Dirigeant de fait : 22 septembre 2022 Cour d’appel d’Amiens RG n° 21/05441

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Dirigeant de fait : 22 septembre 2022 Cour d’appel d’Amiens RG n° 21/05441
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ARRET

[L]

C/

S.C.P. ALPHA MANDATAIRES JUDICIAIRES

COUR D’APPEL D’AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 22 SEPTEMBRE 2022

N° RG 21/05441 – N° Portalis DBV4-V-B7F-IIX3

JUGEMENT DU TRIBUNAL DE COMMERCE DE COMPIEGNE EN DATE DU 17 NOVEMBRE 2021

APRES COMMUNICATION DU DOSSIER ET AVIS DE LA DATE D’AUDIENCE AU MINISTERE PUBLIC

EN PRESENCE DU REPRESENTANT DE MADAME LE PROCUREUR GENERAL

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur [S] [L]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Bruno DRYE de la SCP DRYE DE BAILLIENCOURT ET ASSOCIES, avocat au barreau de SENLIS, vestiaire : 160

ET :

INTIMEE

S.C.P. ALPHA MANDATAIRES JUDICIAIRES, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Frédéric GARNIER substituant Me Serge LEQUILLERIER de la SCP LEQUILLERIER – GARNIER, avocat au barreau de SENLIS, vestiaire : 160

DEBATS :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 Mai 2022 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Dominique BERTOUX , Présidente de chambre et Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère, qui ont avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 22 Septembre 2022.

Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions de l’article 785 du code de procédure civile.

GREFFIER:

Madame Vanessa IKHLEF

MINISTERE PUBLIC : M. Alain LEROUX, Avocat Général

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Ces magistrats ont rendu compte à la Cour composée de :

Mme Dominique BERTOUX, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 22 Septembre 2022 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile ; Mme Dominique BERTOUX, Présidente de chambre a signé la minute avec Madame Charlotte RODRIGUES, Greffier.

DECISION

La Sarl Capnégoce a cessé son activité le 1er septembre 1998, date à laquelle elle a fait l’objet d’une dissolution, M. [S] [L] son gérant étant désigné en qualité de liquidateur amiable.

A la demande d’un créancier, cette société a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Compiègne du 27 avril 2001 maître [U] étant désigné en qualité de liquidateur judiciaire.

Les éléments d’actifs de la société ayant disparu, le liquidateur a attrait M. [S] [L] par acte d’huissier du 3 octobre 2001 devant le tribunal de commerce de Compiègne qui par jugement du 14 décembre 2001 a ouvert à titre de sanction (article 182 ancien du code de commerce) une procédure de redressement judiciaire à l’endroit de M. [S] [L] convertie en liquidation judiciaire, maître [B] étant désigné en qualité de liquidateur judiciaire.

Par jugement du 19 février 2020, le tribunal de commerce de Compiègne a prononcé une mesure de faillite personnelle d’une durée de 15 ans à l’endroit de M. [S] [L] en qualité de dirigeant de fait d’une Sarl Le Bidule.

Entre temps le conseil des prud’hommes de Compiègne saisi par M. [S] [L] d’une demande de reconnaissance du statut de salarié de la Sarl Le Bidule représentée par son liquidateur judiciaire a par jugement du 20 septembre 2018 :

– dit que M. [L] n’a pas le statut de salarié ;

– débouté M. [L] de l’ensemble de ses demandes ;

– débouté les parties de leurs plus amples demandes ;

– pris acte de l’intervention du CGEA ;

– condamné M. [L] aux entiers dépens.

M. [L] a interjeté appel de ce jugement selon déclaration du 19 octobre 2018.

Suivant arrêt du 15 septembre 2020, la cour d’appel d’Amiens a notamment :

– infirmé le jugement rendu le 20 septembre 2018 par le conseil de prud’hommes de Compiègne, sauf en ce qu’il a débouté M. [L] de sa demande d’indemnité de licenciement

– reconnu à M. [L] la qualité de salarié de la société Le Bidule ;

– fixé la créance de M. [L] dans la procédure de liquidation judiciaire (jugement de conversion de RJ en LJ du 8 mars 2017) de la société Le Bidule à la somme totale de 19.343,11 €, inscrite sur l’état des créances déposé au greffe du tribunal de commerce ;

– précisé que le jugement d’ouverture de la procédure collective (RJ) du 11 janvier 2017 a arrêté le cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que tous intérêts de retard et majorations.

