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C O U R D ‘ A P P E L D ‘ O R L É A N S
CHAMBRE SOCIALE – A –
Section 2
PRUD’HOMMES
Exp +GROSSES le 07 JUILLET 2022 à
la SELARL SELARL MAÏLYS DUBOIS
la SELARL LEXAVOUE POITIERS – ORLEANS
– XA-
ARRÊT du : 07 JUILLET 2022
MINUTE N° : – 22
N° RG 20/00523 – N° Portalis DBVN-V-B7E-GDXK
DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE TOURS en date du 10 Février 2020 – Section : INDUSTRIE
APPELANT :
Monsieur [U] [H]
né le 01 Décembre 1974 à CHINON (37500)
54 avenue de Verdun
37140 CHOUZE SUR LOIRE
représenté par Me Maïlys DUBOIS de la SELARL SELARL MAÏLYS DUBOIS, avocat au barreau de TOURS
ET
INTIMÉE :
S.A.S. CIMENT CALCIA La SAS CIMENT CALCIA, au capital de 593.836.525 €, immatriculée au RCS de VERSAILLES sous le n° 654 800 689, dont le siège social est Rue des Technodes – 78930 GUERVILLE, prise en son Etablissement secondaire sis Le Bourg – 37330 VILLIERS AU BOUIN, est prise en la personne de son Président, en exercice, et de tous autres représentants légaux domiciliés ès-qualité au siège.
Le Bourg
37330 VILLIERS AU BOUIN
représentée par Me Isabelle TURBAT de la SELARL LEXAVOUE POITIERS – ORLEANS, avocat au barreau d’ORLEANS,
ayant pour avocat plaidant Me Myriam ANOUARI de la SCP CHASSANY WATRELOT & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS
Ordonnance de clôture : 14 avril 2022
Audience publique du 12 Mai 2022 tenue par Mme Laurence DUVALLET, Présidente de chambre, et par Monsieur Xavier AUGIRON, conseiller, et ce, en l’absence d’opposition des parties, assistés lors des débats de Mme Fanny ANDREJEWSKI-PICARD, Greffier,
Après délibéré au cours duquel Mme Laurence DUVALLET, Présidente de chambre et Monsieur Xavier AUGIRON, conseiller, ont rendu compte des débats à la Cour composée de :
Madame Laurence DUVALLET, présidente de chambre, présidente de la collégialité,
Monsieur Alexandre DAVID, président de chambre,
Monsieur Xavier AUGIRON, conseiller.
Puis le 07 Juillet 2022, Madame Laurence Duvallet, présidente de Chambre, présidente de la collégialité, assistée de Mme Fanny ANDREJEWSKI-PICARD, Greffier a rendu l’arrêt par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
Selon contrat de travail à durée indéterminée, la société Ciments Calcia (SAS) a engagé M.[U] [H] à compter du 7 mars 2005 en qualité de technicien de maintenance 1 (TM1), catégorie EDTAM-Employé, coefficient de base 255, coefficient personnel 260, en application de la convention collective nationale du personnel employés, techniciens, dessinateurs et agents de maitrise de l’industrie de la fabrication des ciments du 2 février 1976.
Le 18 septembre 2017, M. [U] [H] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé le 27 septembre 2017, avec mise à pied immédiate à titre conservatoire.
Le 3 octobre 2017, la SAS Ciments Calcia, a notifié à M. [U] [H] son licenciement pour faute grave.
Il lui était reproché d’avoir ” attaqué, calomnié et dénigré la direction de la société ” à l’occasion d’une étude à laquelle il lui avait été demandé de procéder, réalisée le 13 septembre 2017.
Par requête du 20 juillet 2018, M. [U] [H] a saisi le conseil de prud’hommes de Tours aux fins de demander, à titre principal, des dommages et intérêts pour ” entrave discriminatoire de l’évolution de carrière “, obtenir sa réintégration, et, subsidiairement, la requalification de son licenciement pour faute grave en un licenciement nul, ou, à défaut, dépourvu de cause réelle et sérieuse, et obtenir diverses sommes en conséquence.
Par jugement du 10 février 2020, le conseil de prud’hommes de Tours a :
– Dit et jugé que M. [U] [H] n’a pas fait l’objet de discrimination de la part de la SAS Ciments Calcia,
– Dit et jugé que le licenciement de M. [U] [H] pour faute grave est justifié,
– Débouté M. [U] [H] de l’ensemble de ses demandes,
– Débouté les parties de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– Laissé à la charge de chacune des parties leurs dépens d’instance y compris les frais éventuels d’exécution.
