Le coût des mesures de blocage des sites de diffusion illicite de compétitions sportives en ligne est laissé à la charge des fournisseurs d’accès internet.
La mesure de blocage, que seule l’autorité judiciaire peut prononcer, suppose que soit caractérisée, préalablement, une atteinte à des droits d’auteur ou à des droits voisins. Selon l’article L. 122-4, « Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. » De la même manière, en application de l’article L. 216-1 du code de la propriété intellectuelle, l’autorisation de l’entreprise de communication audiovisuelle est requise avant toute reproduction, mise à la disposition du public par la vente, le louage ou l’échange, la radiodiffusion ou la télédiffusion, la mise à la disposition du public en ligne ou la communication au public dans un lieu accessible à celui-ci moyennant paiement d’un droit d’entrée, de ses programmes. Il résulte de l’article L. 336-2 du même code qu’ « En présence d’une atteinte à un droit d’auteur ou à un droit voisin occasionnée par le contenu d’un service de communication au public en ligne, le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond peut ordonner à la demande des titulaires de droits sur les œuvres et objets protégés, de leurs ayants droit, des organismes de gestion collective régis par le titre II du livre III ou des organismes de défense professionnelle visés à l’article L. 331-1, toutes mesures propres à prévenir ou à faire cesser une telle atteinte à un droit d’auteur ou un droit voisin, à l’encontre de toute personne susceptible de contribuer à y remédier. La demande peut également être effectuée par le Centre national du cinéma et de l’image animée. » L’article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle réalise la transposition de l’article 8 §3, de la directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001, sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information, aux termes duquel : « Les États membres veillent à ce que les titulaires de droits puissent demander qu’une ordonnance sur requête soit rendue à l’encontre des intermédiaires dont les services sont utilisés par un tiers pour porter atteinte à un droit d’auteur ou à un droit voisin ». Le seizième considérant de cette directive rappelle que les règles qu’elle édicte doivent s’articuler avec celles issues de la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000, relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (dite « directive sur le commerce électronique »). La Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit dans l’arrêt Scarlet Extended c/ Sabam (C-70/10) du 24 novembre 2011 qu’ « ainsi qu’il découle des points 62 à 68 de l’arrêt du 29 janvier 2008, Promusicae (C-275/06, Rec. p. I-271), la protection du droit fondamental de propriété, dont font partie les droits liés à la propriété intellectuelle, doit être mise en balance avec celle d’autres droits fondamentaux. Plus précisément, il ressort du point 68 dudit arrêt qu’il incombe aux autorités et aux juridictions nationales, dans le cadre des mesures adoptées pour protéger les titulaires de droits d’auteur, d’assurer un juste équilibre entre la protection de ce droit et celle des droits fondamentaux de personnes qui sont affectées par de telles mesures. Ainsi, dans des circonstances telles que celles de l’affaire au principal, les autorités et les juridictions nationales doivent notamment assurer un juste équilibre entre la protection du droit de propriété intellectuelle, dont jouissent les titulaires de droits d’auteur, et celle de la liberté d’entreprise dont bénéficient les opérateurs tels que les FAI en vertu de l’article 16 de la charte.(…) D’autre part, ladite injonction risquerait de porter atteinte à la liberté d’information puisque ce système risquerait de ne pas suffisamment distinguer entre un contenu illicite et un contenu licite, de sorte que son déploiement pourrait avoir pour effet d’entraîner le blocage de communications à contenu licite. En effet, la réponse à la question de la licéité d’une transmission dépende également de l’application d’exceptions légales au droit d’auteur qui varient d’un État membre à l’autre. En outre, certaines œuvres peuvent relever, dans certains États membres, du domaine public ou elles peuvent faire l’objet d’une mise en ligne à titre gratuit de la part des auteurs concernés. » Dans l’arrêt UPC Telekable Wien du 27 mars 2014 (C-314/12), la Cour de justice a dit pour droit que : « 48 Pour ce qui est de la liberté d’entreprise, il doit être constaté que l’adoption d’une injonction, telle que celle en cause au principal, restreint cette liberté. 49 En effet, le droit à la liberté d’entreprise comprend notamment le droit, pour toute entreprise, de pouvoir librement disposer, dans les limites de la responsabilité qu’elle encourt pour ses propres actes, des ressources économiques, techniques et financières dont elle dispose. 50 Or, une injonction telle que celle en cause au principal, fait peser sur son destinataire une contrainte qui restreint la libre utilisation des ressources à sa disposition, puisqu’elle l’oblige à prendre des mesures qui sont susceptibles de représenter pour celui-ci un coût important, d’avoir un impact considérable sur l’organisation de ses activités ou de requérir des solutions techniques difficiles et complexes. Cependant, une telle injonction n’apparaît pas porter atteinte à la substance même du droit à la liberté d’entreprise d’un fournisseur d’accès à Internet, tel que celui en cause au principal. » Il s’en déduit qu’un juste équilibre doit être recherché entre la protection du droit de propriété intellectuelle, d’une part, et la liberté d’entreprise des fournisseurs d’accès à internet, et les droits fondamentaux des clients des fournisseurs d’accès à internet, en particulier leur droit à la protection des données à caractère personnel et leur liberté de recevoir et de communiquer des informations, d’autre part. La recherche de cet équilibre implique d’écarter toute mesure prévoyant un contrôle absolu, systématique et sans limitation dans le temps, de même que les mesures ne doivent pas porter atteinte à la « substance même du droit à la liberté d’entreprendre » des fournisseurs d’accès à internet, lesquels doivent conserver le choix des mesures à mettre en œuvre. Par ailleurs, il ressort de l’article L.331-37 du code de la propriété intellectuelle que, « I.