la présenter. Il comporte la description de la mission, à effectuer dans les lycées d’Ile de France, avec des déplacements à effectuer en véhicule. M. [B] a répondu le lendemain que le poste était orienté ‘plus système que réseau’ et qu’il ne disposait pas de certaines compétences. Le manager lui a répondu que ce point n’était pas rédhibitoire et que le client recherchait des administrateurs systèmes et réseaux et proposait de mettre en place des formations.



M. [B] a maintenu le 25 septembre 2020 que la mission ne correspondait pas à son profil.



Le refus par M. [B] de cette mission est établi. Les nombreux échanges de mails entre M. [B] et son employeur depuis l’année 2015 démontrent qu’il avait déjà refusé des missions en indiquant qu’il ne disposait pas des compétences, ou en les conditionnant à des formations préalables. Dans le cadre de la mission en cause, il lui était bien indiqué que des formations seraient dispensées. M. [B] avait déjà plusieurs fois indiqué à son employeur qu’il était ingénieur réseau pour refuser d’autres missions ; la mission proposée destinée à un ingénieur réseau correspondait à son profil.



M. [B] fait par ailleurs valoir que les affectations n’étaient pas compatibles avec les préconisations du médecin du travail, qui consistaient à prévoir des trajets en véhicule, alors que la mission qu’il a refusée prévoyait des déplacements en véhicule.



Dans son courrier de contestation M. [B] a invoqué l’absence de prise en compte de ses mandats de représentant du personnel dans le cadre de cette mission. D’une part il n’a pas fait état de ce point dans ses échanges avec son responsable relatif à cette mission, d’autre part il lui avait été demandé depuis plus d’un an d’indiquer quelles étaient ses disponibilités pour les missions compte tenu de ses mandats, ce à quoi il n’avait pas donné de réponse précise.



Enfin, il ne résulte pas des éléments produits que l’exercice des mandats n’aurait pas été compatible avec la mission.



M. [B] n’était pas fondé à ne pas acceter la mission proposée. Son comportement est fautif et la sanction prononcée n’est pas disproportionnée.



La demande de nullité de l’avertissement doit être rejetée.



Le jugement sera confirmé de ce chef.



Sur la discrimination et le harcèlement moral



L’article L1132-1 du code du travail dispose que ‘ Aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié, ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L 3221-3 des mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou en raison de son état de santé ou de son handicap.’



L’article L. 1134-1 du code du travail dispose que ‘Lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à l’emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en tant que de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.’



L’article 1152-1 du code du travail dispose que :

‘Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.’



En application de l’article L. 1154-1 du code du travail, alors applicable, il incombe au salarié qui l’invoque de présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Dans cette hypothèse, il incombera à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.



M. [B] expose que depuis son engagement syndical au mois d’avril 2014 ses conditions de travail se sont dégradées, avec une mise à l’écart professionnelle, ne bénéficiant plus de missions correspondant à son profil et que toutes ses demandes de formation ont été refusées.



Il justifie avoir été désigné conseiller du salarié le 23 octobre 2017 et représentant de la section syndicale Solidaires Informatique le 18 décembre 2017.



Au titre du harcèlement moral et de la discrimination, M. [B] expose que depuis qu’il a été placé en situation d’intercontrat il a été exigé sa présence systématique sur le site de l’entreprise. La pièce 50 produite à cette fin est un mail du 18 février 2015 adressé par M. [Y] HR Support qui indique : ‘Bonjour, Veuillez trouver ci-joint les nouvelles conditions de réalisation de votre période d’intercontrat. Votre ressources manager et votre manager restent à votre disponibilité pour tout complément d’information. Cordialement,’. Aucun autre document n’est produit et le message n’indique pas ce que soutient le salarié. Ce fait d’exigence systématique par l’employeur de la présence du salarié dans les locaux n’est pas établi.



M. [B] explique que sa présence a été exigée à des réunions qui ne le concernaient pas, notamment des réunions qui étaient destinées aux nouveaux collaborateurs ou à des échanges sur les CV, qui étaient programmées à des horaires plus larges que ceux de la présence aux salariés en intercontrat, ce qui impliquait une présence au delà de ce qui était exigé. M. [B] produit plusieurs mails fixant des réunions, adressés à plusieurs salariés en situation d’intercontrat, ainsi que des échanges de mails avec son supérieur qui a constaté son absence à ces réunions et lui a demandé d’y être présent, ainsi que des demandes de rencontres de son supérieur pour faire un point sur son activité. Cette question a fait l’objet d’un examen par le CHSCT.