M. [U] [H] a relevé appel de cette décision par déclaration formée par voie électronique le 25 février 2020.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Vu les dernières conclusions remises au greffe par voie électronique le 8 avril 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles, M. [U] [H] demande à la cour de :
– Dire et juger M. [U] [H] recevable et bien fondé en son appel interjeté à l’encontre du Jugement rendu le 10 février 2020 par le conseil de prud’hommes de Tours,
Le réformer,
En conséquence,
A titre liminaire,
– Ordonner la communication par la SAS Ciments Calcia des éléments administratifs et financiers permettant de calculer le salaire correspondant au grade TM4 auquel M. [U] [H] aurait pu prétendre,
A titre principal,
– Dire et juger que M. [U] [H] a été victime d’une mesure discriminatoire de la part de la SAS Ciments Calcia dans l’évolution de sa carrière professionnelle,
– Dire et juger que M. [U] [H] a été victime de harcèlement moral de la part la SAS Ciments Calcia,
– Dire et juger que son licenciement pour faute grave est nul,
– Condamner la SAS Ciments Calcia à payer la somme de 37 879,32€ à titre de dommages-intérêts pour l’entrave discriminatoire de l’évolution de carrière de M. [U] [H] ainsi que le comportement de harcèlement moral subi par M.[U] [H],
– Ordonner la réintégration de M. [U] [H] au sein de la SAS Ciments Calcia,
A défaut,
– Condamner la SAS Ciments Calcia à verser la somme de 50 000 euros à titre dommages-intérêts en réparation de la nullité du licenciement,
A titre subsidiaire,
– Dire et juger que le licenciement pour faute grave de M. [U] [H] est sans cause réelle et sérieuse,
– Condamner la SAS Ciments Calcia à payer la somme de 34 689,71euros à titre d’indemnité sans cause réelle et sérieuse,
En toute hypothèses,
– Ordonner l’annulation de la mise à pied conservatoire de M. [U] [H],
– Condamner la SAS Ciments Calcia à un rappel de salaire du 3 octobre 2014 au 3 octobre 2017 ainsi qu’aux congés payés afférents,
– Condamner la SAS Ciments Calcia au paiement de la somme de 11 824,09 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,
– Condamner la SAS Ciments Calcia au paiement d’une indemnité de préavis à parfaire ou à défaut à hauteur de 6 313,20 euros,
– Condamner la SAS Ciments Calcia au paiement d’une somme à parfaire avec le coefficient communiqué par l’employeur ou à défaut au paiement de la somme de 613,31euros à titre de congés payés,
– Condamner la SAS Ciments Calcia au paiement d’une somme à parfaire avec le coefficient communiqué par la société à titre de rappel de salaire suite à l’annulation de la mise à pied conservatoire ou à défaut à la somme de 1 366,25 euros outre la somme de 136,32 euros au titre des congés-payés afférents,
– Ordonner la remise des effets personnels énumérés avec astreinte de 100 euros par jour de retard à compter d’un délai d’un mois à compter de la notification de l’arrêt à intervenir:
– Documents épargne temps compte CPF
– 1 classeur de cours du stage IRA avec son attestation de stage,
– 5 attestations de stage avec 5 supports de cours et les 5 paquets de prise de note associée à ces 5 formations fait avec CAP API,
– 1 classeur de cours du stage doseur Hasler avec son attestation de stage,
– 1 classeur de cours du stage doseur Fister avec son attestation de stage,
– 1 livre de cours à spirale du stage superviseur Panorama avec son attestation de stage,
– 1 support de cours du stage environnement SA avec son attestation de stage,
– 2 CD pack office 2003 et 2007 pro,
– titre d’habilitation électrique avec le manuel de référence,
– 3 ordinateurs,
– cours d’école AFPA pour le diplôme TSAII,
– certificat de travail,
– attestation de Pôle Emploi,
– bulletins de paie afférents aux créances salariales,
– Condamner la SAS Ciments Calcia à verser la somme de 7000 euros à titre de dommages-intérêts pour l’absence de restitution de ses effets personnels,
– Condamner la SAS Ciments Calcia au paiement d’une indemnité d’un montant de 250 euros correspondant à la valeur du panier cadeau dont le salarié a été privé,
– Condamner la SAS Ciments Calcia à verser la somme de 650 euros à titre de prime (versée en avril 2018 aux salariés),
– Condamner la SAS Ciments Calcia à verser une somme à parfaire correspondant au montant de la prime versée pour les salariés décorés de la médaille du travail,
– Condamner la SAS Ciments Calcia au paiement de la somme de 5 000 euros pour exécution déloyale du contrat de travail,
– Condamner la SAS Ciments Calcia au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens,
– Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir.
&
Vu les dernières conclusions remises au greffe par voie électronique le 14 avril 2022 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles la SAS Ciments Calcia, demande à la cour de :
– Déclarer M.[U] [H] mal fondé en son appel,
A titre principal,
– Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Tours en ce qu’il a débouté M. [U] [H] de l’ensemble de ses demandes,
– Déclarer irrecevable la demande de dommages-intérêts pour harcèlement,
En tout état de cause,
– Débouter M. [U] [H] de sa demande,
Y ajoutant,
– Condamner M. [U] [H] à la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens,
A titre subsidiaire, si par extraordinaire, la cour devait considérer que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, il lui est demandé de bien vouloir :
– Fixer le salaire mensuel de référence à la somme de 3.156,61 euros bruts,
– Limiter le montant de l’indemnité compensatrice à 6.313,22 euros bruts outre 631,32 euros bruts à titre de congés payés afférents,
– Limiter l’indemnité de licenciement à la somme de 11.824,09 euros bruts,
– Débouter M. [U] [H] du surplus de ses demandes,
A titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire, la cour devait considérer que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse :
– Limiter le montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 9.470 euros conformément aux dispositions de l’article L.1235-3 du Code du travail,
– Débouter M. [U] [H] du surplus de ses demandes.
