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La révocation du mandat social doit intervenir dans des conditions loyales, ce qui suppose que les droits de la défense soient respectés et donc que le dirigeant ait été mis préalablement en situation de présenter ses observations et qu’il ait eu, antérieurement à la prise de décision de son éviction, connaissance des motifs servant d’assise à celle-ci.
L’éviction d’un dirigeant en moins de deux heures, lui cause nécessairement un préjudice, ne serait-ce que moral. En outre, indépendamment du motif de la révocation, les circonstances dans lesquelles un mandataire social est révoqué peuvent donner lieu à des dommages et intérêts si elles ont été humiliantes et vexatoires.
En l’occurrence, le dirigeant n’a pas été en mesure de préparer ses observations en réponse, en connaissance des motifs retenus au soutien de la décision de révocation envisagée. Arrivé au sein du groupe en mai 1991, sa collaboration avec celui-ci a ainsi pris fin aux termes d’une procédure qui aura duré moins de deux heures, alors que la société ne démontrait pas la nécessité dans laquelle elle s’est trouvée après deux ans de direction et 27 ans passés dans le groupe et alors que les manquements retenus à son encontre étaient connus d’elle depuis avril 2018, de ne laisser au dirigeant qu’un jour pour quitter définitivement l’entreprise, avec remise immédiate de son téléphone portable et suppression de ses accès informatiques.
Le caractère déloyal de la procédure de la révocation de ses fonctions de directeur général de la société Farmea et les circonstances vexatoires entourant celle-ci sont à l’origine d’un préjudice moral subi par le dirigeant (50 000 euros à titre de dommages intérêts).
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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL D’ANGERS
CHAMBRE A – COMMERCIALE
ARRET DU 24 MAI 2022
AFFAIRE N° RG 21/00568 – N° Portalis DBVP-V-B7F-EZF7
Jugement du 13 Janvier 2021
Tribunal de Commerce d’ANGERS
n° d’inscription au RG de première instance 19/00319
APPELANTE :
S.A.S. FARMEA
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Benoît GEORGE de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, substitué par Me Inès RUBINEL, avocat postulant au barreau d’ANGERS, et Me Dikmen YOZGAT, avocat plaidant au barreau de LYON
INTIME :
Monsieur [W] [O]
né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 7]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représenté par Me Bertrand BRECHETEAU de la SARL AVOCONSEIL, avocat postulant au barreau d’ANGERS – N° du dossier 180414, et Me Gilles BONLARRON, avocat plaidant au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue publiquement à l’audience du 21 Septembre 2021 à 14 H 00, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme CORBEL, Présidente de chambre, et Mme ROBVEILLE, Conseiller, qui a été préalablement entendue en son rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme CORBEL, Présidente de chambre
Mme ROBVEILLE, Conseiller
M. BENMIMOUNE, Conseiller
Greffière lors des débats : Mme TAILLEBOIS
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 24 mai 2022 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine CORBEL, Présidente de chambre, et par Sophie TAILLEBOIS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
La société (SAS) Farmea est un sous-traitant pharmaceutique agréé par les autorités réglementaires européennes et américaines dans la fabrication et le conditionnement de produits à usage oral et local pour la pharmacie éthique et OTC sous formes solide, liquide et pâteuse, faisant partie du groupe Fareva spécialisé dans le secteur pharmaceutique, para-pharmaceutique, cosmétique et hygiène.
Après avoir été Directeur Général de la SASU Farmaclair, autre société détenue par le groupe Fareva, suivant mandat social à effet du premier avril 2008, M. [W] [O] a été nommé directeur général de la SAS Farmea le 22 décembre 2016.
La SAS Farmea a conclu avec M. [W] [O] un contrat de Direction Générale Opérationnelle, le 9 janvier 2017, à effet du même jour.
Selon procès-verbal des décisions de l’associé unique du 5 novembre 2018, la SAS Farmea a pris la décision, à effet immédiat, de révoquer M. [W] [O] pour manquements professionnels graves, sans versement d’indemnités.
Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 14 novembre 2018, M. [W] [O], par l’intermédiaire de son conseil, a mis en demeure la SAS Farmea de l’indemniser, dans les conditions de son contrat de direction générale opérationnelle, pour la révocation de son mandat social, de l’indemniser spécifiquement du préjudice subi du fait de la rupture brutale de ce mandat et de lui verser le montant du bonus promis en 2017 par son supérieur hiérarchique direct.
Par acte d’huissier du 7 janvier 2019, M. [W] [O] a fait assigner la SAS Farmea devant le tribunal de commerce d’Angers, aux fins de :
— voir condamner la SAS Farmea à lui payer la somme de 203.404,46 euros, à titre d’indemnité contractuelle de rupture de son mandat social, avec intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2018, date de la mise en demeure,
— subsidiairement, voir condamner la SAS Farmea à lui payer la somme de 203.404,46 euros à titre d’indemnité délictuelle, avec intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2018, date de la mise en demeure,
en toutes hypothèses,
— dire et juger brutale et vexatoire la rupture du mandat social de M. [O] et condamner en conséquence la SAS Farmea à lui payer la somme de 101.702 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2018,
— condamner la SAS Farmea à lui payer la somme de 17.231 euros à titre de rémunération et de rappel de bonus 2017, avec intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2018,
— condamner la SAS Farmea à lui payer la somme de 10.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens,
— ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir.
Par jugement du 13 janvier 2021, le tribunal de commerce d’Angers a :
— condamné la société Farmea à payer à M. [W] [O] la somme de 203.404,46 euros au titre de l’indemnité contractuelle due à l’occasion de la révocation de son mandat social, outre intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2018, date de la mise en demeure,
— condamné la société Farmea à payer à M. [W] [O] la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice causé par les conditions vexatoires et humiliantes de sa révocation, outre intérêts au taux légal à compter de la date de la présente décision,
— débouté M. [W] [O] de sa demande de complément de bonus au titre de l’année 2017,
— rejeté les autres demandes de M. [W] [O],
— débouté la société Farmea de toutes ses demandes,
— condamné la société Farmea à payer à M. [W] [O] la somme de 5.000 euros, en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
— ordonné l’exécution provisoire du présent jugement,
— condamné la société Farmea aux dépens.
Par déclaration du 3 mars 2021, la SAS Farmea a interjeté appel de ce jugement en ce qu’il l’a condamnée à payer à M. [W] [O] la somme de 203.404,46 euros au titre de l’indemnité contractuelle due à l’occasion de la révocation de son mandat social, outre intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2018, date de la mise en demeure, l’a condamnée à payer à M. [W] [O] la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice causé par les conditions vexatoires et humiliantes de sa révocation, outre intérêts au taux légal à compter de la date de la présente décision, débouté la société Farmea de toutes ses demandes, l’a condamnée à payer à M. [W] [O] la somme de 5.000 euros, en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, a ordonné l’exécution provisoire du présent jugement et l’a condamnée aux dépens ; intimant M. [W] [O].
M. [W] [O] a formé appel incident.
La SAS Farmea et M. [W] [O] ont conclu.
