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Le premier alinéa de l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse définit la diffamation comme «toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé », ledit fait devant être suffisamment précis pour pouvoir faire, sans difficulté, l’objet du débat sur la preuve de sa vérité organisé par les articles 35, 55 et 56 de la loi ; la diffamation, qui est caractérisée même si l’imputation est formulée sous forme déguisée ou dubitative, ou par voie d’insinuation, se distingue ainsi aussi bien de l’injure, que l’alinéa 2 du même article 29 définit comme « toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait », que de l’expression subjective d’un opinion, dont la pertinence peut être librement discutée dans le cadre d’un débat d’idées, mais dont la vérité ne saurait être prouvée.
Sur un Blog, des propos imputaient à des personnes d’avoir commis le délit d’escroquerie en bande organisée, délit spécifiquement prévu et réprimé par le dernier alinéa de l’article 313-2 du code pénal, les peines encourues étant celles mentionnées dans les propos poursuivis figurant dans la notice individuelle de chacun des demandeurs. L’imputation en cause, qui porte sur des faits suffisamment précis pour faire, sans difficulté, l’objet d’un débat probatoire, est incontestablement attentatoire à l’honneur et à la considération de chacun des demandeurs.
Le caractère diffamatoire des propos incriminés devant s’apprécier tant au regard des propos eux-mêmes que par rapport à leur contexte et à son incidence sur la détermination de leur sens exact et de leur portée précise. Par le contexte direct qui est le sien l’imputation d’avoir commis l’infraction d’escroquerie en bande organisée qui résulte des propos spécifiquement poursuivis se double, en l’espèce, pour chacun des demandeurs, de l’imputation, également diffamatoire, d’avoir été pénalement condamné pour l’infraction en cause.
En l’occurrence, les photographies des personnes diffamées, ainsi que leurs légendes, ont en effet été publiées au regard d’un texte ainsi rédigé, qui annonçait et introduisait la rubrique individuelle consacrée à chacun d’eux :
«ESCROQUERIE, MENSONGE JUDICIAIRE ET DÉLINQUANCE AU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES SOUS L’AUTORITÉ D’UN CONSEILLER D’ÉTAT »
Si les imputations diffamatoires sont réputées faites dans l’intention de nuire, leur auteur peut cependant justifier de sa bonne foi et doit, à cette fin, établir, de manière nécessairement cumulative, qu’il poursuivait un but légitime, exclusif de toute animosité personnelle, qu’il disposait d’une base factuelle suffisante et qu’il a fait preuve de prudence dans l’expression.
En l’espèce, le bénéfice de la bonne foi ne saurait être reconnu en l’absence de légitimité du but poursuivi, de base factuelle sérieuse et de prudence dans l’expression, alors que la détermination du sens exact et de la portée précise des faits d’escroquerie en bande organisée imputés aux demandeurs résulte d’un texte -au regard duquel sont publiées les photographies de ces derniers et à partir duquel leurs notices individuelles sont accessibles- qui, au moyen d’une flagrante contrevérité et d’une évidente tromperie de l’internaute, présente les accusations d’escroquerie en bande organisée portées par DSI comme avérées et comme ayant été pénalement sanctionnées.
La mauvaise foi caractérisée qui résulte d’une telle présentation fallacieuse des faits diffamatoires imputés aux demandeurs ne saurait aucunement être légitimée par les éléments invoqués en défense, à savoir la large liberté d’expression reconnue dans un cadre conflictuel aux auteurs d’un blog, membres d’un syndicat professionnel.