M. [B] indique que des réunions ont été programmées alors qu’il était en délégation dans le cadre de ses activités de représentant du personnel, sans produire aucune pièce en ce sens. Ce fait n’est pas établi.



M. [B] a effectué une déclaration d’accident du travail le 26 janvier 2015 pour une crise d’angoisse et de panique avec augmentation de la tension, en raison des mails échangés et d’appels téléphoniques. Il a été arrêté par son médecin du 26 janvier au 4 février 2015 ; le médecin du travail a signalé cette situation aux responsables de la société Atos Infogérance par mail du 28 janvier 2015.



M. [B] invoque l’inertie de la société face aux dénonciations de harcèlement moral, que l’entretien est intervenu tardivement avec un compte rendu erroné et qu’aucune enquête réelle n’a été menée malgré la saisine du CHSCT.



M. [B] expose que l’aménagement de poste qui a été préconisé par le médecin du travail, dont l’avis est produit, à savoir un déplacement en voiture en raison de ses difficultés auditives et le télétravail dans la mesure où ce serait envisageable avec le poste de travail, n’a pas été mis en oeuvre par l’employeur.



M. [B] fait valoir une absence d’évolution professionnelle, ce qui résulte de ses bulletins de paie jusqu’en février 2023 qui indiquent toujours une classification 3.1 et un coefficient 170, celle qui est mentionnée dans son contrat de travail initial.



M. [B] fait également valoir une absence d’évolution salariale autre que celle prévue par l’accord collectif du 6 décembre 2022, ce qui ne résulte pas des bulletins de paie qui indiquent une progression salariale, 3 994 euros en juin 2018 à 4 060 euros en novembre 2019, puis à 4 135 euros en décembre 2022.



M. [B] invoque également la faiblesse des augmentations de sa rémunération, ce qui résulte bien de ses bulletins de paie. Il souligne que l’évolution de celle perçue par les autres ingénieurs du même niveau n’est pas justifiée par l’employeur, qu’elle est en contradiction avec l’accord groupe sur l’évolution de la rémunération des représentants du personnel, accord versé aux débats, qui prévoit une rémunération calculée sur la moyenne de celle des trois dernières années des autres salariés dans un emploi similaire.



M. [B] fait état de l’absence de formation suffisante correspondant à son domaine d’activité à compter de l’année 2014. Il produit son récapitulatif de formation et n’en a suivi aucune en 2015, 2018 et 2020. Il précise que les formations qui lui ont dispensées depuis 2016 n’ont pas eu d’incidence sur son employabilité. Il justifie qu’en 2022 il n’a pas pu suivre une formation de plusieurs jours en raison de l’incompatibilité avec ses contraintes de représentant du personnel, et qu’entre 2013 et 2018 plusieurs candidatures à des formations ont été refusées par son supérieur ou qu’il n’y a pas été donné suite.



M. [B] établit avoir été convoqué à un entretien avec son supérieur qui était prévu en présence d’une personne du service des ressources humaines, qu’il a demandé à être assisté par un délégué du personnel mais que cela lui a été refusé ne s’agissant pas d’un entretien disciplinaire.



M. [B] justifie qu’un plan d’action de formation a été mis en place en 2019, indiquant être le seul salarié concerné, sans établir ce dernier point.



M. [B] est resté en intercontrat pendant plusieurs années, seule une mission de deux mois lui ayant été confiée en mars 2019. Il produit plusieurs échanges de mails dans lesquels il fait observer que les missions proposées ne correspondent pas à sa fonction d’ingénieur réseau, ou correspondent à celle d’un technicien.



M. [B] a été sanctionné par un avertissement du 3 novembre 2020 pour avoir refusé une mission qui ne correspondait pas à son profil, sans respect de sa qualité et de ses mandats.



M. [B] invoque une absence d’entretiens professionnels. Son entretien professionnel d’évaluation n’a eu lieu qu’en février 2019, puis en 2021. L’employeur a tardé à programmer l’entretien de début de mandat représentatif aux fins d’évaluation de son temps de disponibilité qui a eu lieu le 11 février 2019 malgré l’ancienneté de ses mandats et l’accord groupe qui le prévoyait au début de chaque mandat. Il lui a été demandé de remplir un formulaire lors de chacun de ses rendez-vous, impliquant un contrôle de son activité représentative.



M. [B] expose que l’employeur a injustement supprimé son mandat représentatif, en supprimant l’un des établissements de l’entreprise. Il justifie des courriers de la société Atos Infogérance en ce sens, suivi du recours judiciaire des organisations syndicales, qui a abouti. M. [B] a été convoqué le 7 décembre 2021 pour un RDV de fin de mandat, puis les 5 et 13 janvier 2022.