Une ordonnance du 13 septembre 2021 a clôturé l’instruction de l’affaire.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du Code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement déposées au greffe :
— le 6 septembre 2021 pour la SAS Farmea,
— le 8 septembre 2021 pour M. [W] [O],
La SAS Farmea demande à la cour, au vu du jugement du tribunal de commerce d’Angers du 13 janvier 2021, de l’article 1104 du code civil, de la jurisprudence et des pièces versées aux débats, de :
— la déclarer recevable et fondée en son appel et en ses contestations et demandes, et y faisant droit,
— infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce d’Angers en ce qu’il :
* l’a condamnée à payer à M. [W] [O] la somme de 203.404,46 euros au titre de l’indemnité contractuelle due à l’occasion de la révocation de son mandat social, outre intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2018, date de la mise en demeure,
* l’a condamnée à payer à M. [W] [O] la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice causé par les conditions vexatoires et humiliantes de sa révocation, outre intérêts au taux légal à compter de la date de la présente décision,
* l’a déboutée de toutes ses demandes,
* l’a condamnée à payer à M. [W] [O] la somme de 5.000 euros, en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
* l’a condamnée aux dépens ;
et statuant à nouveau,
— juger que la révocation intervenue par procès-verbal du 5 novembre 2018 pour manquements professionnels graves est établie et justifiée,
— juger qu’aucune indemnité n’est due au regard de l’indemnité contractuelle,
— juger qu’aucune responsabilité délictuelle ne peut être retenue en l’absence de faute et de préjudice établis,
— juger qu’aucune brutalité ou aucun caractère vexatoire ne peut être retenu dans la révocation intervenue le 5 novembre 2018,
en conséquence,
— déclarer M. [O] irrecevable et en tout cas non fondé en l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions, l’en débouter,
à titre subsidiaire, en cas de condamnation,
— juger que l’indemnité contractuelle ne saurait être supérieure à la somme de 73.854 euros correspondant à 6 mois de rémunération brute,
— juger que le montant des dommages et intérêts dus au titre du préjudice résultant des conditions de révocation ne saurait être supérieur à 5.000 euros et à tout le moins, minorer le montant de la condamnation,
au titre de l’appel incident, en cas de condamnation,
— juger que la rémunération de M. [W] [O] est de 12.309 euros par mois,
— débouter M. [O] de sa demande au titre de l’indemnité contractuelle telle que sollicitée dans son quantum,
— débouter M. [O] de sa demande de complément de bonus au titre de l’année 2017 ainsi que de ses autres demandes,
en tout état de cause,
— confirmer le jugement en ce qu’il déboute M. [W] [O] de sa demande de complément de bonus au titre de l’année 2017 ainsi que de ses autres demandes,
y ajoutant,
— condamner M. [W] [O] à lui payer la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.
M. [W] [O] demande à la cour de :
— confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a condamné Farmea à lui payer une indemnité contractuelle à l’occasion de la révocation de son mandat social, outre intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2018, date de mise en demeure,
— le déclarer recevable en son appel incident du chef du montant de cette indemnité contractuelle ; l’y déclarer fondé,
— condamner Farmea à lui payer la somme de 243.404,46 euros à titre d’indemnité contractuelle de rupture de mandat social avec intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2018, date de mise en demeure,
— confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a condamné Farmea à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice causé par les conditions vexatoires et humiliantes de sa révocation outre intérêts au taux légal à compter du jugement rendu,
— le déclarer recevable en son appel incident du chef de la demande de rémunération variable et de bonus 2017,
— infirmer le jugement dont appel du chef de la demande de rémunération et de rappel de bonus 2017, avec intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2018, date de mise en demeure,
statuant à nouveau de ce chef,
— condamner Farmea à lui payer de la somme de 28.718 euros à titre de rémunération et de rappel de bonus 2017, avec intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2018, date de mise en demeure,
— condamner en toutes hypothèses Farmea à lui payer la somme de 10.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
— condamner enfin Farmea aux entiers dépens.
MOTIFS DE LA DECISION
— Sur la demande d’indemnité contractuelle formée par de M. [W] [O] pour révocation de son mandat social
* Sur l’existence de manquements professionnels graves
La société Farmea prétend que la révocation du mandat social de M. [W] [O] de Directeur Général de la société Farmea est intervenue le 5 novembre 2018 à raison de manquements professionnels graves justifiant l’absence de versement de l’indemnité conventionnellement prévue en cas de rupture du mandat social hors le cas de manquement professionnel grave.
Elle soutient qu’il résulte des pièces versées aux débats que le comportement de M. [O] à l’égard de clients importants du groupe portait atteinte à l’intérêt social de la société Farmea, dés lors qu’être en mauvais termes avec ses partenaires les plus importants ne saurait être un mode de direction d’entreprise pérenne.
Elle fait valoir que son comportement à l’égard des clients lui a été reproché à plusieurs reprises depuis avril 2018, de manière précise, dans le cadre de lettres valant mises en demeure, de rencontres et de courriels, sans que la situation s’améliore et en déduit qu’elle était fondée le 5 novembre 2018 à se prévaloir de ce comportement préjudiciable à l’intérêt social comme un motif de révocation pour manquement professionnel grave.
Elle prétend également qu’il ressort des pièces versées aux débats, que le comportement de M. [O] au sein de la société Farmea était préjudiciable à l’intérêt de la société, en soutenant qu’il a adopté une position en contradiction avec les impératifs qualitatifs et les demandes des clients.
Elle lui reproche encore un comportement inadéquat avec ses subordonnés, portant atteinte à l’intérêt social, dés lors que cela a généré des situations de stress, de conflit et d’épuisement dans les équipes qualité, en soutenant qu’il a fait preuve d’une attitude autoritaire et méprisante, voire agressive, avec ces équipes.
M. [O] conclut à l’absence de manquement professionnel grave établi à son encontre de nature à le priver du bénéfice de l’indemnisation prévue par le contrat signé le 9 janvier 2017 avec la société Farmea en cas de rupture de son mandat social.
Il souligne qu’il n’a connu les motifs précis et les justificatifs des griefs qui ont fondé la rupture de son mandat social à effet au 5 novembre 2018 qu’en juin 2019, avec les conclusions déposées par la société Farmea devant le tribunal de commerce.
Il explique que lorsqu’il a été nommé en qualité de Directeur Général de la société Farmea début 2017, le site connaissait de graves difficultés de production à la suite d’un problème de qualité ayant nécessité une interruption totale de la production pour un important client, ce qui a plongé la société dans une situation de crise avec démotivation de l’équipe de direction qui a enregistré plusieurs départs et ce qui a suscité des vives tensions avec les autres principaux clients qui ont exprimé leur mécontentement de subir des retards importants de livraisons entraînant une rupture d’approvisionnement de leurs clients.
Il fait valoir qu’il résulte de l’évaluation faite par son supérieur hiérarchique en février 2018 qu’il a répondu positivement aux termes de sa mission, en prenant les mesures de réorganisation nécessaires et en mettant en oeuvre les changements qui s’imposaient, soulignant que la qualité de ses prestations a été reconnue et que les améliorations commençaient à voir le jour.