Entre temps le tribunal de commerce de Compiègne a par jugement du 20 avril 2020 prononcé la clôture de la procédure de liquidation de M. [L] pour insuffisance d’actif.

Considérant que la créance salariale de M. [S] [L] à l’endroit de la Sarl Le Bidule représentée par son liquidateur constitue un actif de la liquidation judiciaire de ce dernier, le tribunal de commerce de COmpiègne saisi à la requête du liquidateur a par jugement du 14 octobre 2020 ordonné la réouverture des opérations de liquidation judiciaire de M. [L].

Puis maître [B], en sa qualité de mandataire liquidateur de M. [S] [L] a attrait ce dernier par acte d’huissier du 17 décembre 2020, afin, de le voir condamné à lui payer la somme de 19.343,11 € devant le tribunal de commerce de Compiègne qui par jugement contradictoire du 17 novembre 2021, a :

– dit n’y avoir lieu à surseoir à statuer ;

– dit recevable la demande de maître [B], en sa qualité de liquidateur judiciaire de M. [L]

– condamné M. [L] à régler à maître [B], ès-qualités, la somme de 19.343,11 € ;

– condamné M. [L] à régler à maître [B], ès-qualités, la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens ;

– débouté M. [L] de l’ensemble de ses demandes.

M. [L] a interjeté appel de cette décision par déclaration du 24 novembre 2021.

Aux termes de ses conclusions remises le 10 février 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, M. [S] [L] demande à la cour :

– de le recevoir en son appel et de le déclarer bien fondé ;

– de réformer le jugement entrepris ;

statuant à nouveau,

– de surseoir à statuer sur les demandes de maître [B] dans l’attente d’une décision définitive rendue par les juridictions de l’ordre judiciaire sur l’appel interjeté à l’encontre du jugement rendu par le tribunal de commerce de Compiègne le 14 octobre 2020, réouvrant les opérations de liquidation judiciaire de M. [L] ;

en toute hypothèse,

– de débouter Me [B], ès-qualités, de toutes ses demandes à l’encontre de M. [L] comme étant irrecevables et en tous les cas mal fondées ;

– de condamner Me [B], ès-qualités, à lui payer la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Par dernières conclusions remises le 7 mars 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, la SCP Alpha mandataires judiciaires, ès-qualités de liquidateur de M. [S] [L], demande à la cour :

– de débouter M. [L] de tous moyens, fins et prétentions contraires;

– de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

et s’il devait être réformé,

– de condamner quoiqu’il en soit M. [L] à lui régler, ès-qualités, la somme de 19.343,11 €, correspondant aux condamnations prononcées par arrêt de la cour d’appel d’Amiens du 15 septembre 2020 ;

y ajoutant ;

– de condamner M. [L] aux dépens et à la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Selon avis du 5 mai 2022, le ministère public requiert la confirmation de la décision entreprise, étant précisé que, nonobstant l’appel interjeté à l’encontre du jugement du tribunal de commerce de Compiègne du 14 octobre 2020 ayant prononcé la réouverture des opérations de liquidation judiciaire (RG 21/3479 – délibéré de la cour prévu au 9 juin 2022), il y a lieu de confirmer le jugement du 17 novembre 2021 qui trouve son origine dans un arrêt devenu définitif de la chambre prud’homale de la cour d’appel d’Amiens, condamnant la société Le Bidule à la somme de 19.343 euros au titre de salaires et congés payés.

L’affaire a été fixée à bref délai pour plaider à l’audience du 19 mai 2022.

SUR CE :

Sur la demande de sursis à statuer

La demande de sursis à statuer de l’appelant dans l’attente de l’arrêt de la cour d’appel d’Amiens devant se prononcer sur l’appel du jugement du 14 octobre 2020, ré-ouvrant les opérations de liquidation judiciaire de M. [L] est sans objet dans la mesure où par arrêt du 16 juin 2022 l’appel de ce jugement a été déclaré irrecevable.