-Lorsqu’une décision judiciaire passée en force de chose jugée a ordonné toute mesure propre à empêcher l’accès à un service de communication au public en ligne en application de l’article L. 336-2, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, saisie par un titulaire de droits partie à la décision judiciaire, peut demander à toute personne visée par cette décision, pour une durée ne pouvant excéder celle restant à courir pour les mesures ordonnées par le juge, d’empêcher l’accès à tout service de communication au public en ligne reprenant en totalité ou de manière substantielle le contenu du service mentionné par ladite décision. Pour l’application du I, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique communique précisément les données d’identification du service en cause, selon les modalités qu’elle définit. Pour faciliter l’exécution des décisions judiciaires mentionnées à l’article L. 336-2, l’autorité adopte des modèles d’accord, qu’elle invite les ayants droit et toute personne susceptible de contribuer à remédier aux atteintes aux droits d’auteur et droits voisins en ligne à conclure. L’accord détermine notamment les conditions d’information réciproque des parties sur l’existence de tout service de communication au public en ligne reprenant en totalité ou de manière substantielle le contenu du service visé par la décision. Il engage toute personne susceptible de contribuer à remédier aux atteintes aux droits d’auteur et droits voisins en ligne, partie à l’accord, à prendre les mesures prévues par la décision judiciaire. II.-En cas de difficulté relative à l’application des premier ou deuxième alinéas du I, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique peut demander aux services de se justifier. Sans préjudice d’une telle demande, l’autorité judiciaire peut être saisie, en référé ou sur requête, pour ordonner toute mesure destinée à faire cesser l’accès à ces services. Cette saisine s’effectue sans préjudice de la saisine prévue à l’article L. 336-2. » |
Résumé de l’affaire :
Contexte de l’affaireLa société Groupe Canal + et la société d’édition de Canal Plus, spécialisées dans la communication audiovisuelle, détiennent les droits d’exploitation du championnat de rugby masculin professionnel de 1ère division, le « Top 14 ». Ce championnat se déroule du 07 septembre 2024 au 28 juin 2025. Les sociétés Can’l, Micrologic Systems, Nautile, et d’autres opérateurs de télécommunication, commercialisent des services d’accès à Internet dans les territoires d’Outre-Mer. Litige et assignationLes sociétés Groupe Canal + et SECP ont constaté que de nombreux sites internet diffusent illégalement des matchs de rugby, y compris ceux du Top 14, sans autorisation. En conséquence, elles ont assigné plusieurs fournisseurs d’accès à Internet pour obtenir des mesures visant à bloquer l’accès à ces sites. L’assignation a été signifiée le 25 septembre 2024, demandant des mesures de blocage pour protéger leurs droits d’exploitation. Demandes des demanderessesLes demanderesses ont sollicité du tribunal qu’il juge leurs demandes recevables et bien fondées, ordonnant aux fournisseurs d’accès de mettre en œuvre des mesures pour empêcher l’accès aux sites IPTV identifiés. Elles ont également demandé que ces mesures soient mises en œuvre dans un délai de cinq jours suivant la signification du jugement. Intervention de la Ligue nationale de rugbyLa Ligue nationale de rugby, détentrice des droits de diffusion du Top 14, a demandé à intervenir dans l’affaire pour soutenir les demandes des sociétés Groupe Canal + et SECP. Son intervention a été jugée recevable et bien fondée. Défaut de comparution des défenderessesLes sociétés défenderesses, régulièrement citées, n’ont pas constitué avocat ni comparu devant le tribunal. Le jugement a donc été rendu en leur absence, conformément aux dispositions du code de procédure civile. Atteintes aux droits d’auteurLe tribunal a constaté que les sites IPTV en question diffusaient des compétitions sportives sans autorisation, constituant ainsi une atteinte aux droits voisins des sociétés Groupe Canal + et SECP. Les preuves fournies par des procès-verbaux de constat ont établi que ces sites diffusaient des contenus identiques à ceux des chaînes Canal +. Mesures ordonnées par le tribunalLe tribunal a ordonné aux fournisseurs d’accès de mettre en œuvre des mesures pour bloquer l’accès aux sites IPTV litigieux dans un délai de cinq jours. Ces mesures doivent s’appliquer jusqu’à la fin de la saison 2024/2025 du Top 14. Le coût de ces mesures sera à la charge des fournisseurs d’accès. Exécution et suivi des mesuresLes sociétés Groupe Canal + et SECP doivent informer les fournisseurs d’accès de toute modification concernant la date de fin de la saison. En cas de difficultés d’exécution, les parties peuvent saisir le tribunal pour obtenir des ajustements nécessaires. Les mesures sont considérées comme exécutoires par provision. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1]
■
3ème chambre
1ère section
N° RG 24/11928
N° Portalis 352J-W-B7I-C56F2
N° MINUTE :
Assignation du :
23 septembre 2024
JUGEMENT
rendu le 07 novembre 2024
DEMANDERESSES
S.A. GROUPE CANAL +
[Adresse 5]
[Localité 8]
S.A.S. SOCIETE D’EDITION DE CANAL PLUS
[Adresse 5]
[Localité 8]
représentée par Maître Richard WILLEMANT de la SELEURL WILLEMANT LAW, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #J0106
DÉFENDERESSES
S.A.S. PACIFIC MOBILE TELECOM
[Adresse 17]
[Adresse 17]
[Localité 10]
Organisme SERVICE DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS
[Adresse 20]
[Localité 9] (WALLIS-ET-FUTUNA)
S.A.S. VITI
[Adresse 14]
[Adresse 14]
[Localité 10]
Jugement + Annexe
Expéditions exécutoires
délivrées le :
– Maître WILLEMANT #J0106
– Maître MARTIN #P0177
S.A.S. CAN’L
[Adresse 4]
[Localité 11]
Décision du 07 novembre 2024
N°RG 24/11928 – N°Portalis 352J-W-B7I-C56F2
S.A.R.L. MICROLOGIC SYSTEMS
[Adresse 3]
[Localité 11]
S.A.R.L. NAUTILE
[Adresse 1]
[Localité 11]
Etablissement public OFFICE DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS DE NOUVELL E-CALEDONIE
[Adresse 2]
[Localité 11]
S.A.S. OFFRATEL
[Adresse 16]
[Adresse 16]
[Localité 11]
S.A.R.L. TELENET
[Adresse 19]
[Adresse 19]
[Localité 11]
S.A.S. ONATI
[Adresse 23]
[Adresse 23]
[Localité 10]
défaillantes
PARTIE INTERVENANTE
Association LIGUE NATIONALE DE RUGBY
[Adresse 7]
[Localité 6]
représentée par Maître Louis MARTIN de la PARTNERSHIPS PAUL HASTINGS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0177
_____________________________
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Anne-Claire LE BRAS, 1ère vice-présidente adjointe
assistée de Madame Laurie ONDELE, greffière
DEBATS
Sans audience, conclusions déposés au greffe.