MOTIFS DE LA DÉCISION
-Sur l’évolution de carrière de M.[H] et la discrimination
L’article 1132-1 du code du travail, dans sa version applicable au moment du licenciement de M.[H], prévoit qu’aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m’urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d’autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français.
M.[H] invoque l’existence d’une discrimination commise par l’employeur à son encontre, liée à l’évolution, selon lui anormale, de sa carrière au sein de la société Ciments Calcia.
Il relève que déjà, lors de son embauche en mars 2005, son expérience professionnelle et les formations qu’ils avait suivies n’ont pas été pris en compte, et il considère qu’il aurait dû être recruté d’emblée en tant que technicien de maintenance au niveau 2 (TM2) au lieu de TM1, expliquant que c’était ” pour ne pas froisser ” un salarié déjà présent dans l’entreprise. Il ajoute que lors de son passage en janvier 2012 au niveau TM2, avec retard, son salaire a diminué en raison de la suppression d’avantages qu’il percevait auparavant, comme les ” forfaits douche ” ou des ” points personnels “. Il compare également sa situation avec celle de M.[T], qui exerçait le même emploi que lui, mais avec la qualité de technicien automaticien, avec une différence notable de salaire, statut que M.[H] n’a pas pu atteindre, alors qu’il était désigné comme tel dans une note de service et l’organigramme de la société en 2005, avant d’en disparaître. Il relève que les chartes du service maintenance des 28 août 2000 et 20 mars 2012 n’ont pas été respectées, de sorte qu’il n’a pas pu progresser dans sa carrière, d’autant qu’il s’est trouvé exclu du cursus de formation, contrairement à nombre de ses collègues, et n’a pas pu bénéficier du processus de validation des savoir-faire opérationnels, sinon de manière incomplète et irrespectueuse du protocole prévu par la charte applicable, compte tenu notamment des défaillances de l’employeur s’agissant des entretiens annuels ou de la réalisation des ” grilles de savoir-faire opérationnels “. Il se plaint également que des tâches subalternes étaient ajoutées à celles relevant de ses fonctions, mais que lorsqu’il s’est agi de remplacer M.[T] après le départ de celui-ci à la retraite, il a été écarté de ce recrutement alors que tout avait été anticipé dans ce sens en termes de transfert de connaissance, avec l’aval de ses supérieurs hiérarchiques. M.[H] ajoute qu’il a été privé de ligne téléphonique fixe ou mobile, et, avant 2013, d’une boîte mail, contrairement à ses collègues. Enfin, il fait état de comportements méprisants et humiliants à son endroit en lien avec des critiques sur son caractère, étant comparé à un ” autiste ” ou un ” simple d’esprit “. Il en conclut à l’existence d’une discrimination compte tenu des inégalités de traitement qu’il a subies.
La société Ciments Calcia soulève la prescription des faits invoqués par M.[H], au visa de l’article L.1471-1 du code du travail, qui datent de plus de deux ans avant la saisine du conseil de prud’hommes.
Sur le fond, la société Ciments Calcia affirme que M.[H] a été engagé au niveau TM1 avec son accord, et qu’il n’est pas démontré que ses fonctions technicien de maintenance ne correspondaient pas à cette classification, aucune régularisation n’ayant été réclamée par celui-ci à cet égard. L’employeur affirme que M.[H] a bénéficié d’une évolution de carrière conforme à ce que prévoit l’accord collectif applicable, que ce soit au niveau de son grade ou de son coefficient ou de sa rémunération, relevant notamment qu’a été élaboré en 2017 un plan d’actions pour qu’il puisse bénéficier de l’échelon TM3. M.[H] n’aurait jamais contesté les axes d’amélioration et les remarques formulées par sa hiérarchie. Tout traitement différencié par rapport à ses collègues est contesté, que ce soit en termes de rémunération, d’élaboration des grilles des savoir-faire opérationnels ou de formations, organisées de manière régulière. La société Ciments Calcia conteste qu’il ait été prévu que M.[H] remplace M.[T], compte tenu de ce que certains savoir-faire n’étaient pas maîtrisés et que l’intéressé n’aurait jamais postulé à ce poste, d’autant que les conditions financières ne lui convenaient pas et qu’il souhaitait conserver un travail à temps partiel. La société Ciments Calcia affirme que M.[H] disposait d’une ligne de téléphone mobile et d’un email depuis 2013.
-Sur l’action engagée par M.[H] fondée sur la discrimination
La cour relève en premier lieu que la discrimination n’est prohibée qu’en raison de caractéristiques limitativement énumérées par l’article L.1132-1 du code du travail.