Sur le fond

M. [S] [L] soutient que la demande de la SCP Alpha mandataires représentée par maître [B] est mal fondée et qu’elle doit être déboutée au motif d’une part qu’elle est dénuée de fondement et que d’autre part l’ absence de diligence durant 18 ans caractérise une renonciation tacite à liquider les actifs du liquidé dans la mesure où elle emporte un dessaisissement trop long de la personne physique.

Il précise que la créance ayant un caractère salarial sa part saisissable est soumise à barême dans des proportions infimes bien inférieures au montant dont il est demandé paiement.

L’intimée soutient que sa demande est bien fondée dans la mesure où les gains et salaires du débiteur en liquidation judiciaire constituent des actifs de la procédure, qu’il exerce ses droits sur le patrimoine du débiteur en vertu de l’article L. 641-9 du code de commerce et représente la collectivité des créanciers au sens de l’article L.641-4 à L.622-20 du code de commerce.

Elle explique que cette demande est susceptible de fonder une demande ultérieure en saisie des rémunérations de M. [S] [L], la présente action n’ayant pour objet que d’agir en vue de respecter le dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire et d’éviter la soustraction d’un actif, qu’il s’agit donc d’une créance brute et que les sommes devant éventuellement revenir à M. [L] seront calculées dans le cadre de la procédure de saisie des rémunérations.

Il rappelle que le mandat de réalisation des actifs par le liquidateur est d’ordre public, qu’il ne peut y renoncer, faisant observer que la liquidation judiciaire a été prononcée à titre de sanction dans le cadre de sa gérance de la Sarl Capnégoce et qu’il a affiché un réel mépris à l’égard de la procédure collective.

Il précise que la durée de la procédure collective n’ouvre pas droit à sa clôture mais uniquement à une action en responsabilité contre l’état.

Aux termes de l’article L.641-9 du code de commerce, le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens même de ceux qu’il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n’est pas clôturée.

En l’espèce les opérations de liquidation judiciaire à l’endroit de M. [S] [L] ayant été ré-ouvertes et ce dernier étant titulaire d’une créance salariale acquise par l’effet de l’arrêt de la cour d’appel de Douai du 15 septembre 2020, c’est à juste titre que se fondant sur l’article L. 641-9 du code de commerce, la SCP Alpha mandataires judiciaires agissant en qualité de liquidateur de M. [S] [L] qui est dessaisi de la disposition de ses biens agi à son endroit pour récupérer un élément d’actif en vue de sa réalisation.

En conséquence la demande est bien fondée juridiquement.

M. [S] [L] ne conteste pas réellement cette possibilité pour le créancier, de récupérer en vue de leur réalisation, les éléments d’actif, et en l’espèce plus particulièrement les sommes dont il est créancier en vertu de l’arrêt de la chambre sociale de la cour d’appel d’Amiens dans la mesure où il soutient seulement que le temps écoulé entre le prononcé de sa liquidation judiciaire et cette demande peut s’analyser en une renonciation à liquider les actifs.

Cependant tel n’est pas le cas dans la mesure où le liquidateur ne peut pas renoncer à appliquer des dispositions d’ordre public.

Enfin le débat portant sur le montant saisissable relevant de la compétence du juge en charge de la saisie des rémunérations dans le cadre de la procédure prévue par les articles L.3252-1 et R.3251-1 et suivants du code du travail, ce moyen est inopérant.

Partant le jugement est confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les demandes accessoires

M. [S] [L] qui succombe supporte les dépens d’appel et est condamné à payer à la SCP Alpha-mandataires judiciaires en qualité de liquidateur de M. [S] [L] la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

la cour statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe ;

confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

y ajoutant :

condamne M. [S] [L] à payer à la SCP Alpha mandataires judiciaires représentée par maître [B] en qualité de liquidateur de M. [S] [L] la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

condamne M. [S] [L] aux dépens d’appel.

Le Greffier,La Présidente,

 


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