JUGEMENT
Prononcé publiquement à la mise à disposition par greffe
Réputé contradictoire
en premier ressort
EXPOSÉ DU LITIGE
La société Groupe Canal + et la société d’édition de Canal Plus (ci-après « SECP ») sont des entreprises de communication audiovisuelle exploitant plusieurs chaînes de télévision, accessibles au public français, majoritairement par abonnement payant. Elles sont notamment spécialisées dans la diffusion en direct et en différé de programmes sportifs, dont le championnat de France de rugby masculin professionnel de 1ère division à XV, dit « Top 14 ». Cet évènement a lieu du 07 septembre 2024 au 28 juin 2025, le prochain match ayant lieu le 23 novembre 2024.
Les sociétés Can’l, Micrologic systems, Nautile, Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie, Offratel, Onati, Pacific mobile télécom, Service des postes et télécommunications (Wallis-et-Futuna), Télénet et Viti, sont des opérateurs de télécommunication qui commercialisent notamment des offres de téléphonie et d’accès à internet sur le territoire français, et plus particulièrement dans les territoires d’Outre-Mer.
Les droits d’exploitation audiovisuelle du Top 14 sont détenus par la Ligue nationale de rugby, laquelle les a cédés à titre exclusif aux sociétés Groupe Canal + et SECP, pour la diffusion de l’événement sur le territoire français, à l’exception de la finale de ce championnat qui pourra également être diffusée par France télévisions.
La société Groupe Canal + et la SECP exposent que de nombreux sites internet accessibles depuis la France diffusent de manière quasi-systématique, gratuitement, en streaming et en direct entre autres les matchs de multiples compétitions, notamment de rugby.
Les sites et services IPTV concernés sont accessibles par les noms de domaine suivants :
thesports1.orglivetv813.mesportp2p.comdirectatvhd.melshunter.netantenasport.shopantenasports.ruantenasports.shopilovetoplay.xyzhoca2.comlivetv814.mecdn.livetv814.mestreamingon.orgemb.apl357.melivetv815.mecdn.livetv815.menoblockaabbdd-xcktb.xyzembx222304.apl357.metutvlive.infosporttvls.comquest4play.xyzantenasport.onlinewfzrbhp.luxevpn.xyzsmart.lionsmart.cc
Dûment autorisées par une ordonnance du 19 septembre 2024, la société Groupe Canal + et la SECP ont, par actes d’huissier délivrés le 25 septembre 2024, fait assigner, selon la procédure accélérée au fond, les sociétés Can’l, Micrologic systems, Nautile, Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie, Offratel, Onati, Pacific mobile télécom, Service des postes et télécommunications (Wallis-et-Futuna), Télénet et Viti, devant le Président du tribunal judiciaire de Paris, siégeant à l’audience du 08 octobre 2024 à 14 heures, en vue d’obtenir la mise en oeuvre, par ces derniers, en leur qualité de fournisseurs d’accès à internet, des mesures propres à empêcher l’accès par leurs abonnés à ces sites et services IPTV à partir du territoire français et à faire cesser les atteintes aux droits de leurs membres.