En l’espèce, M.[H] ne revendique aucune de ces caractéristiques pour en déduire l’existence d’une discrimination qui en serait la cause et n’invoque en réalité que des atteintes à l’égalité de traitement entre les salariés de l’entreprise, et en particulier une inégalité de traitement dans l’évolution de sa carrière et dans son droit à la formation et ses conséquences sur sa classification et son salaire.
Il convient dès lors, en application des dispositions de l’article 12 du code de procédure civile qui impose au juge de donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposé, de requalifier l’action engagée par M.[H], fondée sur la discrimination, en action fondée sur une atteinte au principe de l’égalité de traitement, évoqué d’ailleurs également dans ses écritures.
– Sur la prescription
L’article L. 1471-1 du code du travail, invoqué par l’employeur, exclut expressément les actions afférentes à la discrimination de son champ d’application, de sorte que c’est la prescription quinquennale qui est applicable à l’action fondée sur la discrimination, comme le prévoit par ailleurs l’article 1134-5 du code du travail pour les actions en réparation du préjudice résultant d’une discrimination.
Le délai quinquennal de prescription applicable en matière de discrimination ne s’applique en revanche pas lorsque le salarié invoque, comme en l’espèce, une atteinte au principe d’égalité de traitement. Dans ce cas, la durée de la prescription est déterminée par la nature de la créance objet de sa demande (Soc., 23 juin 2021, pourvoi n° 18-24.810, FS, P).
S’agissant de la demande de dommages-intérêts formée par M.[H], qui est relative aux conditions d’exécution du contrat de travail, la prescription biennale prévue par l’article L.1471-1 du code du travail est applicable.
En l’espèce, l’inégalité de traitement, selon la description qu’en fait M.[H], s’est déroulée tout au long de la relation contractuelle, jusqu’à son licenciement.
Dès lors, la demande de dommages-intérêts formée par M.[H] n’est pas prescrite, le délai biennal de prescription ayant débuté le 3 octobre 2017, date du licenciement et ayant été interrompu par la saisine du conseil de prud’hommes le 20 juillet 2018.
S’agissant des demandes formées au titre du licenciement, la prescription applicable est d’un an, en application de l’article L.1471-1 du code du travail.
Cette demande n’est pas plus prescrite que la précédente et est recevable.
-Sur le fond
L’éventuelle rupture d’égalité de traitement doit reposer sur une analyse comparée de la situation réelle du salarié par rapport à celle de ses collègues.
S’agissant de l’évolution de M.[H] au sein de la classification prévue lors de son embauche par l’accord d’entreprise ” relatif au personnel de maintenance ” du 1er septembre 2000, la cour constate en premier lieu que M.[H] a accepté les conditions de son embauche au niveau TM1, quoique selon lui, son expérience passée lui aurait permis de prétendre au niveau TM2. Certes, M.[T], qui loue les capacités de M.[H], vient attester que ce dernier n’a pas été d’emblée embauché au niveau TM2 pour ne pas désavantager un salarié déjà présent au sein de l’entreprise, mais il n’en résulte pas que M.[H] ait été pour autant désavantagé :
En effet, dès les premiers temps de son embauche, M.[H] a bénéficié d’une progression régulière non pas du coefficient de base prévu à l’accord, mais de son ” coefficient personnel ” : Le contrat de travail initial prévoyait déjà un coefficient de base (255) corrigé par un coefficient personnel à 260. Ce coefficient a régulièrement été revalorisé pour atteindre 265 au 1er avril 2009, 276 au 1er janvier 2011, 285 au 1er mars 2012, ce qui dépassait alors le coefficient prévu pour le niveau TM3 (280). Aussi, dès cette date, s’il ne bénéficiait pas de la classification qu’il espérait, il en bénéficiait des avantages puisqu’il lui était alloué pendant toute cette période un nombre de points supérieur à celui auquel il pouvait prétendre au titre de sa classification.
Il est à noter qu’il bénéficiait en outre d’un ” forfait douche “, comme M.[T].
A cet égard, dans le ” tableau de translation ” élaboré lors de l’entrée en vigueur de l’accord, les 4 niveaux TM correspondent tous au même emploi de ” technicien automaticien “. C’est d’ailleurs l’emploi figurant sur le bulletin de salaire de son collègue M.[T], qui certes disposait du niveau TM3, mais qui était embauché depuis le 7 avril 1977 au sein de la société alors dénommée ” Ciments du Val de Loire “, et qui disposait donc d’une ancienneté et d’une expérience sans commune mesure avec celle de M.[H], qui selon une attestation de M. [T], a été formé par ce dernier lors de son arrivée. Ces éléments expliquent la différence de traitement pour des fonctions en apparence similaires.
Dans un organigramme de septembre 2007, l’un et l’autre apparaissent en tant que ” techniciens automation “. Certes, les fonctions de M.[T] et de M.[H] sont distinguées dans une note de service du 1er juillet 2008 puis un document du 3 août 2009, puisque seul le premier apparaît en qualité de technicien automation, tandis que M.[H] est mentionné en qualité de simple intervenant, ce dont il a manifestement pris ombrage, mais ce qui n’a eu aucune conséquence sur sa classification ou son salaire.