M. [B] souligne l’inertie de l’employeur sur les différentes dénonciations de harcèlement dans ses échanges avec les responsables de l’entreprise.



M. [B] a de nouveau été en arrêt de travail du 26 février au 15 mars 2019.



Pris dans leur ensemble, les éléments présentés par M. [B] laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral et d’une discrimination en raison de ses activités syndicales.



La société Atos Infogérance justifie que les réunions auxquelles M. [B] ne s’est pas présenté au mois de janvier 2015 concernaient tous les salariés en situation d’intercontrat, et pas uniquement l’appelant, plusieurs salariés étant destinataires des mails produits. Elle démontre que M. [B] a été convoqué par son supérieur à plusieurs entretiens successifs mais qu’il ne s’y est pas présenté. Un congé exceptionnel pour un événement familial a été accordé au salarié pour le 23 janvier 2015, qui a rempli une déclaration d’accident du travail le 26 janvier suivant. L’employeur a alors demandé des précisions au service de santé, ainsi qu’au responsable du salarié. Les mails échangés comportent des termes adaptés et courtois, sans invective ni propos méprisant.



M. [B] a été reçu en entretien par la responsable des ressources humaines le 24 février 2015, après la fin de son arrêt de travail, et une convocation devant le médecin du travail a été organisée le 26 février 2015 puis le 30 mars 2015, visite à l’issue de laquelle il a été déclaré apte.



La société Atos Infogérance produit de nouveaux courriels au mois d’avril 2015 qui demandent à M. [B] de se présenter pour un entretien, auquel il a été absent.



La caisse primaire d’assurance maladie n’a pas donné suite à la déclaration d’accident du travail, selon courrier qu’elle a adressé à la société Atos Infogérance le 9 avril 2015. Une enquête a été menée au sein de l’entreprise concernant la situation spécifique de M. [B], avec un rapport établi le 18 mai 2015 après auditions de ses supérieurs et analyse des échanges de mails.



La société Atos Infogérance justifie qu’une mission a été confiée à M. [B] à la fin de l’année 2015, qui a été réalisée, puis que plusieurs missions ont été proposées à M. [B] à partir de l’année 2016, qui les a successivement refusées. Un entretien a été organisé avec M. [B] pour préparer une mission de deux années, à l’issue duquel M. [B] a reproché à son interlocuteur de lui avoir prodigué des conseils ; le client a ensuite préféré un autre intervenant.



Le 19 juillet 2018 l’employeur a sollicité M. [B] pour obtenir un planning prévisionnel de ses activités représentatives, avec une réponse imprécise du salarié sur ses contraintes. Un entretien avec le responsable des ressources humaines a été organisé le 11 février 2019 pour évoquer les activités représentatives, à l’issue duquel M. [B] a contesté les demandes que l’employeur avait faites concernant ces fonctions.



M. [B] a été sollicité au mois de mars 2019 pour une mission d’ingénieur réseau/sécurité, à laquelle il a tardé à répondre pour ensuite indiquer qu’il ne disposait pas des compétences précises.



Le directeur du programme de la mission sur laquelle M. [B] a ensuite été affecté aux mois d’avril-mai 2019 a signalé des difficultés et a expressément indiqué préférer gérer son projet avec une autre personne.



La société Atos Infogérance produit plusieurs mails des refus de M. [B] des missions proposées à la fin de l’année 2019 et au cours de l’année 2020, au motif qu’elles ne correspondraient pas à son profil ou à ses compétences.



La mission qui a été proposée à M. [B] au mois de septembre 2020 prévoyait un déplacement sur les sites en véhicule, et était compatible avec la préconisation du médecin du travail.



Par la suite, M. [B] n’a pas renseigné plusieurs demandes liées à des recherches d’affectation.



La société Atos Infogérance produit plusieurs échanges de mails avec M. [B] relatifs à des actions de formations qui ont été proposées au salarié mais qu’il a refusées ou n’y a pas répondu ; la nécessité de valider les formations obligatoires lui a également été rappelée.



Si en définitive la formation envisagée en 2022 n’a pas eu lieu, il s’agissait d’un programme de plusieurs dizaines de jours dont la responsable a d’abord cherché à concilier les modules avec les responsabilités représentatives de M. [B].



L’avertissement prononcé à l’encontre de M. [B] pour le refus réitéré d’une mission était justifié.