Aux termes de leur assignation signifiée le 25 septembre 2024, les sociétés Groupe Canal + et SECP demandent au tribunal, au visa des articles articles L. 216-1, L. 331-27 et L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle et 481-1 du code de procédure civile, de :
– Juger recevables et bien fondées les demandes des sociétés Groupe Canal + et SECP en vue de prévenir une nouvelle atteinte grave et irrémédiable aux droits voisins dont elles sont titulaires sur le championnat de France de rugby masculin professionnel de 1ère division à XV, dénommé « Top 14 » ;
– Ordonner aux sociétés Can’l, Micrologic systems, Nautile, Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie, Offratel, Onati, Pacific mobile télécom, Service des postes et télécommunications (Wallis-et-Futuna), Télénet et Viti, de mettre en œuvre toutes mesures propres à empêcher l’accès à partir de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française et des îles Wallis-et-Futuna, par tout moyen efficace et notamment par le blocage de noms de domaine et de sous-domaines, aux sites internet et services IPTV identifiés accessibles à partir des noms de domaine ou sous-domaines suivants qui portent atteinte aux droits voisins des sociétés Groupe Canal + et SECP, et ce pour chacune des journées figurant au calendrier officiel de la compétition « Top 14 », jusqu’à la date de fin de la saison 2024/2025, actuellement fixée au 28 juin 2025 : […]
– Ordonner aux sociétés Can’l, Micrologic systems, Nautile, Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie, Offratel, Onati, Pacific mobile télécom, Service des postes et télécommunications (Wallis-et-Futuna), Télénet et Viti de mettre en oeuvre les mesures précitées au plus tard dans un délai de cinq jours à compter de la signification du jugement à intervenir ;
– Ordonner aux sociétés Can’l, Micrologic systems, Nautile, Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie, Offratel, Onati, Pacific mobile télécom, Service des postes et télécommunications (Wallis-et-Futuna), Télénet et Viti de mettre en œuvre, toutes mesures propres à empêcher l’accès, à partir de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française et des îles Wallis-et-Futuna par tout moyen efficace et notamment par le blocage de noms de domaine et de sous-domaines, aux sites internet et services IPTV dits « miroirs » diffusant la compétition sportive « Top 14 » sans autorisation des sociétés Groupe Canal + et SECP apparus postérieurement à la date du jugement à intervenir, sur la base des données d’identification du site internet ou services IPTV qui leur seront, le cas échéant, notifiées par l’ARCOM, conformément à l’article L. 331-27 du code de la propriété intellectuelle, et ce selon les modalités déterminées par cette autorité ;
– Dire que les sociétés Can’l, Micrologic systems, Nautile, Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie, Offratel, Onati, Pacific mobile télécom, Service des postes et télécommunications (Wallis-et-Futuna), Télénet et Viti, devront informer, sans délai, les sociétés Groupe Canal + et SECP, par l’intermédiaire de leurs conseils, de la réalisation des mesures ordonnées à l’égard des sites et services IPTV identifiées précités et, le cas échéant, des difficultés qu’elles rencontreraient ;
– Dire que les sociétés Groupe Canal + et SECP devront informer les sociétés Can’l, Micrologic systems, Nautile, Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie, Offratel, Onati, Pacific mobile télécom, Service des postes et télécommunications (Wallis-et-Futuna), Télénet et Viti, de toute modification de la date de fin de la saison 2024/2025 de la compétition « Top 14 », à laquelle les mesures ordonnées prendront fin ;
– Rappeler que, pendant toute la durée des mesures ordonnées, les sociétés Groupe Canal + et SECP pourront communiquer à l’ARCOM les données d’identification de tout service de communication au public en ligne qui n’a pas été identifié à la date du jugement à intervenir, diffusant illicitement la compétition « Top 14 », aux fins de mise en œuvre des pouvoirs conférés à cette autorité par l’article L. 331-27 du code de la propriété intellectuelle ;
– Dire qu’aux fins d’actualisation des mesures ordonnées ou en cas de difficulté dans la mise en œuvre des mesures ordonnées à l’encontre des sites et services IPTV identifiés ou sites et services IPTV dits « miroirs », les sociétés Groupe Canal + et SECP pourront en tout état de cause saisir le Président du tribunal judiciaire de Paris, sur requête ou en référé ;
– Rappeler que le jugement à intervenir est de droit exécutoire à titre provisoire ;
– Dire n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Dire que chaque partie conservera la charge de ses frais et dépens.
Suivant les conclusions aux fins d’intervention volontaire accessoire signifiées par voie électronique le 02 octobre 2024, la Ligue nationale de rugby demande au tribunal de :
– Déclarer recevable et bien fondée son intervention volontaire à titre accessoire en soutien des demandes des sociétés Groupe Canal+ et SECP ;
– Prendre acte qu’elle s’associe à l’ensemble des demandes formées par les sociétés Groupe Canal+ et SECP.
Les sociétés Can’l, Micrologic systems, Nautile, Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie, Offratel, Onati, Pacific mobile télécom, Service des postes et télécommunications (Wallis-et-Futuna), Télénet et Viti, régulièrement citées par remise à une personne ayant déclaré être habilitée à le recevoir et par actes d’huissier du 25 septembre 2024, n’ont pas constitué avocat.
L’affaire a été mise en délibéré au 07 novembre 2024.
A titre liminaire, il est rappelé que selon l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait droit à la demande que s’il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
I- Sur la qualité à agir
Aux termes de l’article L. 122-1 du code de la propriété intellectuelle, « Le droit d’exploitation appartenant à l’auteur comprend le droit de représentation et le droit de reproduction. »
L’article L. 122-2 du même code précise que « La représentation consiste dans la communication de l’œuvre au public par un procédé quelconque, et notamment : 2° Par télédiffusion.
La télédiffusion s’entend de la diffusion par tout procédé de télécommunication de sons, d’images, de documents, de données et de messages de toute nature. » et l’article L.122-3 que « La reproduction consiste dans la fixation matérielle de l’œuvre par tous procédés qui permettent de la communiquer au public d’une manière indirecte. »
Selon l’article L. 122-4, « Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. »
De la même manière, en application de l’article L. 216-1 du code de la propriété intellectuelle, l’autorisation de l’entreprise de communication audiovisuelle est requise avant toute reproduction, mise à la disposition du public par la vente, le louage ou l’échange, la radiodiffusion ou la télédiffusion, la mise à la disposition du public en ligne ou la communication au public dans un lieu accessible à celui-ci moyennant paiement d’un droit d’entrée, de ses programmes.
