Diffamation : décision du 28 juin 2022 Cour de cassation Pourvoi n° 21-83.735

·

·

Diffamation : décision du 28 juin 2022 Cour de cassation Pourvoi n° 21-83.735
Ce point juridique est utile ?

N° A 21-83.735 F-D

N° 00837

ODVS
28 JUIN 2022

CASSATION

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 28 JUIN 2022

M. [F] [X] a formé un pourvoi contre l’arrêt de la cour d’appel de Metz, chambre correctionnelle, en date du 18 mars 2021, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 15 octobre 2019, n° 18-83.255), pour diffamation publique envers un citoyen chargé d’un mandat public, l’a condamné à 2 000 euros d’amende avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils.

Des mémoires ampliatif et personnel et des observations complémentaires ont été produits.

Sur le rapport de M. Dary, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [F] [X], et les conclusions de M. Quintard, avocat général, après débats en l’audience publique du 31 mai 2022 où étaient présents M. Soulard, président, M. Dary, conseiller rapporteur, M. Bonnal, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. M. [S] [R], maire de la commune de [Localité 2] (Meurthe-et-Moselle), a fait citer M. [F] [X] devant le tribunal correctionnel, du chef de diffamation publique envers un citoyen chargé d’un mandat public, pour avoir mis en ligne, sur le site internet « laviede.fr », dont il est le directeur de la publication, un texte intitulé « Scandale financier à [Localité 1] », qui relate le litige, pendant devant le juge, opposant le maire, président du centre communal d’action sociale (CCAS) propriétaire de cette résidence pour personnes âgées, à certains résidents qui se plaignent d’augmentations selon eux indues de leurs loyers, texte poursuivi en raison de son titre et des propos « Le maire de [Localité 2] prend chaque mois totalement illégalement
50 euros aux personnes âgées qu’il est supposé assister » et « L’origine de cet impôt illégal ».

3. Par jugement du tribunal correctionnel, M. [X] a été déclaré coupable du délit susvisé et condamné à 2 000 euros d’amende.

Examen des moyens

Sur les premier, deuxième, troisième et quatrième moyens proposés par M. [X] et sur le premier moyen proposé pour M. [X]

4. Ils ne sont pas de nature à permettre l’admission du pourvoi au sens de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Mais sur le cinquième moyen proposé par M. [X] et le second moyen proposé pour M. [X]

Enoncé des moyens

5. Le moyen proposé par M. [X] critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a déclaré celui-ci coupable de diffamation envers un citoyen chargé d’une mission de service public, alors qu’il n’a nullement manqué de prudence dans ses propos ; qu’il s’est fondé sur une enquête sérieuse ; que la cour d’appel a retenu une animosité personnelle à l’égard de M. [R] sans la motiver.

6. Le moyen proposé pour M. [X] critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a déclaré celui-ci coupable de diffamation envers un citoyen chargé d’un mandat public et l’a, en conséquence, prononcé sur les peines et sur l’action civile, alors :

« 1°/ que la liberté d’expression ne peut être soumise à des ingérences que dans le cas où celles ci constituent des mesures nécessaires au regard du paragraphe 2 de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme ; qu’en retenant, pour refuser à M. [X] le bénéfice de la bonne foi, qu’il « ne p[ouvait] se prévaloir d’aucune enquête puisqu’il s'[était] contenté de collecter et de relayer les différents mécontentements et les interrogations des résidents du foyer de personnes âgées concernés par l’augmentation de la redevance et ne démontr [ait] nullement qu’il a[vait] procédé, ou au moins, tenté de procéder à une quelconque vérification », quand le prévenu, qui n’est pas un professionnel de l’information, n’avait pas à effectuer d’autres investigations, la cour d ‘appel a violé le texte susvisé ;

2°/ qu’en retenant, pour considérer que les propos litigieux n’avaient pas
une base factuelle suffisante, que M. [X] « s'[était] contenté de collecter et de relayer les différents mécontentements et les interrogations des résidents du foyer de personnes âgées », sans analyser précisément les « contrat d’occupation, lettres de résidents adressées au maire de [Localité 2], attestations rédigées par les résidents, réponse du maire au défenseur des droits sur le sujet de l’augmentation de la redevance, conclusions du CCAS de la ville de [Localité 2] en réponse à l’action en restitution d’un trop perçu d’un couple de résidents » dont elle constatait pourtant qu’ils avaient été versés aux débats, auxquels l’article litigieux se référait et dont il résultait notamment que l’avocat de la commune avait reconnu un trop perçu mensuel de 50 euros, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article 10, § 2, de la Convention européenne des droits de l’homme ;

3°/ qu’ en retenant, pour écarter le bénéfice de la bonne foi, que « les propos de [F] [X] ne respect[aient] pas l’exigence de prudence et de mesure dans l’expression de la pensée », quand le fait justificatif de la bonne foi n’est pas nécessairement subordonné à la prudence dans l’expression de la pensée et quand ce critère s’apprécie moins strictement lorsque les propos s’inscrivent, comme en l”espèce, dans le cadre d’un débat d’intérêt général relatif à l”exercice par le maire de ses responsabilités dans la gestion d’une résidence pour personnes âgées, la cour d’appel a violé l’article 10, § 2, de la Convention européenne des droits de l’homme ;

4°/ qu’en se bornant, pour refuser au prévenu le bénéfice de la bonne foi, à affirmer que « les formulations employées attest[aient] d’une animosité personnelle de [F] [X] envers [S] [R] », sans aucunement caractériser cette animosité personnelle ni la volonté primordiale qu’aurait eue M. [X] de porter tort à la personne visée, la cour d’appel a violé l’article 10, § 2, de la Convention des droits de l”homme. »

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x