Les échanges de mails démontrent que de très nombreux entretiens ont été organisés par le responsable de M. [B] au cours des années successives, ainsi qu’avec le responsable des ressources humaines, auxquels M. [B] ne s’est pas toujours présenté.



L’employeur justifie avoir organisé de nombreuses formations concernant M. [B] jusqu’en 2019, qui a pu répondre qu’elles n’étaient pas adaptées à sa situation, alors même que le constat de leur nécessité avait été fait auparavant, concernant un programme informatique ou en anglais. Les messages de refus du supérieur indiquaient que des échanges pour faire le point sur cette question étaient envisageables, sans suite du salarié.



En 2019 l’employeur a demandé à M. [B] de faire un point sur ses formations nécessaires aux certifications, sans réponse effective du salarié.



En définitive, l’employeur démontre que les comportements laissant supposer l’existence d’un harcèlement moral de M. [B], ses convocations, absences de missions ou de formations, étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le harcèlement moral ne sera pas retenu.



Le jugement sera confirmé de ce chef.



En revanche, la société Atos Infogérance ne produit pas d’élément relatif à l’évolution de la fonction ou de la rémunération de M. [B] au regard des autres salariés de l’entreprise, alors qu’elle a connu une évolution très limitée. L’accord d’entreprise prévoyait un dispositif spécifique concernant la rémunération des représentants du personnel, dont il n’est pas démontré qu’il a été mis en oeuvre.



La société Atos Infogérance n’explique pas pour quelle raison l’entretien de début de mandat n’a pas eu lieu rapidement après celui-ci, mais plus d’une année après et pour quel motif il a été demandé à M. [B] de renseigner ses activités de représentant du personnel à chaque entretien.



L’employeur n’explique pas plus pour quelle raison M. [B] a été convoqué pour un entretien de fin de mandat, consécutif à la suppression d’un site de l’entreprise, alors qu’un recours judiciaire avait été formé et qu’il a abouti.



La discrimination de M. [B] en raison de ses activités syndicales doit être retenue.



Le jugement sera infirmé de ce chef.



Sur les conséquences financières



Il n’est pas discuté que la société Atos Infogérance qui employait M. [B] est devenue la société Atos France.



M. [B] doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral. Le jugement sera confirmé de ce chef.



Le préjudice subi par M. [B] au titre de la discrimination sera réparé par la condamnation de la société Atos France à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts.



Le jugement sera infirmé de ce chef.



La demande de dommages et intérêts au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail n’est formée qu’à titre subsidiaire.



L’employeur a respecté son obligation de formation à l’égard de son salarié. M. [B] doit être débouté de sa demande. Le jugement sera confirmé de ce chef.



Contrairement à ce que soutient l’appelant, son employeur a pris des mesures après les alertes concernant ses dénonciations. Il a lui a été régulièrement proposé des entretiens, dont certains ont eu lieu, et ce y compris avec le responsable des ressources humaines.



La demande de dommages et intérêts pour inertie de la société doit être rejetée.



Le jugement sera confirmé de ce chef.



Sur l’action du syndicat Solidaires Informatique



Le syndicat Solidaires Informatique est fondé à agir en application de l’article L. 2132-3 du code du travail.



La discrimination à l’égard de l’activité syndicale d’un salarié porte atteinte aux intérêts de la profession et justifie la condamnation de la société Atos France à lui payer la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts.



Le jugement sera infirmé de ce chef.



Sur les intérêts



Les dommages et intérêts alloués portent intérêts au taux légal à compter de la présente décision.



La capitalisation des intérêts sera ordonnée selon les dispositions de l’article 1343-2 du code civil par année entière







Sur les dépens et frais irrépétibles



M. [B] et la société Atos France succombant toutes deux partiellement en leurs demandes, chaque partie supportera la charge des dépens qu’elle a exposés et sera déboutée de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.




Dispositif

PAR CES MOTIFS,



La cour,



Confirme le jugement du conseil de prud’hommes sauf en ce qu’il a débouté M. [B] de sa demande de dommages et intérêts pour discrimination syndicale et le syndicat Solidaires Informatique de sa demande de dommages et intérêts,



Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,



Condamne la société Atos France à payer à M. [B] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts,



Condamne la société Atos France à payer au syndicat Solidaires Informatique la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts,



Dit que les dommages et intérêts portent intérêts au taux légal à compter de la présente décision, avec capitalisation des intérêts selon les dispositions de l’article 1343-2 du code civil,



Dit que chacune des parties supportera la charge des dépens qu’elle a exposés,



Déboute les parties de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.



LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


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