Enfin, il résulte de l’article L. 336-2 du même code qu’ « En présence d’une atteinte à un droit d’auteur ou à un droit voisin occasionnée par le contenu d’un service de communication au public en ligne, le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond peut ordonner à la demande des titulaires de droits sur les œuvres et objets protégés, de leurs ayants droit, des organismes de gestion collective régis par le titre II du livre III ou des organismes de défense professionnelle visés à l’article L. 331-1, toutes mesures propres à prévenir ou à faire cesser une telle atteinte à un droit d’auteur ou un droit voisin, à l’encontre de toute personne susceptible de contribuer à y remédier. La demande peut également être effectuée par le Centre national du cinéma et de l’image animée. »
Il est ici rappelé qu’aux termes de l’article D. 211-6-1 du code de l’organisation judiciaire, ce tribunal est compétent pour connaître des demandes en la matière dirigées contre des défendeurs ayant leur siège dans le ressort des cours d’appel de Nouméa, Papeete, Saint-Denis et du tribunal supérieur de Saint-Pierre.
Par délégation du ministère de la Jeunesse et des Sports et de la Fédération Française de Rugby (FFR), la Ligue nationale de rugby détient les droits exclusifs de diffusion audiovisuelle et de retransmission du Top 14, conformément à l’article L.132-1 du code du sport, à ses statuts et à une convention conclue avec la FFR.
La Ligue nationale de rugby atteste avoir cédé aux sociétés Groupe Canal + et SECP, à titre exclusif, les droits de transmission et retransmission du Top 14, à l’exception de la finale de ce championnat qui pourra également être diffusée gratuitement par France Télévisions (pièce Canal n°15).
La Ligue nationale de rugby a précisé que cette cession valait pour l’ensemble du territoire de la République françaises, incluant tous les teritoires situés outre-mer.
En outre, les sociétés Groupe Canal + et SECP sont titulaires du droit voisin des entreprises de communication audiovisuelle prévu à l’article L. 216-1 du code de la propriété intellectuelle sur les programmes diffusés sur les chaînes : Canal+, Canal+ Cinéma, Canal+ Sport, Canal+ Family, Canal+ Séries et Canal+ Décalé.
En conséquence, la société Groupe Canal + et la SECP sont recevables en leurs demandes.
II- Sur les atteintes aux droits
La mesure de blocage, que seule l’autorité judiciaire peut prononcer, suppose que soit caractérisée, préalablement, une atteinte à des droits d’auteur ou à des droits voisins.
Les procès-verbaux des agents assermentés versés aux débats établissent que ces sites et services IPTV permettent l’accès aux programmes de certaines des chaînes Canal sans autorisation des titulaires des droits.
Les sociétés Groupe Canal + et SECP ont fait dresser par commissaire de justice plusieurs procès-verbaux de constat qui permettent d’établir que les sites et services IPTV accessibles depuis les adresses litigieuses, diffusent des compétitions ou manifestations sportives, sur certaines desquelles les sociétés Groupe Canal + et SECP attestent disposer de droits voisins.
C’est ainsi que :
– Les 07 et 14 septembre 2024, le site internet accessible à l’adresse diffusait les matchs Aviron Bayonnais c. USA [Localité 22] et RC [Localité 24] c. [Localité 15] olympique du Top 14, par l’usage d’un DNS alternatif. Les procès-verbaux de constat dressés par l’ALPA (pièces Canal n°19-1 et 19-2) attestent que les images et le son sont identiques à ceux diffusés au même moment sur les chaînes Canal + et Canal + Sport. Les flux vidéos proviennent des adresses et .
– Les 07 et 14 septembre 2024, le site internet accessible à l’adresse , après redirection vers les noms de domaine et sous-noms de domaine , , et , diffusait les matchs Aviron Bayonnais c. USA [Localité 22] et RC [Localité 24] c. [Localité 15] olympique du Top 14. Les procès-verbaux de constat dressés par l’ALPA (pièces Canal n°20-1 et 20-2) attestent que les images et le son sont identiques à ceux diffusés au même moment sur les chaînes Canal + et Canal + Sport, y compris par l’usage d’un DNS alternatif. Les flux vidéos proviennent des adresses , et .
– Les 07 et 14 septembre 2024, le site internet accessible à l’adresse , après redirection vers le sous-nom de domaine , diffusait les matchs Aviron Bayonnais c. USA [Localité 22] et RC [Localité 24] c. [Localité 15] olympique du Top 14, par l’usage d’un DNS alternatif. Les procès-verbaux de constat dressés par l’ALPA (pièces Canal n°21-1 et 21-2) attestent que les images et le son sont identiques à ceux diffusés au même moment sur les chaînes Canal + et Canal + Sport. Les flux vidéos proviennent des adresses et .
– Les 07 et 14 septembre 2024, le site internet accessible à l’adresse diffusait les matchs [Localité 21] c. [Localité 18] et USA [Localité 22] c. [Localité 21] du Top 14. Les procès-verbaux de constat dressés par l’ALPA (pièces Canal n°22-1 et 22-2) attestent que les images et le son sont identiques à ceux diffusés au même moment sur les chaînes Rugby + et Canal + Sport, y compris par l’usage d’un DNS alternatif. Les flux vidéos proviennent des adresses et .