Il réfute tout comportement agressif ou irrespectueux à l’égard des clients de la société Farmea, en faisant observer que des mails émanant de sa hiérarchie n’ont pas de caractère probant, sauf à admettre que la société Farmea puisse se constituer des preuves à elle-même et en soulignant que les mails produits émanant de tiers ne contiennent aucun fait dont leurs auteurs auraient été les témoins directs.
Il souligne qu’il verse aux débats plusieurs mails émanant des interlocuteurs habituels de la société Farmea chez ses principaux clients, qui ont tenu à lui écrire en apprenant la nouvelle de son départ de la société, ainsi qu’une lettre de recommandation du Vice Président du groupe Fareva en charge des aspects commerciaux, recherche, développement et marketing, dont les termes sont en contradiction avec le prétendu comportement contraire à l’intérêt social qui lui est reproché.
Il conteste également les prétendus manquements graves qui lui sont reprochés concernant la gestion de la qualité ainsi que les relations avec le service qualité et les salariés sous son autorité.
Il relève que ces griefs reposent sur la seule attestation de la Directrice Qualité Corporate Pharma et API en poste depuis fin 2017, proche collaboratrice du groupe et qui s’était vue confier la supervision du service qualité de la société Farmea.
Il fait valoir que la prétendue agressivité dont elle fait état dans son attestation n’est ni circonstanciée ni étayée par des faits précis, tandis qu’il verse aux débats de multiples mails de collaborateurs, notamment du site qualité, qui ont tenu à lui marquer leur considération après avoir appris son départ.
Il explique que les questions de qualité relevaient essentiellement de la responsabilité du directeur qualité du site de Farmea, sous l’autorité directe de la directrice qualité corporate et qu’il ne saurait lui être reproché les échecs du service qualité, précisant que celui-ci avait connu plusieurs changement à sa tête durant son mandat social, ce qui n’avait pas favorisé le redressement de la situation, notamment en terme de confiance des clients.
Il souligne également que les attestations émanant de deux salariés ayant travaillé avec lui postérieurement à sa révocation, au sein de sa nouvelle société sont sans relation avec les griefs invoqués pour révoquer son mandat social dans la société Farmea.
Sur ce :
Le 9 janvier 2017, M. [W] [O] a conclu, avec la SASU Farmea représentée par M. [L] [X], un contrat de Direction Générale Opérationnelle de la société Farmea à effet au 9 janvier 2017 aux termes duquel il s’est vu confier à compter de cette date une mission de direction générale de la société Farmea, exercée dans le cadre d’un mandat social de direction générale, définie précisément à l’article 1.
La mission prévoit notamment au titre de ses obligations qu’il devra ‘se comporter comme un gestionnaire soucieux de l’intérêt de la société Farmea, mais aussi en prenant en compte l’intérêt des autres sociétés du groupe Fareva ; mettre en oeuvre la politique générale définie par le groupe pour la société ; entretenir et développer personnellement des relations avec la clientèle actuelle et potentielle ; rechercher en permanence l’optimisation de l’organisation et des coûts tout en sachant proposer des décisions d’investissements nécessaires, selon les procédures groupe ; participer à la coordination et à la recherche des synergies entre les filières industrielles du groupe et la société’.
La révocation du directeur général d’une société par actions simplifiée obéit à la règle du principe de libre révocation.
Le directeur général peut ainsi être révoqué à tout moment, sans motif et sans droit à indemnité.
Toutefois, les statuts peuvent prévoir les modalités de révocation du directeur général, ou des hypothèses de révocation automatique, ou que la révocation ne pourra intervenir que pour un juste motif, ou encore le versement ou non d’indemnités.
En l’espèce, les statuts de la SAS Farmea prévoient en leur article 14.1 que ‘le directeur général peut être révoqué à tout moment par décision des associés, quelle que soit la durée pour laquelle il a été nommé, sans que ceux-ci aient à justifier d’un motif quelconque et sans que celui-ci puisse prétendre à une quelconque indemnité.’
Néanmoins, au cas particulier de M. [O], le contrat de Direction Générale Opérationnelle de la société Farmea conclu avec la société Farmea le 9 janvier 2017 prévoit en son article 5 que ‘la société pourra mettre fin au mandat de direction générale de M. [O] [W] à tout moment, conformément aux dispositions du droit des sociétés. Si la rupture du mandat social intervient de la volonté de M. [O] [W], celui-ci devra informer le président de sa décision avec un préavis de 3 mois. Hormis le cas de manquement professionnel grave de M. [O] [W], la société versera à M. [O] [W], si la cessation du mandat intervient hors de la volonté de ce dernier, une indemnité compensatrice calculée comme suit’.
La validité de cette clause dérogeant aux statuts pour aménager conventionnellement entre M. [O] et la société Farmea les modalités de rupture du mandat social en prévoyant le versement d’une indemnité, sauf en cas de manquement professionnel grave de l’intéressé, et son application à la révocation de M. [O] intervenue le 5 novembre 2018, ne sont pas remises en cause par les parties.
Il revient à la société Farmea qui est à l’origine de la décision le 5 novembre 2018 de mettre fin au mandat social de M. [O] sans indemnité compensatrice, de rapporter la preuve du motif de cette révocation tenant au cas de manquement professionnel grave de M. [O].
Il convient de relever que ni le procès-verbal des décisions de l’associé unique du 30 octobre 2018 contenant décision de mandater spécialement le Directeur Général et Vice Président de la société Fareva, afin d’informer M. [O] des raisons pour lesquelles il est envisagé de mettre fin à son mandat social de Directeur Général pour manquement professionnel grave, ni celui du 5 novembre 2018 contenant décision de révocation de M. [O] de son mandat social de Directeur Général, avec effet immédiat et sans indemnisation, ni la lettre du 22 novembre 2018 du conseil de la société Farmea en réponse aux demandes indemnitaires de M. [O] formulées par lettre de son conseil, ne contiennent l’exposé des manquements professionnels graves reprochés à celui-ci qui justifient selon la société Farmea la décision prise le 5 novembre 2018 par son associé unique.
Les manquements professionnels graves reprochés à M. [O] ont ainsi été détaillés pour la première fois par écrit, dans les conclusions déposées par la société Farmea devant le tribunal de commerce en 2019.
Ils sont repris dans les conclusions de l’appelante.
La société Farmea reproche en premier lieu à M. [O] son comportement à l’égard des clients portant selon elle atteinte à l’intérêt social de la société.
Au soutien de ses dires, elle verse aux débats la lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 24 avril 2018 adressée par le Directeur Général et Vice Président de la société Fareva à M. [O] aux termes de laquelle il évoque une ‘vague de mécontentement des clients majeurs’ à laquelle il se trouve confronté depuis sa prise de fonctions au sein du groupe en 2018, fait part de ses observations à l’issue de sa venue sur le site le 4 avril 2018 et fait état du bilan de deux réunions qui se sont tenues chez deux clients importants en mars et avril 2018.