Il résulte de ces éléments que M.[H] ne peut déplorer aucune inégalité de traitement par rapport ses collègues, et plus particulièrement par rapport à son collègue M.[T].
L’accord d’entreprise du 1er septembre 2000 prévoyait en outre un ” schéma de progression dans la filière ” nécessitant, pour ” accéder à la formation pour le niveau supérieur “, la ” validation des savoir-faire opérationnels de niveau inférieur “.
Cet accord a fait place à compter du 20 mars 2012 à un nouvel accord d’entreprise reprenant, en le détaillant, le même processus, auquel M.[H] a été soumis puisqu’après avoir été l’objet d’une validation des savoir-faire opérationnels, M.[H] a bénéficié à partir du 1er juillet 2013 d’une promotion au niveau TM2, avec un coefficient de base 285 et un coefficient personnel 300.
Cependant, ce dernier a manifesté son désaccord en constatant que des ” point douche ” lui avaient été retranchés à la suite de sa promotion, de sorte que son salaire est demeuré sensiblement le même, déplorant même une ” diminution de 51,50 euros ” par mois.
Il n’en demeure pas moins que M.[H] restait titulaire d’un coefficient personnel supérieur à celui auquel il pouvait prétendre au regard de sa classification, de sorte qu’il ne peut se plaindre à ce niveau d’avoir été sous-payé par rapport à ses collègues.
M.[H] a donc bénéficié en 2013 du schéma de progression dans la filière dans les conditions prévues à l’accord d’entreprise, comme M.[H] en avait manifesté le souhait lors de l’entretien annuel de l’année 2010, réalisé le 7 janvier 2011 ; quoiqu’en disent les salariés ayant attesté au profit de M.[H], qui ont trouvé cette promotion tardive, ceux-ci ne relèvent pas pour autant qu’eux-mêmes aient bénéficié d’un meilleur traitement, et d’une promotion plus aisée.
S’agissant de la période postérieure à 2013, la cour constate que M.[H] a effectivement stagné dans sa carrière, puisqu’il n’a, jusqu’à son licenciement en octobre 2017, jamais pu atteindre le niveau TM3. M.[P], considère dans son attestation que M.[H] ” avait obtenu gain de cause pour son échelon TM2, depuis, il n’évoluait plus ” et que la passation au niveau TM3 avait été ” refusé “. Cependant, l’évolution de carrière de M.[H] fut évoquée, selon l’attestation de M.[V], délégué du personnel, qui indique en avoir parlé avec la direction et précise avoir constaté, de manière sibylline, que ” ce fut un échec des 2 parties, chacun restant sur sa position “.
Cependant, si pendant les 4 années qui ont séparé la dernière promotion de M.[H] de son licenciement, M.[H] n’a pas connu d’évolution, l’accord d’entreprise du 20 mars 2012 prévoit une durée minimale de 2 ans pour ” acquérir et maîtriser l’expérience de ce niveau avant de pouvoir envisager une progression “, ce qui ne signifie pas pour autant qu’une promotion soit ensuite automatique.
Par ailleurs, l’accord prévoit en son article 7 que ” l’évolution professionnelle vers des niveaux supérieurs à TM2 (TM3/TM4) restera à la discrétion de la direction et n’interviendra en tout état de cause après une validation des savoir-faire opérationnels “, ce qui laisse une latitude certaine à l’employeur en termes d’évolution des salariés à partir d’un niveau que M.[H] avait atteint.
Pendant cette période, il a néanmoins été l’objet d’entretiens annuels réguliers à l’occasion desquels il a pu manifester ses souhaits, et notamment, en 2013, de ” remplacer M.[T] lors de son départ à la retraite “.
A cet égard, si M.[H] apparaît avoir souffert du remplacement de M.[T], dont il convoitait le poste, par M.[L], il lui a été expliqué lors d’une réunion du 4 avril 2017 qu’il ne s’agissait pas pour ce dernier de remplacer M.[T] à 100 % mais de mettre en place la continuité du service avec la ” création et/ou partage des comptes rendus d’activité, résultat d’audit, manuels fournisseurs, modes opératoires pour la maintenance des appareils, configuration des appareils, etc “, ” stratégie ” dont la mise en place par M.[H] ” en total autonomie ” est posée comme un préalable à une évolution vers le niveau TM3 ” sur le court terme (2-4 mois) “, sachant qu’il lui était indiqué que cette évolution demeurait possible et que M.[H] avait le potentiel pour cela.
De plus, la société Ciments Calcia produit une fiche de validation des savoir-faire opérationnels signée de M.[H] et établie le 8 juin 2017, de sorte que le processus d’évolution de ce dernier vers le niveau supérieur était enclenché.
Ces éléments démontrent que M.[H] n’était donc pas pris pour un ” autiste ” ou un ” simple d’esprit ” ou quelqu’un de ” bizarre ” par ses supérieurs hiérarchiques, comme le relèvent les attestations qu’il produit.