– Les 07 et 14 septembre 2024, le site internet accessible à l’adresse , après redirection vers le nom de domaine , diffusait les matchs [Localité 15] olympique c. Racing 92 et RC [Localité 24] c. [Localité 15] olympique du Top 14, par l’usage d’un DNS alternatif. Les procès-verbaux de constat dressés par l’ALPA (pièces Canal n°23-1 et 23-2) attestent que les images et le son sont identiques à ceux diffusés au même moment sur les chaînes Canal + et Canal + Sport. Les flux vidéos proviennent des adresses et .
– Les 07 et 14 septembre 2024, le site internet accessible à l’adresse , après redirection vers le nom de domaine , diffusait les matchs [Localité 13] [Localité 12] c. Stade français et RC [Localité 24] c. [Localité 15] olympique du Top 14. Les procès-verbaux de constat dressés par l’ALPA (pièces Canal n°24-1 et 24-2) attestent que les images et le son sont identiques à ceux diffusés au même moment sur les chaînes Canal + et Canal + Sport, y compris par l’usage d’un DNS alternatif. Les flux vidéos proviennent des adresses et .
– Les 07 et 14 septembre 2024, le site internet accessible à l’adresse , après redirection vers le nom de domaine , diffusait les matchs [Localité 13] [Localité 12] c. Stade français et RC [Localité 24] c. [Localité 15] olympique du Top 14. Les procès-verbaux de constat dressés par l’ALPA (pièces Canal n°25-1 et 25-2) attestent que les images et le son sont identiques à ceux diffusés au même moment sur les chaînes Canal + et Canal + Sport, y compris par l’usage d’un DNS alternatif. Les flux vidéos proviennent des adresses et .
– Les 07 et 14 septembre 2024, le site internet accessible à l’adresse , après redirection vers le nom de domaine , diffusait les matchs [Localité 13] [Localité 12] c. Stade français et USA [Localité 22] c. [Localité 21] du Top 14. Les procès-verbaux de constat dressés par l’ALPA (pièces Canal n°26-1 et 26-2) attestent que les images et le son sont identiques à ceux diffusés au même moment sur les chaînes Canal + et Canal + Sport, y compris par l’usage d’un DNS alternatif. Les flux vidéos proviennent des adresses et .
– Les 07 et 14 septembre 2024, le service IPTV XenonTV accessible à l’adresse diffusait les matchs Aviron bayonnais c. USA [Localité 22] et RC [Localité 24] c. [Localité 15] olympiques du Top 14. Les procès-verbaux de constat dressés par l’ALPA (pièces Canal n°27-1 et 27-2) attestent que les images et le son sont identiques à ceux diffusés au même moment sur les chaînes Canal + et Canal + Sport, y compris par l’usage d’un DNS alternatif.
– Les 07 et 14 septembre 2024, le service IPTV Lionsmart accessible à l’adresse diffusait les matchs Aviron bayonnais c. USA [Localité 22] et RC [Localité 24] c. [Localité 15] olympiques du Top 14. Les procès-verbaux de constat dressés par l’ALPA (pièces Canal n°28-1 et 28-2) attestent que les images et le son sont identiques à ceux diffusés au même moment sur les chaînes Canal + et Canal + Sport, y compris par l’usage d’un DNS alternatif.
Les sites et services IPTV litigieux ont pour objectif principal la diffusion de compétitions sportives sur une partie au moins desquelles les sociétés Groupe Canal + et SECP jouissent d’un droit voisin des entreprises de communication audiovisuelle.
Il est, par ailleurs, observé que, bien que les sites énumérés soient majoritairement accessibles en langue anglaise, leur usage est néanmoins aisé pour des utilisateurs francophones.
***
Il est ainsi démontré de manière suffisamment probante que les sites litigieux, permettent aux internautes d’accéder, sans autorisation, à des manifestations et compétitions sportives sur lesquelles les sociétés Groupe Canal + et SECP détiennent un droit voisin des entreprises de communication audiovisuelle, ce qui constitue une atteinte à leurs droits.
Les sociétés Groupe Canal + et SECP sont donc fondées à solliciter la prescription de mesures propres à prévenir ou faire cesser la violation de leurs droits sur le championnat dit « Top 14 ».
III- Sur les mesures sollicitées
L’article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle réalise la transposition de l’article 8 §3, de la directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001, sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information, aux termes duquel : « Les États membres veillent à ce que les titulaires de droits puissent demander qu’une ordonnance sur requête soit rendue à l’encontre des intermédiaires dont les services sont utilisés par un tiers pour porter atteinte à un droit d’auteur ou à un droit voisin ». Le seizième considérant de cette directive rappelle que les règles qu’elle édicte doivent s’articuler avec celles issues de la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000, relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (dite « directive sur le commerce électronique »).
La Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit dans l’arrêt Scarlet Extended c/ Sabam (C-70/10) du 24 novembre 2011 qu’ « ainsi qu’il découle des points 62 à 68 de l’arrêt du 29 janvier 2008, Promusicae (C-275/06, Rec. p. I-271), la protection du droit fondamental de propriété, dont font partie les droits liés à la propriété intellectuelle, doit être mise en balance avec celle d’autres droits fondamentaux.
45 Plus précisément, il ressort du point 68 dudit arrêt qu’il incombe aux autorités et aux juridictions nationales, dans le cadre des mesures adoptées pour protéger les titulaires de droits d’auteur, d’assurer un juste équilibre entre la protection de ce droit et celle des droits fondamentaux de personnes qui sont affectées par de telles mesures.
