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Dès lors qu’est en cause un sujet d’intérêt général, la bonne foi en matière de diffamation doit s’apprécier plus souplement, y compris de la part de journalistes expérimentés.
C’est à tort que les juges du
fond ont retenu la culpabilité de journalistes du Canard enchaîné à l’origine
d’un article intitulé « Des notes de la CIA et de la DGSE annoncent un
coup d’État à Conakry » et sous-titré “Les troubles pourraient être
déclenchés dès la semaine prochaine » imputant à des hommes d’affaires, d’avoir
recruté des mercenaires, préparé un coup d’État, organisé une insurrection
violente, corrompu le pouvoir en place et déstabilisé le régime guinéen par des
moyens illégaux, pour favoriser un parti fictif et protéger leurs intérêts
miniers.
La journaliste du Canard enchaîné, entendue comme témoin avait expliqué avoir été « destinataire, peu avant les élections en Guinée, de deux notes confidentielles de la part d’une “source” en laquelle elle avait toute confiance et dont elle n’entendait pas révéler le nom, opposant le principe du secret des sources ». Sur l’offre de preuve de vérité, les juges du fond ont considéré à tort que ni les documents produits, soit plusieurs textes, certains en langue anglaise, non traduits, et deux notes dites blanches, qui ne peuvent être rattachées à un quelconque service secret, français ou américain, ni les déclarations des témoins, compte tenu de leur teneur, ne démontrent d’aucune façon l’organisation ni même la participation des parties civiles au coup d’État visant le régime guinéen, et en déduit que la preuve de la vérité des faits diffamatoires n’était pas rapportée. Le défaut la prudence nécessaire dans l’expression et la base factuelle nécessaire insuffisante avaient également été retenus.
En se déterminant ainsi, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision pour au moins trois raisons. En premier lieu, il lui appartenait, en premier lieu, d’analyser précisément les pièces de l’offre de preuve et les déclarations des témoins entendus à ce titre, également invoquées par la journaliste au soutien de l’exception de bonne foi, afin d’énoncer les faits et circonstances lui permettant de juger si les propos reposaient ou non sur une base factuelle, sans écarter les documents présentés comme des notes blanches au seul motif que le prévenu ne révélait pas par quelles sources il les avait obtenus.
En second lieu, elle ne pouvait refuser à la journaliste le bénéfice de la bonne foi aux motifs d’un défaut de prudence dans l’expression et d’une animosité personnelle de l’auteur de l’article, alors qu’elle devait apprécier ces critères d’autant moins strictement qu’elle constatait, en application de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, les propos s’inscrivaient dans un débat d’intérêt général.
En troisième lieu, elle ne pouvait déduire l’animosité personnelle de la journaliste sur le seul fondement de la gravité des accusations et du ton sur lequel elles étaient formulées. Télécharger la décision