Il indique ainsi qu’il ressort de sa visite sur site un manque flagrant de motivation et d’implication des équipes de la société Farmea, relevant l’absence de signes correspondant à une animation de crise et d’engagements tournés vers la satisfaction du client, alors qu’il ressort de deux réunions avec deux des principaux clients, que ceux-ci se plaignent en termes similaires d’un problème récurrent depuis plus d’un an de performance sur la ‘supply chain’ avec un nombre inquiétant de ‘déviations’ à la production révélant une situation préoccupante de la qualité.
Reprochant à M. [O] de refuser tout nouveau projet et le défaut de motivation de son équipe, il le met en demeure de ‘réaliser sa mission de Direction Générale’ en prenant des engagements forts et efficaces en vue d’un retour progressif à la normale concernant le service de la chaîne logistique dans les six mois et un changement notable du service au premier client de la société qui devra être rétabli d’ici juin 2018.
Répondant aux observations contenues dans cette lettre de mise en demeure, de manière détaillée et argumentée, dans une lettre du 8 mai 2018 versée aux débats, M. [O] explique que la situation décrite par les clients existait déjà avant son arrivée, tel que cela ressort du compte rendu de son évaluation annuelle pour 2017 et d’une note du principal client du 11 octobre 2016 fondée sur une analyse des douze derniers mois, en précisant que la dégradation au fil des années du niveau de la culture de la qualité et de la logistique au sein de la société a conduit à une crise provoquée par un problème de contamination à l’origine fin 2016 d’un arrêt de la production pour un client qui a eu des répercussions à long terme, tant sur les relations avec celui-ci, qu’avec les autres clients, dés lors que la concentration des ressources pour résoudre ce problème a eu pour effet de retarder les livraisons à l’ensemble des clients.
Il expose les mesures prises depuis son arrivée concernant le client victime de l’arrêt de la production avec l’établissement d’un planning ainsi que l’organisation interne avec la mise en place d’une nouvelle équipe suite au départ de plusieurs personnes à des postes clés et souligne l’amélioration de la situation financière de la société en 2017.
Contestant la position de refus des nouveaux projets qui lui est imputée, il affirme n’avoir, malgré l’évidente saturation du site du fait du rattrapage nécessaire de la production, pas abandonné la recherche de nouveaux projets, en illustrant ses propos par des exemples et ajoute avoir pour objectif premier avec sa nouvelle équipe, un retour à un taux de service acceptable pour les clients, en faisant valoir que des améliorations sont déjà perceptibles du fait des actions lancées en ce sens, mais que la situation qui exige des changements profonds, demande du temps.
Les éléments rapportés par M. [O] concernant la situation de crise de la société à son arrivée sur le plan de ses relations avec les clients, sur le plan de la qualité des produits et services et sur le plan économique, ainsi que les actions entreprises pour tenter d’y remédier se trouvent corroborés par l’analyse jointe à son évaluation de février 2018 rédigée par son supérieur hiérarchique sur la période considérée (2017), qui reprend un par un les postes d’évaluation en précisant l’état des difficultés et les actions entreprises, pour conclure qu’en dépit des mauvais résultats économiques et de la non atteinte des objectifs, il considérait que M. [O] avait réalisé une bonne année et que ses efforts et le résultat de ses actions devraient se concrétiser en 2018.
La société Farmea produit la réponse à M. [O] du Directeur Général et Vice Président de la société Fareva du 30 mai 2018, dans laquelle celui-ci réitère ses attentes pour rétablir la situation dans les délais évoqués et retrouver la confiance de tous les clients.
Il convient de relever que dans aucune des deux lettres du Directeur Général et Vice Président de la société Fareva, il n’est rapporté des faits relatifs à un comportement irrespectueux, voire agressif de M. [O] à l’égard des clients.
Et les éléments qu’elles contiennent auxquels M. [O] a apporté des explications non démenties, qui relèvent tout au plus d’insuffisances professionnelles, ne caractérisent pas le manquement professionnel grave de M. [O] reproché à celui-ci.
La société Farmea prétend établir que la situation de tension avec les clients ne s’est nullement améliorée dans les mois qui ont suivi et s’est même dégradée à raison du comportement de M. [O] à leur égard, au point que ses principaux clients auraient envisagé de cesser leur collaboration avec elle en octobre 2018.
Au soutien de ses dires, elle verse aux débats un mail du 4 octobre 2018 du responsable des ventes Europe du groupe Fareva, reçu notamment par M. [O], par son supérieur hiérarchique et par la directrice corporate, rapportant le déroulement d’une réunion avec le principal client de la société, dans lequel il indique que le principal point d’inquiétude reste Farmea et que malgré les arguments pour défendre l’usine qui lui avaient été transmis et dont il a fait état, cela n’a pas suffit à rassurer le client qui après deux années de promesses serait, selon ce que rapporte l’auteur du mail, ‘arrivé au point de rupture’ après avoir relevé toujours un nombre élevé de déviations pour les mêmes types d’erreurs, l’auteur ajoutant que le plan d’action proposé par M. [O] fin 2017 n’a pas été respecté.
S’il en ressort que le principal client de la société Farmea a exprimé en réunion son mécontentement à l’égard de son fournisseur auquel il reproche de n’avoir pas entrepris tout ce qui était nécessaire pour résoudre des difficultés qui se posent de manière récurrente depuis au moins un an, l’auteur du mail ne rapporte pas des comportements imputés spécialement à M. [O] qui iraient à l’encontre des intérêts de la cliente.
Le non respect du plan d’action dont il est fait état n’est pas non plus explicité.
La société Farmea produit également un document intitulé ‘attestation sur l’honneur’, rédigée par la même personne, daté du premier octobre 2019, aux termes de laquelle elle déclare que la gestion de la société Farmea par M. [O] a conduit à des relations calamiteuses avec tous les clients de la société et en particulier avec le plus important, affirmant que fin 2018 les quatre principaux clients de l’usine étaient sur le point de transférer leurs produits en dehors de l’usine Farmea.
Ces affirmations concernant les velléités de quatre principaux clients de Farmea, dont les noms ne sont pas cités, de cesser toute collaboration avec cette société, contestées par M. [O], ne sont corroborées par aucun élément.
L’auteur affirme que durant toute la durée du mandat social de M. [O] le service commercial a dû gérer de nombreuses situations de crise de communication avec tous les clients, obligeant à la tenue fréquentes de réunions pour tenter de limiter leurs velléités de cesser toute collaboration avec la société Farmea.
Il explique également avoir alerté le responsable des ventes du groupe à son arrivée en novembre 2017 sur la gestion problématique de M. [O], notamment en matière de communication et de résolution des situations conflictuelles.
Il sera néanmoins relevé que ce responsable n’a pas dû accorder du crédit à cette opinion critique exprimée sur M. [O], puisqu’il est lui même l’auteur d’une lettre de recommandation pour soutenir la candidature éventuelle de M. [O] à un poste de Directeur Général de site, dans laquelle il explique qu’en sa qualité de vice président du groupe Fareva en charge des aspects commerciaux, recherche, développement et marketing, il a travaillé en 2018 avec celui-ci et loue ‘son sens du service client avec le souci du respect des engagements pris’, précisant qu”à travers ses équipes commerciales et la maîtrise du management de son site, il avait mis en place des solutions à long terme pour répondre aux besoins du client tout en gardant une sensibilité forte sur le respect de la qualité et le contrôle des coûts’.