46 Ainsi, dans des circonstances telles que celles de l’affaire au principal, les autorités et les juridictions nationales doivent notamment assurer un juste équilibre entre la protection du droit de propriété intellectuelle, dont jouissent les titulaires de droits d’auteur, et celle de la liberté d’entreprise dont bénéficient les opérateurs tels que les FAI en vertu de l’article 16 de la charte.(…)
52 D’autre part, ladite injonction risquerait de porter atteinte à la liberté d’information puisque ce système risquerait de ne pas suffisamment distinguer entre un contenu illicite et un contenu licite, de sorte que son déploiement pourrait avoir pour effet d’entraîner le blocage de communications à contenu licite. En effet, il n’est pas contesté que la réponse à la question de la licéité d’une transmission dépende également de l’application d’exceptions légales au droit d’auteur qui varient d’un État membre à l’autre. En outre, certaines œuvres peuvent relever, dans certains États membres, du domaine public ou elles peuvent faire l’objet d’une mise en ligne à titre gratuit de la part des auteurs concernés. »
Dans l’arrêt UPC Telekable Wien du 27 mars 2014 (C-314/12), la Cour de justice a dit pour droit que :
« 48 Pour ce qui est de la liberté d’entreprise, il doit être constaté que l’adoption d’une injonction, telle que celle en cause au principal, restreint cette liberté.
49 En effet, le droit à la liberté d’entreprise comprend notamment le droit, pour toute entreprise, de pouvoir librement disposer, dans les limites de la responsabilité qu’elle encourt pour ses propres actes, des ressources économiques, techniques et financières dont elle dispose.
50 Or, une injonction telle que celle en cause au principal, fait peser sur son destinataire une contrainte qui restreint la libre utilisation des ressources à sa disposition, puisqu’elle l’oblige à prendre des mesures qui sont susceptibles de représenter pour celui-ci un coût important, d’avoir un impact considérable sur l’organisation de ses activités ou de requérir des solutions techniques difficiles et complexes.
51 Cependant, une telle injonction n’apparaît pas porter atteinte à la substance même du droit à la liberté d’entreprise d’un fournisseur d’accès à Internet, tel que celui en cause au principal. »
Il s’en déduit qu’un juste équilibre doit être recherché entre la protection du droit de propriété intellectuelle, d’une part, et la liberté d’entreprise des fournisseurs d’accès à internet, et les droits fondamentaux des clients des fournisseurs d’accès à internet, en particulier leur droit à la protection des données à caractère personnel et leur liberté de recevoir et de communiquer des informations, d’autre part.
La recherche de cet équilibre implique d’écarter toute mesure prévoyant un contrôle absolu, systématique et sans limitation dans le temps, de même que les mesures ne doivent pas porter atteinte à la « substance même du droit à la liberté d’entreprendre » des fournisseurs d’accès à internet, lesquels doivent conserver le choix des mesures à mettre en œuvre.
Aussi, conformément aux dispositions de l’article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle, il sera enjoint aux sociétés Can’l, Micrologic systems, Nautile, Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie, Offratel, Onati, Pacific mobile télécom, Service des postes et télécommunications (Wallis-et-Futuna), Télénet et Viti, de mettre en œuvre et/ou faire mettre en œuvre, toutes mesures propres à empêcher l’accès aux sites internet litigieux à partir du territoire français par tout moyen efficace de leur choix.
Les mesures de blocage concerneront les noms de domaine mentionnés dans la liste annexée au présent jugement, et permettant l’accès aux sites et services IPTV litigieux, dont le caractère entièrement ou essentiellement illicite a été établi. Compte tenu de leur nécessaire subordination à un nom de domaine, les mesures s’étendront à tous les sous domaines associés à un nom de domaine mentionné dans cette liste.
Par ailleurs, il ressort de l’article L.331-37 du code de la propriété intellectuelle que, « I.-Lorsqu’une décision judiciaire passée en force de chose jugée a ordonné toute mesure propre à empêcher l’accès à un service de communication au public en ligne en application de l’article L. 336-2, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, saisie par un titulaire de droits partie à la décision judiciaire, peut demander à toute personne visée par cette décision, pour une durée ne pouvant excéder celle restant à courir pour les mesures ordonnées par le juge, d’empêcher l’accès à tout service de communication au public en ligne reprenant en totalité ou de manière substantielle le contenu du service mentionné par ladite décision. Pour l’application du présent I, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique communique précisément les données d’identification du service en cause, selon les modalités qu’elle définit.
Dans les mêmes conditions, l’autorité peut également demander à tout exploitant de moteur de recherche, annuaire ou autre service de référencement de faire cesser le référencement des adresses électroniques donnant accès à ces services de communication au public en ligne.
Pour faciliter l’exécution des décisions judiciaires mentionnées à l’article L. 336-2, l’autorité adopte des modèles d’accord, qu’elle invite les ayants droit et toute personne susceptible de contribuer à remédier aux atteintes aux droits d’auteur et droits voisins en ligne à conclure. L’accord détermine notamment les conditions d’information réciproque des parties sur l’existence de tout service de communication au public en ligne reprenant en totalité ou de manière substantielle le contenu du service visé par la décision. Il engage toute personne susceptible de contribuer à remédier aux atteintes aux droits d’auteur et droits voisins en ligne, partie à l’accord, à prendre les mesures prévues par la décision judiciaire.
II.-En cas de difficulté relative à l’application des premier ou deuxième alinéas du I, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique peut demander aux services de se justifier. Sans préjudice d’une telle demande, l’autorité judiciaire peut être saisie, en référé ou sur requête, pour ordonner toute mesure destinée à faire cesser l’accès à ces services. Cette saisine s’effectue sans préjudice de la saisine prévue à l’article L. 336-2. »
Il sera fait droit aux demandes, selon les modalités précisées au dispositif de la présente décision, étant précisé qu’il apparaît proportionné, compte-tenu de l’urgence, et alors que le calendrier de la compétition est connu de longue date, de laisser un délai aux fournisseurs d’accès internet de cinq jours maximum suivant la signification de la présente décision, ce délai prenant en compte leur éloignement géographique, pour mettre en oeuvre la mesure de blocage ordonnée, le délai de cinq jours étant décompté ici conformément aux dispositions des articles 641 et 642 du code de procédure civile.