S’agissant des conditions dans lesquelles M.[H] a pu se former, les éléments produits par l’employeur à partir de 2010 établissement que ce dernier a suivi régulièrement de nombreuses formations.
De plus, ce n’est pas le défaut de formation dans tel ou tel domaine qui est à l’origine de ce que M.[H] n’ait pas été à même de parvenir à la promotion qu’il convoitait ou à son affectation au poste de M.[T], et notamment pas la formation en anglais, acceptée mais en dehors du temps de travail, ou les formations Methodo15 et Elprojet, sollicitées en vain lors de l’entretien 2016, d’autant que l’employeur, pour refuser la passation au niveau TM3 en avril 2017, n’a évoqué aucune formation nécessaire pour y parvenir.
Enfin, il est établi que M.[H] disposait d’un téléphone portable depuis 2007, à défaut d’une ligne fixe, et qu’en 2013 il a été doté d’une adresse email, de sorte que la privation des outils de travail qu’il évoque ne peut être retenue et n’a en rien grevé ses possibilités d’évolution au sein de l’entreprise.
Il résulte de ces éléments que M. [H] échoue dans la démonstration d’une inégalité de traitement par rapport à ses collègues en termes d’évolution de carrière, de sorte que par voie de confirmation, il sera débouté de sa demande en paiement de dommages-intérêts formée à ce titre.
Il sera également débouté de sa demande de communication des éléments permettant de calculer le salaire correspondant au grade TM4, et de sa demande de rappel de salaire pour la période du 3 octobre 2014 au 3 octobre 2017, qui n’est pas fondée.
– Sur le harcèlement moral
Aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
En vertu de l’article L. 1154-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-1088 du 8 août 2016, applicable en la cause, lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de laisser supposer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du code du travail. Dans l’affirmative, il appartient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
En l’espèce, M.[H] reprend l’ensemble des griefs qu’il a opposés à son employeur dans le cadre de l’action visant à voir reconnaître l’inégalité de traitement qu’il aurait subie.
Il ajoute qu’il aurait souffert d’un ” isolement spatial ” et d’une surcharge de travail importante.
La société Ciments Calcia demande que cette demande soit déclarée irrecevable, en invoquant le caractère nouveau de ce moyen, soulevé pour la première fois en cause d’appel.
La cour relève que si M.[H] invoque effectivement pour la première fois en appel l’existence d’un harcèlement moral, c’est à l’appui d’une demande de nullité du licenciement, déjà formée en première instance, de sorte que cette prétention n’est pas nouvelle au sens de l’article 564 du code de procédure civile puisqu’elle tend aux mêmes fins que celle soumise au premier juge, même si son fondement juridique est différent, comme le prévoit l’article 565 du code de procédure civile.
Par ailleurs, la société Ciments Calcia invoque la prescription de l’action intentée par M.[H] au titre du harcèlement moral.
La cour rappelle néanmoins que le délai de prescription applicable est la prescription de droit commun de 5 ans prévu par l’article 2224 du code civil, l’article L.1471-1 du code du travail excluant le harcèlement moral de son champ d’application.
M.[H] évoquant des faits qui se sont poursuivis jusqu’au licenciement, son action n’est pas prescrite et demeure recevable.
Sur le fond, la société Ciments Calcia soutient que M.[H] n’a jamais évoqué pendant la relation contractuelle de faits de harcèlement moral et que les éléments médicaux qu’il produit sont postérieurs au licenciement.
La cour relève qu’aucune discrimination ou aucune inégalité de traitement n’est établie au préjudice de M.[H], l’ensemble des griefs évoqués par ce dernier à cet égard ayant été jugés inopérants.
S’agissant du prétendu isolement dont il aurait été victime, ou des brimades qu’il aurait subies de la part de ses supérieurs, les quelques attestations portant sur des propos tenus par ceux-ci sur le caractère de M.[H], d’ailleurs en dehors de sa présence, sont insuffisants à en établir la réalité.
M.[H] produit au contraire plusieurs attestations dont il résulte que ce dernier était apprécié de ses collègues ; les entretiens d’évaluation ne laissent apparaître aucune remarque désobligeante de la part de ses responsables sur la qualité de son travail ou son caractère.
Aucun élément ne permet d’établir la réalité des faits allégués par M.[H].
Par ailleurs celui-ci fait état de problèmes psychologiques, et un rapport d’expertise mentionne qu’ils se caractérisent notamment par des troubles de l’attention, la baisse de ses capacités d’attention, des difficultés de conceptualisation et d’accès à l’abstraction. Il est fait état d’une tendance à l’impulsivité et d’une composante dépressive. Le psychologue n’établit cependant aucun lien avec son travail, et ne mentionne aucunement l’existence passée de faits de harcèlement moral, le compte-rendu ayant été rédigé 3 années après son licenciement.
L’ensemble des éléments soumis à la cour par M.[H], en l’absence de pièces médicales plus récentes et plus explicites sur une situation éventuelle de harcèlement moral, ne permet pas de présumer que M.[H] en aurait été victime, ce d’autant que l’inégalité de traitement dont il se plaint par ailleurs n’est pas établie.