Concernant spécialement le principal client, l’auteur de l’attestation produite par l’appelante explique que la personne nommée chez ce client en 2016 pour trouver des solutions afin de rétablir avec Farmea un bon niveau de livraison, s’est montrée très critique sur la gestion de Farmea par M. [O] et en a référé à sa direction qui a sollicité l’organisation d’une réunion.
Il convient de relever que la nomination par le client d’une personne chargée spécialement de suivre l’approvisionnement par le fournisseur Formea est intervenue un an avant l’arrivée de M. [O], confirmant l’antériorité des difficultés avec ce client.
En outre, si une réunion s’est bien tenue le 26 juin 2018 avec ce client représenté par trois personnes, dont la personne nommée comme référent Farmea, en présence de M. [O] et de deux autres personnes du groupe Fareva, il ressort d’un compte rendu de cette réunion (en anglais dans le texte sans traduction), l’impression générale d’aller dans la bonne direction, une amélioration et une meilleure communication entre la société Farmea et le client, avec la reconnaissance des difficultés à tenir des plans au regard de facteurs tels que l’état des stocks et la fluctuation de la demande, des tentatives d’explications aux problèmes d’approvisionnement et l’exposé de solutions passant par la nécessité d’être flexible dans la production, ainsi que l’annonce d’une nouvelle organisation de la cliente prévoyant des responsables chargés notamment de faire l’état des besoins sur leur secteur.
Cette impression générale est confirmée par un mail du supérieur hiérarchique de M. [O] du 3 juillet 2018, dans lequel il indique que la réunion avec le client s’est plutôt bien déroulée, les résultats étant plutôt mieux orientés qu’au mois d’avril 2018, félicitant les deux destinataires, dont M. [O] ainsi que leur équipe ([Localité 5] et [Localité 4]) et précisant pour le site d'[Localité 5] que les résultats étaient en progrès, que l’attention était à porter sur le service de trois produits ainsi que sur l’amélioration de l’écoute client et signalant des retards sur les réalisations des capacités des lignes à rattraper et dans la finalisation des rapports de déviation.
Par ailleurs, M. [O] produit un mail qui a été adressé le 15 novembre 2018 après l’annonce de son départ, par le référent du client principal de Farmea (en anglais dans le texte non traduit), aux termes duquel celui-ci indique que la collaboration était bonne et qu’il pense que dans d’autres circonstances, ils auraient fait du meilleur travail , indiquant avoir eu chacun les mains liées par leur société mère et avoir essayé de parvenir à une bonne situation à partir des moyens dont ils disposaient, concluant que ‘les affaires sont les affaires’ et que cela n’avait jamais été quelque chose de personnel, ce qui atteste de ce qu’il n’a pas considéré que la gestion de la société Farmea par M. [O] avait conduit à des relations calamiteuses avec la société qu’il représente et que le comportement de celui-ci était à l’origine des tensions entre leurs deux sociétés.
L’auteur de l’attestation versée par l’appelante ajoute que la non performance industrielle et qualité de la société Farmea a induit des pertes de marchés importantes pour ce client qui l’ont conduit à arrêter la production de certains produits en 2018, ce qui continue d’avoir des répercussions négatives en 2019 et 2020 en termes de chiffre d’affaire et que l’incapacité de M. [O] à redresser la situation a empêché la société Farmea d’imposer à son client des augmentations tarifaires pour compenser l’inflation, ce qui a engendré des pertes en 2017 et 2018 estimées à plus de 400 000 euros.
Ses affirmations ne sont toutefois pas corroborées par des pièces versés aux débats, en particulier par des éléments sur les comptes de la société, tandis que les précisions de M. [O] sur l’arrêt d’un produit de ce client dû à la position de l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament, ne sont pas contredites par la société Farmea.
La société Farmea appuie également ses griefs à l’encontre de M. [O] concernant un comportement inadmissible à l’égard de son client le plus important, sur un mail du 29 octobre 2018 d’une personne travaillant pour ce client, mais dont les fonctions au sein de celle-ci ne sont pas indiquées, adressé au président du groupe Fareva en réponse à une demande de celui-ci formulée par mail du 16 octobre 2018 de lui faire parvenir des exemples précis du ‘comportement inexcusable’ de M. [O] qu’elle avait pu évoquer avec lui à l’issue d’une réunion qui s’est tenue le 10 octobre 2018, précisant qu’il la priait d’accepter ses excuses pour son attitude et qu’il allait mener des investigations auprès d’autres partenaires qui auraient pu également avoir à déplorer ce comportement.
Il convient de relever qu’il n’est pas permis de savoir à la seule lecture du mail du président du groupe Fareva quel type de comportement de M. [O] lui aurait été rapporté le 10 octobre 2018 et si la personne qui lui en aurait fait part aurait été le témoin direct de ce comportement.
Dans sa réponse, la représentante du client de la société Farmea précise faire parvenir au président du groupe Farvea, à titre confidentiel, pour son information, des commentaires rédigés correspondant à des exemples reçus de collègues ; ce dont il résulte que l’auteur du mail n’a pas personnellement constaté les faits qu’elle mentionne dans sa réponse.
Elle rapporte ainsi (en anglais dans le texte sans traduction) que M. [O] perd parfois son sang froid pendant les réunions d’affaires ou les rencontres hors site, surtout lorsqu’il n’apprécie pas les faits qui lui sont présentés ; qu’il a dit lors d’une réunion d’examen de l’activité de la société Farmea qu’il n’avait pas besoin d’eux pour résoudre les problèmes; qu’à aucun moment depuis qu’il est devenu le dirigeant du site, il a présenté des excuses ou a été conciliant pour des appels qui lui étaient faits concernant les défis tenant aux difficultés d’approvisionnement à long terme et les mauvais rendements ; qu’il changeait de position et acceptait d’agir en appliquant des solutions seulement après que la société ait identifié le problème et fourni un soutien technique ; qu’il minimisait l’importance de l’approvisionnement de leurs produits.
Ces ‘commentaires’ ne sont accompagnés d’aucune précision sur la date des faits rapportés, leur fréquence, le contexte, le nombre et les fonctions des personnes ayant pu effectuer ces déclarations à l’auteur du mail.
Ils sont en outre en contradiction avec le mail de celui qui a été durant tout le mandat de M. [O] son interlocuteur habituel pour ce client, qui a affirmé être d’accord pour dire que la collaboration entre eux était bonne et qu’ils avaient agi avec les moyens qui étaient les leurs.