Le coût des mesures de blocage sera laissé à la charge des fournisseurs d’accès internet.
De tout ce qui précède il résulte que les mesures concernant les sites non encore identifiés dits « miroirs » doivent être demandées à L’arcom selon les modalités rappelées ci-dessus et au dispositif de la présente décision, laquelle est exécutoire par provision, tandis que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens et de ses frais irrépétibles.
Le tribunal,
Constate l’existence d’atteintes aux droits entreprises de communication audiovisuelle des sociétés Groupe Canal + et Société d’édition de Canal plus ;
Ordonne en conséquence aux sociétés Can’l, Micrologic systems, Nautile, Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie, Offratel, Onati, Pacific mobile télécom, Service des postes et télécommunications (Wallis-et-Futuna), Télénet et Viti, de mettre en oeuvre, au plus tard dans un délai de cinq jours suivants la signification de la présente décision, toutes mesures propres à empêcher, jusqu’à la date du dernier match de la compétition dite « Top 14 » 2024/2025 actuellement fixée au 28 juin 2025, l’accès aux sites et services IPTV identifiés ci-dessus ainsi qu’aux sites et services IPTV non encore identifiés à la date de la présente décision, à partir de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française et des îles Wallis-et-Futuna, et/ou par leurs abonnés à raison d’un contrat souscrit sur ce territoire, par tout moyen efficace, et notamment par le blocage de noms de domaine et des sous-domaines associés dont la liste figure dans le tableau annexé au présent jugement faisant partie de la minute et sera transmise au format CSV exploitable par les demanderesses aux défenderesses ;
Precise que le délai de cinq jours maximum prévus ci-dessus sera décompté conformément aux dispositions des articles 641 et 642 du code de procédure civile ;
Ordonne aux sociétés Groupe Canal + et Société d’édition de canal plus d’informer dans les plus brefs délais les sociétés Can’l, Micrologic systems, Nautile, Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie, Offratel, Onati, Pacific mobile télécom, Service des postes et télécommunications (Wallis-et-Futuna), Télénet et Viti de toute modification de la date du dernier match de la compétition dite « Top 14 » 2024/2025 actuellement fixée au 28 juin 2025, à laquelle les mesures ordonnées prendront fin ;
Dit que les sociétés Can’l, Micrologic systems, Nautile, Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie, Offratel, Onati, Pacific mobile télécom, Service des postes et télécommunications (Wallis-et-Futuna), Télénet et Viti, devront informer les sociétés Groupe Canal + et Société d’édition de canal plus de la réalisation de ces mesures et, le cas échéant, des difficultés qu’elles rencontreraient ;
Dit qu’en cas de difficultés d’exécution dans la mise en place des mesures de blocage ou pour les besoins de l’actualisation des sites et services IPTV visés, la partie la plus diligente pourra saisir la juridiction, en référé ou sur requête ;
Dit que les sociétés Can’l, Micrologic systems, Nautile, Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie, Offratel, Onati, Pacific mobile télécom, Service des postes et télécommunications (Wallis-et-Futuna), Télénet et Viti, pourront, en cas de difficultés notamment liées à des surblocages, en référer au président du tribunal judiciaire statuant en référé, le cas échéant à heure indiquée, afin d’être autorisées à lever la mesure de blocage ;
Dit que les sociétés Groupe Canal + et Société d’édition de canal plus devront indiquer aux fournisseurs d’accès à internet les noms de domaine dont elles auraient appris qu’ils ne sont plus actifs ou dont l’objet a changé afin d’éviter les coûts de blocage inutiles ;
Rappelle que pendant toute la durée des présentes mesures, les sociétés Groupe Canal + et Société d’édition de canal plus pourront communiquer à l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique les données d’identification de tout service de communication au public en ligne qui n’a pas encore été identifié à la date de la présente décision, diffusant illicitement les matchs de la compétition dite « Top 14 » 2024/2025, ou dont l’objectif principal ou l’un des objectifs principaux est la diffusion sans autorisation de matchs de la compétition dite « Top 14 » 2024/2025, aux fins de mise en œuvre des pouvoirs conférés à cette autorité par l’article L. 331-27 du code de la propriété intellectuelle ;
Rappelle qu’en application de l’article L. 331-27 II du code de la propriété intellectuelle, le Président du tribunal judiciaire statuant en référé ou sur requête peut être saisi pour ordonner toute mesure destinée à faire cesser l’accès à un service de communication en ligne au sens de l’article L. 336-2 du même code ;
Dit que le coût de la mise en œuvre des mesures ordonnées restera à la charge des sociétés Can’l, Micrologic systems, Nautile, Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie, Offratel, Onati, Pacific mobile télécom, Service des postes et télécommunications (Wallis-et-Futuna), Télénet et Viti ;
Condamne chaque partie à ses propres dépens ;
Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rappelle que la présente décision est exécutoire par provision.
Fait et jugé à Paris le 07 Novembre 2024
La Greffière La Présidente
Laurie ONDELE Anne-Claire LE BRAS
Décision du 07 novembre 2024
N°RG 24/11928 – N°Portalis 352J-W-B7I-C56F2
ANNEXE
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