Directeur de Collection : 4 octobre 2007 Cour de cassation Pourvoi n° 06-43.562

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Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 25 avril 2006), que le 2 septembre 1999, Mme X… a conclu avec la société Editions Monsieur Le Prince-Editions Jacques Y… deux contrats de codirecteur de collection, aux termes desquels il lui était confié la responsabilité de diriger les collections “guide des lycées” et “question sur”, puis, le 1er octobre 2001, un contrat de directeur d’ouvrage concernant la collection “le journal de la Bourgogne” et deux contrats de codirecteur de collection visant les titres mentionnés dans les premiers contrats ; que la relation professionnelle a cessé à compter du 3 octobre 2002 ;

Attendu que la société Editions Monsieur Le Prince-Editions Jacques Y… fait grief à l’arrêt d’avoir requalifié en contrat de travail la relation professionnelle avec Mme X… et de l’avoir condamnée en conséquence à payer à cette dernière diverses sommes au titre de la cessation de cette relation de travail, ainsi qu’à régulariser rétroactivement sa situation de salariée auprès des organismes sociaux, alors, selon le moyen :

1 / que le directeur de collection, de par son niveau de participation intellectuelle à la création des oeuvres de la collection, conclut un contrat d’édition et non un contrat de travail, peu important qu’il mette en oeuvre les projets définis par les dirigeants de la maison d’édition ; qu’en l’espèce, le juge d’appel s’est borné à relever que Mme X…, directrice de collections aux Editions Jacques Y…, ne faisait qu’oeuvrer aux projets définis par M. Jacques Y… et était en charge de l’exécution des instructions données par celui-ci ; qu’en s’en tenant à ce constat touchant seulement aux fins recherchées de la collaboration litigieuse sans analyser plus précisément le degré de liberté dont disposait Mme X… dans l’exécution quotidienne de ses tâches et sans constater que M. Y… déterminait unilatéralement les conditions de travail de Mme X…, le juge d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, L. 121-1 du code du travail ;

2 / que le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur ayant le triple pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que, s’il a constaté que Mme X… travaillait sous les directives des responsables de la société Editions Monsieur Le Z…, les juges du fond n’ont pas établi que les dirigeants contrôlaient l’exécution de leurs directives ni qu’ils sanctionnaient à l’occasion Mme X… ; qu’ainsi, les juges du fond ont de nouveau privé leur décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, L. 121-1 du code du travail ;

3 / que le simple visa des documents non identifiés de la cause équivaut à une absence de motifs ; que le juge du fond a affirmé que l’exécution de fonctions techniques cumulées avec celles consistant à assurer la mise en oeuvre des projets définis par Jacques Y… résulte de la production de différents devis et factures adressés par les fournisseurs de la société à Mme X…, des commandes transmises par celle-ci et, d’une manière générale, d’une ” masse de courrier produite aux débats par Mme X…” ; qu’en s’abstenant d’identifier les pièces ainsi visées, le juge du fond a violé l’article 455 du nouveau code de procédure civile ;

4 / que ni l’importance ni la régularité des sommes perçues par le travailleur ne permettent de caractériser l’existence d’un contrat de travail ; que le juge du fond a cru utile de relever la régularité des sommes perçues par Mme X… tant dans leur montant que dans leur périodicité ainsi que le caractère exclusif de ces revenus se suffisant à eux-mêmes ;

qu’ainsi, le juge du fond a déduit un motif dépourvu de valeur et a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 121-1 du code du travail ;

5 / que l’inscription régulière et acceptée à l’URSSAF et aux organismes sociaux à titre de travailleur indépendant interdit toute modification rétroactive de la situation du travailleur indépendant et notamment toute régularisation rétroactive, à titre de salarié auprès des organismes sociaux ; qu’en l’espèce, il n’était pas contesté que Mme X… avait été inscrite en qualité de travailleur indépendant tout au long de sa collaboration auprès des éditions Jacques Y…, qu’elle avait régulièrement réglé ses cotisations à ce titre ; que, vis-à-vis des organismes sociaux, la requalification de sa relation avec les éditions Jacques Y… en qualité de salarié ne pouvait avoir d’effet que pour l’avenir ; qu’en condamnant néanmoins les éditions Jacques Y… à régulariser pour le passé la situation de Mme X… auprès des organismes sociaux à titre de travailleur salarié, la cour d’appel a violé l’article L. 311-2 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu que la cour d’appel, qui a constaté, par motifs propres et adoptés, que Mme X… était exclusivement chargée de l’exécution des directives et instructions de M. Y…, associé majoritaire de la société, qui arrêtait lui même les projets, qu’elle exécutait des fonctions techniques dans une totale dépendance et effectuait son travail de gestion quotidienne en suivant les horaires de l’entreprise et en utilisant tant son matériel que son personnel, s’intégrant ainsi dans un service organisé, a pu, sans encourir les griefs du moyen, en déduire l’existence d’un lien de subordination ; que le moyen, qui manque en fait en sa dernière branche, le dispositif de l’arrêt ne contenant aucune condamnation de l’employeur à régulariser sa situation auprès des organismes sociaux, est mal fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Editions Monsieur Le Prince-Editions Jacques Y… aux dépens ;

Vu l’article 700 du nouveau code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X… la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre octobre deux mille sept.