La société Farmea produit encore une attestation émanant de la directrice qualité au sein de Fareva, dans laquelle elle affirme que M. [O] avait un comportement irrespectueux vis à vis de ses interlocuteurs lors de réunions clients, sans autre précision et cite trois exemples d’un comportement selon elle problématique avec trois clients différents l’un tenant à sa proposition de supprimer des contrôles sur les lignes de production en contradiction avec la demande du client concerné, le deuxième au défaut de collaboration avec un client important dont il a refusé de prendre en compte les demandes et remarques et le troisième à un incident lors d’un dîner avec un représentant du principal client de la société dont il a rejeté les remarques et conseils consécutifs aux résultats d’un inventaire réalisé dans le magasin Farmea.
M. [O] produit néanmoins, s’agissant du premier client visé par cette attestation, qui est celui qui a été victime de l’arrêt total de la production des médicaments qu’il avait confiée à la société Farmea, un mail du 22 novembre 2018 de son directeur des opérations industrielles, répondant à l’annonce du départ de M. [O], en le remerciant pour son professionnalisme et son implication pendant leurs années de collaboration, ainsi d’une lettre de recommandation du même, du 18 décembre 2018, aux termes de laquelle il précise avoir travaillé en étroite collaboration avec M. [O] et indique notamment que sa compréhension rapide des problématiques, sa disponibilité et son approche client ont permis de mettre en place les actions nécessaires pour gérer et redresser la situation, concluant qu’il avait pu apprécier la transformation faite sur le site en deux ans et qu’il le recommande pour tout poste de direction de sites pharmaceutiques ou cosmétiques.
S’agissant du deuxième client, M. [O] produit également un mail de l’interlocuteur de la société Farmea dans la société concernée (en anglais dans le texte sans traduction) dans lequel celui-ci indique que l’année a été difficile, mais qu’il est satisfait qu’ils aient pu réussir à se mettre sur une bonne voie, ajoutant que leur collaboration et orientation commune ont été essentielles aux améliorations réalisées jusqu’à présent ainsi qu’à la fondation d’une bonne base.
S’agissant du troisième client, il a déjà été observé que l’interlocuteur de la société Farmea désigné par celui-ci a affirmé dans un mail que la collaboration entre eux était bonne.
Par ailleurs, M. [O] a produit plusieurs autres mails reçus à l’annonce de son départ de la société Farmea, émanant d’autres clients qui attestent d’une bonne collaboration, qualifiée d’active, de courtoise, professionnelle et constructive, y compris par des personnes faisant état de différents commerciaux ou de ‘débuts compliqués’.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, il convient de considérer que le manquement professionnel grave tenant au comportement de M. [O] envers les principaux clients de la société Farmea, contraire à l’intérêt social de celle-ci, n’est pas caractérisé.
L’appelante reproche également à M. [W] [O] un comportement inadéquat avec ses subordonnés, en soutenant qu’il a fait preuve d’une attitude autoritaire et méprisante, voire agressive, avec ses équipes et d’avoir adopté une position en contradiction avec les impératifs qualitatifs et les demandes des clients, contraire à l’intérêt de la société.
Concernant le grief tenant à un management de ses équipes qui serait contraire à l’intérêt social comme générant un climat permanent de tension et de stress, il repose sur la mention dans la lettre du supérieur hiérarchique de M. [O] du 19 avril 2018, de ce qu’il s’est trouvé confronté, à son arrivée en poste, au mécontentement des équipes internes de Fareva, ainsi que sur l’attestation du 11 février 2019 de la directrice qualité corporate qui indique que ‘d’une manière globale, afin d’éviter toute contradiction lors des réunions quotidiennes ou de travail pour des recherches de causes suite à des déviations, M. [O] avait un comportement agressif avec les équipes qualité, ne les laissant pas s’exprimer, ce qui a généré des situations de stress, de conflit et d’épuisement des équipes’.
La lettre du supérieur hiérarchique de M. [O], outre qu’elle date de six mois avant sa révocation, ne contient aucune précision sur les sujets de mécontentement des équipes internes de Fareva, ni d’ailleurs sur les équipes concernées au sein du groupe qui seraient les auteurs de ces remontées d’un mécontentement.
S’agissant de l’attestation du 11 février 2019, si la directrice qualité corporate précise avoir constaté lors de ses visites du site le stress des équipes qualité, elle ne précise pas avoir assisté personnellement à la tenue de réunions au cours desquelles M. [O] se serait montré agressif.
Elle explique s’être vue confier en septembre 2017 par le supérieur hiérarchique de M. [O] auquel avait fait appel un des clients pour que des mesures soient prises afin d’améliorer le niveau qualité de la production Farmea, une mission de soutien à l’équipe qualité de Farmea qui s’est traduite par une présence renforcée sur le site de la direction qualité corporate et affirme avoir rencontré des difficultés à mettre en place des actions pour atteindre le niveau de qualité requis, du fait du manque de collaboration de M. [O] dont les consignes au service production contredisait cet objectif, indiquant qu’il avait montré à plusieurs reprises son manque d’intérêt pour la qualité et inquiété les responsables sur les mesures mises en place dans l’usine.
Cependant, c’est à juste titre que le tribunal a relevé que la perception par la directrice qualité au sein de la maison mère, des relations de M. [O] avec les équipes qualité de la société Farmea et son absence d’intérêt pour la qualité des produits fabriqués sur le site, n’est pas celle qu’ont exprimée plusieurs responsables de services clés de la société Farmea, y compris du service contrôle qualité, au travers des messages qu’elles lui ont adressés à l’annonce de son départ et qui, contrairement aux dires de l’appelante, ne sont pas de simples réponses de politesse, mais contiennent des appréciations personnelles précises et circonstanciées sur la qualité de leurs relations de travail, les intéressés n’hésitant pas souvent à revenir sur le contexte difficile et à évoquer les problèmes auxquels ils se sont trouvées confrontés, pour témoigner favorablement sur les effets de l’action de M. [O] dont ils sont plusieurs à indiquer qu’elle a permis de remettre la société sur la bonne voie en améliorant sensiblement la situation, ainsi que sur leur évolution personnelle.
L’un d’entre eux est revenu précisément sur le rôle de directeur général de M. [O], saluant sa performance à ce poste, en soulignant la très forte progression du nombre d’unités produites, en dépit du fait qu’il n’ait pu atteindre les résultats financiers attendus, attribuant les progrès observés à ses qualités de franchise dans les relations, qualifiée néanmoins d’un peu abrupte, d’exigence, de très forte disponibilité, en particulier en l’absence de directeur ‘ supply chain’, mises au service de sa volonté de faire progresser les personnes individuellement et collectivement en les faisant travailler en équipe dans l’intérêt de la société.
Il convient en outre de rappeler qu’un responsable au sein du client de la société Farmea directement affecté par un problème de qualité de la production qui a entraîné l’arrêt total de cette production, a rédigé une lettre de recommandation de M. [O] à un poste de direction de sites pharmaceutiques ou cosmétiques en soulignant son sens du service client et la maîtrise du management de son site qui lui a permis de mettre en place des solutions à long terme pour répondre aux besoins du client tout en gardant une sensibilité sur le respect de la qualité.
Ainsi, en définitive, au vu des pièces versées aux débats, l’existence de manquements professionnels graves retenue par l’associé unique pour décider le 5 novembre 2018 de la révocation immédiate du mandat de directeur général de la société Farmea de M. [O], sans indemnité contractuelle, n’est pas caractérisée.
