Diffamation : décision du 6 septembre 2016 Cour de cassation Pourvoi n° 15-83.768

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Diffamation : décision du 6 septembre 2016 Cour de cassation Pourvoi n° 15-83.768

N° N 15-83.768 F-D

N° 3427

SL
6 SEPTEMBRE 2016

CASSATION

M. GUÉRIN président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :


L’Association pour la gestion de la formation des salariés des petites et moyennes entreprises, partie civile,

contre l’arrêt de la cour d’appel de PARIS, chambre 2-7, en date du 13 mai 2015, qui l’a déboutée de ses demandes après relaxe de MM. L… S…, X… Y… et W… G… du chef de diffamation non publique ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 7 juin 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Buisson, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Hervé ;

Sur le rapport de M. le conseiller BUISSON, les observations de la société civile professionnelle GATINEAU et FATTACCINI, de la société civile professionnelle MASSE-DESSEN, THOUVENIN et COUDRAY, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général DESPORTES ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles R. 621-1 du code pénal, 29 de la loi du 29 juillet 1881, 388, 536, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse à conclusions, manque de base légale ;

“en ce que l’arrêt infirmatif attaqué a jugé que certains des propos incriminés dans l’article du 21 février 2013 intitulé « Il est déjà trop tard pour sauver la soldate DRH » et le courrier du 4 mars 2013 portant annexe de l’article du 21 février 2013 n’étaient pas diffamatoires et a débouté en conséquence la partie civile de ses demandes ;

“aux motifs qu’il sera rappelé que le tribunal a retenu comme diffamatoires les propos de MM. L… S… et de W… G…, assimilant la gestion de l’Association pour la gestion de la formation des salariés des petites et moyennes entreprises (AGEFOS PME) à la dictature roumaine de Ceausescu, ainsi qu’un mépris supposé par l’entreprise du droit social, tous propos exprimés les 21 février et 4 mars 2013 ; qu’étant à nouveau rappelé que la cour n’est saisie que dans les limites de l’appel des prévenus, il sera constaté que les propos considérés comme diffamatoires par le premier juge, tels qu’ils ont été ci-avant rappelés ont effectivement ce caractère en ce qui concerne le droit social ; qu’en revanche, l’assimilation de la gestion de l’intimée à la dictature roumaine, par son excès même est dérisoire et contrairement à l’argumentation de l’intimée ne repose sur l’imputation d’aucun fait précis ;

“1°) alors qu’il appartient à la Cour de cassation d’exercer son contrôle sur le sens et la portée des propos incriminés et de rectifier les appréciations des juges du fond en ce qui concerne les faits de diffamation non publique, tels qu’ils se dégagent de l’écrit litigieux ; que dans l’article litigieux en date du 21 février 2013, certains passages imputaient à la partie civile des comportements illégaux et des méthodes totalitaires à propos de la mise à pied de la directrice des ressources humaines Mme O… M… en affirmant que « évidemment, cette mise à pied qui n’a aucune justification valide légalement a un objectif : se débarrasser – rapidement et en douce- de l’intéressée, en lui interdisant d’avoir des contacts avec ses collègues et de leur expliquer ce qui se passe… C’est AGEFOS PME versus Ceaucescu- avec sa police secrète et ses éliminations sans bruit ni témoin. Exit les gêneurs qui menacent la tranquillité du haut de la pyramide » ; que le fait de comparer l’AGEFOS PME avec un dictateur, et de lui prêter des méthodes totalitaires dans la gestion de son personnel allant jusqu’à l’élimination de certains salariés, à propos de la mise à pied de l’une de ses salariées, précisément identifiée, constitue bien l’imputation d’un fait précis portant atteinte à l’honneur et à la réputation de la personne morale visée ; qu’en infirmant le jugement ayant reconnu le caractère diffamatoire de ce passage incriminé, la cour d’appel a méconnu les textes visés au moyen et privé sa décision de toute base légale ;

“2°) alors qu’en ne se prononçant pas sur l’ensemble des faits présentés comme diffamatoires à l’encontre de l’AGEFOS PME et plus particulièrement sur la diffusion, pour illustrer les propos diffamatoires précités comparant l’AGEFOS PME à Ceaucescu, d’une photographie présentant des jambes allongées d’un soldat décédé avec pour commentaire, « il est déjà trop tard pour sauver la soldate DRH », quand la diffusion de cette photographie pour illustrer les propos diffamatoires précités, était expressément visée non seulement par la partie civile à l’appui de sa citation et de ses conclusions, mais encore par le jugement du tribunal comme participant de la diffamation litigieuse, la cour d’appel s’est abstenue de se prononcer sur un élément déterminant des faits objet de la prévention privant de ce fait sa décision de toute base légale au regard des textes visés au moyen ;

“3°) alors que la reprise d’une imputation diffamatoire constitue elle-même une diffamation ; que la cassation de l’arrêt en ce qu’il a refusé de considérer que le passage de l’article du 21 février 2013 comparant la gestion de l’AGEFOS PME avec la dictature roumaine de Ceaucescu était diffamatoire entraînera nécessairement la cassation de l’arrêt sur le débouté de la partie civile s’agissant du courrier du 4 mars 2013, cosigné par MM. S… et G…, lequel avait annexé l’article du 21 février 2013 comportant les propos diffamatoires” ;

Vu l’article 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure que le comité d’entreprise de l’association pour la gestion de la formation des salariés des petites et moyennes entreprises (AGEFOS PME), organisme paritaire agréé pour collecter les fonds de la formation professionnelle de ces entreprises, a, sur son site informatique intranet accessible à l’ensemble des salariés dont l’administrateur était M. Y…, publié quatre documents ; que, visant ceux-ci, ladite association a fait citer devant le tribunal de police compétent, pour leur reprocher la commission d’une contravention de diffamation non publique envers un particulier, le comité d’entreprise, ainsi que MM. S… et G…, respectivement secrétaire et secrétaire adjoint dudit comité, pour un courrier en date du 4 mars 2013 que ceux-ci avaient adressé aux membres du conseil d’administration de l’association, en y annexant un article titré « Il est déjà trop tard pour sauver la soldate DRH », et pour un courriel du 7 mars 2013 signé par les mêmes à destination de l’ensemble des salariés de l’association ;

Qu’elle a pareillement fait citer M. Y… pour deux écrits mis en ligne le 21 février 2013 sur le site précité : un éditorial et un article, respectivement intitulés « De pire en pire c’est moins bien que …rien » et « Il est déjà trop tard pour sauver la soldate DRH », illustré d’une photographie des jambes d’un soldat supposé mort ;

Que cette juridiction a, notamment, annulé la citation délivrée à l’encontre du comité d’entreprise, relaxé MM. S… et M. G… pour l’écrit du 7 mars 2013 et M. Y… pour l’éditorial incriminé, puis les a déclarés coupables, les deux premiers pour l’annexe jointe à l’écrit du 4 mars 2013 et le troisième pour l’article intitulé « Il est déjà trop tard pour sauver la soldate DRH » ; qu’appel a été formé de cette décision, à titre principal, par MM. S…, G… et Y… ainsi que, à titre incident, par l’officier du ministère public ;

Attendu que, pour infirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la culpabilité des prévenus appelants et dire non établie la contravention de diffamation non publique à l’égard de la partie civile à raison des imputations ou allégations contenues dans l’article intitulé « Il est déjà trop tard pour sauver la soldate DRH », l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

 


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