M.[H] sera débouté de sa demande en paiement de dommages-intérêts au titre du harcèlement moral.
-Sur la demande visant au prononcé de la nullité du licenciement et la demande de réintégration
En l’absence de toute discrimination ou de tout harcèlement moral, cette demande sera, par voie de confirmation, rejetée.
Il en sera de même de la demande en paiement de dommages-intérêts pour nullité du licenciement et de la demande de réintégration formée par M.[H].
– Sur le licenciement pour faute grave
Il résulte de l’article L.1232-1 du code du travail que tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.
Le motif inhérent à la personne du salarié doit reposer sur des faits objectifs, matériellement vérifiables et qui lui sont imputables.
L’article L.1235-1 du code du travail prévoit qu’en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
Enfin, la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et qui justifie la rupture immédiate de son contrat de travail, sans préavis ; la charge de la preuve pèse sur l’employeur.
La lettre de licenciement fait état d’une ” étude ” que M.[H] a réalisée, alors que de simples renseignements lui étaient demandés, sur le centre de broyage Val de Loire, qu’il a intitulée ” Centre broyage Val de Loire après 10 minutes de recherche sur Google “, dans laquelle il mentionne : ” je trouve bizarre ou anormal que des mecs grassement payés pour être dirigeant pays, commercial région, analyste de marché, ne sont pas foutus de donner des informations au directeur d’usine concerné quand il demande des nouvelles à ce sujet. Soit ces mecs sont des incapables, soit ils sont de la magouille en se faisant passer pour chien et chat tout en dormant dans le même panier “, adressant ce document par courriel le 13 septembre 2017 aux dirigeants cités et notamment au directeur général de la société.
La société Ciments Calcia soutient que les propos qui sont reprochés par M.[H] dans la lettre de licenciement présentent un caractère inacceptable, portant atteinte à la réputation de l’entreprise et de ses dirigeants, caractéristique d’un abus de la liberté d’expression.
M.[H] ne conteste pas la teneur des écrits qui lui sont prêtés, mais tente de les expliquer par le contexte tel qu’il l’a décrit précédemment, et notamment les brimades dont il était l’objet, par le fait qu’il attendait une réponse quant à ses inscriptions au plan de formation annuel et que la réalisation du rapport qui lui était demandé (ne s’agissant pas de simples renseignements) relevait de postes supérieurs au sien, alors que lui-même demandait en vain une promotion de longue date. Il produit des éléments pour en justifier. Il invoque l’article L.1221-1 du code du travail protégeant les libertés individuelles dans le cadre des relations de travail, et l’article L.2281-1 protégeant la liberté d’expression des salariés, niant tout caractère injurieux, diffamatoire ou excessif à ses écrits, soulignant que son maintien dans l’entreprise n’était pas rendu impossible dès lors qu’un délai de plusieurs jours a séparé l’envoi du rapport de sa mise à pied. Il considère que l’article 29 du règlement intérieur, afférent aux droits de la défense, n’a pas été respecté par l’employeur, les agissements reprochés ne rendant pas indispensable la mesure de mise à pied conservatoire.
La cour relève le caractère excessif des écrits litigieux, l’ironie dont ils sont empreints et surtout leur caractère agressif et injurieux, les dirigeants de la société Ciments Calcia étant traités ” d’incapables ” qui ne sont pas ” foutus de ‘ “, et qui seraient susceptibles de ” magouilles “, mettant ainsi en cause leur compétence et leur honnêteté. Par ailleurs, ce qu’exprime M.[H] n’a aucun lien avec le litige qui l’opposait à son employeur quant à son évolution de carrière, sinon que le ton employé relève de l’aigreur dont un de ses collègues, M.[Z], a fait état dans son audition devant les services de Gendarmerie, saisis d’une plainte de M.[H] contre la société Ciments Calcia, qui aujourd’hui n’a d’ailleurs donné lieu à aucune poursuite. Enfin, si les propos n’ont pas été diffusés en public ou de manière très élargie dans l’entreprise, M. [H] les a cependant volontairement adressé, outre aux dirigeants visés par les propos, au directeur général de la société, recherchant la polémique.
M.[H] a donc abusé de la liberté d’expression qui lui est reconnue par la loi, dont l’exercice suppose que celui qui en use s’adresse avec un minimum de respect à ceux auxquels il s’adresse, qu’ils soient ses supérieurs hiérarchiques ou non.
Le maintien dans l’entreprise de M. [H] était dès lors, par ce comportement inadmissible, rendu impossible.
La faute grave est donc constituée, M. [H] ne pouvant sérieusement reprocher à l’employeur d’avoir attendu 5 jours, dont un week-end, pour lui notifier la lettre de convocation à entretien préalable avec mise à pied à titre conservatoire.
Le jugement entrepris, qui a débouté M.[H] de l’ensemble de ses demandes pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sera confirmé sur ce point, ainsi que de ses demandes au titre de la mise à pied.