C’est donc à juste titre que le tribunal de commerce d’Angers a retenu que l’indemnité conventionnelle de rupture du mandat social de M. [O] prévue à l’article 5 de son contrat, lui est due par la société Farmea.
* sur le montant de l’indemnisation conventionnelle de la rupture du mandat de directeur général de M. [O]
M. [O] soutient qu’il est fondé, en application de l’article 5 du contrat de Direction Générale Opérationnelle du 9 janvier 2017, à solliciter l’allocation d’une indemnité d’un montant de 243 404,46 euros et non de 203 404,46 euros mentionnée par erreur en première instance, correspondant à 18 mois de sa rémunération brute mensuelle moyenne sur les douze derniers mois, soit 13 533,47 euros x 18.
La société Farmea soutient d’une part que la rémunération brute mensuelle de M. [O] sur les douze derniers mois était de 12 309 euros, d’autre part que M. [O] ne peut réclamer, au regard de son ancienneté dans ses fonctions, une indemnité supérieure à six mois, soit 73 854 euros.
Elle ajoute que M. [O] ne peut invoquer sa propre erreur pour voir réformer le jugement critiqué quant au quantum de l’indemnité.
Sur ce :
L’article 5 du contrat conclu entre la société Farmea et M. [O] prévoit les modalités de calcul de l’indemnité compensatrice en fonction de l’ancienneté de l’intéressé au moment de la rupture du mandat et sur la base de la moyenne brute des douze derniers mois de rémunération.
Il précise également que ‘pour le calcul de l’indemnité due à M. [O], l’ancienneté sera reprise à la date du premier mai 1991, ce qui correspond, conformément à l’article 5§3 à une indemnité de 18 mois’.
Compte tenu des bulletins de salaire versés aux débats, le salaire mensuel moyen de M. [O] sur les douze derniers mois s’établit à 13 522,47 euros.
Dans ces conditions, l’indemnité s’établit à 13 522,47 euros x 18 = 243 404,46 euros.
Le jugement critiqué sera dés lors infirmé, mais seulement en ce qu’il a condamné la société Farmea à payer à M. [W] [O] la somme de 203 404,46 euros et statuant à nouveau, la société Farmea sera condamnée à payer à M. [W] [O] la somme de 243 404,46 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2018, date de la mise en demeure ; étant précisé que la prétention n’est pas nouvelle dés lors qu’elle ne diffère de celle formulée initialement devant les premiers juges que par son montant.
— Sur la demande indemnitaire au titre de la rupture abusive du mandat social de M. [O] résultant de la déloyauté de la procédure et de ses circonstances vexatoires
M. [O] fait observer que si la révocation demeure en principe libre et peut intervenir à tout moment, le dirigeant concerné doit être informé des motifs de la rupture de son mandat social envisagée et doit pouvoir être entendu en ses explications avant que l’organe décisionnaire la prononce.
Il soutient qu’en l’espèce, la procédure qui a conduit à la révocation de son mandat a été menée sans respecter le principe de loyauté, en faisant valoir qu’il a seulement été averti fin octobre 2018, de la tenue d’une réunion opérationnelle le 5 novembre, dans les locaux du groupe Fareva à [Localité 6], qui devait porter sur un projet relatif à un nouveau produit[e] et que c’est seulement à son arrivée qu’il a été informé par le vice président et directeur général de Farmea et par le vice président Europe 2 de Fareva, de ce que la révocation de son mandat social allait être proposée immédiatement à l’assemblée générale des associés de la société Farmea.
Il affirme que sans avoir recueilli ses observations, le vice président et directeur général de Farmea s’est absenté avant de revenir pour lui notifier verbalement sa révocation à effet immédiat décidée aux termes d’un procès-verbal de décision de l’associé unique qui s’est tenue à 18 heures, lequel ne lui sera adressé que le 15 novembre 2018.
Il souligne qu’il s’est ainsi vu annoncer verbalement sa révocation pour manquement professionnel grave, au bout de près de 30 années de collaboration avec le groupe Fareva et expose qu’il s’est vu intimer de remettre sur le champ les biens mis à sa disposition par la société, soit son ordinateur portable et son téléphone mobile.
Il ajoute qu’alors même qu’il n’avait pas encore reçu officiellement la notification de sa révocation par l’envoi du procès verbal des décisions de l’associé unique, il s’est vu confirmer celle-ci par plusieurs collaborateurs dont l’information leur avait été donnée en réunion.
Il rappelle qu’il n’a connu les manquements professionnels graves retenus pour motiver la décision de révocation que dans les conclusions déposées par la société Farmea en première instance.
Il s’estime fondé au regard des circonstances vexatoires de la révocation et du non respect de la loyauté de la procédure, à solliciter la condamnation de la société Farmea à lui payer la somme de 50 000 euros à titre de dommages intérêts.
La société Farmea s’oppose à la demande, en soutenant que M. [O] a été convoqué le 30 octobre 2018 à un entretien prévu le 5 novembre 2018 relatifs aux griefs qui lui étaient reprochés depuis de nombreux mois.
Elle affirme qu’il a pu formuler ses observations lors de cet entretien qui a bien eu lieu avant que la décision de sa révocation soit prise par l’associé unique de la société Farmea, tel que cela ressort du procès verbal du 5 novembre 2018 et conclut que la procédure n’a pas été menée sans respect du contradictoire.
Elle précise que M. [O] a pu transférer toutes ses données personnelles de l’ordinateur et du téléphone sur une clé usb avant que ces outils lui soient restitués, qu’il a pu momentanément conserver sa carte bleue affaire pour rentrer chez lui et que ce n’est que le lendemain qu’il a restitué le véhicule et les clés de l’établissement lors d’un rendez-vous qui lui avait été fixé.
Elle ajoute que sa révocation n’a donné lieu à aucune publicité auprès des collaborateurs et que l’information n’a été donnée que plus tard.
A titre subsidiaire, elle soutient que M. [O] ne justifie d’aucun préjudice, en faisant valoir qu’il a rapidement trouvé un nouvel emploi et qu’en toute hypothèse l’indemnité allouée ne saurait être supérieure à 5 000 euros.
Sur ce :
La révocation du mandat social doit intervenir dans des conditions loyales, ce qui suppose que les droits de la défense soient respectés et donc que le dirigeant ait été mis préalablement en situation de présenter ses observations et qu’il ait eu, antérieurement à la prise de décision de son éviction, connaissance des motifs servant d’assise à celle-ci.
En outre, indépendamment du motif de la révocation, les circonstances dans lesquelles un mandataire social est révoqué peuvent donner lieu à des dommages et intérêts si elles ont été humiliantes et vexatoires.
En l’espèce, il résulte des pièces versées aux débats que suivant procès-verbal des décisions de l’associé unique du 30 octobre 2018, la société Fareva, associé unique de la société Farmea, a décidé de mandater spécialement son Directeur Général et Vice Président de la société, afin d’informer M. [O] des raisons pour lesquelles il était envisagé de mettre fin à son mandat social de Directeur Général pour manquement professionnel grave.
Néanmoins, la société Farmea n’a pas été en mesure de justifier ses dires, formellement contestés par M. [O], selon lesquels il aurait été convoqué à un entretien avec le Directeur Général et Vice Président de la société, dans les locaux parisien de la société Farmea, le 5 novembre 2018, en vue de discuter des raisons pour lesquelles il était envisagé de mettre fin à son mandat social de Directeur Général.
L’attestation détaillée du vice président Europe 2 de Fareva produite par la société Farmea confirme les circonstances dans lesquelles est intervenue la révocation, telles que relatées dans les conclusions de M. [O], sauf concernant l’impossibilité pour celui-ci de s’exprimer avant la suspension de l’entretien.
Il apparaît ainsi que l’entretien a démarré le 5 novembre 2018 à 17h10, par les explications du Directeur Général et Vice Président de la société concernant la raison de l’entretien et les griefs retenus à l’encontre de M. [O].
L’attestation du vice président Europe 2 de Fareva ainsi que les mentions dans le procès-verbal de décisions de l’associé unique de l’assemblée qui s’est tenue le 5 novembre 2018 à 18 heures confirment qu’avant la tenue de cette assemblée, M. [O] a eu la possibilité de présenter des explications à la personne spécialement mandatée par l’associé unique de la société Formea pour l’informer des raisons pour lesquelles il était envisagé de mettre fin à son mandat social de Directeur Général pour manquement professionnel grave.
Il n’en demeure pas moins que M. [O] n’a pas été en mesure de préparer ses observations en réponse, en connaissance des motifs retenus au soutien de la décision de révocation envisagée.
L’entretien a été suspendu à 17h45, pendant le temps de l’assemblée générale à laquelle le Directeur Général et Vice Président de la société a assisté par téléphone.
A 18h15, le Directeur Général et Vice Président de la société, reprenant l’entretien, a notifié à M. [O] la décision de révoquer son mandat pour manquement professionnel grave prise par l’associé unique, à effet immédiat impliquant qu’il restitue de suite l’ordinateur et le téléphone mis à sa disposition par la société et lui a fixé un rendez-vous le lendemain sur le site d'[Localité 5] pour restituer le véhicule et les clés de l’entreprise.
Aucun document n’a été remis à cette occasion à M. [O] qui a quitté les lieux à 18h40.
Arrivé au sein du groupe en mai 1991, sa collaboration avec celui-ci a ainsi pris fin aux termes d’une procédure qui aura duré moins de deux heures, alors que la société Farmea ne démontre pas la nécessité dans laquelle elle s’est trouvée après deux ans de direction et 27 ans passés dans le groupe et alors que les manquements retenus à son encontre étaient connus d’elle depuis avril 2018, de ne laisser à M. [O] qu’un jour pour quitter définitivement l’entreprise, avec remise immédiate de son téléphone portable et suppression de ses accès informatiques.
Le caractère déloyal de la procédure de la révocation de ses fonctions de directeur général de la société Farmea et les circonstances vexatoires entourant celle-ci sont à l’origine d’un préjudice moral subi par M. [O].
Le jugement critiqué sera en conséquence confirmé en ce qu’il a condamné la société Farmea à payer à M. [W] [O] la somme de 50 000 euros à titre de dommages intérêts, en réparation du préjudice moral causé par les conditions déloyales, brutales et vexatoires dans laquelle sa révocation est intervenue, avec intérêts au taux légal à compter du jugement.
— Sur la demande de M. [O] au titre du bonus pour l’année 2017
M. [O] prétend que le 22 février 2018, son supérieur hiérarchique qui a réalisé le rapport de son évaluation, a proposé de retenir une rémunération variable égale à 80% du maximum prévu par son contrat sous forme de bonus exceptionnel.
Il indique qu’au final, c’est un bonus de 10 339 euros qui lui a été versé avec son salaire du mois d’avril 2018, tel que fixé par la personne qui est devenue entre temps son supérieur hiérarchique dans le cadre d’une réorganisation du siège du groupe Fareva, sans que la société Farmea soit en mesure de justifier de ce quantum.
Il soutient que le bonus lui a été versé en violation des dispositions de son contrat et conclut qu’il est fondé à solliciter le paiement de la somme de 45 949 euros brut = 80/30 x 17 231 euros, de laquelle sera déduite la somme de 17 231 euros au titre du montant perçu.
La société Farmea s’oppose à la demande en faisant valoir que le supérieur hiérarchique de M. [O] a évalué en février 2018 le bonus de celui-ci pour 2017 sans validation par le comité de direction, contrairement à la procédure en place, précisant qu’il n’était même plus son supérieur hiérarchique à la date de février 2018.
Sur ce :
Le contrat signé avec la société Farmea par M. [O] prévoit à l’article 2 B une partie variable de 20% maximum de la rémunération brute, fixée chaque année en accord avec le président, qui fera l’objet d’un avenant particulier.
Pour l’année 2017, M. [O] a reçu avec son salaire du mois d’avril 2018 une rémunération supplémentaire brute de 10 339 euros.
Au soutien de sa demande d’allocation d’un bonus d’un montant de 45 949 euros incluant la somme perçue en avril 2018, M. [O] verse aux débats un document d’évaluation de ses performances pour 2017, sur lequel celui qui a réalisé l’évaluation a retenu 5% pour les objectifs quantitatifs, 45% pour les objectifs qualitatifs, en indiquant au-dessus de sa signature, par une mention manuscrite, qu’il souhaitait ajouter exceptionnellement, compte tenu de la situation, un ‘bonus’ (entre guillemets dans le texte) de 30%, portant le pourcentage des objectifs atteints au titre de 2017 à 80%.
Ce document qui constitue une évaluation des performances de M. [O] exprimée par un pourcentage déterminé sur la base de critères fixés par la société, ne contient aucun calcul de la partie variable de la rémunération due à M. [O] pour l’année 2017, n’émane pas du président de la société et ne constitue pas un avenant particulier au contrat, ne saurait démontrer que la société Formea devait à l’intimé, en application des dispositions conventionnelles sus rappelées, la somme de 45 949 euros au titre de la partie variable de son salaire pour 2017.
La décision critiquée sera en conséquence confirmée en ce qu’elle a débouté M. [O] de sa demande.
— Sur les demandes accessoires
Le jugement du tribunal de commerce d’Angers sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles.
Partie perdante, la société Farmea sera déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles, sera condamnée aux dépens d’appel ainsi qu’à payer à M. [W] [O] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe,
— CONFIRME le jugement du tribunal de commerce d’Angers du 13 janvier 2021 SAUF en ce qu’il a dit que la société Farmea est condamnée à payer à M. [W] [O] la somme de 203 404,46 euros et statuant à nouveau de ce chef, CONDAMNE la société Farmea à payer à M. [W] [O] la somme de 243 404,46 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2018 ;
y ajoutant,
— CONDAMNE la société Farmea aux dépens d’appel et à payer à M. [W] [O] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d’appel ;
— DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
S. TAILLEBOIS C. CORBEL