– Sur la demande de restitution des effets personnels
M.[H] affirme avoir laissé lors de son départ un certain nombre d’effets personnels qu’il n’a pas pu récupérer et notamment des cahiers sur lesquels il notait des éléments aussi bien personnels que professionnels.
La société Ciments Calcia réplique que ses effets personnels lui ont été restitués et que les cahiers en question ont été rendus après que la société en a fait copie pour l’usage général.
Une enquête a été diligentée par les services de Gendarmerie après que M.[H] a déposé plainte pour le vol de ses effets personnels, qui n’a donné lieu à aucune poursuite.
Les dirigeants de l’entreprise ont été entendus, de même que des collègues de M.[H], qui confirment que celui-ci n’a pas été en mesure de récupérer ses affaires le jour de son départ de la société.
Il résulte de la liste d’effets personnels dont M.[H] demande aujourd’hui la restitution qu’il s’agit en majeure partie de documents afférents aux différentes formations qu’il a suivies, de cours ou d’un titre d’habilitation, et de trois ordinateurs, qui, selon M.[Y], sont à sa disposition dans un local de la société. Ce dernier ajoute que les CD Pack Office 2003 et 2007 ont été désinstallés et détruits.
La cour en conclut que les autres éléments cités à l’occasion de la plainte pour vol, qui n’a pas donné lieu à une suite quelconque, ont été récupérés par M.[H], et notamment ses notes personnelles.
M.[H] n’apparaît pas avoir entamé une démarche quelconque pour venir récupérer les quelques éléments qu’il persiste à réclamer.
Dans ces conditions, sa demande visant à la remise d’effets personnels sous astreinte sera, par voie de confirmation, rejetée, de même que sa demande de dommages-intérêts formée à ce titre.
-Sur la demande au titre du panier cadeau dont M. [H] a été privé
M.[H] réclame le paiement de la somme de 250 € au titre d’un panier cadeau remis à chacun des salariés en décembre 2017 par le comité d’entreprise.
M.[H] ne faisant plus partie des effectifs de l’entreprise à cette date, sa demande sera rejetée, comme l’a jugé le conseil de prud’hommes.
-Sur la demande de prime versée en avril 2018
M.[H] réclame le paiement de la somme de 650 € versée aux autres salariés en avril 2018 au titre de l’intéressement sur l’année 2017.
La société Ciments Calcia soutient que cette prime relève d’un accord de fin de conflit à la suite d’une grève menée par les salariés de l’entreprise, ce à quoi M.[H] réplique que cette grève a été précisément motivée par l’absence de versement de la participation pour l’exercice 2017.
La cour relève, à l’instar du conseil des prud’hommes, que cette prime a été versée dans le cadre d’un conflit social auquel M.[H] n’apparaît pas avoir participé, ayant déjà quitté l’entreprise lorsqu’il a eu lieu, lié à des questions beaucoup plus larges que celle du versement de la prime d’intéressement 2017, et qui a donné lieu à un protocole d’accord signé le 20 mars 2018, après son départ.
Cette demande, par voie de confirmation, sera rejetée.
– Sur la demande de prime versée pour les salariés décorés de la médaille du travail
Cette demande ne peut qu’être rejetée, M.[H] reconnaissant lui-même n’avoir jamais obtenu une telle médaille et rien de démontrant qu’il l’aurait obtenue. Le jugement sera confirmé sur ce point.
-Sur la demande en paiement de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail
M.[H] revient sur l’ensemble des griefs qu’il a opposés à la société Ciments Calcia , dont aucun n’aura été retenu par la cour, soutenant également qu’il aurait été privé de chance de passer un diplôme en septembre et octobre 2017 par le fait qu’il n’avait plus accès à sa boîte mail et que son état dépressif serait en relation directe avec les agissements de l’employeur.
Ces éléments sont insuffisants à convaincre la cour du comportement déloyal de l’employeur, dès lors notamment que le licenciement pour faute grave de M.[H] est justifié.
La demande de M.[H] à ce titre sera, par voie de confirmation, rejetée.
– Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens
Si le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu’il a débouté chacune des parties de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et en ce que les dépens ont été laissés à la charge de chacune d’elles, la solution donnée au litige commande de condamner M. [H] à payer à la société Ciments Calcia la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles qu’elle aura engagés en cause d’appel et de condamner M.[H] aux dépens d’appel.
Enfin, la demande formée par M.[H] au titre de l’exécution provisoire est sans objet devant la cour d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme le jugement rendu le 10 février 2020 par le conseil de prud’hommes de Tours en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Déclare recevables mais infondées les demandes formée par M. [U] [H] au titre du harcèlement moral, et l’en déboute ;
Condamne M.[U] [H] à payer à la société Ciments Calcia la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et rejette sa demande présentée à ce titre ;
Condamne M.[U] [H] aux dépens d’appel.
Et le présent arrêt a été signé par le président de chambre, président de la collégialité, et par le greffier
Fanny ANDREJEWSKI-PICARD Laurence DUVALLET